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Critiques de Javier Cercas (526)
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L'Imposteur

Loin de moi de dire que ce n'est pas un bon livre, mais je n'ai pas aimé et ma notation représente le plaisir que j'ai eu à le lire...



J'ai trouvé ce livre long, lent, laborieux, ennuyeux, en un mot ... potache.



Cercas, l'auteur pour moi des "Soldats de Salamine", décrit sur plus de quatre cents pages l'imposture d'un homme espagnol qui s'est fait passer pour un rescapé d'un camp de concentration nazi. Toute sa vie va se révéler émaillée de mensonges.



Le fait divers a eu beaucoup de retentissement en Espagne et ailleurs nous enseigne l'auteur, bien que je n'en aie jamais entendu parler.



Mais cela reste du fait divers, pas de la littérature, et l'analyse des motivations de ce Marco, aux agissements pourtant pour le moins cauteleux, est répétitive et lassante, égrenée sur un ton plutôt insipide.



Le seul intérêt, mais pas forcément positif, c'est d'apprendre que la motivation de Cercas d'écrire ce livre provient du fait qu'il nous dévoile, dès l'entrée du livre, qu'il est lui aussi, à sa mesure, un imposteur et il nous livre cette imposture en fin d'ouvrage à travers une conversation fictive qu'il aurait eu avec ledit Marco. Je n'en dirai pas plus.
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Indépendance

Deuxième volet d’une trilogie débutée avec Terra Alta en 2021, on retrouve avec un immense plaisir Melchor Marin, policier et homme contradictoire au passé compliqué. Melchor aime la littérature du XIXème, au point que « Les misérables » est devenu son vade-mecum et que sa fille s’appelle Cosette. Il envisage d’ailleurs sérieusement de devenir bibliothécaire. A côté de ça, il ne peut s’empêcher de tabasser incognito les hommes qui cognent les femmes. Tout ça s’explique par son histoire personnelle dont je ne vous dirais rien ; il faut découvrir la psyché ténébreuse de ce personnage en lisant Cercas.



Melchor retourne à Barcelone pour enquêter sur une affaire de chantage. La maire de la ville voit une vieille vidéo à caractère sexuel menacer de refaire surface . S’agit-il d’une simple extorsion d’argent ou d’une tentative de déstabilisation politique ? Pour le découvrir, le policier va entrer dans les cercles du pouvoir et rencontrer la haute bourgeoise catalane qui se croit tout permis depuis toujours.•

Cynisme, ambition, corruption systématique et généralisée, absence de scrupule… C’est moche, très moche.

« Indépendance » n’est donc pas un simple roman policier. C’est un livre anti système. Un portrait affreusement réaliste de l’élite barcelonaise (mais sans doute transposable à d’autres lieux), un plaidoyer contre la tyrannie des nantis, une critique de l’argent qui domine le monde et de la démocratie corrompue. Rien n’échappe à Cercas et ça fait mouche.



Nul besoin d’avoir lu le premier tome pour se jeter sur cette enquête haletante. L’auteur replace petit à petit le passé de son personnage et les relations avec les autres protagonistes sont rappelées au cours du récit. J’attends déjà avec impatience le 3ème opus pour continuer à découvrir la réflexion romanesque de Cercas sur l’histoire de l’Espagne, thème central de son œuvre depuis toujours.



Traduit par Aleksandar Grujicic et Karine Louesdon
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A la vitesse de la lumière

« J'ai eu pour la première fois l'intuition fallacieuse que le passé n'était pas un lieu stable mais changeant, altéré en permanence par l'avenir, et par conséquent rien de ce qui est arrivé n'est irréversible ». Quasi mot pour mot le narrateur s'interroge deux fois sur le passé tout d'abord comme une révélation contestable puis une seconde fois comme une évidence qui s'impose. Citation hermétique s'il en est. Parle-t-il de la perception du passé ?

Pour tenter de comprendre il faut avoir suivi pas à pas le narrateur, en grande partie l'auteur. Un jeune diplômé d'université barcelonais plutôt gauche part enseigner deux ans à Urbana, une université du Middle West américain. Il y côtoie Rodney, un collègue asocial, rescapé du Vietnam rongé par la culpabilité. Une relation forte mais incertaine s'installe entre eux. Lorsque, une douzaine d'années plus tard, Rodney vient le retrouver en Espagne, le même malaise persiste fait d'attirance irrépressible et de rendez-vous manqué presque de fuite. Entre temps le narrateur espagnol a fait son chemin. Ecrivain renommé après des années de galère il est célèbre. le succès inespéré s'avère un désastre qui le détruit moralement. Suite à un drame familial il perd tout appétit de vivre.

Au gré des hasards, car souvent c'est le hasard, un vague instinct, une sensation fugace qui sont les éléments déclencheurs, il souhaite renouer avec Rodney et faire de sa guerre du Vietnam le sujet d'un prochain livre. de retour dans le Middle West au gré des rencontres, des conversations, il aura la révélation diffuse mais fulgurante de la fin du tunnel, une « brèche dans la porte de pierre est apparue ».

