AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Doris Lessing (528)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Le carnet d'or

Un petit bijou. L'introspection de la vie d'une femme dans l'Angleterre des années 50. Doris Lessing couche sur le papier, avec cette aisance qui lui est propre, le témoignage d'une femme amante, d'une mère, d'une amie, d'une militante politique ... Mille pages à savourer.
Commenter  J’apprécie          110
Alfred et Emily

Quelle vie auraient vécu Alfred et Emily, les parents de Doris Lessing, si la Première Guerre mondiale n’avait pas eu lieu et qu’ils ne s’étaient pas mariés ensemble? C’est ce qu’imagine l’autrice dans la première partie, avant de livrer au lecteur certains souvenirs du passé réel de sa famille.



Comment qualifier ce roman? Biographie fantasmée? Uchronie familiale? Roman autobiographique? Difficile de trancher tant les genres se mélangent! Et, quel que soit le genre vers lequel tendent plus ou moins les différentes parties, c’est tout aussi prenant 🙂



Je ne connaissais Doris Lessing que de nom et j’étais vraiment curieuse de découvrir son oeuvre, n’en ayant toujours entendu parler que comme un « grand nom » de la littérature anglaise contemporaine. J’avais noté dans ma wishlist Les Enfants de la Violence, mais, hasard des trouvailles de seconde main, c’est Alfred et Emily qui m’est en quelque sorte « tombé dessus » le premier. J’avoue que je n’avais pas vraiment lu le résumé avant de l’ouvrir et je ne savais pas du tout à quoi m’attendre. Quelle surprise! Et vraiment une très bonne surprise!



La première partie est une réécriture de la vie d’adulte des parents de l’autrice. On pourrait penser que le quotidien d’un couple bourgeois ordinaire n’a rien de bien palpitant, pourtant c’est passionnant. On apprend un tas de choses sur la vie au début du 20e siècle dans ce milieu, sur l’évolution de la condition des femmes, sur l’éducation, etc. On s’attarde également un peu sur les conséquences sociales dues à l’absence de la guerre.



La deuxième partie est essentiellement centrée sur les souvenirs réels de Doris Lessing, la vie qu’ont vraiment vécue ses parents, mais aussi sur les relations qu’elle entretenait avec eux. La plupart des chapitres racontent leurs boires et déboires de colons en Afrique, de la petite enfance de l’autrice jusqu’à l’âge adulte. J’ai trouvé ce témoignage absolument passionnant et j’en aurais voulu encore plus!



Le style est très agréable, les pages défilent fluidement et rapidement. La façon dont c’est raconté rend la lecture très addictive, au point que j’ai dévoré ce livre en deux jours à peine 🙂 J’ai très hâte de lire d’autres livres de Doris Lesssing!



Je ne peux que vous conseiller cette lecture, que j’ai vraiment énormément aimée 🙂
Lien : https://bienvenueducotedeche..
Commenter  J’apprécie          110
L'été avant la nuit

La trame de "L'été avant la nuit" est simple. Elle met en scène Mme Michael Brown - Kate - qui, après d'excellentes études, a consacré sa vie entière à sa famille, composée de quatre enfants et d'un mari, neurologue de renom. La vie s'est déroulée sans heurts majeurs ni drame dans la belle maison de Londres, et au cours de cette existence bien réglée, Kate Brown, outre qu'elle est bilingue, a développé de remarquables compétences logistiques, organisationnelles et de gestion, doublées de qualités innées de communication et d'attention aux autres. Savoir, savoir-faire et savoir-être qui pourraient justement, la vie est bien faite, la désigner à travailler durant l'été pour l'organisation institutionnelle "Nourrir le Monde", qui recherche très précisément un ou une interprète de langue portugaise, qui soit doté d'un solide bagage culturel et apte à s'occuper consciencieusement, voire maternellement, de congressistes cocoonés venant de tous les horizons.

