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Critiques de Honoré de Balzac (3261)
Ursule Mirouët

Habituellement, quand je lis un Balzac, surtout si c’est un gros format, j’alterne avec mes autres livres en cours. Eh bien, sachez que j’ai dévoré Ursule Mirouët d’une seule traite tant ce roman est captivant.



Balzac nous raconte une sordide histoire d’héritage : le vieux docteur Minoret, veuf, est venu finir ses jours à Nemours et ses héritiers potentiels, des neveux, passent leur temps à évaluer leur part d’héritage. Seulement voilà : Minoret a recueilli une orpheline, Ursule Mirouët, et l’a élevée comme sa propre fille… Les héritiers craignent d’être désavantagés à la mort du vieillard. Alors, ils manigancent, complotent, s’allient et se trahissent, vont jusqu’à voler les titres de rente au porteur destinés par le défunt à assurer l'avenir de la jeune fille et médire à son sujet…

C’est un roman où l’on compte beaucoup, où l’on parle de revenus à toutes les pages ; il est question de placements, de rentes, de titres, de ce fameux Grand Livre mais aussi de dettes, de traites, de prêts… J’ai beaucoup appris sur les règles en vigueur au XIXème siècle en matière d’héritage, notamment en ce qui concerne le mauvais sort fait aux enfants naturels et à leur descendance ; car, en ce qui concerne Ursule, c’est bien sa qualité de fille du fils naturel du beau-père du médecin qui pourrait rendre les dispositions testamentaires faites en sa faveur sujettes à contestation...

C’est aussi un livre où Balzac fait intervenir le surnaturel à la fois avec doigté et humour : « — Croyez-vous aux revenants ? dit Zélie au curé. — Croyez-vous aux revenus ? répondit le prêtre en souriant ». En effet, il faudra que le défunt revienne d’entre les morts pour aider sa pupille à faire valoir ses droits.



La première partie, dite d’exposition, intitulée « Les Héritiers alarmés » peint avec justesse la société bourgeoise de Nemours ; certains passages sont savoureux, satiriques et comiques parfois. L’antagonisme entre riche bourgeoisie et noblesse ruinée, les compromissions nécessaires donnent une certaine idée d’une époque charnière marquée par le retour à la royauté. Balzac démontre encore une fois ses grands idéaux sur la famille, la religion et la monarchie.

J’ai beaucoup apprécié le cocon protecteur organisé autour de la petite Ursule, que nous voyons grandir, entourée de son parrain, le docteur Minoret, et de ses meilleurs amis, un militaire, un juge de paix et un curé, formant un quatuor de belles âmes. Tous ces hommes âgés, marqués par la vie et l’expérience, sont profondément attachés à Ursule et recréent pour son bonheur une famille de cœur exemplaire : « cette famille d'esprits choisis eut dans Ursule une enfant adoptée par chacun d'eux selon ses goûts : le curé pensait à l'âme, le juge de paix se faisait le curateur, le militaire se promettait de devenir le précepteur ; et, quant à Minoret, il était à la fois le père, la mère et le médecin ».

La seconde partie, « La Succession Minoret », décrit les manœuvres malhonnêtes des héritiers opposées à la grandeur d’âme d’Ursule devenue une belle jeune femme sensible et bonne. Sa piété est constante : elle est à la fois digne dans les épreuves, candide et lucide, capable de sacrifices et d’une grande humilité.

Tout le roman est construit sur un mode binaire opposant les personnages supérieurs et les matérialistes ; pour une fois, envers et contre toutes les adversités, cela finit bien pour l’héroïne…



Ursule Mirouët est une réussite sur tous les plans : un beau portrait de femme, une mise en lumière des valeurs balzaciennes, une description minutieuse des mœurs de la bourgeoisie de province, une histoire d’héritage mêlée à une belle histoire d’amour, une résolution à la fois logique et surnaturelle…

Un régal !



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Le Colonel Chabert

Le colonel Chabart, Hyacinthe de son prénom, est laissé pour mort à la bataille d'Eylau. Sa femme se remarie, a des enfants, la vie suit son cours... Sauf que le colonel n'est pas décédé, et revient littéralement d'entre les morts, sous lesquels il avait été enseveli. Le crâne fendu, méconnaissable, il entame une procédure pour retrouver sa vie et sa femme, son identité et... son argent.

