Après un an de tergiversations, je termine enfin le diptyque des Chroniques d'au-delà du Seuil consacré au prince Khimaï de Mitellia. le bilan global est plutôt moyen.
J'avais espéré que ce tome 2 verrait les événements accélérer, se diriger vers des révélations ahurissantes dans un crescendo palpitant. J'en ai été pour mes frais et c'est bien dommage car tout est loin d'être mauvais.
Le tome 2 démarre donc au même rythme que le tome 1 avait fini… et aussi commencé. J'en suis venu à penser que ce diptyque était en fait un seul roman découpé en deux volumes pour des raisons éditoriales (on connaît la méthode très rémunératrice pour l'éditeur et popularisée par Pygmalion).
Les chapitres continuent à s'enchainer, ceux décrivant le présent jouant à saute-mouton avec ceux qui retrace l'initiation du jeune prince. Et le rythme ne varie pas d'un pouce.
Paul Carta continue à assécher le lecteur en petite révélations intermédiaires qui relance l'intérêt du lecteur. Comment Khimaï a-t-il pu perdre son poste de Pourvoyeur au profit d'un usurpateur (chose à priori impossible car la lignée des Pourvoyeurs a fait un pacte avec le fameux Dieu Secret, et on ne saurait tromper un dieu, pas vrai ?) ? Qu'est venue faire son amie d'enfance Lathân dans les montagnes de la sauvage province de Kalenia ? Pourquoi Khimaï lui court-il après ? J'ai rongé mon frein, obligé de franchir de nombreuses descriptions de forêts, de ruisseaux et de campements de nuit à l'intérêt précaire sans que l'auteur ne nous donne un crouton de révélation.
Il faut dépasser la moitié du tome (donc les ¾ du diptyque) pour que les indices arrivent. Mais là, c'est le drame !
Paul Carta en dit trop et court-circuite le principal rebondissement qu'il nous réservait pour la fin. Il est étonnant que ses éditeurs et lui aient laissé passer ça. C'est une erreur scénaristique importante de mon point de vue.
Il y a d'autres erreurs scénaristiques comme l'apparition à la moitié du tome (encore) d'Anhyâ, un personnage féminin très important dans le passé de Khimaï et que l'auteur n'a pas du tout considéré utile d'évoquer avant, ne serait-ce que durant l'une des innombrables introspections du héros. Elle arrive un peu comme un bourdon dans la soupe, pour asperger le lecteur.
Mais j'ai dit tout à l'heure que tout est loin d'être mauvais. Car même si la révélation est quasi-spoilée, l'idée est très bonne. La nature de Mitellia et de son pacte avec le Dieu Secret est une construction que j'ai beaucoup appréciée. L'ensemble de cet univers est décrit par son auteur… je dirais avec précision et amour. Les personnages sont très attachants. Et il faut avouer que la mention en quatrième de couverture de
Jack Vance (pour l'aspect exploration ethnologique),
Ursula le Guin (l'exploration ethnologique aussi et la notion de l'ombre côtoyant la lumière, du Bien et du Mal frères siamois) et
Robin Hobb (pour le voyage initiatique) est justifiée. Cependant, chacun de ces auteurs a fait bien mieux dans son genre.
Paul Carta a écrit un deuxième diptyque dans ses Chroniques, dont je ne sais si elles paraîtront un jour en poche. Si c'est le cas un jour, peut-être irais-je jeter un oeil. Mais ce n'est pas une priorité.