Kate rempli tous ces critères et elle est tentée. Mais à dire le vrai, elle est surtout affectueusement poussée par son entourage. Pour la première fois en effet, elle ne sert plus à rien à la maison. Devenus grands, ses enfants, y compris le petit dernier, vont s'éparpiller de part le monde pour les vacances et son neurologue de mari a, de son côté, son propre congrès de neurologie aux États-Unis ; sans compter qu'il compte bien profiter de ce séjour pour avoir, comme il lui arrive, quelque aventure sans lendemain.

Kate accepte donc et naturellement, sa vie ne peut manquer de basculer, à ce tournant sensible du "middle-aged women" et dans ces années 70 à peine libérées, où les femmes de l'âge de Kate s'habillent encore chez "Jolie Madame".

Doris Lessing entre à merveille dans la psychologie de son personnage et restitue de façon magistrale la "tempête sous un crâne" qui conduit la sage Kate d'Istanbul à Londres en passant par l'Espagne, pour un voyage initiatique spatio-temporel peuplé de rêves, messages des profondeurs adressés à sa conscience.

Long, détaillé, "L'été avant la nuit" est aussi un récit universel, où chacun arrivé au mitan de sa vie peut être amené à s'interroger sur le sens qu'il lui a donné et parfois, accomplir un virage à 180 degrés !
Commenter  J’apprécie          110
Les Carnets de Jane Somers, Tome 1 : Journa..

Jane Somers décide de consigner ses pensées dans un journal pour mieux saisir les changements en cours dans son existence. La vie de cette quinquagénaire était jusqu’alors focalisée sur sa carrière de rédactrice en chef d’un journal féminin de Londres et son apparence. Son égoïsme et son côté « femme enfant » lui sont souvent reprochés. Elle va perdre coup sur coup les personnes qui lui sont le plus proches. Elle assiste sans aucune empathie aux maladies et aux décès de son conjoint et de sa mère. Sa collègue et amie avec qui elle forme un duo fusionnel déprime et part suivre son époux aux Etats-Unis. Les deux amies ne se comprennent plus. Jane prend alors conscience qu’elle n’a jamais véritablement connu ses proches, qu’elle ne leur a jamais vraiment parlé. Un jour, elle rencontre Maudie, une femme âgée de quatre-vingt-dix ans qui habite son quartier. Ces deux femmes que tout oppose vont s’apprivoiser et devenir progressivement amies. Cette rencontre va faire changer radicalement la vie de Jane.

Je vais être franc. Ce livre m’a vraiment ennuyé et je me suis forcé à le finir. Je lui reconnais pourtant de nombreuses qualités. Dorris Lessing s’intéresse ici aux personnes âgées vivant dans la misère, ces petits êtres rabougris que nous avons plus l’habitude de croiser aux caisses d’un Franprix ou dans un bus, armés de leur chariot, que dans la littérature. La vieillesse effraie. Dans une société où la solidarité familiale s’effrite, la vieillesse et la pauvreté conduisent à l'isolement et à l'exclusion. Dans ce roman, les rapports entre les deux femmes sont compliqués. Jane n’est pas une sainte qui se dévoue par charité. Elle exprime son dégoût profond pour l’odeur et la saleté de Maudie. Elle se sent prisonnière à plusieurs reprises et ses visites la rebutent souvent après une journée de travail chargée. Quant à Maudie, elle fait preuve d’un mauvais caractère et d’un entêtement à toute épreuve. Et pourtant, elles parviennent à s’apprivoiser et à devenir amies. Maudie mène combat pour sa dignité. Elle refuse les visites d’un médecin ou de l’assistante sociale qui la condamneraient à l’hospice. Elle évite de prendre les analgésiques qui attaqueraient sa lucidité. Elle conserve dans la maladie sa pudeur et sa fierté. Elle surprend par sa rage de vivre à plus de quatre-vingt-dix ans, après une vie de misère et de souffrance. Sa vitalité est intacte et elle ressent un fort sentiment d’injustice face à la progression de la maladie. Cette amitié va permettre à Jane de sortir de son nombrilisme, de son égoïsme. L’attention et les soins qu’elle n’a pas offerts à sa famille, elle va les apporter à cette vieille femme, dans une sorte de transfert affectif.

