AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9791030705560
192 pages
Au Diable Vauvert (06/10/2022)
3.72/5   9 notes
Résumé :
Certains qu'il y a une place en 2022 pour un cannibalisme librement consenti, une chirurgienne et un entrepreneur de renom décident de commercialiser de la viande humaine.
Denrée fort addictive, sa consommation va rapidement menacer l'équilibre d'une humanité déjà vacillante.

Au terme de cette fable à la saveur aigre-douce, qui fera tomber le tabou civilisationnel ultime, nous saurons enfin si la pureté peut jaillir de l'innommable.
Que lire après CarnumVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Après Cela aussi sera réinventé et L'Homme-canon, Au Diable Vauvert propose à la rentrée 2022 un autre roman de Christophe Carpentier : Carnum !

Capitalisme cannibale
Jérôme Mareuil est au bout du rouleau. Il a pourtant tout réussi. Ou justement il a tout réussi, et n'en peut plus à cause de cela. Magnat du transport routier depuis des années, il décide de tout plaquer, sa femme, sa famille, ses affaires, pour s'isoler et réfléchir à sa fin. Mais c'est sans compter Edwige Müller, chirurgienne renommée, qui se passionne d'un coup pour la viande humaine depuis qu'elle a goûté la jambe amputée d'un enfant lors d'une opération. Elle offre à Jérôme une opportunité d'investir les 4 millions d'euros qu'il a récupérés de sa mirobolante entreprise : créer un tout nouveau marché de vente de viande humaine ! Mais comment faire de l'argent sur un tabou ? Comment créer un marché, de niche certes, sur une denrée difficile à trouver au premier abord, difficile à refourguer puisque la demande n'existe pas, et difficile à vendre sans essayer soi-même au risque de s'y perdre ?

La forme au service du fond
Cela aussi sera réinventé avait l'avantage de fournir un monde de science-fiction très développé, mais le défaut de vouloir trop en dire, trop faire déblatérer les personnages en de longs monologues exposant leurs motivations complexes. L'Homme-canon gagnait en vigueur en proposant un texte sous forme de pièce de théâtre sur des thématiques proches du précédent et misait sur une absurdité certaine. Carnum, lui, affine davantage la forme pour servir le propos complètement absurde du « tabou civilisationnel ultime ». Ici, d'un côté, le style est agréable, la forme théâtralisée (héritée de L'Homme-canon) fonctionne très bien avec la découverte progressive des personnages, le rendu absurde de certaines scènes et les didascalies à répétition. Toutefois, l'ensemble reste court, bon certes, mais court (moins de 200 pages). Cela ne pose pas de problème pour une pièce de théâtre, d'autant que les ellipses sont habilement utilisées, cela en pose davantage quand on s'attend à une conclusion plus dense pour ce roman. On ne peut qu'anticiper une fin tragique à cette fuite en avant, et l'amoncellement de scènes un brin gores ne pouvait de toute façon pas se répéter sur plusieurs centaines de pages sans déranger à l'excès, mais tout de même il y a une petite sensation de coupe-faim sur la fin. Dans le même ordre d'idée, mais avec un traitement davantage « zombiesque », lisez également Carne, de Julia Richard.

Décidément, Christophe Carpentier nous propose des romans théâtralisés de plus en plus barrés et ce n'est pas pour nous déplaire !
Commenter  J’apprécie          120
Avant de discuter du fond, j'aimerai commencer par quelques mots sur la forme. le présent roman est en effet rédigé comme une pièce de théâtre. Les acteurs se donnent la réplique, le contexte, leurs faits et gestes sont brièvement décrits afin que le lecteur visualise la scène.

Adeptes de la bien-pensance et du politiquement correct passez votre chemin, ce court roman (moins de 200 pages), qui fait l'apologie d'un cannibalisme consensuel et commercial, n'est pas adaptés à vos chastes et prudes neurones… C'est au contraire délicieusement amoral et subversif, nul besoin d'adhérer au propos pour se régaler avec ce bouquin.

