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Citations de Georges Duhamel (200)


Tu sais que, d'ordinaire, je ne suis pas très « Marseillaise ». Je trouve toujours assez drolatique de voir d'honorables bourgeois se mettre sur leurs fumerons et retirer leur huit-reflets pour entendre exécuter un hymne révolutionnaire, plein d'appels aux armes, plein de sang et de fureur, plein de meurtres sacrés. C'est le sort des chants révolutionnaires de s'assoupir en définitive dans la friture des fêtes foraines, dans le tumulte des comices ou la puanteur des banquets.
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Les lapins ont recommencé, sournoisement de se battre. Hélas ! Les lapins ne sont pas, comme on le croit souvent, de doux et timides rongeurs ; ce sont des bêtes féroces, comme tous les êtres vivants. Le mâle suit la femelle et l'importune. Si la femelle n'est pas bien disposée, elle manifeste son impatience en frappant le sol avec ses pattes de derrière – comme nous, mon vieux, comme nous, – si le mâle insiste, la femelle le mord, et sois bien sûr qu'elle ne le mord pas n'importe où : elle tâche d'atteindre le malheureux dans le siège même du désir. Il arrive qu'elle l'émascule, d'un seul coup.. Alors la bête blessée pousse des cris terrible et le silence du laboratoire en est transpercé.
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- Le plus regrettable, disait Schleiter de sa voix sans vibration, le plus amer, quand on avance dans la vie, c'est de comprendre qu'il n'y a plus rien à faire pour réconcilier les classes et qu'il est parfaitement ridicule de rêver encore de cette réconciliation. J'annonce le crépuscule des universités populaires où les bourgeois sentimentaux viennent jouer à la fraternité.
- Tu te condamnes toi-même, s'écria le calme Vuillaume.
Schleiter haussa les épaules.
- Non ! Pas de fusion possible, pas de flirt entre les classes ! Un bourgeois, un vrai bourgeois, ou bien il donne son argent, tout son argent – ce qui ne s'est jamais vu – et c'est réglé : il n'est plus un bourgeois. Ou il garde son argent et, alors, même s'il fait de la politique socialiste, même s'il roucoule dans l'ombre de Jaurès, il peut dire tout ce qu'il veut : il n'est jamais qu'un bourgeois. 
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- Oh ! Non. Ce serait trop simple. Il existe, paraît-il, des offices très sérieux, des maisons de confiance. De telles maisons, on dirait que papa les sent de loin et s'en écarte avec répugnance. Il est presque infailliblement attiré par les faiseurs, les escrocs, les canailles. Il a besoin d'être dupé, d'être grugé. C'est le fond de sa nature. Il a donc fait alliance avec un cabine véreux, et, depuis, c'est la grande folie. Il prend des brevets non seulement pour la France, mais encore pour le Kamchatka, pour le Honduras, pour la Zambézie, pour des pays impossibles. C'est un besoin, une maladie. Il oublie de renouveler ses brevets à temps. Alors, c'est la déchéance, c'est de l'argent gaspillé. 
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C'est une chose incompréhensible. Tu as fait ta blague et maintenant tu files comme un voleur. Attends, attends, je te suis. Tu ne t'en tireras pas comme ça. Ce ne sont pas des idées saines, pas des idées de chez nous, pas des idées françaises. Ca vient de tous ces brindezingues, de tous ces loufoques avec lesquels tu te baguenaudes. Mille francs ! Tu dis que tu aimes ta mère. As-tu réfléchi, pour maman, à ce que ça représente, mille francs ? Tu l'as vue travailler, maman ?