L'argent c'est bien le nœud du problème ; sa démarche va se transformer en parcours du combattant, et il y a fort à parier qu'il aurait préféré combattre sur le champ de bataille que dans les cabinets d'avoués.

Son cri du cœur lorsqu'il se rend compte qu'il ne retrouvera pas sa vie si aisément en est tout à fait révélateur : "J'ai été enterré sous les morts ; mais, maintenant, je suis enterré sous des vivants, sous des actes, sous des faits, sous la société tout entière, qui veut me faire rentrer sous terre ! "

Sa femme se montre machiavélique, et bien qu'avoir instantanément pensé "c'est lui" en le retrouvant, tant d'années après, elle déploie des trésors d'inventivité pour préserver le patrimoine acquis grâce à la mort de son premier époux.

Le colonel finira seul et dépourvu de tout.



Après un début un peu poussif, Balzac livre ici un chef d'œuvre de psychologie humaine, décryptant et critiquant les rouages de son époque et de la manière de fonctionner des hommes en général.

La tirade finale de l'avoué est bouleversante et effrayante à la fois.

Un petit livre de très grande qualité.
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Le Père Goriot

Quel livre que le Père Goriot. Je viens de le relire après des années, vraiment quel génie ce Balzac. C'est le premier roman qui constituera ensuite La Comédie humaine qui connaîtra la postérité que nous connaissons tous.

Le roman retrace le parcours du génie Eugène de Rastignac, jeune provincial arrivant à Paris pour ses études de droit. Il va rentrer dans le Monde où il fréquentera les puissants qui font et défont les réputations.

D'un autre côté, nous suivons le récit du Père Goriot, vieillard desargenté qui a tout donner à ses deux filles qui le méprisent.

À la fin de la lecture, vous serez choqués, énervé mais tellement ébloui par la plume de Balzac, qui nous raconte des choses vieilles de deux siècles mais tellement contemporaines ( n'a-t-on jamais vu des jeunes gens négliger leur parent ou d'autre tout sacrifier par amour?)

Et oui Balzac n'a pas pris une ride...
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La Cousine Bette

Mon avis sur ce livre à la fois puissant et bourré d'imperfections (stylistiques notamment, on voit qu'il a été écrit vite), est mitigé. De part en part il est éprouvant, et le monde qu'on aperçoit de sa fenêtre quand on le termine, en est teinté de gris.



Balzac y dépeint des figures humaines à la méchanceté et la veulerie paroxystiques.



Lisbeth, dite "La cousine Bette" pauvre malgré le beau mariage de sa parente devenue baronne Hulot d'Evry, fixe pour unique but de sa vie de parvenir par ses intrigues à la ruine totale de la nouvelle famille, qui pourtant l'accueille, et dont, sans scrupule, elle sait se faire aimer pour mieux la détruire. On ne peut qu'admirer le génie de la vieille fille, qui, s'il n'était pas exercé exclusivement au service du mal, aurait pu être un véritable homme d'état, politicien de grande envergure. Je ne dis pas femme d'état, tant les caractéristiques de la cousine Bette en font davantage un homme qu'une femme - physique sévère, sans charme, elle est même affligée d'une authentique laideur (ses sourcils se rejoignent) ; elle est, tout comme un homme, capable de se mêler au demi-monde et d'y tenir une place d'éminence grise sans déchoir de son statut social et éveiller la méfiance de ses proches ; Balzac suggère à plusieurs reprises le plaisir trouble qu'elle éprouve à la fréquentation des jolies femmes, dangereuses lorettes qui lui servent à remplir son dessein.



Les hommes (le baron Hulot d'Evry et le marchand Crevel) sont les esclaves absolus de leurs vices et de leurs addictions envers les petites femmes. Celles-ci n'ont d'autres possibilités d'établissement quand elles ne sont pas nées riches, que de vivre «des hommes» ou d'exercer un métier peu payé, d'apparence plus honnête, mais dans lequel elles s'useraient vite et seraient de toute façon la proie de l'omniprésente concupiscence masculine.



