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Critiques de Laura Poggioli (145)
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Trois soeurs

°°° Rentrée littéraire 2022 # 34 °°°



Krestina, Angelina, Maria Katchatourian. Assises côte à côte dans l’entrée d’un appartement moscovite, trois sœurs âgées de 17 à 19 ans attendent l’arrivée de la police, à quelques mètres du cadavre de leur père. Des années qu’il s’en prenait à elles, le jour, la nuit, sans répit. Alors, elles l’ont tué.



Laura Poggioli remonte ainsi sur onze ans le compte à rebours ayant conduit au parricide, entrant dans l’intimité de cette famille, dans l’enfer de la vie des sœurs Katchatourian. Avec empathie et sensibilité, Laura Poggioli décrit la sensation de délitement insidieux qui gagne l’âme et le corps de ces enfants puis jeunes filles, leur arrachement lent aux certitudes de l’enfance, leur combat pour affronter les sévices physiques, psychologiques et sexuels infligés par le père. Progressivement, on perçoit la mécanique tragique qui a déclenché le passage à l’acte.



Ce récit permet de tirer des fils sur la société russe contemporaine que l’auteure connait parfaitement, Française russophone amoureuse de la culture russe, ayant vécu à Moscou. Elle éclaire loin des clichés sur les lames de fonds qui traverse ce pays. L’affaire des sœurs Katchatourian ( toujours en cours judiciaire ) a enflammé la Russie, devenant le symbole des violences domestiques faites aux femmes. Les violences subies donnent-elles le droit de se soustraire à la loi ? leur acte est-il de la légitime défense ? Le pays s’est violemment divisé sur la question, d’autant que juste avant ce parricide, une réforme législative appuyée par les ultra-conservateurs et l’Eglise orthodoxe a largement dépénalisée les violences domestiques ; d’autant qu’en 2021, la Douma a validé un amendement sur la diffamation rendant passible de cinq ans de prison des accusations portées par des victimes d’abus sexuels.



« S’il te bat, c’est qu’il t’aime » dit un proverbe russe. La lutte contre les violences faites aux femmes apparait pour beaucoup comme la faillite de l’autorité morale qui aurait mené à leur perte les sociétés occidentales. Laura Poggioli propose une réflexion très riche sur le sujet, interrogeant plus largement sur la violence en Russie, pays qui a vu son territoire et son peuple dévastés par sept décennies de totalitarisme, avec un Etat soviétique qui a nié à l’individu le droit d’exister pour lui seul, laissant le foyer familial comme seul endroit où l’homme pouvait exercer son ascendant et imposer sa domination. Les statistiques actuelles estiment qu’au moins 20% des femmes russes ont signalé des violences régulières intra-familiales. Glaçant.



Ce sordide fait divers a fortement résonné Laura Poggioli, elle aussi victime de violence de la part de son compagnon russe de l’époque. Dans une forme hybride à la Emmanuel Carrère, elle explore d’autres vies que la sienne, tisse des liens avec son vécu intime, se force à se pencher sur son passé, réflexion portée par une construction alternant chapitres consacrées aux trois sœurs et chapitres centrés sur elle.



Si j’ai trouvé passionnant la façon dont l’actrice décortique ce fait divers, je suis plus sceptique quant à la forme de ces récits qui entrelacent autofiction et enquête sur un fait de société, parti pris narratif auquel on recourt de plus en plus d’auteurs avec leur «  je » qui se veut universaliste et qui souvent se révèle très nombriliste. Au départ, j’ai apprécié le « je » de Laura Poggioli car son regard de russophone-russophile porté sur la société russe permet d’échapper aux habituels clichés. Et puis je me suis agacée lorsqu’elle évoque l’emprise qu’un professeur a exercé sur elle adolescente ou les humiliations et coups portés par son compagnon russe de l’époque. J’avais juste envie de retrouver les soeurs Katchatourian. Les parallèles m’ont semblé maladroits et m’ont quelque peu dérangée tant il y a un gouffre entre la violence supportée par les sœurs et celle encaissée par l’auteure.



Et puis, en laissant maturer cette lecture, j’ai été conduite à revoir mon jugement initial mitigé. Dans ce double récit, Laura Poggioli propose un éventail de toutes les violences faites aux femmes dans le cadre domestique, des plus légères aux criminelles, poussant à une réflexion plus large sur l’intimité, le poids de la famille, ainsi que les mécanismes sociétaux qui autorisent la brutalité quelle que soit son degré et institutionnalisent la violence.
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Trois soeurs

Cet éloge de la culture russe, je pourrais le reprendre à mon compte. Depuis longtemps attirée par l’histoire, séduite par la langue que j’ai même étudiée pendant quelques années, frissonnant au son des choeurs de chants traditionnels.



Je ne fais pas l’amalgame entre la Russie et le despote fou qui pourrait tout faire exploser. Le peuple russe ne partage pas forcément sa mégalomanie , ou lorsqu’il le fait c’est formaté par la propagande . Donc oui, même en ces temps troubles on peut aimer la Russie.



Mais il ne s’agit pas non plus d’un territoire de rêve, et ce peuple qui a beaucoup subi reste ancré dans des traditions que ne partagent plus les occidentaux, en particulier et c’est là le sujet sur le statut de la femme. « S’il te bat c’est qu’il t’aime » « un aphorisme en forme de passe-droit auréolé d’une culture ancestrale. Or en Russie les violences conjugales sont considérées comme normales, les femmes qui osent signaler leur détresse aux autorités n’obtiennent aucune écoute et encore moins de possibilité de recours.