Dans ce texte souvent barbant, Doris Lessing délivre un message plein d'humanité. Nous devons considérer la personne âgée avant tout comme une personne et non pas comme un fardeau. Il faut contribuer à lui redonner sa place de personne à la fois unique et membre, au même titre que nous, de la communauté humaine. Me voilà convaincu. Je promets d'écouter désormais les longues récriminations de ma voisine de palier avec une patience angélique...

Commenter  J’apprécie          110
Le carnet d'or

Doris Lessing - "Le carnet d'or" ("the golden notebook" – cop. 1962), traduction en français par Marianne Véron - Albin Michel "le livre de poche", 1976 - avec une préface de Doris Lessing écrite en juin 1971 (cop. 1984 LGF), le tout sous l'ISBN 978-2-253-02532-0.



Un pavé de 764 pages : j'ai mis deux semaines pour le lire, avec parfois un profond découragement, et même du dégoût, mais une attention toujours soutenue.



Grosso modo, le récit couvre principalement la période 1950-1960, incluant de nombreuses réminiscences d'évènements survenus pendant la seconde guerre mondiale, et colle de près à la biographie de l'auteur. Quasiment tous les personnages sont empruntés au cercle restreint des intellectuels britanniques et états-unisiens d'origine bourgeoise ou petite-bourgeoise, gravitant dans la mouvance du Parti Communiste de Grande-Bretagne ou des Etats-Unis, et les jugements de valeur émis ou implicites tout au long du récit s'articulent en fonction de cette idéologie particulière de la gauche communiste de ces années-là, dans ce milieu-là, juste avant et après la mort de l'idole Staline, le «Petit Père des Peuples».



Le deuxième pilier canonique de ces gens-là y est bien sûr largement évoqué, à savoir la sacro-sainte psychanalyse freudienne (là encore : de cette époque-là).



Entre ces deux piliers incontournables, l'auteur évoque le féminisme propre à cette caste dans ces années-là : rien à voir avec mémère Simone (de Beauvoir), c'est pourquoi la lecture de ce récit reste intéressante, quitte à devoir admettre des paragraphes parfois assez répugnants. Le récit étant ainsi solidement cadré – et c'est le moins que l'on puisse dire ! – l'auteur évoque aussi des questions d'écriture littéraire, de rapport au texte, à l'écrit, souvent passionnantes.



Quatre pôles, dont le mode de restitution littéraire est exposé en page 548 (fin du chapitre "femmes libres 3, le carnet bleu") :

"Lorsque je suis arrivée dans ce nouvel appartement et que j'ai installé ma grande pièce, la première chose que j'ai faite fut d'acquérir la table à tréteaux et d'y poser mes carnets. [...] Je ne les ai pas achetés selon un plan. Je ne crois pas m'être jamais dit, avant d'arriver ici : Je vais posséder quatre carnets, un noir qui concernera Anna Wulf l'écrivain, un rouge pour la politique, un jaune où j'écrirai des histoires à partir de mon expérience, et un bleu où j'essaierai de tenir mon journal."



Doris Lessing structure donc le récit en le répartissant entre quatre carnets imaginaires tenus par une intellectuelle



Un témoignage passionnant.

Commenter  J’apprécie          112
Les Grand-mères

J'ai trouvé cette histoire de "cougars" complètement nulle et pathétiquement ridicule. Ce n'est pas le sujet qui me gêne mais la façon dont il est traité. Aucune psychologie.

Doris Lessing baisse beaucoup en vieillissant. Je garde de bons souvenirs de ses œuvres anciennes.
Commenter  J’apprécie          110
Vaincue par la brousse

C'est "the Grass Is Singing", n'est-ce pas ? C'est l'un des romans qui m'a le plus mise mal à l'aise dans mon existence de lectrice. La romancière (la plus douée qui soit) parle du racisme avec un talent rarement égalé. Quelle perte que la perte de cette grande romancière courageuse !
Commenter  J’apprécie          112
Vaincue par la brousse

A la fin des années 1940, dans la Rhodésie coloniale, Mary, une jeune femme indépendante, épouse un peu hasard Dick, un fermier. Elle part s'installer avec lui dans les étendues désolées du veld. Cette vie frustre, monotone, sous le soleil accablant des étés de l'Afrique australe intérieure, effiloche progressivement son appétit de vivre. Les journées tournent au cauchemar dans une ambiance de plus en plus poisseuse, et alourdie par les rapports orageux qu'une Mary pas encore tout à fait apathique entretient avec les domestiques noirs. Chaque page précipite un lecteur oppressé vers une issue fatale connue dès l'incipit.