Car une femme seule à Paris est un gibier cerné de toutes parts dans une sorte de chasse à courre qui ne connaît ni trêve ni repos : dans cette société du 19 ème, les hommes, outre un emploi au ministère, à la chambre, à l'armée et un bon mariage, se mesurent entre eux au train sur lequel ils entretiennent une danseuse, plus richement souvent que leurs épouses ; car le mariage est lien obligatoire et sans plaisir, un fade brouet qui ne peut rivaliser avec des mets exquis et relevés. Cette course folle au paraître, contrairement aux plaisirs de la chair, ne s'épuise jamais puisqu'elle est rivée à l'amour propre, à la place dans la société et à la masculinité proprement dite.



Dès lors, les messieurs, lorsqu'ils se prennent au jeu, deviennent dépendants de leur manie et conduisent toute une famille à la ruine et au déshonneur sans s'amender jamais. Comme les toxicomanes d'aujourd'hui.



Balzac, pourtant marqué par la misogynie unanime de son siècle, a mis en évidence à quel point la société de son temps, telle qu'elle allait, lui semblait malsaine et disons le mot, marcher sur la tête. Ainsi on peut lire : « Les réflexions faites à propos de madame Marneffe (femme de la classe des prostituées aisées) s'appliquent parfaitement aux hommes à bonnes fortunes qui sont des espèces de courtisanes-hommes.»



Les hommes courant le guilledou ne sont rien d'autre pour Balzac que des prostitués-hommes puisqu'après avoir dilapidé tout leur avoir, ils sont réduits à la mendicité, aux humiliations incessantes et à la clandestinité pour fuir police et prêteurs à intérêts. Ils ont naturellement aussi sacrifié leur famille, poussant souvent à deux doigts du ruisseau femmes et filles, puisque, rappelons-le, l'épouse n'a aucune possibilité légale de mettre fin à la dilapidation de la fortune de la famille, ni même à celle de sa propre dot. Pauvres épouses, qui, si leurs père et mère n'ont pas un statut social et un entregent supérieurs à ceux du mari, n'ont plus qu'à tendre le cou pour se faire tondre, et à prier, chèvres résignés ou bêlantes sous la curée.



On retrouve dans la Cousine Bette, écrite en 1846, un Balzac toujours fidèle aux thèses qu'il a développées dans «Physiologie du mariage» quinze ans plus tôt : le mariage est un contrat inégalitaire qui réussit pourtant l'exploit de flouer les deux époux. La virginité exigée de la jeune fille au moment de ses noces est la garantie que son mari sera cocu. Quel homme, en effet, voudrait voir sa connaissance de l'autre sexe limitée à un seul exemplaire ? Peu, assurément ! Et pourquoi, sauf dans l'esprit illogique des hommes, en irait-il autrement des femmes ? Celles-ci, mariées vierges pour satisfaire des usages imbéciles et contre-nature, deviendront soit des bigotes aigries, soit des femmes adultères. Or la stabilité du foyer est entre leurs mains. Laissons donc les filles connaître l'amour et contracter des mariages d'inclination sous la surveillance bienveillante des parents. En tous cas ne les forçons jamais à contracter pucelles une union qui leur répugne.



Et Balzac reprend cette idée presque quinze ans plus tard dans la Cousine Bette à travers les propos tenus par l'actrice Josepha à la baronne Hulot « Si vous aviez eu, voyez-vous, un peu de notre chique, vous l'auriez empêché de courailler; car vous auriez été ce que nous savons être : toutes les femmes pour un homme. Le gouvernement devrait créer une école de gymnastique pour les honnêtes femmes ! Mais les gouvernements sont si bégueules !... ils sont menés par les hommes que nous menons ! Moi, je plains les peuples !…»



Une école de gymnastique, pour préparer les femmes à leur rôle d'épouse, voilà ce dont rêvait Balzac, afin que les maris trouvent en la même femme -leur épouse-, la femme honnête selon leur coeur, mais sachant mettre toute pruderie au placard à l'entrée de la chambre conjugale.

Il en va de la stabilité des alliances et de la fortune des familles.





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La Bourse

On trouve dans "La Bourse" toute la puissance de Balzac ; la puissance de son style, pour dire la vie de ces personnages, pour dire le monde, pour dire sa pensée et bien plus. Lui seul a su dire avec une telle puissance les vicissitudes, les joies et les tourments !... Et dire que cette nouvelle n'est même pas sa meilleure !... Ah !... Quel grandeur que l'oeuvre balzacienne !... Quel plaisir toujours de lire un Balzac !... De lire sa prose, tellement riche, tellement belle, tellement émouvante !... Quel bonheur, quel plaisir, quelle joie, quelle allégresse, quelle euphorie !...

