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EAN : 9782246680215
280 pages
Grasset (21/01/2009)
3.73/5   211 notes
Résumé :
Tout avait si bien commencé. Insouciants et heureux, Voltaire, sa femme et son fils se préparent à une journée de farniente sous le soleil ardent. Mais un feu dévastateur embrase l'arrière-pays : la panique générale les accule vers la plage... Face à une mort qui semble inéluctable surgissent les souvenirs, ridicules et sublimes, de toute une vie. Un miracle peut-il encore advenir ?
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Critiques, Analyses et Avis (35) Voir plus Ajouter une critique
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Jaenada et sa famille échappent de justesse à un grand incendie de forêt. Il en tire ce grand roman pourtant hilarant.

Philippe Jaenada renouvelle régulièrement la prouesse de réussir de grands romans, provoquant un rire authentique quasi-permanent durant la lecture, à partir d'un je-ne-sais-quoi et d'un presque-rien dont le seul contenu serait affligeant d'insignifiance chez la plupart des autres écrivains.

"Plage de Manaccora, 16 h 30", son sixème roman, paru en 2009, reste mon préféré à ce jour. C'est ici qu'il atteint son sommet dans cette tentative de montrer à quel point le cerveau humain, nourri de culture générale, d'histoire personnelle, d'idées, de sentiments, de passions, peut produire un invraisemblable monceau de pensées, vagabondes ou non, en quelques instants, et ce, quelle que soit la situation ou l'ampleur de la crise à un moment donné.

Fondé sur une aventure réellement vécue par l'écrivain et sa famille (à savoir se retrouver pris dans un gigantesque incendie méditerranéen lors de vacances en Italie du Sud), ce roman en constitue la démonstration hilarante, servi par ces phrases à rallonge et ces digressions imbriquées dans jusqu'à quatre niveaux de parenthèses qui servent désormais d'heureuse marque de fabrique à Philippe Jaenada.

"Je suis resté quelques secondes horrifié (gourde hypnotisée, je dois reconnaître - mais on ne peut pas m'en vouloir), prenant véritablement conscience de la monstruosité de l'ennemi qui se déployait : des kilomètres de feu féroce contre nous, toute une région enflammée qui se dressait contre nous, petites personnes. (Je me demandais combien de petites personnes à la traîne avaient déjà été tuées là-bas, étaient restées au-delà de la frontière de feu qui avançait, et noircissaient maintenant dans le brasier - je ne savais pas, peut-être pas une, peut-être dix ou cinquante. La vieille en noir, sûrement, recroquevillée et grésillante. D'autres. Où était Tanja ?) La horde brûlante progressait en ligne incurvée pour couper une fuite éventuelle par la forêt, nous cerner et nous rabattre, nous coincer au bord de la mer, nous étouffer. Mais il y avait peut-être une issue juste là, deux mètres plus haut : s'il s'agissait effectivement d'un parking (il en fallait bien un, on ne parcourt pas des kilomètres à pied avec glacière et parasol pour aller jouer à la balle dans une crique - si ?), une route y menait, des voitures y stationnaient - tout ce qu'il faut pour se sauver. C'était, sans mélo, notre dernière chance."
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Un écrivain nommé Voltaire (ce qui donne lieu a des considérations réjouissantes à un moment du roman) loue une petite villa pour les vacances avec sa femme Oum et son fils Géo. Ils sont déjà venus se reposer dans ce petit coin des Pouilles deux ans auparavant, et y connaissent quelques personnes, même s'ils ne parlent pas italien, ce qui est parfois gênant, d'ailleurs. (Ah, la scène du coup de balai sur le balcon, où le narrateur se retrouve enfermé dehors, j'ai failli m'y étouffer de rire !). Mais le village de vacances est cerné de forêts et un incendie se déclare, par temps de grand vent, les obligeant à se réfugier sur la plage.
C'est bien sûr très schématiquement résumé, ce qui est surtout passionnant, c'est que le narrateur fait état de toutes les pensées qui le traversent à chaque moment de cette journée particulièrement éprouvante et dramatique. Avec le style inimitable de Philippe Jaenada, tout hérissé de parenthèses, pratiquant avec acharnement l'auto-dérision et les comparaisons empreintes d'humour, cela donne un résultat à la fois authentique, humain, et dramatiquement drôle.
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Un incendie ravage une région paradisiaque d'Italie. de nombreux touristes se retrouvent pris au piège sur une plage. Un écrivain français, accompagné de sa femme et de son jeune fils, raconte cette tragique odyssée.
Ce récit nous montre la fragilité de la vie, la dérision de l'humanité souffrante et les promesses vite oubliées.
Un bémol sur le style, cependant.
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Pour une (des rares) fois que la quatrième de couverture d'un roman semble ne mentir en rien, on ne va pas passer cette "originalité" sous silence. "Tout a pourtant si bien commencé, y lit-on. Voltaire, écrivain quadragénaire, Oum sa femme, Géo leur petit garçon, sont en vacances au bord de l'Adriatique, fin juillet. Insouciants, sous le soleil implacable. Survient le feu, puis la panique, la course, la lâcheté qu'on découvre en soi, le courage aussi s'il faut sauver les siens. On s'agenouille même au pied d'une Vierge étrangement posée sur une plage italienne. Philippe Jaenada est ici à son meilleur : le portrait d'humains à la dérive, la vanité de leurs efforts, la beauté fragile de la vie. Un magnifique roman d'une drôlerie désespérée."

