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EAN : 9782707321435
153 pages
Editions de Minuit (20/01/2011)
3.53/5   47 notes
Résumé :
PRIX VIRILO 2011

Dino Egger, ce nom n’évoque rien pour personne et c’est bien regrettable. C’est aussi parfaitement compréhensible, puisque Dino Egger n’a jamais existé. Il aurait pourtant accompli de grandes choses, s’il faut en croire Albert Moindre dont le nom ne vous dira rien non plus. Pas étonnant, Albert Moindre est un homme modeste, sans éclat. Tandis que Dino Egger devait marquer le monde de son empreinte, ouvrir des perspectives nouvelles,... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (16) Voir plus Ajouter une critique
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Mais que serions nous aujourd'hui si Dino Egger avait existé ?
Il aurait tout changé et suivant l'époque où il aurait sévi , le futur n'aurait pas été le même.
Ce livre est brillant, l'écriture loufoque qui semble pouvoir s'accrocher à tout et n'importe quoi nous entraine dans un vortex des plus étourdissant. on pourrait se régaler . 30 pages , 40 si on est de bonne humeur.
Et puis , on tourne un peu en rond , personne n'existe , tout le monde existe , c'est toujours bien écrit, il y a des punchlines littéraires de haut vol , " l'objectivité du biographe l'oblige à descendre aussi bas que son personnage dans l'abjection et la vulgarité".
J'ai eu l'impression de lire un truc d'intello qui a juste cherché à me faire sentir inférieur. Il y est bien arrivé .
Voilà, on aurait sans doute pu sauver un arbre , mais si vous aimez les exercices de style ,c'est une expérience.
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A quoi ressemblerait le monde si Dino Egger avait existé ? Mais voilà, Dino Egger, son probable génie et ses non moins probables découvertes et inventions n'ont pas existé ! A l'inverse de Marco Polo, Einstein ou Leonard de Vinci, Dino Egger s'inscrit en négatif dans l'histoire du monde et son narrateur, Albert Moindre, s'en désole tout en délirant sur les implications de son hypothétique passage sur notre terre : un exercice de style loufoque, délirant et brillant qui m'a divertie pendant quelques dizaines de pages...
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«Il faut se rendre à l'évidence : ce monde est tel parce que Dino Egger n'a jamais existé.»

Éric Chevillard est capable de choisir n'importe quel sujet - l'arrivée inopinée d'un hérisson sur sa table de travail ou bien la détestation du gratin de chou-fleur -, mais aussi un non sujet : ici les conséquences pour le monde de la non-existence d'un génie avéré, Dino Egger, et la traque de ce génie en creux par le désespérant Albert Moindre. Laborieusement, Albert Moindre cherche les traces du grand homme qui ne fut pas, et reformule les inventions que celui-ci aurait pu apporter au monde s'il avait existé.

«Et n'est-il pas affligeant, quand on sait tout l'osier qui a poussé sur cette terre depuis l'aube des temps, n'est-il pas affligeant de penser qu'il ne s'en trouva pas douze brins pour tresser un berceau à Dino Egger ? Il y a de bonnes raisons de pleurer, nous en possédons tous un joli lot dont nous sommes du reste assez jaloux, mais celle-ci est sans doute la seule qui nous soit commune.»

Évidemment c'est brillant, Albert Moindre et Dino Egger devenant les représentations de l'auteur et de sa fiction, de cette grande oeuvre qui sans cesse se dérobe, de la tentation de l'auteur de fusionner en son personnage, de l'alternance chez l'écrivain - et chez l'homme - du sentiment de sa grandeur et de sa médiocrité.

Mais le génie d'Eric Chevillard ne s'arrête pas là : ce propos insensé, absurde, devient sous sa plume virevoltant et immensément drôle, source d'une jubilation totale. Albert Moindre saute d'une hypothèse à l'autre en imaginant ce qu'aurait pu être la vie manquée de Dino Egger, le dépeignant successivement en génie, en monstre, croyant tout à coup trouver ses écrits puis retombant dans un désespoir sans fond, voulant enfin s'effacer au profit de Dino Egger, dans un kaléidoscope hilarant qui lie dans un même récit l'intelligence la plus brillante, la fantaisie et l'imagination les plus débridées, celles de l'enfance, et l'essence de la littérature.