Quelle bonheur que de découvrir tant de beauté, tant d'émotions, tant de richesse, tant de force...

Balzac est probablement le seul écrivain au monde à avoir écrit des romans qui transcendent les genres, mêlant le roman philosophique, la poésie en prose, le roman psychologique, le roman d'aventures...

Et "La Bourse", quelle belle nouvelle est-ce !... Courte, mais si belle, un peu mélancolique, puissante, simple, et surtout, surtout ayant la plus grande des qualités, étant balzacienne !... On passe par toutes les émotions, en lisant ce Balzac.

Encore un excellent livre de mon Balzac chéri, de mon Balzac adoré !...
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Avant-propos de la Comédie humaine

Ce que j'ai trouvé le plus intéressant, dans l'Avant-propos à la Comédie humaine, c'est l'exposé du passionnant projet de Balzac : raconter, à l'aide d'une fresque magistrale, la société de son temps, en parlant de tous les types sociaux, de leurs relations, de tout ce qui se passe dans la société du temps où vécu Balzac. Voilà un projet, une idée intéressante, qui a réussit bien au-delà des ambitions de Balzac, puisque sa Comédie Humaine, quoique inachevée, reste encore actuelle de nos jours et qu'il tend par son humaine comédie un miroir, à peine déformé, à notre société.

Toutefois, malgré l'intérêt que j'ai concernant le projet de Balzac, je n'approuve pas nombre de points de détails, issus de croyances et pseudo sciences fumeuses ( à commencer par la phrénologie… ).

Avis mitigé, donc.
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Le Père Goriot

Paris, 1819. La maison Vauquer est une pension qui abrite des personnages aussi différents que Jean-Joachim Goriot, vermicellier retraité entièrement dévoué à ses deux filles dont l'ingratitude le ronge ; le jeune Eugène de Rastignac, étudiant aux dent longues monté de sa province pour tenter d'intégrer la haute société parisienne, encouragé et aidé en cela par l'étrange Vautrin, autre pensionnaire au passé trouble. Les destins de ces personnages vont s'entremêler et la sordide pension va devenir le théatre de drames aussi terribles qu'inéluctables.

Depuis la lecture, il y a 25 ans, du "lys dans la vallée" ( lecture qui m'avait plongé dans un ennui d'une intensité peu commune), je n'avais jamais rouvert un ouvrage de l'ami Balzac, persuadé d'être à jamais insensible à son oeuvre. A tort, car "Le Père Goriot" m'a passionné de bout en bout. Dés les premières lignes, le lecteur est captivé par la description minutieuse de la sinistre pension. le décor scrupuleusement planté, Balzac nous présente des personnages très peu sympathiques à l'exception du Père Goriot, pauvre bougre dépassé par l'ambition sans scrupules de son entourage. Ainsi le lecteur va suivre l'arriviste Rastignac dans ses expéditions dans cette haute société (croquée par Balzac de manière impitoyable! )qui le fascine si bien qu'il est prêt aux pires manigances pour s'y faire une place, mais aussi et surtout assister à la lente déchéance du Père Goriot, dévasté par l'amour à sens unique qu'il porte à ses filles et qui va le mener jusqu'à la ruine et la maladie lors d'un déchirant final. Impitoyable, Balzac expose les bassesses de l'âme humaine avec un talent et une précision exceptionnelles. Féroce mais sensible, ce "Père Goriot" est à conseiller à qui ne saurait pas par où aborder l'oeuvre balzacienne.
Lien : https://www.takalirsa.fr/le-..
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Le Père Goriot

Pas de résumé de ma part sur ce roman, cela a déjà été fait des centaines et des centaines de fois avant aujourd'hui. Pas la peine d'en rajouter :-)



Une fois encore la plume de Balzac fait son oeuvre :

truculente, pleine de beauté, de poésie mais aussi de cruauté.



Balzac a cette qualité de nous faire lire mais aussi voir les scènes de son roman.



Un bon classique.
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La Peau de chagrin

De tous les romans de Honoré de Balzac que j'ai lus et aimés, " La Peau de Chagrin" est l'un de ceux qui marque . Je viens de le refermer, après une troisième lecture et j'en suis encore captive.