Il ne faut pas trop en dire sur ce roman cérébral et trivial à la fois. John Wayne, figure du commandeur, Certains l'aiment chaud ou les cafés de Barcelone font aussi partie des références de l'auteur. On est dans le monde réel. Le récit d'une vie, de deux vies symétriques marquées par le drame, des échecs ou des sursauts. Le roman ne nous laisse pas souffler. Peu de pauses, ni de paragraphes, les phrases s'étirent au gré du cheminement interne du narrateur, soumis à des injonctions successives et contradictoires. Ce n'est jamais pesant, on est emporté avec lui, on adhère pleinement. Sa sensibilité devient la nôtre.

Un roman envoutant sur un passé douloureux.





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Le monarque des ombres

« C'était un franquiste fervent, ou du moins un fervent phalangiste, ou du moins l'avait-il été au début de la guerre. »



En une phrase, Javier Cercas nous laisse comprendre toute l'ambiguïté du personnage dont il fait le centre de son « roman non fictionnel ». Manuel Mena, son grand-oncle, est le héros de la famille. Il est mort à dix-neuf ans à Bot, Catalogne, lors de la bataille de l'Ebre.



Les Cercas sont originaires d'un village figé dans le temps et l'espace, en Estrémadure, le village de Ibahernando. Village de paysans pauvres et de paysans devenus locataires de leurs terres, village d'aristocrates qui vivent à Madrid. La fracture du monde paysan se fait quand les locataires de terres deviennent des patriciens et se prennent pour des aristos. Situation assez fréquente en Espagne mais qui se révèle terriblement destructrice au bout de seulement deux ans d'existence de la Seconde République, vers 1931. Dès lors, les intérêts divergent et chacun se range dans son camp, en s'en trompant parfois.



Le propos de Cercas est de faire revivre ce « héros de la famille », phalangiste plutôt que franquiste. Il veut écrire sur lui et aidé de David Trueba, cinéaste et écrivain, il enregistre les souvenirs de gens qui ont connu le « héros ». Parmi lesquels le « Tondeur », 94 ans et toute sa tête !



Il raconte l'histoire de ce village qui, en un clin d'oeil, est passé de monarchique à républicain, de soumission à l'Église riche et indifférente au choix du temple protestant, plus soucieux des gens pauvres et qui va développer l'école. Javier Cercas parle de sa famille, de ses deux grands-pères de droite, de sa propre mère sous la coupe du héros Manuel Mena et c'est l'histoire de toute l'Espagne que nous avons sous les yeux. Ces familles d'aujourd'hui, de gauche, athées, modérées, qui savent que, très proches d'elles dans leur arbre généalogique, se trouvent d'anciens phalangistes, d'anciens franquistes. Et qui n'en parlent pas.



« Un oncle facho ? Non, la famille au grand complet ! » s'exclame le personnage, « Toute l'Espagne ou presque était franquiste, par action ou par omission. »



Des années plus tard, et encore aujourd'hui, il est difficile d'aborder ces sujets.

« Dans l'Espagne des années 1970, le mot « réconciliation » était un euphémisme du mot « trahison », parce qu'il n'y avait pas de réconciliation possible sans trahison, du moins sans que certains trahissent. »



Javier Cercas donne la parole au chef de la Phalange et à « son idéalisme venimeux », José Antonio Primo de Rivera qui affirme les principes de son mouvement : anticapitalisme, anti-marxisme, non-adhésion au franquisme, nationalisme revendiqué : «  Arriba Espana, una, grande, libre ! ». Puis des décennies de dictature, d'exécutions, de tortures. La Phalange a fini par se plier sous la férule de Paquito !



Le narrateur raconte les assassinats perpétrés sous le nom de « la promenade », plus par les franquistes que par les républicains. Il raconte l'exécution d'une jeune fille qui n'avait pas d'autre tort que celui d'être la fiancée d'un révolutionnaire. Il raconte comment les franquistes ont recruté et formé en quinze jours 300 000 sous-lieutenants, « sous-lieutenant intérimaire, cadavre titulaire », disait-on alors !



Ce roman autobiographique est une recherche passionnée de « la vérité » d'un héros qui s'était trompé de camp, appuyée sur des documents d'époque, des photos, jusqu'à une touchante marguerite séchée depuis quatre-vingts ans entre les pages des papiers laissés par Manuel Mena.



Pour clore cette quête essentielle pour un auteur manifestement hanté par son oncle, nous nous rendons à Bot, petite ville où Manuel Mena mourut d'une blessure qu'on n'a pas pu soigner, ni opérer en temps utile. Et l'auteur semble enfin apaisé, bouclant un parcours douloureux dont le livre est la concrétisation, avec ce qu'il présuppose de conséquences pour la famille.



Comme toujours, on apprécie la sincérité de l'auteur, son souci de dissocier auteur et narrateur selon les moments de l'écriture, son souci de restituer scrupuleusement les faits, appuyés sur des entretiens avec des « anciens », puis des descendants d'anciens, jusqu'à peut-être ne plus être aussi fiable. Là, le littérateur prend la relève, dit-il. Et c'est ce qui me gêne : aucune bibliographie, des références minimes, invérifiables.