«Albert Moindre se fait oublier. Dans sa barbe, il s'est bâti une cabane de fortune, il vit de la chasse et de la pêche, il élève quelques chèvres. Il est seul à se retrouver dans cet inextricable taillis. Plus pour très longtemps, il commence lui-même à perdre ses repères, il s'égare en portant la nourriture à sa bouche, il fait de longs et inutiles détours. Dans sa barbe, il devient étranger à lui-même ; il est à la fois l'explorateur et l'indigène ; l'explorateur ethnologue curieux de l'indigène et l'indigène anthropophage curieux de l'explorateur. Ils se livrent à de curieux échanges de fléchettes et de colifichets. La barbe croît toujours et prolifère sur le cadavre en décomposition de Moindre ; le loup va venir des Alpes et l'ours des Pyrénées pour ronger ses os ; on attend aussi la panthère et le puma qui, depuis leurs forêts déboisées, ont flairé les odeurs suaves de mousse et de pourriture en provenance de cette barbe luxuriante, nouveau poumon de la planète : déjà se manifeste l'action bienfaisante de Dino Egger, et il n'est guère surprenant que les animaux soient les premiers à la ressentir.»
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Dans ce livre vertigineux, Chevillard s'applique à faire perdre au lecteur tous ses repères par poses multiples de miroirs et changements inopinés de cap narratif tout en déployant son récit dans une langue virtuose mais toujours limpide et drôle.

Tout commence par une simple interrogation posée par Albert Moindre, le narrateur : que serait devenu le monde si Dino Egger, personnage qui n'a jamais existé, avait vécu ? Le ton est donné dès les premières lignes : le livre est construit sur la recherche d'un personnage réputé fictif (Dino Egger) mené par un personnage réputé réel (Albert Moindre). A partir de là, Chevillard applique à son écriture une suite de métamorphoses et on ne sait plus vraiment à quoi on a à faire. Pour le dire autrement : est-ce du lard ou du cochon ?

Cela ressemble parfois à une biographie virtuelle, une hagiographie pleine de louanges. C'est parfois une succession de phrases vraisemblables agencées dans un raisonnement rigoureux qui finit par donner un passage absurde et loufoque sans aucun sens logique. Ou alors ce sont des fragments semblables à des bouts d'ADN collés les uns aux autres pour leur donner un air de vraisemblance. Dans un subtil jeu de miroir, les mots glissés dans le roman donne au lecteur des clés sur la méthode employée par Chevillard (‘l'aliénant principe de causalité' ou encore le refus ‘de se soumettre aux injonctions triviales de la réalité'). On aborde aussi les rives de la réflexion métaphysique sur le rien, sur ce qui est et ce qui aurait pu être. On se demande où Chevillard veut en venir : cet homme qui n'a jamais existé est-il une figure archétypal de l'être humain ? le Messie ? un hommage au génie humain ? à son ingéniosité ? mais aussi à sa capacité d'échec ? une dénonciation de sa nature mauvaise, guerrière et perverse ?

Un peu avant la moitié du roman alors que l'on commençait un peu à s'ennuyer – pourquoi le nier - , brusque changement de direction : le récit devient sur une vingtaine de pages un journal dont Dino Egger aurait pu être l'auteur d'après le narrateur. C'est un pastiche ironique très réussi de ce genre littéraire.

Et puis passé sous la banderole des 25 dernières pages, le roman met au premier plan le narrateur Albert Moindre. ‘Si Dino Egger n'existe pas, pourquoi ne le remplacerai-je pas ?' se dit Moindre. C'est alors le feu d'artifice final tiré par Chevillard. Le récit abandonne le ‘je' du narrateur et tout se mélange en un combat entre Albert Moindre et son personnage utopique, l'un prenant la place de l'autre et réciproquement.

Un très bon moment de lecture !
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La littérature est-elle née d'un délire ? C'est un peu la question qui se pose en creux dans ce livre. Car le livre de Chevillard est creux, terriblement creux et cela fait son terrible attrait en même tant que sa profonde vacuité.

En effet, le dispositif est un creux absolu : l'histoire, les sciences, les arts, etc. actuels ne seraient possible que par le creux laissé par l'inexistence de Dino Egger. Telle est la conjecture quantique que déploie le narrateur putatif, Albert Moindre (déjà employé ailleurs par Chevillard), détaillant au fil des récits ce que ce Prince des Possibles de Dino Egger aurait apporté à l'humanité, s'il avait pu exister.
Cela tourne vite au délire, au vertige de la liste d'inventions toujours poétiques et drolatiques, qui finissent par interroger par leur vacuité, en effet : tout ça pour ça ? Si peu de choses importantes essentielles : loin d'être révolutionnaire, Dino Egger est une bouffonnerie, ses actions sont presque des clichés, ses inventions des canulars improbables. Et c'est là à mon sens que se fait le déclic. Certes la jouissance de l'absolu littéraire a ses charmes. Un temps. Puis la clownerie déçoit, et c'est là que ça devient intéressant.
Albert Moindre, met ainsi petit à petit en scène la débâcle de l'invention de ce Dino Egger qu'il s'est créé pour échapper à sa médiocrité. Mais la médiocrité rattrape tout. le génie supposé de Dino Egger, tue peu à peu Albert Moindre, devenu le Dr. Jekyll de ce Mr Hyde à tout le moins grotesque.

