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Léo Lack (Traducteur)
EAN : 9782234054288
390 pages
Stock (03/10/2001)
3.69/5   31 notes
Résumé :
Ce jour de printemps, Fred Uhlman, jeune avocat plein d'avenir, se rendit à son cabinet comme d'habitude, pour y étudier les dossiers en cours. Mais on était en 1933, à Stuttgart, et Fred Uhlman était juif. Le coup de téléphone fut très bref : "Il fait beau à Paris aujourd'hui. Aujourd'hui." Uhlman avait compris. Il rassembla quelques vêtements, un peu d'argent, sauta dans sa voiture et quitta pour toujours sa ville, sa famille, son pays. Ce bref récit est dans sa s... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Rare sont les écrivains qui arrivent à m'émouvoir autant. Rare sont ceux qui, dans leur plume, laissent suer des échos d'un bouleversement majeur de leur vie avec la qualité et la subtilité requise. La légèreté épouse parfaitement la profondeur de son message, la poésie embrasse avec force la qualité narrative et la trame de l'histoire secoue le lecteur de façon incisive. Cette même trame qui nous fait devenir le spectateur de sa vie. Fred Uhlman, avocat plein d'avenir, nous la conte. Ici et maintenant.

«Pendant dix ans, j'ai commencé et recommencé ce chapitre, puis déchiré tout ce que j'avais écrit. Je me suis demandé si je pouvais éviter de l'écrire, mais n'en vois pas la possibilité car il est la clé de ma personnalité. C'est l'histoire de mes parents et de ma soeur, qui ont disparus dans l'holocauste avec des millions d'autres êtres humains et aux âmes desquels je dois respect, justice, piété ...et pitié.»

Issu d'un milieu bourgeois, Fred Uhlman avait toutes les armes pour devenir une personne aisée. Son père, que tout lui opposait, semblait avoir une entreprise qui, dans la période noire de son existence, fonctionnait assez correctement pour permettre à ses enfants de croître dans de bonnes conditions. Pourtant tout oppose Fred Uhlman à son père. Pendant que celui-ci était négligent, Fred Uhlman était assidu, pendant que l'un payait toujours ses factures avec un temps de retard, l'autre appliquait les consignes à la lettre. C'est peut-être ceci qui a fait de Fred Uhlman l'homme qu'il est devenu plus tard. Poétique, sensible, sincère, honnête, calme et combatif. Une combativité qui, à sa juste mesure, lui a peut-être sauvée plusieurs fois la mise. Plutôt que choisir de marcher dans les traces de son père, l'auteur nous conte son métier d'avocat, qu'il exercera avec une passion dévorante. Toute cette adolescence qu'il mènera en parallèle de l'ascension d'Hitler dans son pays, qui au fur et à mesure, lui deviendra de plus étranger. Lui le « Deutsch-jüdischen » (Juif Allemand).

Jusqu'au jour où un coup de téléphone va bouleverser son existence. « Il fait beau à paris aujourd'hui ». Il devait quitter son pays, la traque des juifs avait commencé. Choisissant d'atterrir à Paris, ville qu'il voyait à l'époque comme le berceau d'une immense culture. Cette terra d'asile l'accueillera en son sein et lui permettra de jouir d'une renommée grandissante. Avec force et persuasion, Fred Uhlman se lancera à corps perdu dans la peinture, ce qu'Hitler, aussi doué soit-il, n'a jamais réussi à faire, croisant parfois même la route de Picasso en personne.

«Mon père détestait le sionisme. L'idée même lui paraissait insensée. Réclamer la Palestine après 2000 ans n'avait pas pour lui plus de sens que si les Italiens revendiquaient l'Allemagne parce qu'elle avait jadis été occupée par les Romains. Cela ne pouvait mener qu'à d'incessantes effusions de sang car les Juifs auraient à lutter contre tout le monde arabe.»