Le fait divers sur lequel se construit le roman est récent, 2019. Trois sœurs, comme un écho au titre de Tchekhov , ont tué leur père qui leur faisait subir depuis des années inceste, torture et autres humiliations. Au su et au vu de l’entourage : les parois sont minces dans les appartements staliniens.



Outre son amour pour la culture russe, l’auteur connaît aussi ce qu’il en coûte de tomber amoureuse de celui qui au départ méritait le titre de prince russe. Et l’auteur analyse avec finesse les processus de l’emprise et les difficultés de sortir de ses situations dangereuses une fois que tout s’est mis en place. D’autant que le phénomène se reproduira pour elle dans sa vie de couple.



Le discours construit sur un champ contre champ est solidement étayé et on souhaite que les femmes russes puissent aussi un jour affirmer leur place et que les autorités reconnaissent l’iniquité de telles pratiques avec l’assentiment de toute une structure judiciaire.



320 pages L’Iconoclaste 18 Août 2022


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Trois soeurs

Un an plus tôt, on avait dépénalisé les violences domestiques. Les peines déjà minimes étaient passées à plus de peines du tout. Ou presque. Désormais un mari violent ne risquait qu'une simple amende pour des coups et blessures sur sa femme et ses enfants. le pouvoir russe estimant que la libération de la parole des femmes victimes de violences avec le mouvement MeToo n'était qu'une faillite de l'autorité morale dans les sociétés occidentales. Dans une Russie qui a déjà la violence ancrée au plus profond de ses gènes, cette dépénalisation était à l'évidence un blanc seing donné à tous les tyrans domestiques. Ce qu'était le père des trois soeurs. Un homme violent qui avait toujours tabassé sa femme et ses filles, et que ces dernières ont fini par tuer pour que cesse leur supplice.

Mêlant sa propre vie à celle des trois soeurs, Laura Poggioli, qui jeune étudiante a vécu une relation destructrice avec un moscovite violent, reconstitue l'histoire vraie d'adolescentes jugées par la société même qui a permis qu'elles soient pendant des années les victimes d'un homme qui se croyait tout permis. La société patriarcale russe de Poutine qui a donné en quelque sorte aux hommes quasiment le droit de vie ou de mort sur les femmes. Sans que personne ou presque s'en émeuve. Effrayant.
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Trois soeurs

En ce jour où le tyran russe s'assure peu glorieusement un mandat de plus, ayant éliminé toute opposition par le meurtre ou la "dissuasion musclée", je me décide enfin à poster mon retour sur ce petit livre terminé il y a une dizaine de jours. Et puis sa couverture est très rouge, tout comme celle de "Rita", chroniqué un peu plus tôt.

Attention, quand je dis "petit livre", rien à voir avec sa qualité, mais avec le format et le nombre assez peu élevé de pages (250, avec un texte resserré en milieu de page et de grandes marges).



L'histoire, vous en avez peut-être déjà entendu parler : les soeurs Khatchatourian : Krestina, Angelina et Maria, âgées de 17, 18 et 19 ans ont tué leur père en 2019 après des années de sévices, alors que tout l'entourage connaissait leur terrible situation, mais voilà, en Russie la violence familiale et conjugale n'est pas pénalisée, on peut battre femme et enfants, les torturer ou en abuser, leurs plaintes ne seront pas entendues. Pire : elles peuvent être accusées de diffamation et se retrouver en prison...



Laura Poggioli a choisi de raconter cette histoire vraie en retraçant les prémisses qui ont abouti à cette nuit de trop où les soeurs ont fini par se délivrer de leur bourreau. Elle remonte 11 ans en arrière et entrelace le récit des malheurs de la famille Khatchatourian avec ses propres séjours à Moscou. En effet, passionnée par la langue et la culture russe, elle a effectué une partie de ses études sur place, et y a également rencontré son premier amour, Mittia. Pourquoi ce choix, qui m'a tout d'abord surpris (et un peu déstabilisée) ? Parce qu'à travers cette relation, elle a découvert la réalité du quotidien de nombreuses femmes russes, qui lorsqu'elles sont battues ou maltraitées n'ont bien souvent aucun recours, n'étant pas entendues par la police et la justice qui donneront systématiquement raison à l'homme. Elle-même a subi la violence de Mittia, et n'a pas su se rebeller, pensant même qu'elle était fautive.



Cette attitude m'a d'abord énervée, mais elle explique bien le mécanisme pernicieux de cette "culture" patriarcale où elle a baigné pendant des années et qui l'a comme anesthésiée. En évoquant son propre vécu parallèlement à celui des soeurs, elle met en évidence plusieurs facettes de l'emprise exercée par les pères, maris, petits amis ou cousins sur les femmes de leur entourage. L'autorité russe estime que l'attitude occidentale (mouvement #meetoo par exemple) est synonyme de faiblesse et veut montrer que "chez eux, on sait se tenir, et ce qui concerne la famille reste chez soi". Mais le procès des soeurs Khatchatourian aurait peut-être pu ébranler certaines certitudes, puisqu'aux dernières nouvelles (avant l'envahissement de l'Ukraine), la légitime défense était envisagée, seul cas de figure qui pouvait leur éviter une condamnation à la prison. A l'heure actuelle bien sûr, on n'en entend plus parler, on sait seulement que la plus jeune a été reconnue irresponsable, et a pu rejoindre sa mère. A l'origine, la qualification de meurtre en réunion avec préméditation devait leur valoir une peine de 20 ans de réclusion...



J'ai apprécié les nuances de l'auteure sur son expérience en Russie, elle sait mettre aussi en évidence les bons côtés de la vie à Moscou pour les étudiants (attention, on parle bien de la vie avant la déclaration de guerre à l'Ukraine, le livre a été terminé juste avant), la richesse de la culture russe.