"Ainsi, à présent, de nouveaux rapports se nouaient entre eux : elle se sentait irrémédiablement en son pouvoir, bien qu'en fait rien ne justifiât cette impression."



Premier roman de Doris Lessing, ce Vaincue par la brousse contient en germe l’œuvre de la grande romancière, dominé qu'il est par une dimension biographique et psychologique au travers d'un portrait de femme bouleversant révélant son talent. La déchéance de Mary, sombrant dans la dépression et la folie, est analysée avec une minutie étonnante (et, partant, plutôt angoissante), sans que la dimension sociale soit exclue, avec des pages très puissantes sur les rapports Noirs-Blancs au crible de l'apartheid.
Lien : http://le-mange-livres.blogs..
Commenter  J’apprécie          111
Le carnet d'or

Anna Wulf, artiste en proie à la panne d'écriture, par désir de protection, cloisonne bien proprement sa vie. Elle tient des carnets qui sont l'expression de son besoin irrépressible d'analyse et de retour sur soi. Ils sont au nombre de quatre : un noir, qui concerne Anna Wulf l'écrivain, un rouge, pour la politique, un jaune, pour des fictions tirées de son expérience personnelle, et un bleu, qui est un journal intime proprement dit.



Le roman débute par un récit assez conventionnel, qui permet au lecteur, par un regard extérieur, de se familiariser avec le personnage principal et son amie. C'est ensuite que tout se corse, les carnets se succédant et les récits s'entremêlant.



C'est un roman complexe, foisonnant, protéiforme, et un peu nébuleux, il faut bien l'avouer. Certains passages sont prenant, comme l'évocation de ce groupe de jeunes britanniques dilettantes, cyniques et désabusés, dans un paysage sud-africain de rêve. D'autres épisodes font penser à une éternelle variation sur les mêmes thèmes (certaines créations d'Anna ne sont qu’une simple projection d'elle-même) et je n'ai pu me défendre contre une certaine lassitude, compte-tenu de la grosseur de l'oeuvre (près de 800 pages!). A cette lassitude s'ajoute une sensation de véritable malaise, les personnages baignant dans une atmosphère oppressante de névrose continuelle, vivant une époque ô combien angoissante par elle-même, celle de la guerre froide, avec ses chasses aux sorcières, ses suspicions et ses trahisons. Dans ce livre, les hommes sont joliment arrangés, avec leur lâcheté et leurs travers, leur peur viscérale de l'engagement et leur inconséquence. Une oeuvre profondément féministe dans son essence donc, que les hommes tireraient profit à lire...
Commenter  J’apprécie          110
Les Carnets de Jane Somers, Tome 1 : Journa..

Les carnets de Jane Somers "Journal d'une voisine", tome 1



Janna est une femme, proche de la cinquantaine, veuve sans enfant. Dans son journal elle se décrit ainsi "Une veuve d'âge mûr, d'une beauté distinguée, pourvue d'une excellente situation dans les milieux de la presse féminine".



Un soir, rentrant de son travail, elle entre dans une pharmacie et y voie "une vieille sorcière"qui lui met dans sa main une ordonnance en déclarant "qu'est-ce que c'est ? commandez moi ça". En sortant de la pharmacie elle raccompagne la vieille dame jusqu'à chez elle. Dans l'appartement où "tout cela était sale, sordide, désolant, atroce" elle accepte de prendre le thé dans une tasse sale.



Que s'est-il passé entre la quadragénaire distinguée et l'octogénaire acariâtre à l'odeur douce, rance et poussiéreuse dont " je voyais la crasse sur son vieux cou décharné et sur ses mains." ?