Il y a là une belle réflexion – en creux à nouveau – sur la création littéraire, qui m'a rappelé cette remarque de Nietzsche : « Faire des plans et concevoir des desseins s'accompagne de bien des sentiments agréables, et qui aurait la force de n'être rien sa vie durant, qu'un bon faiseur de projets serait un homme heureux ; mais il lui faudra bien, à l'occasion, se reposer de cette activité, en réalisant un de ses plans, et voilà le dépit et la désillusion. » (Humain, trop humain, II, § 85). Eh oui. En creux de l'histoire c'est la destruction de l'histoire même raconté par l'écrivain médiocre et la victoire son échec qui prend vie à son détriment (le rêve de l'écrivain maudit, je suppose), mais cela avec un pied de nez redoutable au lecteur attaché à ne lire que le texte et à ne pas y prendre plaisir en y lisant aussi autre chose.

En creux, oui, tout un ensemble de choses résonne dans ce creux qu'évoque la matrice de Dino Egger : la voix de Kafka, disant avec lassitude que les chefs d'oeuvres inconnus ne manquent à personne puisqu'il n'y a personne pour les regretter, celle d'Artaud, qui cette fois teintée d'humour exprimant qu'« il faut en finir avec les chefs d'oeuvres », et pourquoi pas celle du Galilée de Brecht déclarant « Malheureux le pays qui a besoin de héros ». Ceux-là, bien sûr, mais d'autres (pourquoi pas Jacques le Fataliste et toute l'aporistique post-moderne) dans une oeuvre métafictionnelle, c'est tous les souvenirs du lecteurs qui font écho dans cet espace littéraire.
Et l'on comprendra que l'ouvrage soit donc définitivement entre deux sortes de « creux » qui l'un l'accuse et l'autre le sauve.
Lien : http://www.senscritique.com/..
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
L'épouse du marin perdu en mer qui n'a point de sépulture où se recueillir est une bienheureuse pourtant comparée à Flora Egger qui jamais ne reçut ce nom et demeura Flora Ragonit, qui ignora surtout quel homme remarquable eût été son mari, réformateur du vers français, de la sphère et du triangle ou bâtisseur de ponts d'un genre nouveau, enjambant les grands fleuves de la source au delta, sachant que là, évidemment, je dis encore n'importe quoi - et comment faire autrement ? Comment décrire l'oeuvre inaccomplie de Dino Egger ?
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Ah Dino ! Dino ! que n'as-tu donc vécu ! Sais-tu que nous pourrions t'en vouloir de n'avoir point paru ?
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Dino Egger n'eût point craché sur cette vie-là, elle eût été bonne à prendre : elle ne lui fut pas donnée.
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Mais ces couloirs, pourtant, cette véranda, ce jardin, une telle tristesse y rôde, il faut que vous les ayez traversés, qui semblent dorénavant voués au regret des réalisations avortées, des promesses non tenues.
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Cette discrétion me sied, j'y trouve mes aises et je ne crains pas le néant qui absorbera ma personne : comment se souviendrait-il de moi, alors que je suis moi-même sans mémoire.
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Vidéo de Éric Chevillard
«Bêtes de littératures» avec Éric Chevillard Hérissons, orangs-outans, tortues, flamants roses, insectes… Les bêtes peuplent les livres d’Éric Chevillard. S’interrogent à cette occasion les enjeux de la présence d’animaux, et par là d’altérités non humaines, dans la littérature. Comment rendre compte, avec l’écriture, d’intensités animales au-delà de l’allégorie ou de la fable ? Donner vraiment la parole aux animaux, est-ce pour autant se couper du symbolique ? Et l’humour dans tout cela ? L’entretien sera ponctué d’une lecture d’extraits de «Zoologiques» (Fata Morgana, 2020). - Modération : Sandra de Vivies La Fondation Jan Michalski, le 11 septembre 2021
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