Le roman s'ouvre sur une maison de jeu dans laquelle jouent et se perdent d'inquiétants joueurs aux mines maladives, des habitués rusés, un public assoiffé du désespoir des perdants. Raphaël de Valentin, pâle archange un peu faible, entre et joue son dernier argent. Il perd... et décide qu'il est temps de mourir. Il se jettera dans la Seine, mais avant il déambule dans un Paris crépusculaire et froid. Pour se réchauffer une dernière fois, il entre dans la boutique d'un antiquaire qui recèle de multiples merveilles, vestiges d'anciennes civilisations ou de contrées exotiques, chères aux romantiques. L'antiquaire, homme mystérieux mas qui deviendra finalement très humain plus tard dans le roman, vend à Raphaël une peau de chagrin. Objet magique, inquiétant, elle a le pouvoir de réaliser tous les vœux de son propriétaire mais à chaque souhait exaucé, elle réduit et ajourne la vie de celui qui la possède... Ainsi commence "La Peau de Chagrin", par un jeune homme désespéré et un pacte qui n'est pas sans évoquer Faust.

Le roman se divise en trois parties: la première court de la maison de jeu à une ahurissante soirée, fruit de la peau. La seconde constitue un récit de Raphaël lui-même qui explique à un ami ce que fut son enfance et sa jeunesse. La troisième, elle, moins resserrée, narre la suite du destin de Raphaël.

Ce que le roman a de particulier est avant tout ce mélange de réalisme et de fantastique qui le nimbe. Balzac peint la société des années 1830 avec une finesse et une acuité dont il ne se dépare jamais: les conversations des convives du dîner, les avancées scientifiques et les théories... On y trouve même les traces des soubresauts politiques de l'époque. Pourtant, au cœur de ce tableau qui rappelle parfois "Le Père Goriot", il y a cette peau inquiétante qui réalise les vœux, que rien ne peut détruire (ni la chimie, ni la physique, ni la mécanique). Même dans la réalisation des plaisirs, des désirs, elle n'a rien d'une magie bienfaisante, rassurante. Non, elle agit avec une profusion malaisante, étouffante... Raphael lui-même ne s'y trompe pas.

Autre point fort du roman: ses personnages. Le marquis de Valentin est complexe: j'ai souvent envie de le secouer tant il est mol, pleurnichard, naïf. Il est pourtant désarmant de pureté et la folie qui l'étreint à la fin du roman le rend digne d'un personnage de Byron et lui confère une belle épaisseur. Les personnages féminins sont moins complexes mais cohérents, bien construits: la douce Pauline bien sûr mais aussi et surtout Feodora (suis-je la seule qui aimerait en savoir plus sur elle? Son passé? Son avenir?). Rastignac est également de la partie, différent de ce qu'il sera par la suite, mais toujours extrêmement vivant, combatif. A titre personnel, j'ai un faible pour le père de Raphaël qu'on vit peu mais qui me touche beaucoup pourtant...

Enfin, un mot de la langue de Balzac, riche, opulente, chatoyante. Une langue toute romantique finalement, au service d'un intrigue troublante et des questionnements philosophiques qui lui étaient chers: peut-on tout posséder? Peut-on être heureux quand on a tout? Peut-on vivre vraiment? Pouvoir ou vouloir?

Un roman complexe, profond et très beau. Un grand Balzac... même s'il ne me bouleverse pas autant que "Illusions Perdues"...
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La Peau de chagrin

Relu lorsque ma fille l'a étudié au lycée, j'ai toujours apprécié dans Balzac certains côté comme son parisiannisme et son approche du monde de l'argent !

Sur l'argent comme pour Paris, tout reste d'actualité, et comme l'écriture de Balzac est belle, c'est un plaisir de faire le parallèle.

J'adore redécouvrir Paris avec Balzac (là on ne s'éloigne pas du centre / 1er, 6 et 7eme), les rues (toujours en travaux), les boutiques qui sont toujours là, les porches qui cachent de riches demeures.

Bien sur, je n'oublie pas l'histoire et sa métaphore romantique !!
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Béatrix

Je reprends enfin ma lecture de La Comédie Humaine délaissée depuis avril dernier par Béatrix, un roman un peu long et ennuyeux dont j’ai peiné à venir à bout...