Ajoutons que le style épouse ici parfaitement le propos, moult digressions venant informer le lecteur sur la vie (en train de se terminer ?) et l'époque des protagonistes du récit (on ne s'y sent presque jamais perdu (et même quand c'est le cas, cela n'est pas désagréable, et certainement pas grave, on suffoque un peu mais ce n'est pas irrespirable) au fil des multiples parenthèses (et parfois des doubles (voire triples) parenthèses)).
Les parenthèses et les digressions sont présentes en masse et sans cesse dans la vie, alors pourquoi pas dans les livres ? Les livres seraient-ils autre chose que (de) la vie ?

Ce que l'on aime aussi dans Plage de Manaccora, 16h30, c'est que ce n'est pas hyper politiquement correct. On avait "peur" (on pourrait même enlever les guillemets) que l'événement tragique raconté tout le long du roman change à jamais les survivants, et qu'ils deviennent des êtres parfaits. Mais ils redeviennent vite eux-mêmes, c'est-à-dire pas grand-chose mais quelqu'un. Comme tout le monde.

Un vrai roman, au fond, c'est quoi ? C'est une personne unique (l'auteur) qui parle à une personne unique (le lecteur) et qui lui demande, avec des phrases uniques, des mots mis dans un ordre unique, de rester unique. C'est toute l'histoire du singulier et de l'universel, et ce sont des milliards de livres encore à écrire et à lire.
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« Les deux premiers jours, tout s'est très bien passé. le troisième, non. » La lecture du livre débute à peine mais déjà le ton est donné, il va y avoir des problèmes mais ils seront présentés avec humour. le père, la mère et leur petit garçon sont en vacances dans un coin perdu de l'Italie, au bord de la mer. C'est l'été, il fait très chaud, tellement chaud qu'un incendie de forêt se déclanche et embrase toute la région. Notre petite famille et quelques centaines de personnes se retrouvent acculées entre les terres en feu et la mer. Les autochtones voient leurs commerces et maisons détruits par les incendies, les vacanciers leurs voitures et bien personnels disparaître dans les flammes mais tout cela n'est rien quand leurs vies ne tiennent plus qu'à un fil.
Philippe Jaenada réussit un tour de force en nous relatant une histoire dramatique et humaine tout en gardant un ton plein d'humour. Ecrit à la première personne du singulier, le père raconte l'histoire ne nous cachant rien de ses petits travers (il est un peu enrobé, il perd ses cheveux, l n'est pas très courageux etc.) ou de ceux des autres (sa femme est maniaque) et l'écrivain combine allègrement le temps présent, les actions passées et les traits d'humour même aux moments les plus incongrus (alors qu'ils sont tous coincés sur un bout de plage et que sa femme retire son slip pour passer son maillot de bain, espérant fuir le feu à la nage, il se satisfait de voir un inconnu reluquer le cul de celle-ci !). Il y aura des morts, une région dévastée, des survivants ruinés, mais aussi de l'espoir, du courage et la vie reprendra son cours.
Un livre magistral émerge de ce récit souvent rigolard et si le titre et la forme inclinent à prendre ce bouquin pour un roman de plage, je vous certifie qu'il va bien au-delà et qu'il vous réservera en tout cas de très bons moments. A lire absolument.
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Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
- Oum ! (J'ai un peu regretté, mais c'était sorti.)
- Il faut que j'aide la dame !