Ce qui me gêne aussi, ce sont ces deux procédés de style répétitifs jusqu'à l'indigestion : l'accumulation basée sur des dizaines de « et » très indigestes ; et la prétérition répétée : tout ce que je ne dirai pas mais que vous lisez sous ma plume. C'est long, pesant, indigeste.



Il n'en reste pas moins que ce livre est une mine d'informations, une démarche intelligente, honnête et courageuse pour raconter ce que fut réellement ce héros de 19 ans mort pour un idéal auquel il avait fini par ne plus croire, ce héros qui n'avait pas fait le bon choix en 1937.
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Le monarque des ombres

Cela faisait des années que l’auteur espagnol Javier Cercas tournait autour de ce héros de la famille, jeune homme mort à vingt ans sur les bords de l’Ebre, mais le fait que rétrospectivement il ait été du mauvais côté, à savoir du côté du franquisme, était très certainement un frein à cette entreprise. Cela et aussi la mémoire des contemporains de Manuel Mena qui commençait à s’effacer… Pourtant, grâce à la proposition de son ami le cinéaste David Trueba qui lui propose de l’accompagner dans son village d’Estrémadure pour interroger et filmer ceux qui ont connu le jeune phalangiste, un projet de livre se dessine.

C’est avec plaisir que je retrouve Javier Cercas, dont j’avais lu avec un très grand intérêt L’imposteur. Le présent livre relate scrupuleusement les recherches, les rencontres, en quête de la personnalité de Manuel Mena, mais curieusement, l’auteur parle de lui tantôt à la première personne, tantôt, notamment pour les membres de sa famille, en les nommant « le grand-père de Javier Cercas » ou « l’oncle maternel de Javier Cercas », un curieux dédoublement qui surprend, mais ne soulève aucun doute quand à la sincérité du propos.



Les dialogues entre l’auteur et David Trueba rendent très vivante cette quête, près de quatre-vingts ans après les faits, ainsi que le retour au village natal qui m’a rappelé le très beau livre de Carine Fernandez, Mille ans après la guerre. Impossible de ne pas se passionner pour tous les doutes et les questionnements soulevés par l’enquête de l’auteur, et ils sont nombreux, car il n’est pas forcément facile d’évoquer un ancêtre franquiste dans l’Espagne actuelle. Tous les moments où il réussit à faire remonter des réminiscences de la part de proches parents ou de voisins de son village s’avèrent également très émouvants, et j’ai vraiment été emballée par le style. La traduction me semble d’ailleurs parfaite pour mettre en valeur ce texte.

Un seul petit bémol concerne les recherches qui relèvent davantage des textes d’archives. Les formulations manquent parfois un peu de clarté pour qui ne connaît pas parfaitement les protagonistes de la guerre civile espagnole : les franquistes, les républicains, ça va, les phalangistes, on voit bien de quel côté ils sont, mais lorsqu’est évoquée « l’armée de Yagüe » de quel côté se situe-t-on ? Il faut quelques lignes à rechercher des indices pour trouver la réponse, retomber sur ses pieds et reprendre le fil, compliqué par des phrases très longues. J’aime beaucoup habituellement les phrases longues, mais lorsqu’il s’agit de guerre, de différentes factions, ça n’aide pas à la compréhension… Certains épisodes sont toutefois captivants comme l’approche de Teruel à la fin de l’année 1937, connue par les photos de Robert Capa et Gerda Taro, et qu’on retrouve ici, vue de l’intérieur. La fin est également une grande réussite, très belle et émouvante, elle révèle enfin la signification du titre…
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Le monarque des ombres

Écrire pour crever un abcès, pour comprendre un pan de l'histoire familiale et de la grande Histoire de l'Espagne, pour comprendre une honte, pour comprendre le choix d'un homme, d'un parent présent dans son arbre généalogique, écrire pour mieux connaître sa famille, pour mieux se connaître...tel pourrait l'objet de ce livre "Le Monarques des ombres".

Livre après livre, Manuel Cercas se penche sur des aspects méconnus de la grande Histoire et plus particulièrement sur la guerre d'Espagne, le fascisme.. On ne peut le soupçonner d'avoir été favorable aux thèses franquistes, loin de là. Depuis toujours il sait qu'un de ses grands oncles Manuel Mena (frère de son grand-père maternel) a été tué à 19 ans. Il était sous-lieutenant dans l'armée franquiste. Une rue du village d'Ibahernando dont est originaire une partie de la famille maternelle de l'auteur porte encore le nom de Manuel. Il a entendu parler de lui par sa mère qui se souvient d'un jeune homme souriant qui lui offrait des cadeaux.

Alejandro Cercas, député européen, dira même à Javier qu'écrire sur Manuel MENA est une idée casse-gueule "Tu es de gauche comme moi et notre famille est de droite."

Un projet qui "n’intéresse personne" selon d'autres !