À travers ce récit, semi-initiatique, à la recherche de l'homme qu'il a toujours voulu être, Fred Uhlman bouleverse. Il nous conte son enfance difficile avec son père, ses années de lycée, de révolte, son passage dans une ville inconnue et sa nouvelle vie et loin des siens avec une profusion de détails pour le moins surprenant. Tout semble être figé dans le temps, ralenti par la mémoire eidétique de l'auteur et retranscrit avec une qualité proche de la perfection. le récit coule et tout s'embranche afin de donner le tissu narratif de son oeuvre.
Plus surprenant encore, le silence qu'à l'auteur pour son bourreau, Adolf Hitler. le citant très peu dans son oeuvre il rend son récit plus dense, plus énigmatique et évite, comme beaucoup d'auteur le font, de diaboliser le mal pour rendre son récit plus touchant encore.

Fred Uhlman vit dans la promptitude absolu de devoir faire de sa vie un bonheur, au diable les moqueries et les apparences.

Fred Uhlman est un personnage énigmatique, aussi envoûtant qu'obsédant. Son lyrisme sue la beauté et la poésie. Ses deux vies aussi éloignées l'une de l'autre supportent le même leitmotiv.
L'amour de la vie.
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J'ai découvert Fred Uhlman récemment en lisant son chef d'oeuvre Reunion (L'ami retrouvé en français) et les deux romans qui y font suite regroupés dans un seul ouvrage La Lettre de Conrad suivi de Pas de résurrection, s'il vous plaît. J'avais beaucoup aimé ces récits historiques se déroulant dans l'Allemagne des années 1930. Bien qu'il s'agissait de romans, on pouvait évidemment percevoir une partie de l'expérience de l'auteur, lui-même juif allemand exilé en France, en Espagne puis en Angleterre suite à l'arrivée au pouvoir des nazis dans son pays natal.

C'est cette fois son expérience personnelle en tant que telle que Fred Uhlman raconte dans cette autobiographie :

Ce jour de printemps, Fred Uhlman, jeune avocat plein d'avenir, se rendit à son cabinet comme d'habitude, pour y étudier les dossiers en cours. Mais on était en 1933, à Stuttgart, et Fred Uhlman était juif. le coup de téléphone fut très bref : « Il fait beau à Paris aujourd'hui. Aujourd'hui. » Uhlman avait compris. Il rassembla quelques vêtements, un peu d'argent, sauta dans sa voiture et quitta pour toujours sa ville, sa famille, son pays.

Ce bref récit est dans sa sobriété et sa concision un écho bouleversant de la plus affreuse tragédie de l'histoire humaine. Arthur Koestler ne s'y était pas trompé, qui avait le premier fait l'éloge de la « qualité musicale obsédante et lyrique à la fois » du talent de Fred Uhlman, « comme si Mozart avait écrit le Crépuscule des Dieux » ...

Le récit débute évidemment par la jeunesse de Fred Uhlman en Allemagne, des années 1900 jusqu'à la montée du nazisme. Lorsque Hitler arrive au pouvoir, il s'engage quelque temps dans l'opposition social-démocrate mais finit par fuir son pays, averti par un ami juge que son arrestation est imminente. Nous suivons alors le parcours d'exilé de l'auteur, à Paris tout d'abord, puis dans l'Espagne à l'aube de la guerre civile, puis en Angleterre où il se marie et est interné dans un camp en tant qu'étranger issu d'un pays ennemi du Royaume-Uni.

Je dois avouer qu'il y a des livres qu'on se sent quasiment obligé d'apprécier, car le thème est trop fort pour qu'on le mette de côté. Ce n'est pas tout à fait le cas avec celui-ci, qui m'a plu dans l'ensemble, mais j'ai parfois trouvé le récit un peu ennuyant. C'est évidemment un panorama exceptionnel de l'Europe des années 1930 et 1940 : on parcourt avec Fred Uhlman l'Allemagne de la Première Guerre Mondiale jusqu'au début du régime nazi, puis la France de l'avant-guerre, l'Espagne à la veille de la guerre civile entre Républicains et Franquistes, puis l'Angleterre pendant la guerre.

C'est un témoignage précieux, parfois passionnant, mais d'autres fois plus anecdotique voire ennuyeux. Personnellement, je me serais facilement passé des longues pages sur l'élevage de poissons exotiques à Paris dans les années trente, ou des nombreuses références à la peinture et à des peintres plus ou moins célèbres. Dans ce dernier cas, c'est évidemment normal puisque Fred Uhlman a été peintre en plus d'être connu pour ses romans, mais c'est malheureusement un art dont je suis loin d'être spécialiste.