Le récit, organisé en trois parties, met du temps à entrer dans le vif du sujet. Il ne se passe rien dans la première partie, intitulée « Les Personnages », particulièrement descriptive avec la présentation de la ville de Guérande, que je connais et que je retrouve avec plaisir à l’époque balzacienne, « une ville à part, essentiellement bretonne, catholique fervente, silencieuse, recueillie, où les idées nouvelles ont peu d'accès ». Il est aussi question de deux maisons que tout oppose : l’hôtel des du Guénic, vieille famille de la noblesse bretonne, pétrie de traditions et le château des Touches, demeure d’une femme libérée, écrivain, tenant salon à Paris. La jonction entre ces deux endroits passe par Calyxte du Guénic, un jeune homme séduisant et prometteur, fasciné par Camille Maupin, nom de plume de Félicité des Touches. À la fin de cette longue exposition du décor et des protagonistes, apparait la fameuse Béatrix, marquise de Rochefide, femme infidèle qui a abandonné son mari pour un musicien italien.

La deuxième partie, « Le Drame » raconte par le menu comment Calyxte tombe amoureux de Béatrix. S’ensuit un étrange jeu de dupe entre les deux femmes pour s’attirer les faveurs du beau jeune homme. Naturellement, ce dernier fait le désespoir de sa famille, refusant les projets de mariage que l’on fait pour lui avec un beau parti breton. Béatrix triomphe mais ne cède pas aux avances de Calyxte, Félicité se réfugie au couvent mais organise, avant de se retirer du monde, l’avenir de son protégé et son mariage de convenance avec Sabine de Grandlieu.

La dernière partie, sans titre particulier, est d’abord épistolaire ; Sabine raconte les débuts de son union dans de longues lettres adressées à sa mère. Nous comprenons que cette jeune femme est pleine de bon sens et de ressources, qu’elle a compris les tenants et les aboutissants du drame qui s’est joué avant elle et qu’elle luttera pour garder son mari quand ce dernier retombera dans les filets de la perfide Béatrix. Le dénouement arrive enfin après une série d’intrigues et de complots mondains destinés à préserver la morale tout en ramenant le beau Calyxte à sa place auprès de son épouse dévouée et renvoyant la marquise à ses propres devoirs familiaux...



Les portraits féminins sont toujours aussi finement travaillés, physiquement, moralement, psychologiquement et demeurent très intéressants malgré les longueurs du récit. Je retrouve l’œil balzacien : « les femmes sont parfois mauvaises ; mais elles ont des grandeurs secrètes que jamais les hommes ne sauront apprécier ».

On reconnait sans peine Georges Sand derrière le personnage de Félicité des Touches qui écrit sous le pseudonyme de Camille Maupin, s’habille en homme et bouscule les convenances... : « une femme de mœurs équivoques, occupée de théâtre, hantant les comédiens et les comédiennes, mangeant sa fortune avec des folliculaires, des peintres, des musiciens, la société du diable, enfin ! Elle prend, pour écrire ses livres, un faux nom sous lequel elle est, dit-on, plus connue que sous celui de Félicité des Touches. [...] Cette monstrueuse créature, qui tenait de la sirène et de l'athée, formait une combinaison immorale de la femme et du philosophe, et manquait à toutes les lois sociales inventées pour contenir ou utiliser les infirmités du beau sexe ».

Les figures ecclésiastiques sont également bien campées, particulièrement savoureuses dans leurs compromis et leurs manières de concilier les affaires mondaines et les choses spirituelles.





Dans ce roman, la comédie humaine prend des allures de comédie mondaine.

Ce n’est pas mon préféré parmi tout ce que j’ai déjà lu de Balzac ; c’est trop détaillé, long et monotone. Je déconseille de commencer par Béatrix pour découvrir cet auteur.

À réserver donc aux inconditionnels avertis...