Je tiens d'entrée de jeu à préciser – de nouveau – que je respecte les choix alimentaires des uns et des autres… du moment que les autres en question respectent mes propres choix et ne viennent pas me faire chier avec leurs leçons de morale à deux balles. Carnivore parfaitement assumé et revendiqué, ma consommation de barbaque n'est limitée que par les prix du marché (que ce soit en boucheries ou en grandes surfaces, la viande – y compris les morceaux de consommation courante – tendrait malheureusement à devenir un luxe).

Je vous rassure tout de suite sur mon état mental : la consommation de viande humaine ne m'attire nullement. Je vais me contenter de ce qui existe déjà dans nos étals, que ce soit classique (boeuf, veau, porc, volaille et lapin) ou plus exotique (cerf, cochon sauvage, autruche, bison…).

Revenons à nos moutons et au roman de Christophe Carpentier.

Sans entrer dans les détails, le coeur de la « petite affaire » imaginée par Jérôme et Edwige repose sur le consentement, aussi bien au niveau des Donneurs que des Mangeurs. L'autre paramètre clé de l'intrigue est le côté addictif de la consommation de viande humaine. Et comme toute addiction, elle peut être lourde de conséquences et sources de dérives.

C'est en poussant à l'extrême, parfois même jusqu'aux portes de l'absurde, que Christophe Carpentier déroule sa mise en scène. S'affranchissant de tout sens moral il nous expose les débuts difficiles du marché de la viande humaine, puis son succès fulgurant malgré un prix des plus prohibitifs. Enfin il termine par les effets secondaires et les dérives autour de ce marché des plus lucratifs.

Contre toute attente le format court et le côté théâtral du bouquin sont parfaitement adaptés au récit. Un choix qui permet d'aller à l'essentiel tout en optant pour une mise en scène très visuelle (à mon avis ce n'est pas demain la veille que France Télévision diffusera une telle pièce de théâtre…).

Afin de coller à l'actualité et d'ouvrir leur marché à l'international, nos deux commerciaux de choc vont même aller jusqu'à démarcher un certain Vladimir Poutine. Telle qu'ils décrivent la rencontre à leur retour, ce n'est pas cet interlude gastronomique qui va améliorer l'image de Vlad le Rouge.

Je me suis régalé avec cette intrigue aussi subversive qu'amorale, une pépite d'humour noir qui ne plaira sans doute pas à tout le monde. Si le politiquement correct ambiant vous saoule, que vous savez apprécié le second degré et êtes doté d'une large ouverture d'esprit, je vous invite à tenter l'expérience et à vous mettre à table. Pour ma part j'avoue sans le moindre complexe l'avoir dévoré d'une traite.

Si un jour un metteur en scène est assez couillu pour faire jouer la pièce, j'espère avoir l'occasion de la voir. En live ça devrait être une tuerie (oups… encore un mauvais jeu de mot).
Lien : https://amnezik666.wordpress..
Commenter  J’apprécie          90
Après un changement de vie radical, Jérôme fait la rencontre d'Edwige qui va lui faire une proposition des plus dérangeantes : elle veut commercialiser la viande humaine d'une manière légale et elle a besoin d'un entrepreneur comme Jérôme pour l'y aider. D'abord réticent, Jérôme va très vite se laisser tenter…

Comme vous pouvez l'imaginer rien qu'avec le postulat de base de l'histoire, l'auteur nous propose quelque chose d'atypique et dérangeant. Mais ça fonctionne très bien !

Je ne peux pas dire que j'ai été convaincu à 100% par le récit dans la mesure où les choses ne sont pas très crédibles, que ce soit la rencontre improbable entre les deux protagonistes, la relative facilité avec laquelle ils arrivent à trouver des donneurs et des clients, ou même juste le modèle économique de leur entreprise. Pourtant, toutes ces choses ne sont pas plus gênantes que ça. Je ne pense pas que l'objectif soit vraiment de proposer un récit réaliste, mais plutôt de déranger et de faire réfléchir, et en ça, le pari est tout à fait relevé.