Au fur et à mesure des visites de Janna, elle et Maudie (Fowler) vont apprendre à se connaitre, s'apprivoiser, se raconter, rire d'elles-même et devenir amies. Pour éviter à Maudie d'être placée dans un hospice, Janna lui consacrera une grande partie de son temps libre , l'aidant à sa toilette, faisant les courses, nettoyant le linge, l'appartement, l'accompagnant jusqu'à la fin.



Tout en reconnaissant que vers la fin du livre, j'étais un peu lassée par la répétition des descriptions de certains gestes quotidiens, ce livre est vraiment excellent. L'écriture - la traduction - très fluide, agréable. Quelques scènes très réalistes, particulièrement la première fois que Janna fait la toilette Maudie.



Ce roman a été édité en 1983 (1985 en France). L'autrice évoque dans son ouvrage la question du vieillissement, de la maladie, de la précarité des personnes âgées, de l'éloignement des familles, de la solitude. Elle évoque le travail des services sociaux, le mouvement des "bonnes voisines", le travail des infirmières dans les hôpitaux pour personnes âgées.



***



"le Carnet d'Or" est le premier livre de Doris Lessing (prix Nobel 2007) que j'ai lu. C'était il y a très longtemps! Paru en France en 1976, il a obtenu le prix Médicis étranger.
Commenter  J’apprécie          100
Le cinquième enfant

Le Cinquième Enfant est indiscutablement un chef-d'oeuvre. Doris Lessing est extrêmement talentueuse en cela qu'elle envahit son lecteur, physiquement et mentalement. Cette eau glaciale et sombre dans laquelle elle nous attire à travers ce roman est simplement terrifiante et cependant irrésistible, magnétique.



L'écriture est remarquable. Non seulement sur la forme, mais surtout sur le fond. L'intrigue de ce roman tient sur trois lignes. Mais les 160 pages ne sont pas de trop.



Envahissante, dérangeante, inquiétante, cette indispensable réflexion sur la maternité, la norme, la position de la femme dans la société, m'a laissée pantoise, épuisée, soulagée, purgée en somme. Une expérience étrange mais unique à laquelle je n'ai mis que quatre étoiles pour le peu de plaisir que j'y ai pris, tout en comprenant les enjeux indélébiles d'une telle lecture.
Commenter  J’apprécie          101
Les Grand-mères

un peu ennuyeux digressions inutiles

Commenter  J’apprécie          100
Mémoires d'une survivante

C'est un livre réellement étonnant.

Deux univers séparés par le mur d'un appartement et apparemment reliés par Emily, la jeune fille qui a été mystérieusement confiée à la narratrice par un inconnu sans plus d'explications.

Le récit principal se déroule dans une société pas vraiment post-apocalyptique mais plutôt une anticipation angoissante d'une société en déréliction, proche de l'anarchie, où, faute de pouvoir continuer à vivre selon un modèle de "consommation", les plus jeunes apprennent la décroissance.

Les "anciens" dont la narratrice fait partie, se souviennent d'un mode de vie rendu impossible sans électricité ni énergie fossile. Ils observent avec effarement la formation de "bandes" qui se regroupent sur les trottoirs au pied des immeubles et tentent d'imaginer un autre modèle basé sur la communauté, le troc, le recyclage, le partage loin d'un modèle familial classique.

Emily, qui va passer du statut d'enfant à celui de femme mûre, bien que le lecteur devine que le temps supposé écoulé ne puisse y suffire, devient un pivot de cette nouvelle société.

Curieusement à côté, lorsque la narratrice se rend dans les contrées "oniriques" derrière le mur, elle accède à des bribes de l'enfance de sa protégée… et des scènes qui symbolisent la chute de la société ancienne (?).

Ce roman m'a évoqué d'une part "Les mangeurs d'argile" de Pelot et "Station Eleven" pour la survie, la formation de tribus mais aussi "Macha ou l'évasion" de Jérôme Leroy pour l'invention d'un nouveau mode de vie décroissant.

Etonnant comme un texte publié en 1974 peut être aussi actuel !
Commenter  J’apprécie          100
Un enfant de l'amour

Ou l'art de passer à côté de son existence. James Reid, le héros, attend, il attend et s'ennuie....

tout comme Drogo, le héros du Désert des Tartares de Buzzati.