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C'est l'époque de la déhiscence, comme dirait M. Bonnier : le fruit s'ouvre et les graines sautent.
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Je veux que tout Paris le sache, que le monde entier, monsieur, sache que vous êtes un mufle. Un mufle doublé d'une canaille, une canaille doublée d'un fauve, un fauve doublé d'un niais.
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L'approvisionnement de l'ambulance - personnel et blessés - était remis aux bons offices d'un excellent garçon nommé M***, aussi peu normand que possible, naturel et liant, qui ne montrait quelque repli de l'intellect qu'en ce qui touchait sa fonction. Il appartenait à l'Ad-mi-nis-tra-tion, dans le militaire aussi bien que dans le civil. Il était de ces employés pour lesquels l'administration est, en fait, un sacerdoce, de ceux qui, pour écrire « l'administration d'un médicament » ne peuvent, et c'est légendaire, se dispenser de mettre une majuscule. Il était fort susceptible et poussait au delà des limites du raisonnable le sentiment de la responsabilité. Si l'un de nous jugeait le bœuf coriace ou le vin aigrelet et s'avisait de faire à ce sujet une remarque même anodine, les oreilles de M*** commençaient à rougir et la colère éclatait. Nous avions pris le parti de nous en tenir aux louanges.
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[Le Père F***] appliquait, avec rigueur, les règles de l'éloquence ecclésiastique, telles qu'elles étaient enseignées en ce temps-là. Les difficultés de cet art oratoire si particulier étaient alors impérieusement déterminées par la nécessité de se faire entendre dans des vaisseaux parfois très grands. - Le Père F*** disait volontiers qu'on l'entendait très distinctement dans les plus grandes églises de France, et je n'en doute pas. - N'empêche que cela suppose une certaine façon de placer la voix, comme disent les comédiens. N'empêche que cela ne peut pas ne pas exclure toutes les tentatives de langage parlé, de contact direct avec le public des fidèles. N'empêche que cela comporte une sorte de pompe qui, faute d'invention géniale, se gonfle de lieux communs. Même quand le Père F*** venait se placer sur le premier degré du chœur, dans cette église minuscule, je le sentais séparé de son auditoire par un voile de conventions, de préjugés, de formules toutes faites et de vocalises traditionnelles. Je me suis demandé souvent si l'introduction du microphone dans les églises n'allait pas transformer complètement l'éloquence de la chaire. Il n’y paraît pas encore.
p.99-100
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Les déformations qu'exige le métier de caricaturiste, ce qu'on peut appeler les procédés comiques, qu'ils sont peu de chose en comparaison du lyrisme plastique, des amplifications qui le soulèvent même dans ses lithographies où il doit composer avec le présent, et, davantage encore, quand il ne dessine que pour lui !
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Avais-tu rêvé pareil martyre, ô frère, alors que tu poussais ta charrue sur ton petit bout de terre brune?
Te voici, agonisant d'une agonie de cinq mois, enfoui dans ce linge livide, vierge même des récompenses que l'on donne.
Il faut que ta poitrine, il faut que ton suaire soient purs de la moindre récompense que l'on donne, Carré !
Il faut que tu aies souffert sans but et sans espoir.
Mais je ne veux pas que toute ta souffrance se perde dans l'abîme. Et c'est pourquoi je la raconte très exactement.
(in Histoire de Carré et de Lerondeau)
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LES ERISPAUDANTS
À LÉON COLMAR