Par contre j'aurais préféré que le livre soit plus centré sur la vie de la famille Khatchtourian, le parallèle avec les violences subies par l'auteure me semble quand même un peu disproportionné, sans vouloir nier sa souffrance. Mais elle évoque aussi d'autres épisodes de sa jeunesse ( en France) qui pour moi n'ont pas leur place ici. mais c'est son premierlivre, on retiendra son mérite d'avoir mis en lumière un drame bien représentatif de ce qui se passe encore bien trop souvent derrière les portes fermées des foyers russes.
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Trois soeurs

Ce roman est celui de toute l’horreur des lois russes en matière de violences conjugales. En effet, durant les années 2000, le système législatif russe a grandement facilité la perpétration de violences à l’égard des femmes en rendant en quelque sorte « légal » le fait de lever la main sur sa compagne, de la battre, voire même de la tuer.



Avec un compte à rebours de 11 ans, c’est une véritable plongée dans la société russe que nous emmène faire l’autrice, Laura Poggioli, ayant elle-même habité ce pays, qui occupe encore plus une place prépondérante sur le devant de la scène internationale depuis février 2022.



Dans un pays où l’un des dictons dit « s’il te bat, c’est qu’il t’aime », l’homme occupe une place centrale dans le couple, dans la famille, dans la société. Les femmes ne sont guère que des êtres inférieurs où leur parole n’est que peu entendue. Alors qu’en Europe, nous entendons déjà quotidiennement que trop de féminicides ou de cas de violences domestiques, pas un jour ne passe en Russie où des femmes en sont encore plus sujettes.



Associant son vécu personnel d’un pays qu’elle connait bien (mais surtout victime d’un compagnon violent) à celui des sœurs Khatchatourian, l’autrice nous conte ce soir du 27 juillet 2018, où les 3 sœurs n’ont eu d’autre choix que de tuer leur père après avoir été victimes de violences physiques, sexuelles et psychologiques durant de très longues années.



Ce terrible fait divers a ouvert les yeux et conscientiser de nombreux russes. Il a, par ailleurs, provoqué un soulèvement de la société contre un système légal bien trop laxiste. Abordé comme une enquête journalistique, ce thème central est finement travaillé et bien documenté.



J’ai beaucoup apprécié ce livre malgré la dureté de ce qui est rapporté. Pour ma part, il s’agit d’un livre déjà très réussi pour un premier roman. A aucun moment, je n’ai trouvé certaines petites anicroches qu’il aurait été en quelque sorte normal d’y constater au fil des pages. Il est à la fois porté par une plume déjà bien aboutie ainsi que par une force incroyable du fait de la touche intimiste issue de l’histoire personnelle de l’autrice. J’espère très fort que le talent de Laura Poggioli pourra se confirmer aux travers d’autres écrits.



Je vous le conseille vivement et il est certain qu’il est un des livres marquants de 2022.
Lien : https://www.musemaniasbooks...
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Trois soeurs

J'avais repéré une critique sur Babelio sur ce bouquin. J'ai vu que ma bibliothèque l'avait, mais je ne l'ai pas emprunté tout de suite. J'aime oublier la raison pour laquelle un livre me tentait, histoire de repartir sans idées préconçues.

Comme à mon habitude, je n'ai pas lu le 4e de couverture.

Je commence le livre que je pense être un roman..... pas vraiment. Un récit en fait, sur la condition des femmes dans un pays, la Russie, où existe un proverbe qui dit "S'il te bat, c'est qu'il t'aime". Qu'ajouter après cela ?

.

L'autrice a vécu dans cette Russie qu'elle aime. Elle a aimé. Elle a été aimée. Et donc elle a été battue. En parallèle de ce témoignage, elle va nous raconter l'histoire (non encore finie) de trois soeurs. Trois soeurs régulièrement battues, humiliées, violées, martyrisées par leur père. Trois soeurs qui vont décider de se faire justice elles-mêmes. Trois soeurs qui vont faire la une des médias russes.

Parce que cette histoire révèle ce qui est du ressort de la famille et qui doit donc être tu, mis de côté. Là on est face à un meurtre. Un meurtre commis par trois jeunes filles. Un parricide.

.

Attendez vous à un récit dur, mais pas du tout larmoyant car l'autrice s'attache à raconter ces jeunes filles, mais aussi s'interroge sur la société russe.

Pour rappel : les actes de violence contre son conjoint sont dépénalisés en Russie. Bin oui c'est juste une marotte de l'Ouest qui contamine la pure société russe !

.

Maintenant il nous faut attendre la décision de la Justice russe concernant ces trois soeurs....
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Trois soeurs

Après des années de violence, de brimades, d’insultes et de viols à répétition, après des appels au secours maintes et maintes fois ignorés, trois sœurs décident de se faire justice elles-mêmes et de mettre fin à leur calvaire en assassinant leur bourreau qui n’est autre que leur père…

Le fait divers se produit en novembre 2019 en Russie, à Moscou plus précisément, et va défrayer la chronique en divisant le pays tant il remet en cause un héritage socio-culturel basé sur le règne du patriarcat et de la domination masculine. Dans un pays où l'on considère que “S’il te bat, c’est qu’il t’aime” (Proverbe russe), faire acte de résistance et rendre les coups peut être jugé inacceptable et faire de vous, non pas la victime mais le bourreau…



Avec l’histoire de ces “Trois sœurs”, Laura Poggioli nous offre un récit-enquête que j’ai trouvé passionnant. Cette russophile française de 37 ans nous immerge totalement dans ce pays à l’histoire complexe, profondément marqué par son passé communiste, sa culture patriarcale et des décennies de totalitarisme. Grâce à elle, nous pénétrons dans l’intimité des sœurs Khatchatourian, dans leur enfer. L’autrice démêle avec beaucoup de finesse et de sensibilité tout ce qui a conduit à ce dénouement funeste. Le procès ayant toujours cours aujourd’hui, elle nous ouvre les portes de la justice russe et nous fait voir dans son ensemble la complexité de l’affaire.