J'ai donc un sentiment ambivalent en terminant cette autobiographie. Je me suis parfois ennuyé pendant certains détours du récit, n'y retrouvant pas la force et l'intensité des romans de Fred Uhlman. Malgré tout, le témoignage historique que constitue ce livre est passionnant et certainement essentiel ; rien que pour cela, il vaut la peine d'être lu et de figurer dans la bibliothèque de tout amateur d'Histoire.
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Ce jour-là, le 23 mars,Fred Uhlman, jeune avocat plein d'avenir, se rendit à son cabinet comme d'habitude, pour y étudier les dossiers en cours. Mais on était en 1933 à Stuttgart, et Fred Uhlman était juif. le coup de téléphone fut très bref:''Il fait beau à Paris aujourd'hui. Aujourd'hui;''
Fred Uhlman avait compris. Il rassembla quelques vêtements, un peu d'argent, sauta dans sa voiture et quitta pour toujours sa ville, sa famille, son pays.''Comme un homme grièvement blessé, mais heureux d'être vivant, je ne pris conscience de la blessure que plus tard.....

le récit est donc autobiographique.
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Une autobiographie qui tente de retracer minutieusement la montée du nazisme en Allemagne et l'engrenage qui conduisit à la guerre, le parcours d'un juif en exil, à Paris, en Espagne (1936) et en Angleterre. En même temps qu'un témoignage historique passionnant sur les mouvements politiques des années 1930, sur le statut des émigrés allemands antinazis, et sur de nombreux autres sujets proches ou plus éloignés, ce livre est aussi écrit à la mémoire de la famille de l'auteur qui n'a pas survécu à Hitler. Enfin et peut-être surtout, il s'agit aussi de retranscrire le parcours d'un individu, certes marqué par l'histoire collective mais aussi pris dans une histoire personnelle, comme tout individu, depuis son berceau familial jusqu'à son épanouissement d'homme adulte. Ainsi, si le ton est souvent grave, l'humour n'est pas absent et, en définitive, le style est léger et entraîne à suivre sans décrocher, malgré la noirceur du sujet initial et la longueur du texte.
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Je trouvais une petite chambre non loin de l'université et, pour la première fois de ma vie, j'étais seul.
J'avais emporté mes livres préférés:
" Guerre et Paix, L'Idiot, Crime et Châtiment, Conversations avec Eckermann de Gœthe, les pièces et les essais de Kleist, Heine ( que j'admirais beaucoup à l'époque) et, bien entendu, Hölderlin.Mais je n'avais pas envie de lire.J'avais assez lu.Je voulais que la vie frappât à ma porte.

( Stock, 1985, p.62 )
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Schumacher était grand , mince, légèrement courbé. Son visage évoquait une pomme ratatinée; ses lèvres étaient aussi minces que si on les lui avait coupées au rasoir et ses yeux verts aussi froids que des glaçons. Comme Churchill, il fumait sans cesse ou suçotait un cigare. On avait conscience de sa force de volonté et de sa foi fanatique en la justesse absolue de sa cause mais, pour ma part, j'avais peur de lui et me sentais nerveux et gauche en sa présence. Comparé à lui, j'étais un être faible et irrésolu. La politique était tout pour lui, la vie même et il était prêt à mourir et à laisser les autres mourir pour ses convictions. Pour moi, la politique n'était qu'une partie de la vie, une partie nécessaire, mais peu agréable. Je suis certain qu'il le savait, réprouvait cette attitude et qu'à cause de cela je lui étais antipathique. Je doute qu'il ait eu des amis intimes et ne suis pas sûr qu'il en éprouvât le besoin, mais il avait des milliers de partisans prêts à mourir pour lui.

( Stock,1985,p.133)
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Ma secrétaire partageait son temps entre le polissage de ses ongles des mains et des pieds, la lecture de romans policiers et la fabrication de ravissantes chainettes avec mes trombonnes
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L'antisémitisme est une étrange maladie qui germe dans les lieux les plus invraisemblables. Il est latent chez nombre de gens qui ignorent son existence et sont atterrés et honteux lorsqu'il s'empare d'eux.Un homme sera votre ami et vous invitera chez lui, mais il aimera mieux mourir que vous emmener à son club.

( Stock, 1985, p.32)
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Vidéo de Fred Uhlman
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