Tout comme lui, il attend la guerre et l'action, mais il ne se passe rien.... le temps s'écoule et il s'ennuie ! Mais, chez Buzzati, Drogo existe, l'auteur le fait vivre, on le sent vibrer, bouger, espérer, croire et s'investir dans des rêves de gloire ....

Alors qu'ici, rien de tel ! James Reid reste un témoin contemplatif et engourdi de sa propre existence. Il vit à travers la poésie dont il se gave. Il assiste à sa vie, sans y prendre part !

Que ce soit au cours de son adolescence dans la terne existence menée auprès de ses parents, durant le long voyage en bateau qui le conduit en Inde, où l'attend la guerre ou en Inde même où il demeure et où il ne se passe rien, et où il ne s'intéresse à rien ! James Reid attend en s'ennuyant ou s'ennuie en attendant ... tout comme nous en lisant !



Sauf pendant les quatre jours qu'il passe au Cap, où durant ce laps de temps, il vit, (ou croit vivre) une histoire d'amour fou, un amour qui lui était destiné, qu'il attendait et rêvait depuis l'adolescence... un amour qui lui apportera un fils, en tout cas, il est persuadé que l'enfant de Daphné est son fils (mais l'est-il vraiment ?) et qu'en est-il de cet amour ? réalité ou chimère ?



Et voilà tout. James Reid passera son existence à rêver de ce fils inconnu, qu'il ne rencontrera pas, pas plus qu'il ne reverra cette Daphné, fantasmée, à qui il écrira une abondante correspondance qu'il ne lui enverra jamais. Mais il s'obstinera vainement à la rechercher ...



Doris Lessing nous conte tout cela sur un ton volontairement distancié, d'où l'ennui suinte, l'ennui même qui a envahi son héros falot et que celui-ci nous transmet. Et, en l'occurrence, c'est en cela que réside le talent de la narratrice !



Car ce James Reid, ne personnifie-t-il pas nombre d'entre nous ? qui passons à travers la vie, irrésolus, en subissant les événements, sans savoir comment surmonter les coups infligés par le sort ? inconfortable question qui laisse le lecteur mal à l'aise en refermant ce livre.
Commenter  J’apprécie          100
Le cinquième enfant

Cela aurait pu être une belle histoire d'amour sous fond de conte de fées seulement voilà...

Un jeune couple se rencontre, se marient et rêvent d'une famille nombreuse.

Ils vont achetés une immense maison dont il ont eu un gros coup de cœur et Harriet va rapidement tombé enceinte, mais pas seulement du premier, va s'en suivre trois autres naissances qui vont l’épuisée littéralement et la famille pourtant heureuse et épanouie devra demander de l'aide.

Et voici qu'une cinquième grossesse non désirée montre le bout de son nez mais celle ci est bien différente des autres, plus difficile, Harriet souffre comme jamais, ce bébé lui déchire les entrailles.

Elle donnera naissance à Ben qui va plonger toute la famille dans une vie terrifiante et nous les suivrons dans une descente aux enfers angoissante.

Magnifique roman qui traite de la différence à une époque ou l'acceptation de cette différence était quasiment neutre, voir cachée et montrer du doigt.
Commenter  J’apprécie          100
Nouvelles africaines, Tome 3 : La Madone no..

Des nouvelles (19) qui nous viennent de l'Afrique australe, et qui décrivent les relations pas toujours faciles (une sorte de cohabitation), entre les blancs ( les anglais) et des indigènes (Afrikaners), mais surtout une description tragique et émouvante des conditions des femmes.



Doris Lessing donne un tableau saisissant de l'Afrique du Sud des années 1970 entre Noirs asservis et humiliés et Anglais colons paupérisés et redoutant de tomber au niveau des Noirs.



Un écriture fluide et une agréable lecture que je recommande.
Commenter  J’apprécie          100
Victoria et les Staveney

Ce roman raconte le destin de Victoria, une petite fille noire,qui rencontre, à l'âge de 9 ans, une riche famille blanche: les Staveney.