extrait 6

 Quand il aperçut pour la première fois un melon, le grand
chef Baba déclara : « J’en veux, de la ronde boule ! » Et quand,
fermant à demi les yeux pour mieux savourer une volupté déli-
cate, le glorieux héros mange une fraise, au printemps, il s’ex-
clame, transporté : « Oh ! c’est la première fois de ma vie que
je mange une fraise cette année.
 Le grand chef Zazou ― grand par le prestige plutôt que par
la taille ― fait un emploi capricieux des adverbes. Va-t-il au
cirque. Il estime : « C’est un beau très, très cirque. » S’il s’a-
muse du spectacle, il avoue : « C’est mieux drôle. » Comme
tous les grands chefs, il est arrogant ; lui fait-on remarquer
qu’il n’a pas réussi telle prouesse du premier coup, il répond
avec aigreur : « Si ! J’ai réussi du premier coup la troisième fois. »

p.247
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LES ERISPAUDANTS
À LÉON COLMAR



extrait 5

 Les endroits où les routes publiques croisent les voies
ferrées portent en Erispaudantie, le nom de « passages
animaux », sans doute parce que la circulation y est ani-
mée. Le ciel sera baptisé « le plafond du dehors » et
l’instrument que nous dénommons, chez nous, le baro-
mètre, deviendra, pour les membres du clan, « la pendule
du beau temps ».
 Qu’un Erispaudant aperçoive du sable, et il s’écrie avec
enthousiasme : « Oh la belle petite poussière ! » Qu’un
Erispaudant cueille une fleur de véronique, une fleurette
d’azur, et il dira, sans hésiter : « Elle s’appelle Mes Yeux. »


p.246-247
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LES ERISPAUDANTS
À LÉON COLMAR



extrait 4

 Comme tous les peuples primitifs, les Erispaudants
disposent, pour exprimer leurs sentiments et leurs
idées, de mots peu nombreux dont les acceptions
demeurent incertaines et le groupement syntaxique
assez arbitraire. Ils inventent, à l’occasion, des termes,
des tournures, des images. Exemples : le cheval, cette
noble conquête de l’ Erispaudant, est parfois appelé
« écureuil », parce qu’il habite dans les écuries, comme
chacun sait.


p.246
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LES ERISPAUDANTS
À LÉON COLMAR



extrait 3

[…]

 les Erispaudants sont farouches ;

[…]

 Les Erispaudants répugnent au régime monar-
chique, car grande est leur superbe et pointilleuse
leur indépendance. Ils revendiquent, tous à la fois,
les titres, les privilèges, les prérogatives de la
royauté. Ils forment une démocratie exception-
nelle dont chaque citoyen fait valoir plusieurs
fois par jour ses droits au trône. Ils n’échappent
cependant pas au principe d’autorité : ils obéissent,
bon gré, mal gré, à des chefs qui ne sont ni choisis
ni reconnus, mais que leur voix perçante signale
et qu’elle prédestine aux honneurs.
 Les plus connus d’entre ces chefs s’appellent
Baba, Zino, Zazou, Poupi, Titi, Coco.

p.245-246
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LES ERISPAUDANTS
À LÉON COLMAR



extrait 1

 À l’extrémité orientale du jardin, par delà les
pelouses, derrière les troènes toujours verts,
entre les framboisiers et la roseraie, habitent les
Erispaudants. C’est un peuple vindicatif, redouté
des explorateurs, peu connu des historiens. Les
coutumes des Erispaudants sont mystérieuses,
leurs exploits légendaires. Par des chants guer-
riers et d’incessantes rumeurs de querelles, ils
jettent le trouble chez les populations limitrophes.
Ils se nourrissent exclusivement de tout ; certains
d’entre eux, au dire des étrangers, ingurgitent
même des boutons de culotte, des crayons, des
billes d’agate ; d’autres absorbent des haricots par
la voie nasale ; d’autres encore, s’il faut en croire
l’éminent professeur Barnabé, semblent trouver
un principe alimentaire dans la succion prolongée
de leur pouce.


p.243-244
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Il faut encore sans en rien altérer, pouvoir retracer dans sa vérité et sa simplicité votre histoire de victimes émissaires, l'histoire de ces hommes que vous êtes pendant la douleur.
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Union des cœurs purs pour l'épreuve !
Union des cœurs purs pour que notre pays se connaisse et s'admire !
Union des cœurs purs pour la rédemption du monde malheureux.
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Aujourd'hui, la face du château demeure crispée et comme attentive à la canonnade; quant à la chambre, elle est devenue une salle d'agonie.
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Qu'ai- je à lui offrir en échange de ce que je vais lui demander?
Où trouver les mots qui décident à vivre?
Ô vous, toutes les choses, dites moi, répétez moi qu'il est encore doux de vivre avec un corps si douloureusement mutilé !
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