Déterminé, Javier Cercas poursuit malgré tout son projet et partira à la rencontre des rares derniers survivants qui ont connu Manuel. Il traverse l'Espagne en compagnie notamment de David Trueba, cinéaste et écrivain (qu'il me fit découvrir et dont je parlerai bientôt), et contre l'avis de ce dernier, afin de filmer le dernier survivant qui connut Manuel. Il parlera beaucoup avec sa mère, et rencontrera également des historiens, des survivants de batailles, consultera des archives franquistes ou républicaines, visitera la vieille bâtisse qui servait d’hôpital de campagne, où Manuel mourut..... Il a besoin de comprendre pourquoi ce jeune phalangiste s'est engagé. Était-il opposé aux thèses républicaines, a-t-il été contraint, recherchait-il la gloire, soutenait-il les thèses phalangistes et fascistes? A t-il souffert de malentendus ou frustrations ?

Cette tentative de plongée dans l'esprit d'un jeune homme est passionnante car Javier Cercas n'analyse pas avec le regard d'un homme du XXIème siècle qui ne connut pas la guerre, mais tente de comprendre ce qui a pu motiver ce choix, qu'aucune prédestination familiale ne laissait supposer, tente de se replacer avec 80 ans de recul. Manuel aurait très bien pu être un combattant dans les rangs républicains. D'autres aussi sans aucun doute.

A partir de ce cas particulier, Javier Cercas, tente de comprendre les choix d'espagnols et de familles qui se déchirèrent en choisissant un camp plutôt qu'un autre, sans aucune supposition ou affabulation de sa part, en vérifiant ses sources, ou en se taisant quand il ne pouvait trouver la vérité. Une quête de vérité qui peut hanter chacun de nous.....

Et si ? Pourquoi ?....des questions de toute vie humaine, pour lesquelles nous n'avons pas toujours de réponse.
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Le monarque des ombres

Javier Cercas nous livre une fois de plus une enquête, ou plutôt un roman-enquête. Celui-ci concerne son grand-oncle Manuel Mena, mort à 19 ans pendant la guerre d'Espagne du côté franquiste. Donc du mauvais côté. L'auteur, grâce aux rares traces écrites existant encore et aux témoignages des derniers témoins vivants, tel un détective dans l'Histoire, retrace le parcours de ce jeune homme, remonte sa destinée depuis son village perdu d'Estrémadure jusqu'aux circonstances de sa mort pendant la bataille de l'Ebre.

Un livre bien documenté, intelligent et, cerise sur le gâteau, d'une grande et délicate sensibilité.

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L'Imposteur

Vérité, mensonge, roman, histoire, mémoire, Don Quichotte, quelques-uns des mots que j'associe rapidement à L'imposteur; Trop rapidement, tant ce livre est foisonnant, multiple, inattendu et profond. De l'histoire de Marco qui s'est inventé une vie qu'il n'a pas vécu, au point d'en devenir un terrible imposteur, prétendant être un ancien déporté alors qu'il n'en fut rien, Cercas écrit un livre brillant, multiforme. L'enquête sur l'imposture, quelques années après que l'affaire eut éclaté, lui permet d'explorer les ressorts du mensonge, en lien avec la mémoire et l'histoire. C'est aussi le moyen d'interroger son propre travail de romancier. Les interventions fréquentes de Don Quichotte proposent un extraordinaire miroir à l'histoire de Marco. Déjà j'avais aimé le travail de Cercas pour Les soldats de Salamine. Je le relis aujourd'hui avec la même joie.
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Indépendance

Que de perplexité à la lecture de cette suite à Terra Alta, livre qui m'avait conquise sans beaucoup de bémols!

Je me faisais une joie de retrouver Melchor et cette terre espagnole bardée de tragique autant que de magnificence.

Sur le fond, rien à dire. On est dans l'air du temps, et Javier Cercas s'immisce dans l'atmosphère viciée des élites et édiles en imaginant un chantage à la sextape pour déboulonner la maire de Barcelone.

(Dans la ville où je vis, ce type de fiction a des relents de vécu parfaitement nauséabonds et confirme que ce petit monde est définitivement intouchable...)

Le scénario tient donc la route, et la connaissance profonde de l'auteur de l'histoire catalane reste un bonheur d'érudition.

C'est du côté de la forme que j'ai peiné...

Que de répétitions et de redondances.

Beaucoup trop de pages reprennent en quasi mot à mot des éléments du tome précédent. Que diable, Javier, vos lecteurs ne sont pas totalement amnésiques et il était sans doute possible de re-contextualiser les histoires intimes de Melchor et de ses acolytes sans ces redites pointilleuses.

Il est décidément très difficile de chroniquer une déception, et ce d'autant plus quand l'auteur est incontestablement un grand de la littérature. Mais, pour le coup, il me faut reconnaître que le style de cet opus m'a souvent sidérée par son insignifiance. J'avoue avoir soupçonner une sous-traitance scripturale...

Dernier bémol et non des moindres pour un roman qui dénonce ouvertement la corruption de cette infime poignée d'individus détenant pouvoirs administratif, politique et financier. Retrouver l'occurence "WhatsApp " presque 30 fois dans 350 pages est un camouflet au titre de l'ouvrage. Je veux croire qu'il s'agit d'une bévue de traduction, mais cela reste aussi indigeste que les trop nombreuses pommes qui émaillent les séries d'une célèbre plateforme.

