Ma première découverte de cet auteur cubain et français, romancier mais aussi musicologue, l'un des écrivains qui a revendiqué l'emploi du « réel merveilleux » ce qui se nomme maintenant je crois, « réalisme magique » si caractéristique de nombreux auteurs sud-américains.
Au 18ème siècle, un Mexicain, dont on ne nous dit pas s'il est basané, mais c'est sûr, il est très riche, prépare son embarquement pour aller au Carnaval de Venise à bord d'un riche vaisseau, en y entassant toutes sortes d'objets.
Et durant ces préparatifs, le serviteur attitré du Maître, tombe malade et meurt.
Il lui faut trouver un remplaçant de qualité, et il le trouve en la personne d'un noir, Filomeno, avec lequel s'engage une collaboration fructueuse, et les dialogues entre ces deux-là, parfois philosophiques, ne manqueront pas de nous ravir.
Et, sans entrer dans les détails, le Maître, accompagné de Filomeno, arrive d'abord en Espagne, pays d'une partie de ses ancêtres (le reste ce sont des Indiens si j'ai bien compris). L'Espagne le déçoit, il trouve Madrid sale et triste. Et donc, il repart vers Venise, dans laquelle les festivités du Carnaval battent leur plein, comme on dit chez nous.
Et il y rencontre un « trio musical » de choc, composé de
Georg-Friedrich Haendel, Alessandro Scarlatti, et le « local »,
Antonio Vivaldi. Je vous passe toutes les péripéties de cette rencontre, dans laquelle les beuveries sont nombreuses, dans laquelle les musiciennes et chanteuses du Prêtre Roux, jouent un rôle, pas que musical. Sachez qu'ils discutent d'un certain
Igor Stravinsky, né deux siècles plus tard, sur la tombe duquel ils se rendent, que Vivaldi va composer un opéra (qui existe réellement), Montezuma, à la demande du Maître mexicain, opéra relatant les déboires de celui-ci dans sa lutte contre l'envahisseur espagnol Herman Cortès, dont la représentation mettra le Maître en colère.
Et puis, notre mexicain repartira en train (sic) vers son pays natal, tandis que Filomeno partira pour Paris et sa Tour Eiffel (re-sic), pour aller écouter un concert de
Louis Armstrong!!!(re-re-sic).
Cette histoire ne serait que loufoque, baroque, s'il n'y avait pas, en filigrane, de multiples réflexions, sur la musique d'abord et la diversité culturelle qu'elle implique, sur la colonisation, le rapport entre les peuples, et sur ces thèmes éternels, la vie, l'amour, la mort.
J'avais d'abord été déconcerté et un peu lassé par les premières pages, avec leur accumulation de descriptions, noms, adjectifs. Mais, vite, le roman trouve son rythme de croisière, et même devient formidable. Et je l'ai perçu comme beaucoup plus profond que son « réel merveilleux » le laisserait supposer, à première vue.
Il y a aussi dans le rythme des phrases quelque chose de musical, et les références aux oeuvres de ces trois grands musiciens sont à la fois justes et pleines de fantaisie.
Un court roman que j'ai bien apprécié, il ne faut pas s'arrêter à la pesanteur des premières pages, et un hommage à la diversité culturelle, toutes époques confondues.