J'ai eu envie de dire quelque chose comme : "Laisse-la, elle a bien vécu!", mais cette fois, je me suis retenu. Pourtant, c'était sincèrement ce que je pensais : je ne trouvais pas normal que nous mourions en essayant de sauver une vieille femme. Je ne voulais pas mettre en jeu la vie de mon fils (et celle de ses parents, soyons honnête) pour que cette brave grand-mère reste quatre ou cinq ans de plus sur terre.
J'ai continué à avancer avec Géo, en ralentissant tout de même un peu pour ne pas abandonner Oum. Je voyais la femme que j'aimais à la traîne, ma raison d'être, sur fond de flammes et de fumée, et ça m'ouvrait les entrailles - tout ce que je réussissais à penser, c'était : "Laisse-la griller, et tu pourras filer." (C'est dans les situations délicates qu'on comprend qu'on est moins altruiste qu'on l'espérait. J'ai été obligé d'admettre à cet instant, et pour le restant de mes jours, que je n'étais pas prêt à risquer la mort, encore moins celle de ma femme et de mon fils, pour sauver quelqu'un. C'est la honte, mais c'est la vie.) p.60
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Avant que nous ayons tout à fait quitté le parking, un bruit violent de verre explosé nous a stoppés : le tatoué chauve qui tournait autour des voitures venait de lancer une pierre (je suppose) dans la vitre d'une petite Fiat rouge. Il a ouvert la portière et plongé sous le volant, certainement pour arracher et connecter les fils ( je crois que je n'aurais jamais l'occasion d'essayer ça, mais j'aimerais bien, on doit se sentir gangster désinvolte, la caméra sur soi - et fuck them all). Ce devait être un voyou, à la ville, un petit braqueur de quartier (on y pense pas, mais ils ont bien le droit d'aller se baigner de temps en temps). C'est parfois très utile, comme formation, ça donne un net avantage sur les autres quand il s'agit de foutre le camp de ce traquenard.
Sous les yeux incrédules des indécis (pas un touriste tremblant ne s'est risqué à monter à côté de lui, les voyous ont leurs propres codes et des réactions imprévisibles - "Vire-moi ton bermuda d'ici, papa, ou je te saigne comme un mouton"), il a démarré en quelques secondes, tout le monde ayant conscience qu'il était en train de condamner à mort une gentille petite famille encore dans la montée ("Va doucement, mémé, on a le temps"), et s'est fait la belle en trombe - en trombe de Fiat, tout est relatif, Fuck them all, sourire édenté.
(Deux jours plus tard, dans La Gazzetta del mezzogiorno, je lirais trois lignes sur le cadavre anonyme retrouvé calciné dans la carcasse d'une Fiat. Ses amis truands de supérette, à Naples, se demandent où il est passé.) p.128
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L'habitude, quand même, a aussi du bon, je me disais. Ca souligne les souvenirs. J'aime les souvenirs, c'est à peu près tout ce qu'on a de sûr, d'intime et dense, une collection précieuse, inaccessible, dedans, : ils se polissent d'eux-mêmes sans qu'on y pense, et prennent, les bons comme les mauvais, une charge de douceur rassurante, lointaine, une enveloppe aimable.
Ils restent là, on peut en profiter quand on veut. J'aime me revoir dans le passé, me rappeler ce que j'étais, ce que j'ai fait à tel endroit où je me trouve maintenant, plus vieux, je m'émeus tout seul, nouille. p.16