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Les Chouans

Grand roman de jeunesse de Balzac dont la Vendée et ses Chouans en révolte contre la révolution française sont les héros. Marie de Verneuil est assurément le phare de ce roman qui emporte le lecteur dans les chemins noirs et les ornières boueuses d'une Vendée méconnue. Le style est déjà celui du grand écrivain que deviendra Balzac, l'histoire de cet épisode de la grande Histoire de la France, la chouannerie, immerge le lecteur dans le contexte de l'époque avec des descriptions détaillées des aventures épiques de ces malheureux chouans qui ont cru pouvoir résister à la déferlante révolutionnaire.
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Mémoires de deux jeunes mariées

Fourrant au placard ma peur d'un style inaccessible, je me suis plongée dans les Mémoires de deux jeunes mariées, roman épistolaire mettant en scène deux jeunes femmes du XIXème siècle, qui rejoignent le monde séculier après avoir passé plusieurs années dans le même couvent.



D'un côté, au cœur de Paris, Louise, coquette et orgueilleuse, espiègle et séductrice. De l'autre, en Province, Renée, sage et raisonnable, placide et dévouée. Les deux amies sont à la recherche d'un but apparemment commun : l'amour, dont elles ont tant rêvé pendant leurs années au couvent. Deux femmes, deux destinées, et une surprenante correspondance sur les configurations de l'union amoureuse. S'affrontent dans de tendres échanges deux visions du mariage : si Louise ne vibre que par la passion dévorante, Renée ne jure que par le dévouement paisible à la famille. Naissance du sentiment amoureux chez l'une, résignation tranquille chez l'autre, on se délecte vite de leurs confidences qui oscillent entre bienveillance et concurrence.



Même si j'ai parfois buté sur les tournures de quelques phrases, la plume de Balzac m'a charmée : les paragraphes ciselés font de certains passages de la véritable dentelle littéraire. J'ai même pris un certain plaisir à voir le récit ponctué de verbes conjugués à l'imparfait de subjonctif (si, si !) et d'interpellations d'antan telles que "ma mignonne" ! Et bien que la position apparemment défendue par l'auteur vogue bien loin de mes convictions féministes (la promotion de la monarchie et de la famille patriarcale : très peu pour moi, ne vous en déplaise cher Honoré), je lui reconnais bien du talent à s'immiscer de manière extrêmement crédible dans la peau de jeunes femmes arpentant les règnes méconnus de Charles X et de Louis-Philippe.
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Le Père Goriot

Tout a été dit sur et Balzac et Goriot. Inutile d’y revenir. A avoir lu et relu La comédie humaine, je tiens Le père Goriot comme un des plus achevés et le premier chapitre - Une pension bourgeoise – comme le modèle absolu de l’ouverture d’un roman et d’une œuvre. Tout est essentiel dans ces pages, les pensionnaires (pour certains d’entre eux des personnages clés de la Comédie, Rastignac, Vautrin, Blanchon…), l’environnement, Paris. Un long premier chapitre, mais le décor est planté et la comédie commence vraiment.
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La vieille fille

Balzac m'est toujours un régal.

Cette minutieuse étude des meurs et gens de province, c'est de la dentelle (littéraire) d' Alençon.

Comme pour Saumur, avec Eugénie Grandet, Balzac visite cette petite préfecture de l'Orne.
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Le Colonel Chabert

Le colonel Hyacinthe Chabert, comte de l’Empire et Grand-officier de la Légion d’honneur est un valeureux soldat napoléonien. Au cours de la bataille d’Eylau, il est blessé à la tête et enterré dans une fosse commune. Ayant repris conscience, il réussit à s’extirper de cette tombe et est secouru par des paysans. Remis de cette incroyable aventure, il revient à Paris afin de réclamer ses biens, son identité sociale et surtout sa femme qui s’est remariée fort avantageusement avec le comte Ferraud, un aristocrate royaliste et opportuniste. Madame Ferraud voit donc d’un très mauvais œil le retour du déterré d’autant plus qu’elle a eu deux enfants de son deuxième mari et mène une vie d’aisance et de luxe mondains. Elle usera donc de ruse afin de soumettre à sa volonté le pauvre et naïf Chabert et l’empêcher de lui nuire dans sa nouvelle vie de parfaite comtesse de la Restauration.