Parallèlement au fait divers, elle nous dévoile son expérience personnelle après plusieurs années passées en Russie dans le cadre de ses études. Elle nous raconte son histoire d’amour avec un homme qui la maltraite et la rabaisse après l’avoir d’abord portée aux nues et interroge sur la place de la femme dans un pays où “les victimes d’abus sexuels risquaient désormais jusqu’à cinq ans de prison pour avoir dénoncé publiquement des crimes ou du harcèlement sexuels” (p.267).



Pour un premier texte, Laura Poggioli signe un récit extrêmement fort et nécessaire pour dénoncer la violence faite aux femmes. C’est tour à tour bouleversant, glaçant et révoltant, mais habilement mené et particulièrement addictif! Une très belle découverte en ce qui me concerne!
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Trois soeurs

Laura Poggioli nous offre ici un roman assez incroyable dans lequel se juxtaposent trois visions pointant du doigt la domination masculine et la violence qui règne dans un silence quasi absolu dans certains foyers russes. Ici, l’auteure décortique le quotidien noir et sans aucun échappatoire possible des trois soeurs Khatchatourian. Elles sont soumises à la volonté de leur père, elles sont ses esclaves et ses souffre-douleur. L’auteure croise habilement leur histoire avec leur inculpation et leur jugement, en montrant bien que la Russie entière se déchire à ce sujet. Et pour donner plus de profondeur à son histoire, elle ajoute sa propre histoire personnelle, sa relation avec son premier grand amour qui est violent et qui l’humilie…



L’intérêt de ce livre est de mettre en lumière la condition de la femme en Russie. Les exemples donnés dans le livre laissent à penser que la violence domestique est, en Russie, un mode de fonctionnement courant. Elle est même illustrée par un proverbe : « S’il te bat, c’est qu’il t’aime », qui montre une fois encore le machisme qui peut être présent dans l’intimité. L’emprise patriarcale très – et trop ! – importante dans de nombreux foyers, semble être banalisée. Bien qu’une évolution sur le sujet semble être en marche, l’auteure nous livre ici un cri de détresse sur des événements courants et qui montrent une fois encore que l’obscurantisme est à nos portes !



En revanche, là où je suis un peu sceptique, c’est concernant sa tentative d’explication concernant le retard de la Russie au sujet des violences faites aux femmes. Je trouve que se servir des régimes totalitaires et plus particulièrement du stalinisme est vraiment trop simpliste comme conclusion et ça mériterait une étude plus approfondie…



Malgré tout, l’histoire de ces trois sœurs me restera en mémoire. Solidement documenté, ce livre est brutal, percutant et captivant, autant par ses mots que par les faits qu’il met en lumière et qu’il dénonce. Sa lecture peut également être une bonne manière de montrer à certaines femmes russes qu’elles ne sont pas seules dans leur lutte contre cette violence institutionnalisée.
Lien : https://ogrimoire.com/2022/1..
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Trois soeurs

C’est un premier roman au thème particulièrement fort : en Russie, un mari peut frapper sa femme, lui faire souffrir mille morts sans que la société ne s’en émeuve. D’ailleurs il existe une loi qui l’affirme et confirme les violences domestiques. Ce qui se passe au sein d’une famille relève de l’intime et ne concerne pas la société.



L’autrice s’intéresse au cas de trois sœurs qui ont assassiné leur père après avoir subi pendant des années ses hurlements, ses coups et ses relations incestueuses. Leur affaire a partagé l’opinion russe, certains considérant qu’elles n’auraient jamais dû tuer ce père, présenté comme aimant par un cousin, que s’il était aussi violent qu’elles le disaient, elles auraient dû partir. Visiblement l’emprise psychologique est une notion ignorée en Russie. D’autres ont pris leur défense, leur avocat notamment qui s’est battu pour qu’on leur accorde une liberté provisoire, qu’on leur donne un procès équitable et que la justice ouvre enfin un dossier sur les violences commises par le père. Cette affaire permet ainsi à l’autrice d’interroger les relations hommes/femme en Russie et sa propre histoire. C’est un roman que je recommande.



Challenge Multi-défis 2023

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Trois soeurs

Un roman qui ressemble aussi à une enquête journalistique, un documentaire. Mêlant les souvenirs de ses quelques mois passés en Russie quand elle était étudiante avec les circonstances qui ont précédé le meurtre d'un homme par ses trois filles, Laura Poggioli tisse les liens de la violence domestique, de ce que sont l'intimité, l'humiliation, le poids des histoires familiales et des systèmes qui débride la brutalité. C'aurait pu être hasardeux, ces parallèles autobiographiques. Et ça ne l'est pas. Comme une invitation à comprendre l'universalité des traumatismes malgré la particularité de chacune de ces histoires, de chacune de ces cultures. Bien sûr, désormais la Russie n'est plus seulement belliqueuse à l'intérieur de ses frontières et les sévices que son armée exporte en Ukraine font résonner un peu plus gravement encore la réflexion que contient Trois soeurs. Il y a quelque chose de tragique à sentir tout un peuple prisonnier d'une violence qui, si elle n'est jamais consubstantielle, imprègne tellement les relations qu'elle paraît impossible à canaliser. Pourtant, le parallèle qui est fait avec la manière dont bons nombres de foyers français, (d'associations ou d'églises, là c'est moi qui rajoute) ont pu être le lieu d'abus montre qu'un moment advient où ce qui paraissait systémique n'est plus acceptable, que la société dans son ensemble a le pouvoir de se réformer. A condition de détenir toujours la liberté d'expression, de s'informer à des sources fiables, de recevoir une éducation solide et ouverte de disposer de son corps librement ... c'est un autre débat...