Un constat très mitigé au final. Je lirai le troisième volet de la trilogie avec l'espoir d'une rédemption !
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Terra Alta

Javier Cercas aime écrire et il écrit bien. Lorsqu'il raconte une histoire, il l'enrobe de mille détails ; il la pare d'une ampleur démesurée, conférant à des lieux communs le souffle d'un drame mémorable. Mieux vaut avoir Les Misérables sous le coude pour recueillir le suc d'une rédemption, prélude à une grande romance, étouffée dans la violence.

Il y a enquête, certes, mais l'essentiel est ailleurs. Dans ces terres sèches et pauvres, dans ces blessures inguérissables d'une guerre civile sanglante. L'auteur espagnol parle de son pays avec feu, sur le débit d'un conteur méditerranéen, volubile lyrique, au point de m'étourdir et de me lasser. Je préfère garder le charme de mon premier Cercas (À la vitesse de la lumière) et laisser Melchor à ses aficionados inconditionnels.

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Le château de Barbe Bleue

Javier Cercas est un très grand auteur espagnol, se lancer dans le polar la soixantaine venue pourquoi pas mais...Voici donc une trilogie commencée par Terra Alta qui se termine .

Le toujours Melchior est l’acteur principal , de policier reconverti en bibliothécaire.

Les premiers épisodes de la saga sont développés dans la première partie, mais c’est le silence observé sur les causes du décès de son épouse vis à vis de sa fille Cosette qui va déclencher la disparition de celle ci, puis une enquête qui bloque, et donc la recherche du pourquoi.

C’est une attaque en règle de la corruption retrouvée à tous les étages de l’administration, également un hommage à des amitiés indéfectibles.

Certes la lecture est passionnante, mais tout se passe comme prévu au départ, pas de trahison ou quelque chose du genre, c’est quand même un polar ! Et le dernier paragraphe (ce n’est pas gentil je sais) m’a semblé sortir tout droit de la bibliothèque rose.

J’ai de loin préféré le premier tome, mais c’est très personnel.

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Le château de Barbe Bleue

Troisième et dernier épisode de la série Terra Alta, Le château de Barbe Bleue se situe en grande partie sur l'île de Majorque, dans un avenir proche (2035). Si l'on y perd un peu de l'atmosphère de la région qui donne son nom à la trilogie, Melchor, son personnage principal, est fort heureusement bien de la partie. Cet ancien taulard puis policier est devenu bibliothécaire et mène à présent une vie rangée où toute son attention va à sa fille, désormais adolescente. L'enlèvement de cette dernière va l'obliger à sortir de nouveau de ses gonds, jusqu'à à une opération d'envergure et vengeresse. Le suspense et l'action sont au rendez-vous mais Javier Cercas signe surtout un roman introspectif où les relations père/fille prennent la première place, marquées par les peines rétrospectives et les mensonges protecteurs et maladroits. Le cheminement du livre n'offre pas de surprise majeure et sa toile de fond, autour des violences faites aux femmes, ne peut qu'inciter à adhérer à son propos, mais le livre fourmille de petits détails ou de digressions qui le rendent très attachant. Et Melchor reste toujours fascinant et terriblement humain, avec ses failles et ses cicatrices, son appétit pour les sandwiches au thon, son abstinence et ses lectures de Tourgueniev. Accessoirement, et comme dans son roman précédent, une mise en abyme fait apparaître l'auteur, avec un sens de l'auto-dérision qui ne manque pas de piquant. A vrai dire, si la lecture du Château de Barbe Bleue est aussi plaisante, cela est dû, en assez grande partie, aux deux tomes précédents, qui permettent de nombreux non-dits qui enrichissent notre compréhension des faits, gestes et pensées de son héros, de son désir de tranquillité comme de ses colères irrépressibles contre les injustices et les saletés du monde qui l'entoure.
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Les lois de la frontière

Très bel ouvrage fort bien écrit et agréable à lire sur la période du post-franquisme sur le thème de la jeunesse et du sens de la loyauté mais aussi de la liberté. Par l'auteur de "Soldados de Salamina".
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Le monarque des ombres

Au-delà d’une plongée à vif dans les combats de la guerre civile espagnole, au-delà de la plaie béante qu’elle a léguée, Javier Cercas nous invite à convoquer le souvenir de ces hommes qui ont été entrainés dans cette guerre, pour servir les intérêts de ceux qui les y envoyaient et dont la seule logique était d’exterminer l’adversaire au mépris de toutes les vies vouées au sacrifice, comme prix de leur pouvoir usurpé dans le sang, le mépris et le mensonge.

Avec une émouvante sincérité l’auteur se place à égalité avec le lecteur, dans ses hésitations à faire le portrait de ce grand oncle, Manuel Mena, mort à 19 ans, dans les combats de l’Èbre, au service de la phalange et de ceux qui allaient s’employer à écraser l’Espagne au terme de leur victoire. Dans sa quête de ce que fut la vie et la mort de Manuel Mena, il aura soin à faire surgir derrière le fantôme du passé, ce qui pouvait animer ce très jeune homme dans ses espoirs d’abord, dans ses doutes ensuite. Il réussit un portrait en négatif, aux teintes grises et douces, d’un adolescent qui s’éveille à l’ailleurs, au contact d’abord de Elado Vinuela, son maître, puis à Caceres, dans sa dernière année de lycée.