Quelques années plus tard, elle aura une liaison avec Thomas leur fils.

Naîtra alors Marie, une petite fille à la peau claire qui enchantera ses grands - parents, Lionel et Jessy Staveney.....mais je n'en dis pas plus...

Cette histoire de Victoria, devenue une jolie fille noire intelligente, une orpheline aux bonnes manières,sous la forme d'un récit court, dense, au style romanesque,à la fois réaliste et lyrique met en exergue les barrières sociales, le racisme, l'hypocrisie, les faux semblants, les préjugés dans la société anglaise de nos jours.

On retrouve les thèmes chers à Doris Lessing : le socialisme, le féminisme, l'anti racisme, la différence de classe sociale, l'ambition mais j'ai été déçue par cet ouvrage.

L'histoire se lit vite, trop vite, stéréotypée, on ne trouve plus le mordant ni la profondeur psychologique d'autres ouvrages, Le Carnet d'Or m'avait profondément marquée, la psychologie des personnages est simplement effleurée, je vais décevoir les inconditionnels de cette très grande dame des lettres Anglaises qu'était Doris Lessing, mais ce n'est que mon avis!

Commenter  J’apprécie          100
Filles impertinentes

L'impertinence de Doris Lessing lui aura sauvé la vie en lui permettant de construire son destin.

C'est ici le schéma précis de ce qui aura su donner son élan à tous les combats de sa vie.

Elle aura du s'opposer aux volontés d'une mère prise dans la toile meurtrière de l'esprit de sa classe, .

Elle aura assisté aux délires d'un père traumatisé par la guerre, qui courrait après une chimère aurifère.

Elle aura supporté le poids d'une société colonialiste.

Regard sur cette société blanche britannique implantée en Afrique noire durant l'entredeux guerre. Société qui avait quitté l'Europe non pas pour construire un nouveau monde, mais pour permettre à leurs valeurs de survivre.

On comprend les mouvements qui ont saisi une partie de leurs enfants à l'issue de la seconde guerre mondiale : anticolonialisme, féminisme, anticonformisme, communisme, antiracisme.

Sur une pointe de tendresse nostalgique, le trait est vif , rapide et extrêmement pertinent.



Astrid Shriqui Garain
Commenter  J’apprécie          100
Alfred et Emily

Avec "les grand-mères", j'étais restée sur une trop mauvaise opinion de Doris Lessing pour m'en tenir à cette histoire ridicule écrite dans ses dernières années et peu représentative de son œuvre et de son talent couronné par le prix Nobel.

Doris Lessing est né en Perse en 1919, de parents anglais. Sa famille s'installe en 1924 en Rhodésie du Sud (aujourd'hui Zimbabwe) ancienne colonie britannique. Cette expérience de l'exil est très présente dans ses romans. Communiste dans sa jeunesse, elle quitte le parti en 1956. Féministe, battante, humaniste, c'est une rebelle envers sa famille d'abord, envers la société conservatrice ensuite.

Avec "Alfred et Emily", elle évoque la vie de ses parents : son père Alfred mutilé physiquement et éprouvé psychiquement par la Grande Guerre et sa mère Emily, jeune fille ambitieuse et privilégiée dont le destin médiocre altérera définitivement le caractère.

Le livre se divise en deux parties, d'où son originalité.

Dans la première tranche, elle imagine pour chacun d'eux un avenir non commun et conforme à leurs aspirations respectives : l'agriculture pour lui, la vocation d'infirmière pour elle, dans leur mère patrie.