Quoiqu'il en soit, aussi dur qu'il soit, j'ai beaucoup aimé ce récit tant dans l'originalité de sa forme que pour la subtilité et la justesse des questions qu'il pose.
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Trois soeurs

Une nuit d’août 2018, dans un petit appartement de la chaussée Altoufievo, dans la banlieue nord de Moscou, un homme meurt. Il succombe aux coups de couteau, de marteau, aux gaz d’une bombe poivrée, donnés par ses trois filles. Les sœurs Khatchatourian ont mis fin à des années de violences, d’humiliations, de privations avec ce geste irréparable. C’est parce qu’elles n’ont jamais trouvé une main tendue pour les aider, un adulte responsable pour les retirer de ce foyer destructeur, qu’elles ont écrit leur propre fin de l’histoire…



Bien au-delà d’un simple fait divers, le roman de Laura Poggioli est une véritable plongée dans la société intime russe. Cette histoire glaçante, insoutenable, reflète l’injuste et triste image de la femme au sein de nombreux foyers de ce pays.



« S’il te bat, c’est qu’il t’aime »… Voici le proverbe qui se murmure, qui se faufile, qui s’impose. Un homme qui frappe, qui humilie, qui asphyxie, n’a rien d’exceptionnel. C’est aux femmes d’endurer et de se taire. Alors l’histoire des trois sœurs déclenchent le débat, et le combat.

Il y a ceux qui clament leur innocence. Ce n’est qu’un cas de légitime défense. Et il y a ceux qui crient à la préméditation, qui ne voient qu’une justice illégitime.



Mais les faits sont là. Krestina, Angelina et Maria ont appelé à l’aide. En silence, lorsqu’on soignait leurs hématomes à l’hôpital, mais aussi avec leurs mots quand elles suppliaient que leur père ne revienne pas à la maison…



Symbole de corps épuisés par les coups, par les cris, par la peur et la honte, elles sont avant tout un cri de courage et les ailes blessées d’une liberté qu’on a volé…



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Trois soeurs

Je remercie les Editions L'Iconoclaste, pour leur confiance à mon égard.

Un roman révoltant, impensable, une histoire bouleversante sur les conditions des femmes en Russie. Le courage de trois sœurs de tuer sauvagement leur père, , mettre fin aux violences, aux viols, , leurs conditions de vies misérables, des humiliations quotidiennes. La culture soviétique est loin de notre vie , de nos mœurs occidentales, les femmes jouent un rôle important autant que les hommes, les violences conjugales ou autres sont répressifs d'incarcération.

En Russie la violence n' est pas reconnu ,rien ni personne peuvent revendiquer ces actes barbares., une véritable remise en question ,sur la condition féministe. Ces trois sœurs ont voulu se libérer du fardeau de leur tortionnaire, leur père qui leur faisait subir des horreurs depuis des années, tout le monde le savait, tout le monde se taisait, c'était tout à fait banal cela fait parti des gènes , d'une normalité, dans ce pays sectaire.

L'auteure nous montre comment ces femmes sont détruites psychologiquement et physiquement. Elles vivent dans une incompréhension totale.

Ce livre est un documentaire, un témoignage, pour moi, la réalité prend le dessus de la fiction. La plume de l'auteure est percutante, violente. La lecture est captivante malgré la brutalité , la douleur du sujet..

Un livre écrit avec justesse sans filtres.

Un livre poignant, qui nous met dans le questionnement
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Trois soeurs

"En Russie, il y avait ce proverbe qui disait « Biot - znatchit lioubit - s'il te bat, c'est qu'il t'aime », et les proverbes, c'est comme le passé : quand on ne sait plus où on va, on s'y agrippe pour se persuader qu'on est du bon côté."



Dès les premières pages, l'ambiance est posée dans ce premier roman qui est clairement un true crime, et qui va nous emmener dans les coulisses honteuses des violences domestiques en Russie. Il s'agit ici de l'une des rares affaires médiatisées qui a ébranlé l'opinion publique d'un pays jusque là apathique : le meurtre de Mikhaïl Katchatourian à l'été 2018 par ses trois filles de 17, 18 et 19 ans.



Pendant des années, avant et après le départ de leur mère, cet homme les a torturé psychologiquement et martyrisé physiquement, et quand les brimades et les coups n'étaient pas assez, quand l'alcool, la frustration et la folie se conjuguaient, c'était de leur innocence que cet ogre se délectait. Jusqu'au soir de trop où, épuisées, à bout, elles ne virent qu'une seule issue dans un pays où tout le monde fermait les yeux depuis des années : il fallait tuer le monstre.



Les chapitres consacrés à l'affaire dite des trois sœurs sont passionnants, ils révèlent sans fard ce fléau dans un pays où une chape de plomb vient étouffer tout espoir de changement. L'histoire est pourtant entrecoupée du récit des années que l'autrice a passé à Moscou, elle-même sous l'emprise d'un homme violent, et j'ai eu l'impression que l'histoire des autres n'était qu'un prétexte pour parler de soi, comme les auteurs français savent si bien le faire.