J'ai été assez surpris par le format (le récit se présente comme une pièce de théâtre). le parti pris est plutôt original mais est à double tranchant. A la fois le rythme est efficace et on enchaîne les pages sans s'en rendre compte puisqu'on n'a finalement que des dialogues, mais la contrepartie est qu'on n'a pas vraiment de descriptions pour vraiment développer les idées. On a aussi des grosses ellipses qui viennent occulter des étapes clés de l'entreprise de nos personnages. C'est un peu dommage dans la mesure où on n'en sait finalement assez peu sur la façon dont les choses se mettent en place et sont perçues par le grand public, mais en même temps on arrive bien à suivre la psychologie des quelques personnages que l'on suit.

Sur le fond, on a un récit profondément immoral et on est souvent mal à l'aise de voir la nonchalance, le détachement et le cynisme avec lequel on nous parle de cannibalisme. Mais si on est aussi mal à l'aise, c'est aussi parce qu'on peut faire des parallèles avec notre société actuelle qui nous sautent d'autant plus aux yeux ici parce qu'ils sont montrés à travers le prisme d'un des actes les plus tabous qui soient. On parle ici d'addiction, de la société de consommation, du cynisme dont peuvent faire preuve les industriels, d'inégalités sociales et de ce que certains sont prêts à faire pour réussir à arrondir leurs fins de mois difficiles…

Si vous avez peur des livres qui parlent de cannibalisme parce que vous n'aimez pas l'horreur ou que vous ne voulez pas lire de scènes gores, ce roman pourrait très bien fonctionner pour vous. Il n'y a finalement pas grand chose de graphique (certes, on y déguste des tranches de mollet d'enfant amputé mais d'une manière tout à fait civilisée 👀), et la seule horreur est celle qu'on ressent lorsqu'on se dit que l'humain n'est pas vraiment au-dessus de ça, et qu'on pourrait faire face à ce genre d'entreprises un jour…
Commenter  J’apprécie          30
Elisabeth et Jérôme vivent leur séparation d'une manière quelque peu étrange, bien plus étrange que l'idée que l'on se fait généralement des ruptures amoureuses. Sur le papier, Jérôme a une vie heureuse et des plus agréables. Mais Jérôme ne peut plus. Jérôme n'en peut plus. Cette vie de suractivité, d'ambition démesurée et d'échelons à gravir, de fortune à agrandir toujours plus, tout cela n'est plus possible pour lui. Une réminiscence enfantine lui souffle qu'il faut absolument qu'il s'isole et quitte cette vie qui ne lui convient plus du tout. Abandonnant tout, Elisabeth et son envie d'enfant, sa famille, ses appartements à Dubaï et à New-York, ses amis, son travail évidemment, il part.

Jérôme profite désormais de sa complète solitude pour réfléchir, pour penser. Quand on frappe à la porte, une certaine Edwige, chirurgienne, se présente et débarque avec une glacière ultra sophistiquée, s'installant sans gêne dans la cuisine de Jérôme qui n'a plus assez de sièges à disposition dans son salon. Non satisfaite d'avoir quelque peu forcé le passage à son propriétaire, Edwige annonce que sa glacière contient un mollet et un pied d'enfant, amputé à la suite d'un terrible accident. La stupeur est évidemment de mise pour Jérôme qui croit d'abord à une plaisanterie de mauvais goût. Mais il n'en est rien, et non contente d'avoir choqué son interlocuteur, cette sacrée Edwige amène l'hébétude à son paroxysme lorsqu'elle déclare avec le plus grand flegme, qu'elle a mangé deux tranches découpées dans le mollet du petit garçon. Sa confession achevée, elle poursuit en demandant à Jérôme qu'elle a reconnu à la supérette, son avis sur l'acte qu'elle a commis sur ce membre de garçonnet amputé. Elle prétend que la Providence les a liés et que son acte de cannibalisme va leur permettre de se sauver tous les deux. Mais se sauver de quoi, se demande Jérôme ! Pourquoi le délire cannibale de cette folle devrait le sauver lui de quoi que ce soit ?