Le roman possède d’immenses qualités dont entre autres la brièveté et aussi le souci du détail, les belles descriptions minutieuses de lieux et de personnages, le côté réaliste et enfin, le regard incisif et d’une impitoyable lucidité de l’auteur sur les mœurs, les valeurs et l’ambition dévorante caractéristique de l’époque de la Restauration. Le retour du Roi amène aussi le retour des aristocrates ayant fui sous le régime Napoléonien, un phénomène qui engendre l’émergence de nombreux cabinets d’avoués suite aux multiples procès intentés par les nobles ayant été entièrement dépouillés de leurs biens et privilèges sous la Révolution. Chabert s’adresse donc à un de ces cabinets afin de rentrer en possession de sa vie passée mais l’entreprise s’avère des plus difficiles et les obstacles à surmonter seront légion. Maître Derville ne ménagera pourtant pas sa peine et il fera preuve d’une bonté et d’une compassion admirable envers cet ancien colonel napoléonien déchu dont plus personne ne se soucie ni ne respecte et dont la mise débraillée et loqueteuse entraîne les moqueries et les railleries les plus cruelles.

C’est le roman d’un homme broyé par le nouveau régime politique auquel il n’appartient pas et dont l’honnêteté, la probité, le sens de l’honneur, le patriotisme et surtout l’immense naïveté ne lui permettront pas de se refaire un place au sein de cette société basée sur l’argent et le pouvoir. Triste destin que celui du colonel Chabert, un personnage pitoyable mais aussi infiniment respectable et bon. Mais la bonté ne paie pas toujours dans ce monde cruel et vorace et Balzac nous le démontre d’une magistrale façon. Que la leçon serve…
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Le Père Goriot

Un jeune provincial qui cherche à s'insérer dans la société parisienne (Rastignac) mais son seul problème est qu'il lui manque les manières et l'argent.

Comme il n'est pas bête, et pour y parvenir il vas côtoyer des "femmes du monde" tout en restant très attaché à son voisin de la pension, un vieillard malheureux abandonné de ses filles (le Père Goriot)

La mélancolie qui se dégage de cette oeuvre, par le malheur de Rastignac, du Père Goriot, par cette pension miteuse et de ses espérances déçues m'ont beaucoup émue.

Il s'agit d'une oeuvre intemporelle, car chacun des personnages du livre pourraient très facilement trouver son homologue dans notre société contemporaine.
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La Peau de chagrin

Un livre ayant marqué mon adolescence, le premier qui m'a convaincu que les auteurs classiques, parfois, n'étaient pas juste bons à garnir les étagères poussiéreuses du grenier ...
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Le message

Dans cette courte nouvelle, un jeune homme pauvre sympathise avec un jeune vicomte lors d’un voyage en diligence de Paris à Moulins ; les deux jeunes gens se livrent à des confidences sur leur vie amoureuse, ayant chacun une maitresse d’âge mûr. La diligence verse et le jeune vicomte est mortellement blessé dans l’accident : avant de mourir, il a le temps de charger son nouvel ami d’une mission auprès de sa maitresse, l’avertir de son décès avant qu’elle ne l’apprenne par le journal et lui rendre ses lettres.

Le narrateur nous promet « une histoire simple et vraie », en fait c’est aussi « un drame presque vulgaire » puisque, arrivé à destination, face à la belle comtesse de Montpersan et à son mari, caricature de gentilhomme campagnard, notre jeune héros aimerait bien prendre la place de l’amant disparu. Nous retrouvons ici brièvement quelques détails de la vie de province, dont la présence de l’inévitable oncle chanoine, d’une femme de chambre dans le secret des amours adultères de sa maitresse et d’un mari sans doute complaisant.

De retour à Paris, le messager raconte son aventure à sa maitresse : « quelles délices d’avoir pu raconter cette aventure à une femme qui, peureuse, vous a serré, vous a dit “oh ! Cher, ne meurs pas, toi ?“ ».

Voilà un texte très peu connu de Balzac qui me laisse une impression de brouillon et d’inachevé. J’ai bien envie de ne pas croire les Anglais qui « vous le savez, regardent les places situées dans cette partie aérienne de la voiture comme les meilleures » et de conclure en rappelant les dangers de voyager sur l’impériale des diligences. Prenez dix minutes pour découvrir cette nouvelle et vous comprendrez ce que je veux dire.

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La Peau de chagrin

Grand classique, maintes fois adapté, notamment au cinéma, ce roman est aussi incontournable que plaisant à lire.

Et au-delà de ce plaisir, on trouve matière à réflexion dans un texte riche et profond.

A lire et à relire, parfois.
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