📖 Trois soeurs de Laura Poggioli a paru le 18 août 2022 aux éditions de l'Iconoclaste. 320 pages, 20€.



🔗 Service de presse adressé par l'éditeur.
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Trois soeurs

J'ai vu ce livre sur divers compte livre et j'avoue que la thématique m'a attirée ainsi que le fait que l'on parle de la Russie notamment avec ce proverbe qui m'a tout de suite interpellé il est d'ailleurs noté sur la quatrième de couverture "" S'il te bat, c'est qu'il t'aime ".



Ici il est question de trois jeunes soeurs russes qui ont tuées leur père, l'auteur nous narre leur vie avant qu'elles en arrivent à faire cette acte et nous fait un parallèle avec la situation de la femme actuellement en Russie.



Le récit est court mais vraiment percutant à mes yeux et j'ai d'ailleurs du faire des pauses dans mon récit, la lecture n'est pas avec de multiples détails sur le meurtre de ce père mais plus glaçant sur la situation encore actuelle des femmes.



Car dans l'intimité avec leurs conjoints ou au sein de la famille comme dans l'histoire des soeurs Katchatourian, les femmes n'ont pas beaucoup de recours pour se sortir de ce type de situations.



L'auteur nous fait d'ailleurs un parallèle très habilement mené avec un histoire d'amour qu'elle a d'ailleurs elle-même vécu dans ce pays également.



Un récit dur mais nécessaire à mes yeux pour que les choses puissent enfin bouger et qui démontre bien l'emprise des bourreaux sur leurs victimes.



Pour un premier roman c'est bluffant et je suivrai les prochaines parutions de l'auteur.
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Trois soeurs

« S’il te bat, c’est qu’il t’aime », affirme un proverbe russe.



IMPENSABLE.



Laura Poggioli revient sur un drame familial qui s'est déroulé à Moscou, il y a quelques années : trois soeurs violentées psychologiquement et physiquement par leur père. Une relation criminel-victimes dans tous les aspects de la vie quotidienne.



« Mikhail Sergueïevitch Khatchatourian était grand, large, imposant, les yeux noirs perçants, le ventre débordant. Il était terrifiant, et les clichés de lui abondamment partagés en ligne entretenaient son image d'ogre. »



Le 28 juillet 2018, elles l'assassinent.



Si vous êtes, en ce moment, plutôt lecture récréative, passez votre chemin. Revenez-y plus tard, si le coeur vous en dit ; car l'écriture vaut le détour. Et le sujet forcément, fait de cette lecture une lecture nécessaire.

Elle est difficile, certains passages sont glaçants. Le système judiciaire russe est accablant, cruel, lamentable envers les femmes. Je suis passée par une multitude d'émotions, de la colère à la tristesse, de l'incompréhension à l'effroi.



« « Toutes les familles heureuses se ressemblent, mais chaque famille malheureuse l'est à sa façon. » Je connaissais la phrase liminaire d'Anna Karénine par cœur depuis l'adolescence mais j'en mesurais maintenant la portée. »



Laura Poggioli parsème et enrichit le récit de ce fait divers de sa propre expérience. J'ai trouvé son témoignage très à propos, courageux, il apporte, mon avis, à de la puissance à cette bouleversante lecture.



« Je m'étais dit que je devais raconter cette histoire, mais pas seulement. Je voulais raconter tout ce qui foutait le camp en Russie, sans mettre de côté tout ce que j'y aimais, tout ce qui me remuait, tout ce qui était beau au-delà des préjugés et des on-dit. »
Lien : https://seriallectrice.blogs..
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Trois soeurs

La prison plutôt que la maison.

Voilà ce que les sœurs Khatchatourian pensent après des années de calvaire auprès d'un père monstrueux. Les sévices subis par ces jeunes filles deviennent de plus en plus intolérables jusqu'à un point de non-retour qui se solde par un assassinat.

L'emprise de Mikaël ne s'étend pas uniquement à ses filles mais aussi à leur mère Aurélia qui ne peut se retourner auprès des instances de l'Etat. Celle-ci refusent de s'ingérer dans l'intimité du foyer même pour maltraitance.

On apprend donc qu'en Russie la violence domestique est très répandue et pas combattue.

D'ailleurs les femmes n'ont aucune structure pour se réfugier et se protéger. Ni police, ni justice et même pas l'église n'interviennent dans ces foyers anxiogènes.

L'homme russe exerce son pouvoir dans l'intimité dans un pays où l'espace public est source de suspicion, de surveillance permanente et de délation.

Laura Poggioli souligne ici un fait divers qui a fait grand bruit en Russie tout en nous livrant son propre parcours de femme battue quand elle vivait avec le russe Mitia.

Insultes, humiliations, coups, la violence dégénère tandis que Laura se découvre des comportements à risque.



Cette alternative entre témoignage personnel et cette affaire des trois sœurs donnent un ouvrage certes au style peu recherché mais met tout de même en lumière les dégâts psychologiques que le bourreau fait subir à ses proies.

Cet aspect sombre de la Russie avec un patriarcat violent m'a révolté: tant de souffrances et de vies gâchées par des hommes galvanisés par le pouvoir.

J'ai ressenti aussi de la révolte devant les institutions qui ferment les yeux sur les 12000 femmes russes qui en 2013 ont subi des violences conjugales.

Grâce à l'auteure nous voyons la domination d'un patriarcat odieux dénué d'empathie.