Edwige annonce et explique qu'elle veut créer un partenariat afin de promouvoir un cannibalisme planétaire librement consenti, tout simplement en achetant des muscles humains pour mieux les revendre à prix d'or. Elle tente de convaincre Jérôme que son idée révolutionnaire relancerait sa carrière en un rien de temps, et par là même, relancerait sa motivation et son ambition perdues.

Le duo Edwige / Jérôme va-t-il amorcer la vente industrielle de viande humaine ? le cannibalisme va-t-il devenir chose courante ? Sera-ce une denrée pour les ultra riches ?

Christophe Carpentier nous emmène dans son délire et c'est hilarant, passionnant et irrésistible ! Un véritable petit bijou d'humour noir !
Lu d'une traite évidemment, j'ai trouvé ce super roman bien trop court, j'en voulais encore ! Pas de viande humaine hein ? Je parle du talent de Christophe Carpentier, entendons-nous bien !
Un roman qui se dévore, qui se déguste et dont on se délecte à chaque page.
Une immense réussite !
Commenter  J’apprécie          20
Voilà sans conteste LE roman le plus original qu'il m'ait été donné de lire depuis bien longtemps, et. c'est encore à l'éditeur Au Diable Vauvert qu'on le doit ! L'histoire ? Jérome Mareuil, magnat du transport routier européen, traverse une mauvaise passe existentielle qui le pousse à tout abandonner, lorsque son chemin crois celui d'Edwige Müller, brillante chirurgienne en traumatologie (démissionnaire) de Mulhouse. Son idée: développer le commerce de la chair humaine sur le principe du donner /receveur libre et consentant. D'abord très réticent, Jérome se laisse convaincre, et nos deux hurluberlus se lancent dans une entreprise lucrative. La viande humaine, surtout les biceps et les muscles fessiers, devient un met de choix et de luxe, au prix au kilo exorbitant, poussant aux marchés parallèles. Jamais gore, toujours amusante et totalement absurde, l'histoire que nous propose Christophe Carpentier s'incrit comme une pièce de théâtre, dont elle emprunte les codes à chaque chapitre. Un récit qui n'est pas sans rappeler l'originalité de Rhinocéros de Ionesco. Au delà de ce cannibalisme bon chic bon genre, l'auteur nous offre une belle satire de cette société de consommation qui ne sait se contenter de ce qu'elle possède et cherche par tous les moyens à posséder toujours d'avantage. Un roman particulièrement savoureux, drôle et bien plus subtile que ne pourrait le laisser croire son résumé.
Je remercie les Editions Au Diable Vauvert pour leur confiance.
Commenter  J’apprécie          10

Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Eh, arrêtez votre char, là. C’est pas parce qu’on mange de la viande humaine qu’on est de mauvaises personnes.
Commenter  J’apprécie          60
Si une chose, même horrible, même incompréhensible, peut être verbalisée, alors c’est qu’elle a reçu de façon intrinsèque l’autorisation d’exister.
Commenter  J’apprécie          00
Rien, jamais, ne fait l’unanimité contre soi. C’est une loi sociale.
Commenter  J’apprécie          00

Videos de Christophe Carpentier (10) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Christophe Carpentier
Festival des Utopiales à Nantes
Dans le film Soleil Vert tiré du roman de Harry Harrison, on voit l'humanité, ayant tout consumé autour d'elle, condamnée à se dévorer elle-même. La consommation de viande des pays développés serait, entre autres, l'un des facteurs cruciaux qui contribuent au réchauffement climatique, mais également nuirait à la santé des citoyens. Et ce non seulement à cause de la viande elle-même mais également du fait de sa contamination par les polluants. Serons-nous simplement consommables demain ?
Avec : Christophe Carpentier, Morgane Caussarieu, Charlotte Sinding, Olivier Gechter Modération : Benoît Tonson, The Conversation
+ Lire la suite
autres livres classés : romanVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (18) Voir plus



Quiz Voir plus

Titres d'oeuvres célèbres à compléter

Ce conte philosophique de Voltaire, paru à Genève en 1759, s'intitule : "Candide ou --------"

L'Ardeur
L'Optimisme

10 questions
1294 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature française , roman , culture générale , théâtre , littérature , livresCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..