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Il fallait entrer dans l'eau, maintenant, ou nous allions griller sans avoir bougé. (…) Oum a sorti de sac de toile orange le bas de son maillot de bain, prévoyant peut-être contre toute raison une longue traversée à la nage – qui n'était pas plus envisageable pour nous qu'un long voyage aérien, bras écartés et jambes jointes, loopings. Sous sa robe courte, elle ne portait qu'une petite culotte de dentelle, qui ne devait pas lui paraître adéquate pour des heures de natation. En maillot, au moins, elle serait à l'aise (quand l'esprit se désorganise, il cherche ses bases). Elle a relevé sa robe sur ses hanches, et s'est penchée en avant pour baisser sa culotte. Comme dans les avions en chute libre, la pudeur (qui, au passage, n'avait jamais étouffé Oum) n'avait plus rien à faire ici. Tous ces culs, ces seins, ces bites, ne valaient plus rien : ils n'existeraient plus dans peu de temps. Et pourtant, en vérifiant derrière elle par réflexe (ça ne change pas, un homme, je crois que c'est Johnny Hallyday qui disait ça), je suis tombé sur le père de famille flanchant dont j'avais tout à l'heure absorbé les craintes du regard. Pendant que sa femme et ses enfants s'écroulaient près de lui, il fixait le cul d'Oum. Métamorphosé deux secondes entre parenthèses, une clarté lubrique sur le visage, une lueur animale (bouc, babouin) dans les yeux, il s'était arraché à l'épouvante et rêvait en regardant le cul d'Oum. Et sa chatte, car elle se penchait bien en avant. Je me suis mis à sa place (mon frère), je ne pouvais pas lui en vouloir. Sa réaction m'a même fait plaisir, et remué. La force déconcertante de l'être humain, qui trouve les ressources, sans même le vouloir, pour s'émouvoir du cil d'une fille à l'approche de la mort ? L'insouciance invincible
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Oum était maniaque (comme on dirait « Attila était nerveux ») et se réveillait toujours deux heures et quart avant d'emmener Géo à l'école (juste en face de chez nous, de l'autre côté de la rue), pour respecter toute une série de rituels entre la cuisine et la salle de bains, sans lesquels elle se désorganisait et partait en toupie contre les murs. Elle gardait certains automatismes en vacances (le jour de l'arrivée, elle tenait toujours à s'occuper de tout dans notre nouveau décor, à tout placer, installer, ranger elle-même, méticuleusement, jusqu'à la lampe de poche et au chargeur de l'appareil photo), mais s'assouplissait tout de même, s'oubliait, déplacée, sortie de son contexte, de sa cage.
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Vidéo de Philippe Jaenada
Son rapport à la famille, au VIH SIDA, sa réussite personnelle, la plus belle remarque qu'on lui a faite sur son livre, découvrez l'entretien avec Anthony Passeron, dixième et dernier épisode de cette première saison Filature.
Anthony Passeron enseigne les lettres et l'histoire-géographie dans un lycée professionnel. Il est né à Nice en 1983, une région qui est au coeur de son premier roman, paru aux éditions Globe, dans lequel il revient sur l'histoire familiale et la figure de son oncle Désiré, mort prématurément du sida et dont le destin tragique a longtemps été occulté. Une véritable révélation littéraire.
Filature, la nouvelle série du Média de la Fête du Livre de Bron présente 10 podcasts où Florence Aubenas, Sébastien Joanniez, Victor Hussenot, Jeanne Macaigne, Corine Pelluchon, Michka Assayas, Kamel Benaouda, Seynabou Sonko, Philippe Jaenada, Anthony Passeron se laissent aller au fil des mots. 10 formats courts de 4 minutes à écouter sur le Média et les réseaux sociaux de la FdLB.
© Collectif Risette/Paul Bourdrel/Fête du Livre de Bron 2023
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