J'avoue que parfois j'ai été irritée par l'étalage de l'intimité de Poggioli mais elle a le mérite de donner une voix aux femmes russes soumises à des brutes.
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Trois soeurs

C'est un premier roman impressionnant que propose Laura Poggioli. J'ai déjà eu l'occasion de dire que j'aimais beaucoup les choix de publications des éditions de l'Iconoclaste et c'est le cas une fois de plus.

J'ai été bouleversée par ce livre très bien construit qui dénonce les violences domestiques et surtout l'impunité des coupables de ces atrocités en Russie.

Laura Poggioli base son roman sur une histoire vraie, l'affaire des trois soeurs Khatchatourian, Krestina, Angelina et Maria, âgées respectivement de 19, 18 et 17 ans en 2018. On sait dès le début qu'elles ont tué leur père. Au fur et à mesure on va apprendre pourquoi ce patricide mais pas comment elles ont fait. On le saura à la fin, ce qui fait monter la tension.

Il faut avoir le coeur accroché pour lire tout ce qu'elles ont subi ainsi que leur mère, les douleurs physiques et psychiques infligées par le père depuis l'enfance.

Ce qui est terrible c'est la violence institutionnalisée dans la Russie du 21ème siècle car les plaintes et les témoins sont nombreux mais la police ne fait rien et ne veut rien savoir parce que cela se passe à l'intérieur du foyer.

Laura Poggioli rend son roman passionnant en faisant un parallèle avec sa propre histoire, son rapport à la Russie où elle a séjourné durant ses études et où elle a des attaches. Très amoureuse d'un jeune russe brillant, elle a subi des humiliations et même des coups mais n'a jamais rien dit. Aujourd'hui, cela la renvoie à des secrets de famille et à sa prise de conscience du fait que les violences domestiques sont un fléau souvent passé sous silence et même si les choses ont évolué aujourd'hui avec le mouvement #MeToo, ce n'est pas le cas partout.

Ce qu'il faut signaler également c'est sa tentative d'expliquer le retard de la Russie dans ce domaine, même si je ne partage pas entièrement ses conclusions liées à l'histoire du pays et au stalinisme, une Russie dans laquelle il n'y a pas ou peu de violence dans l'espace public et une frontière étanche avec la sphère familiale où les violences sont communes.

J'ai beaucoup aimé la façon dont l'autrice remonte le temps pour raconter ces histoires croisées et la qualité de l'écriture surtout pour un premier roman.

J'ai lu ce livre en avant-première en tant que jury du 21ème Prix du roman Fnac pour la rentrée littéraire 2022 et je suis enchantée de cette découverte.



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Trois soeurs

Ce livre n'est pas un roman, moins encore comme j'ai pu le lire, « Un éloge à la culture russe ».

Non ! Ce livre raconte, d'une écriture très fluide, un fait divers terrible qui s'est passé en 2018 en Russie.

Une sordide affaire de violence domestique et de meurtre, qui fera ressurgir violemment du coeur de l'auteure, des souvenirs qu'elle avait enfoui au plus profond d'elle.

*



Laura Poggioli avec une grande sensibilité et une grande finesse, m'a fait pénétrer dans deux intimités, la sienne et celle de la famille Khatchatourian et son malheur.



L'auteure lève un pan de voile pudique sur sa vie d'étudiante et nous fait découvrir des facettes de la société russe, celle où elle a vécu lorsqu'elle est arrivée dans ce grand pays.

Une Russie si différente de la France, marquée par des décennies de communisme et de totalitarisme. Profondément blessée dans l'âme, par le souvenir transgénérationnel des répressions, des grandes terreurs, des dénonciations, des purges et des goulags staliniens dont des millions de patriotes furent les victimes.

Une Russie qui pensait avoir perdu sa dignité dans les errances des années Eltsine.

Une Russie qui rejetait en bloc toutes références, tous exemples qui venaient des pays occidentaux.

Une Russie qui gardait sa culture patriarcale toute puissante, en défendant ses valeurs traditionnelles et une vision très rigoriste de la famille.

*



Nous sommes en 2002, Laura Poggioli à 17 ans, elle est belle, elle est heureuse, lorsqu'elle débarque chez sa correspondante Alina, pour s'installer comme étudiante à Moscou.

Laura Poggioli a étudié la langue russe, elle aime ce pays et sa culture bien particulière.

Avec le temps, elle se fera des amis et rencontrera Mitia, un étudiant venu de Sibérie dont elle tombera amoureuse.



Mais le prince russe, doux et blond, comme le nommera Laura Poggioli dans son livre, montrera bientôt son vrai visage. Celui d'un jeune homme frustré, envieux, jaloux et colérique. Un méchant manipulateur qui lui fera subir des violences, des humiliations, des offenses, des vexations.

*



C'est en 2019 lorsque l'auteure retourne en Russie, qu'elle découvre la triste affaire des trois soeurs Khatchatourian qui ont tué leur père l'année précédente.

Laura Poggioli va alors très vite s'intéresser à ce meurtre et essayer de comprendre qu'elles étaient les raisons pour que ces trois soeurs soient passées à l'acte.



Et c'est par cette enquête, que l'auteure verra son passé refaire surface, ravivant brutalement cette liaison houleuse, nocive et violente qu'elle avait eu avec Mitia, sept ans plus tôt.

Laura Poggioli découvrira avec stupeur et effroi, l'enfer que Mikhail Khatchatourian, un père alcoolique, inactif et colérique, a fait subir à sa femme mais aussi à ses filles.



Ce monstre qui avait même séjourné dans un hôpital psychiatrique, se montrait en public comme une personne pieuse, un père respectueux et un mari aimant.

Mais derrière cette façade mesquine se cachait un bourreau impitoyable qui a fait vivre à ses trois filles, des années d'inceste, d'humiliations, de tortures physiques et morales.



