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Célestopol, quelques mois après le dernier texte de
Célestopol 1922. La nouvelle se place dans la continuité de cet univers, et en explore de nouvelles facettes.
Le cadre m'a fait penser au Bonheur des Dames de
Zola. J'y ai retrouvé l'ambiance grands magasins du XIXème siècle et ses petites fourmis qui y travaillent dans l'ombre.
Dans ce texte,
Emmanuel Chastellière évoque en creux le soulèvement des Caréliens de l'Est fin 1921-début 1922, pour une Carélie libre et indépendante de la Russie soviétique. Comme toujours, l'auteur parvient encore ici à tisser des liens entre réalité et imaginaire, brouillant les frontières.
Célestopol, toute imaginaire soit-elle, accueille des personnages au passé ancré dans une réalité historique. Cette évocation de la Finlande dans cette nouvelle est d'autant plus pertinente et frappante qu'elle a des échos avec la réalité contemporaine (demande d'adhésion de l'Otan par la Finlande).
L'auteur évoque également le statut de réfugié, de l'exil. On y voit un rapport évident avec les Ukrainiens de nos jours, et en cela le texte est un bel hommage. D'autant plus intéressant que
Célestopol est la cité russe lunaire, la ville d'accueil du personnage principal… Une façon de dire que rien n'est jamais définitivement ni noir ni blanc ?
On retrouve également des automates pas tout à fait machines, pas tout à fait humaines. Un entre-deux perturbant, qui donne au récit son aspect à la fois féroce, mélancolique et touchant.
J'aime la manière dont
Emmanuel Chastellière mélange subtilement ces ressentis, avec toujours une petite touche steampunk légère. J'apprécie beaucoup que cette esthétique ne se suffise pas à elle seule mais soit mise au service d'un récit plus large. Ici, elle répond à un questionnement sur ce qui différencie l'Humain de la Machine.
Et toujours, en quelques pages, quelque chose de complet, un arrière-plan suggéré mais que l'on parvient à bien reconstruire mentalement. J'aime beaucoup l'écriture d'
Emmanuel Chastellière dans son oeuvre
Célestopol, car il s'en dégage beaucoup d'émotion, un méli-mélo de beauté touchante, de mélancolie amère et d'optimisme, ténu mais présent, dans un univers pas folichon.
Un très beau petit texte qui peut se lire sans difficulté, et sans nécessité d'avoir parcouru les nouvelles des recueils précédents. Une petite porte d'entrée dans
Célestopol, pour qui ne connaîtrait pas encore les recueils de nouvelles ?
Je ne peux que vous y inciter, d'autant que les produits de la vente de cette nouvelle vont en intégralité à la Croix Rouge française en Ukraine. Plus de détails sur l'article du blog.
Lien :
https://zoeprendlaplume.fr/e..