Manuel commence à se sentir à l’étroit dans son village d’Estrémadure, Ibahernando. Dans ce village de paysans, la terre divise, elle brouille les appartenances de classes, fait miroiter des illusions, pèse sur les mentalités, les cultures et les engagements politiques. Il y a ceux qui la louent aux lointains aristocrates de Madrid, et multiplient les initiatives pour vivre un peu mieux, et il y a les autres, paysans, restés pauvres, sans terre, dans une quasi servitude marquée du sceau de la fatalité. Le poids de la religion dans la conception de l’ordre social sera déterminant dans les choix à venir à partir de 1933, à Ibahernando comme ailleurs, crimes, règlements de compte, terreur au quotidien, deviendront un lot commun.

Manuel Mena fait ainsi un choix marqué par son appartenance familiale, et cet engagement, pour les siens, en fait un héros qui pourra braver la mort, une mort qui ne pourra être que « kalos thanatos », une belle mort, une mort à la hauteur de celle d’Achille dans l’Iliade. L’auteur recueille des témoignages qui sont l’occasion d’autres portraits émouvants, ces hommes et ces femmes de plus de 90ans qui disent chacun à leur manière les cicatrices de la guerre. Au fil des propos l’image de Manuel Ména change. Il devient vieux en un an de combat, il devient dans la mort, cet Achille qui réapparaît dans l’Odyssée, et qui fait l’aveu à Ulysse qu’il se préfèrerait vivant sur la terre d’un paysan que monarque au royaume des ombres.

Magnifique récit ans lequel Javier Cercas redonne vie à ce garçon et nous entraîne au feu des combats de Teruel et de l’Èbre, mais où il excelle aussi, à se mesurer lui-même à la mémoire des siens, à ses racines, à ce qu’est l’identité de chacun, faite de l’identité de tous ceux qui l’ont précédé et de ceux qui lui survivront. Il écrit dans une distance toute poétique qui le place toujours à la frontière de l’histoire, de la chronique familiale, de l’affabulation qu’il repousse mais qu’il évoque de temps en temps, dans un flirt esquissé. Il campe la vie de Manuel Ména à la façon d’un mythe éternel, celui de l’homme confronté à sa propre mort, comme le Drogo de Buzzati dans son ultime prise de conscience, comme le héros de la nouvelle de Danilo Kis, « Il est glorieux de mourir pour la patrie » dont l’exécution finale porte en interrogation le sens de sa mort.

Le vingtième siècle a ainsi eu son lot d’hommes ordinaires croyant s’engager pour une juste cause et donner leur vie en héros, dans une mort qui à leurs yeux, et bien avant qu’ils ne la regardent en face, pouvait avoir un sens. Qu’en a-t-il été de tous ces têtes à tête muets ?

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Le monarque des ombres

J'avoue avoir été déçu par ce roman avec lequel je découvre Javier Cercas. Pourquoi faut-il attendre la page 141 pour lire ce qui me semblait être la motivation essentielle de ce récit :

«Parce que nous ne sommes pas omniscients. Parce que nous ne savons pas tout. Quatre-vingt ans se sont écoulés depuis la guerre, et toi et moi on a dépassé la quarantaine, alors pour nous c'est du tout cuit, on sait que la cause pour laquelle Manuel Mena est mort n'était pas juste. Mais est-ce qu'il pouvait le savoir à l'époque, lui, un gamin sans aucun recul et qui, en plus, était à peine sorti de son village ?»

Javier Cercas ne se réjouit pas de compter parmi ses ancêtres un grand-oncle qui fut phalangiste, combattit contre les troupes républicaines et fut tué durant la bataille de l'Ebre. La plus meurtrière de la guerre civile espagnole.

C'est la raison pour laquelle, tout au long du récit il tourne autour de l'idée «dois-je ou non écrire ce livre sur mon grand-oncle ?»

Tantôt il fait oeuvre d'historien en rapportant avec la plus grand précision le détail des offensives et contre offensives des Républicains et des Franquistes.

Tantôt il se défend d'‘être un «littérateur» et se refuse à imaginer ce qu'a pu être la vie de Manuel Mena...

« Un littérateur pourrait répondre à ces questions car les littérateurs peuvent affabuler, mais pas moi : l'affabulation m'est interdite. Certaines choses, pourtant, sont avérées. Ou presque avérées.»

Tantôt il fait état de ses références littéraires en appelant à Drogo du désert des Tartares,à Hanna Arendt à Danilo Kis, à l'Achille du chant XI de l'Odyssée, ou à l'Ulysse qui lui rend visite dans la chambre des morts... héros de l'I

Tantôt il se perd dans des divagations comme lorsqu'il décrit par le menu ce voyage en voiture avec son ami David Truebas au cours duquel la radio passe une chanson de Bob Dylan ou un imitateur de Bob Dylan...