Tout le monde savait mais se taisait. C'était dans la culture russe que les familles règlent leurs problèmes entre membres et évitent de laver leur linge sale sur la place publique.

*



Le procès de Krestina, Angelina et Maria Khatchatourian suscita beaucoup de polémiques.

Le meurtre des trois soeurs était devenu pour certaines rares associations, le symbole de la lutte contre la violence faite aux femmes. Il faisait débat.

Pour beaucoup de russes, c'était les soeurs les seules coupables, à une époque où les violences domestiques avaient été dépénalisées en 2017, pour disait-on en Russie, la stabilité des familles et de la société.

*



Le livre en double récits de Laura Poggioli m'a bouleversé par sa propre histoire et m'a touché sur la complexité sociétale de la Russie contemporaine.

L'auteure a démontré entre autres, la place très restreinte qui était donnée aux femmes dans la société russe. L'auteure a également pointé le rapport de l'intimité où beaucoup de familles entières vivent dans une seule pièce, en asphyxie, dans des appartements communautaires.

Chacune et chacun cherchant sa place, un peu de son privé et de son espace.

*



Un énorme merci Laura Poggioli que j'ai rencontré au festival Clameur(s) à Dijon et à l'occasion de cette rencontre littéraire, très intéressante.

Et merci pour sa grande gentillesse, pour notre échange et pour sa dédicace.

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Trois soeurs

Trois soeurs de Laura Poggioli (L'iconoclaste 251 Pages )







Une amie m'a prêté ce livre.



Je ne connaissais pas son sujet.



Je suis tombée dans l'enfer des femmes battues. En France en 2022 ,104 femmes sont mortes sous les coups de leurs conjoints et ex conjoints



Janvier, février 2023 :16 sont décédées. En Russie la police se déplace juste quand il y a un mort.



Elle ne se mêle pas de la vie de famille.



Une jeune française part pour ses études en Russie et tombe folle amoureuse d'un jeune russe, Mitia. Leur couple va vit se fissurer;



Il va vite l'insulter et la tabasser. Elle va lui trouver des excuses et subira.



En parallèle l'auteur nous narre l'horrible vie de trois soeurs, battues, violées par leur père.



La mère après des années de violence est partie pour ne pas mourir. Un esclavage qui durera des années jusqu'à un dénouement dans le sang.



Celles qui ont subi les coups et menaces peuvent comprendre ces femmes.



En France heureusement les lois ont mieux protégé les femmes contre ces monstres, ces malades mentaux qui prennent du plaisir à frapper sous l'emprise de la colère, la jalousie ou l'alcool.



En Russie leur mentalité patriarcale n'en est pas encore arrivée à protéger les épouses, les enfants.



" S'il te bat c'est qu'il t'aime " disent ils en russe. L'alcool là-bas est un fléau.



Mais le calvaire de trois soeurs va diviser les mentalités sous Poutine. Malheureusement Il y a encore beaucoup de chemins à parcourir pour arriver aux progrès de la France.



Ce témoignage m'a bouleversé et j'ai ressenti de la haine.



Je crois que si j'avais pu, j'aurais peut être aidé à tuer ce monstre vu que la justice ne faisait rien.



Un livre que je ne suis pas prête à oublier.



Mireine



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Trois soeurs

Elles sont trois, elles ont de 17 à 19 ans, elles sont sœurs, ce sont les filles de Mikhaïl Khatchatourian. Lorsque la police arrive, Krestina, Angelina et Maria se tiennent près du cadavre de leur père sur le palier qui mène à leur appartement. Accident ou assassinat, aucun doute n’est permis puisqu’elles expliquent rapidement les événements qui ont précédé le décès du bourreau.



Lorsque leur mère Aurelia rencontre Mikaël elle a 17 ans à peine. Plus âgé, plus affirmé, sûr de lui et de son pouvoir d’homme, mais déjà violent, celui qui la viole dans les toilettes du bar où ils se rencontrent sera le père de ses quatre enfants. Un fils et trois filles plus tard, celle qui subit quotidiennement des violences physiques et psychologiques de cet homme à qui personne ne résiste doit quitter le foyer. C’est une question de vie ou de mort.



A compter de ce jour, et même si c’était déjà le cas avant, Krestina, Angelina et Maria sont à la merci de Mikhaïl. Violence, tortures psychologiques, privations, viols, tout lui est permis, puisque ce sont ses filles, elles lui appartiennent. Et la famille paternelle entre dans le jeu pervers des violences et du silence. Et même si des déclarations ont été faites auprès des autorités ou de la police, en Russie ce qu’il se passe dans la famille doit rester secret et se régler en famille. Personne jamais ne prendra soin de ces trois jeunes femmes. Quand on sait qu’une loi a été promulguée qui permet d’arrêter et de punir toute femme qui se plaindrait de violence intra-familliale on peut s’interroger sur la valeur de la vie d’une femme ou d’une fille dans ce pays.



Laura Poggioli alterne le récit de ce drame familial avec sa propre expérience. Amoureuse de la Russie, elle y a passé de nombreuses années. Étudiante étrangère, elle y a rencontré Mitia. Amoureux prévenant et attentionné au début de leur relation, il est rapidement devenu violent, exerçant sur elle un harcèlement destructeur auquel elle s’est soumise pendant des années.



C’est cette réflexion sur sa propre soumission et l’acceptation de ces relations qui émaille le récit autour des trois sœurs.



chronique complète à lire sur le blog Domi C Lire https://domiclire.wordpress.com/2022/11/17/trois-soeurs-laura-poggioli/
Lien : https://domiclire.wordpress...
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