Dans la seconde tranche, elle évoque la vraie vie de cette famille meurtrie par la guerre, émigrée en Rhodésie pour des raisons essentiellement économiques. Alfred est en proie aux soucis et vicissitudes d'une exploitation agricole peu rentable. Emily a perdu son bel enthousiasme. Elle est aigrie par les déboires et les déceptions d'une existence terne, précaire, recluse dans la brousse africaine, loin du milieu socialement et culturellement sophistiqué de son enfance. Dans ce climat triste et crispé se développe la personnalité d'une grande dame de la littérature anglaise.
Commenter  J’apprécie          100
Le cinquième enfant

Harriett et David ont dès le début envie de fonder une grande famille. Et pour pouvoir loger un grande famille, il faut une grande maison ! Pour cela il leur faut quitter Londres pour une ville assez proche, où ils tombent sous le charme d'"une grande maison victorienne au jardin mal entretenu". "Une maison à deux étages, avec un grenier, pleine de chambres,, de corridors et de paliers"... Voici pour le décor, victorien et gothique à souhait. Et dans cette maison au jardin mal entretenu, il y a comme une chambre magique à faire des bébés ! Harriett enchaîne les grossesses en un temps record. La famille, les voisins, les amis débarquent dans la grande maison pour Noël et Pâques, pendant des années, à tel point que le couple devient réputé pour les fêtes qu'il organise.



Tout va bien dans le meilleur des mondes, jusqu'au jour où s'annonce la cinquième grossesse. A partir de ce moment-là, Doris Lessing se délecte à casser l'image de la femme enceinte heureuse et de son accomplissement à travers la maternité. Une ambiance à la Rose-Mary's Baby s'installe (c'est du moins la très forte impression que j'ai eue !). Avant même d'être né, le bébé a décidé d'en faire voir de toutes les couleurs à sa mère, l'empêchant de dormir par son agitation intra-utérine. Une fois né, Ben (puisque c'est ainsi qu'il sera prénommé) est "une créature batailleuse", très costaud, qui a besoin de double ration de biberon prescrites pour un bébé de son âge : il lui en faut pas moins de dix par jour et même davantage... Et quand il tête sa mère, il la laisse meurtrie de bleus ! Ben n'est pas un beau bébé, d'ailleurs il ne ressemble pas un bébé :



"Il avait la tête rentrée dans les épaules, comme s'il avait été accroupi et non couché. Le front offrait une pente uniforme, et les cheveux poussaient curieusement en deux épis sur le devant, formant un genre de triangle qui descendait assez bas sur le front, jaunâtres et hirsutes, tandis que, derrière et sur les côtés, ils étaient aplatis. Il avait les mains épaisses et lourdes, avec les paumes noueuses." Il a des "yeux vert-jaune" sans "aucune lueur de reconnaissance". Harriett trouve qu'il ressemble à "un troll ou un lutin" ! Elle finit même par sincèrement croire qu'il n'est pas humain, qu'il vient du monde du Petit Peuple, etc. Cela revient souvent dans ses propos !



Une chose est certaine : cet enfant fait peur. La famille, les amis prennent leurs distances avec le couple. Ben est un être violent. Il lui prend de tuer des animaux en les étranglant. Harriett et David finissent par l'enfermer dans une des chambres de la maison, de peur qu'il ne fasse du mal à ses frères et soeurs, qui d'ailleurs, ne l'aiment pas. Puis David décide de le placer dans une institution pour inadaptés... (je ne raconte pas la suite mais ça ne s'arrête pas là).



Doris Lessing se fait sarcastique sur le sort réservé aux êtres différents, hors normes, sur le regard d'autrui et des proches en particulier. Cependant, elle fait de Ben un personnage effrayant, pas du tout sympathique. On n'a aucune empathie pour lui. Elle maintient donc une certaine ambiguite pour montrer également la difficulté à gérer un enfant différent, sans pour autant s'apitoyer sur le sort des parents. On trouve Harriett stupide quand elle pense sérieusement que son fils n'est pas humain !



Doris Lessing vous happe littéralement, maintient un suspense de tous les diables, jouant avec la frontière du fantastique et l'imagination du lecteur en experte ! On suit l'évolution de Ben jusqu'à l'âge adulte et on n'est pas trop surpris du chemin social qu'il emprunte. Il y a une suite à ce roman : Le monde de Ben.
Commenter  J’apprécie          101




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Doris Lessing Voir plus

Quiz Voir plus

Doris Lessing

Où est-elle née ?

en Angleterre
en Rhodésie du Sud
en Perse ( Iran actuel)
au Portugal

9 questions
70 lecteurs ont répondu
Thème : Doris LessingCréer un quiz sur cet auteur

{* *}