Certes il ne s'agit pas ici de défendre Manuel Mena ou de lui trouver des excuses pour son engagement aux côtés des Franquistes, mais une comparaison me vient à l'esprit, la façon dont Alice Zeniter dans l'art de perdre a traité l'histoire de son grand-père dont elle ignorait qu'il fut Harki, donc du «mauvais» côté, et la stratégie de dissimulation de son fils, le père d'Alice.

Il y a dans le roman de Zeniter un souffle, un réalisme, une absence de mise en scène de son mal-être face à ce qu'elle a découvert, que l'on ne retrouve pas chez Cercas...

Je m'attendais, naïvement peut-être, à une mise en perspective de cette histoire familiale dans laquelle il apparaît que le petit neveu d'un phalangiste peut défendre des idées totalement opposées à celle de son ancêtre.

J'attendais aussi une analyse plus profonde du mécanisme de l'engagement comme le laissait supposer ce qui est écrit p 83 et sur lequel le récit ne revient jamais :

« (...) la Phalange était un parti qui, avec sa vocation anti-système, son irrésistible aura de semi clandestinité, son refus de la distinction droite et gauche, son pari simultané et impossible sur le nationalisme patriotique et la révolution égalitaire et sa démagogie captivante, semblait être fait sur mesure pour séduire un étudiant (...) qui, à seize ans à peine, rêverait à l'occasion de ce moment historique décisif d'assener un coup brutal et libérateur à la peur et à la pauvreté qui tourmentait sa famille, et à la faim, l'humiliation et l'injustice qu'il voyait quotidiennement dans les rues de son enfance.»



Le roman hésite entre plusieurs genres ce qui à mon sens le dessert.



Dernier point à mettre au débit des éditions Actes Sud, la mauvaise qualité des reproductions des documents originaux est incompréhensible...
Lien : http://desecrits.blog.lemond..
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Le mobile

Un petit livre jubilatoire qui explore les limites entre la fiction et la réalité.

Le style est très agréable, recherché mais pas trop, et l'on se laisse embarquer avec plaisir par les mots de Javier Cercas.

C'est une histoire très bien menée, et le personnage d'Alvaro, écrivain qui trouve sa source d'inspiration chez ses voisins d'immeuble, est fouillé et parfois même amusant.

Une toute petite lecture par la taille mais de qualité...
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Les soldats de Salamine

Parce que j’ai adoré et été fascinée par ‘L’imposteur’, j’ai voulu lire autre chose de cet auteur. C’est un plaisir de retrouver son style qui me plait bien mais, comme je n’y connais rien à l’histoire politique espagnole, cela est devenu trop ardu pour moi. Je ne suis pas arriver à entrer dedans, peut-être aurai-je dû laisser passer plus de temps entre les deux ou ai-je été trop exigeante après ‘L’imposteur’ ?
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Les soldats de Salamine

Javier Cercas brouille les cartes avec ce roman de 2001, objet inhabituel qui raconte une histoire tout autant que sa genèse, le destin de Rafael Sánchez Mazas à la fin de la guerre d’Espagne, un récit historique fondé sur des faits réels, tandis que sa genèse est elle, au moins en partie, une fiction.



L’auteur se dépeint en écrivain reconverti en journaliste, qui devient obsédé par Rafael Sánchez Mazas, poète et théoricien des phalangistes espagnols. Il imagine la personnalité de l’homme, enquête sur sa vie, et en particulier sur cet épisode où il réchappe par miracle à son exécution par des soldats républicains en déroute en Catalogne, à Collell, en 1939.



Au moment où il doit être fusillé, Rafael Sánchez Mazas réussit à s’enfuir ; il croise dans sa fuite un soldat républicain anonyme qui le fixe un moment et lui laisse la vie sauve. L’histoire se cristallise donc autour de ce moment, du regard du soldat au bord de la défaite mais qui tient encore le sort de Mazas entre ses mains, autour du renversement du sort du vaincu qui redevient le vainqueur.



«-Il y a quelqu’un par là ?

Le soldat regarde Sánchez Mazas ; celui-ci fait de même, mais ses yeux embués ne comprennent pas ce qu’ils voient : sous les cheveux mouillés, le large front et les sourcils perlés de gouttes, le regard du soldat n’exprime ni compassion ni haine, pas même de mépris, mais une espèce de joie secrète et insondable. Il y a en lui quelque chose qui confine à la cruauté et résiste à la raison mais qui n’est pas pour autant l’instinct, quelque chose qui vit là avec la même persévérance aveugle que le sang qui s’obstine dans ses veines ou que la terre dans son immuable orbite ou tous les êtres dans leur immuable condition d’êtres, quelque chose qui échappe aux mots de la même manière que l’eau du ruisseau esquive la pierre, car les mots ne sont faits que pour se dire eux-mêmes, que pour dire le dicible, c'est-à-dire tout hormis ce qui nous gouverne ou nous fait vivre ou nous touche ou ce que nous sommes ou ce qu’est ce soldat anonyme et vaincu qui regarde à présent cet homme dont le corps se confond presque avec la terre et l’eau brune du fossé, et qui crie en l’air avec force sans le quitter des yeux :

-Par ici, il n’y a personne !»



"Les soldats de Salamine" c’est le renversement du sort des deux camps en cette fin de guerre d’Espagne, à l’instar de celui des Perses et des Grecs à Salamine, mais aussi celui de la narration : le livre ne prend forme finalement, que lorsque le narrateur, suite à une rencontre providentielle avec Roberto Bolaño, réussit enfin à l’écrire en donnant un nom, un corps et une voix – bref une mémoire - au soldat anonyme.



"Il est plus difficile d'honorer la mémoire des sans-noms que celle des gens reconnus. À la mémoire des sans-noms est dédiée la construction historique". (Walter Benjamin, 1940).



«Sánchez Mazas gagna la guerre, mais perdit une place dans l’histoire de la littérature.» Le soldat républicain a perdu la guerre mais gagné l’immortalité dans un grand roman.
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Terra Alta

Un polar de Javier Cercas... Voilà qui a piqué ma curiosité. De cet auteur, je n'avais lu que des livres qui, dans mon souvenir, tenaient plus de l'historiographie que du gang de la clé à molette. Je me souviens notamment des Soldats de Salamine ou de l'Imposteur qui signaient l'oeuvre d'un grand auteur fortement marqué par l'histoire tumultueuse de son pays.

Un polar, donc. Un vrai. Meurtres atroces et flic au psychisme ravagé, tout y est.

Avec, en plus, cette aura littéraire de grande classe. Un polar de luxe qui explore littérature, histoire, politique, théologie.



Bienvenue en Terra Alta qui effleure l'Ebre pour ne jamais oublier qu'elle fût le théâtre de la sanglante bataille homonyme.

Terre âpre, brûlée, sauvage, où tous se connaissent et où la criminalité frôle le zéro absolu.

C'est là que le barcelonais Melchor arrive après un haut fait héroïque qui fait de lui une cible potentielle. Hormis sa fascination pour Les Misérables d'Hugo, (et plus largement les romans du XIXe), et une colère obstinée ravalée à coups d'alcool, Melchor ne possède rien de plus.

Ce lieu sera celui de son salut. Il y rencontre l'amour, la paternité et l'amitié de ses collègues.

Jusqu'au double meurtre atroce d'un couple de vieillards richissimes...

Melchor fait une entrée fracassante dans l'univers de mes personnages littéraires favoris. Probablement un effet des neurosciences. Faire d'Hugo un maître sapiential ne pouvait que titiller ma propre épigénétique...

Quand à Cercas, son incursion dans le noir est brillante. Il nous offre ici un autre grand livre qui rappelle encore et toujours qu'en Terra Alta comme partout, c'est l'histoire qui fait les hommes et rarement le contraire.
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Le château de Barbe Bleue

Melchor Marín est de retour avec ce troisième et dernier volet de la série policière de Javier Cercas. Si vous n’avez pas lu les deux premiers tomes, vous filez en librairie sans plus attendre.

Pour les autres, autant le dire immédiatement, « Le château de Barbe Bleue » n'est pas le meilleur de la trilogie, mais il est toujours bon de revenir en Terra Alta et de retrouver Melchor.



Quelques années après l’action du tome 2, Melchor n'est plus policier : il travaille comme bibliothécaire et vit avec sa fille Cosette, aujourd'hui adolescente.

Quand elle découvre que son père lui a caché la vérité sur la mort de sa mère, elle est bouleversée et décide de partir prendre l’air à Majorque avec une amie. Malheureusement son voyage l’amène directement dans la gueule du loup. Ou plutôt des loups. Une meute d'hommes puissants au premier rang desquels un milliardaire qui s'avère être un prédateur sexuel, agissant en toute quiétude sur l'île, protégé par un réseau de corruption politique.

Face à l'inefficacité de la police, Melchor part sur les traces de sa fille, prêt à tout, même à se faire justice lui-même (ce à quoi il est déjà habitué). Il va ordonner sa vengeance avec l'aide de ses collègues qui l'ont accompagné tout au long de la trilogie.



Malgré le fait que l'intrigue soit peut-être la plus simple de la trilogie, l’intérêt du lecteur s'engage très rapidement et c'est en partie grâce au personnage de Melchor qui, après trois épisodes, est déjà parfaitement dessiné, avec ses lumières et ses ombres, et dont les actes, bien que parfois répréhensibles, ne peuvent qu’entraîner l’empathie.



Javier Cercas, via son personnage, nous parle à nouveau de son Espagne, sujet principal de son œuvre qu’elle qu’en soit la forme. Un pays gangrené par la violence, notamment envers les femmes, la corruption. le mensonge, les abus de pouvoir et la lâcheté.

À côté de ce tableau sinistre, l’auteur développe en contrepoint des personnages capables de tout risquer pour une juste cause.



Je suis bien évidemment un peu triste de dire adieu à Melchor (un Melchor pour le coup plus Jean Valjean que Javert) mais je ne dis pas adieu à Cercas. Je serais, sans aucune hésitation et quelque soit le genre, au rendez-vous pour son prochain roman.
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