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Janine Poulsen (Autre)Karl E. Poulsen (Traducteur)
EAN : 9782072982279
304 pages
Gallimard (01/09/2022)
4.12/5   8 notes
Résumé :
Danoise née en 1935 et décédée en 2009 à Copenhague, Inger Christensen a produit une oeuvre puissante. Cet ouvrage permet de mesurer l'ampleur de son inspiration et l'originalité très forte de sa manière.
La poésie de Christensen adonnée à la scrutation du monde dans ses éléments les plus naturels entre le sentiment d'émerveillement constant et la conscience exacerbée de la perte et de la disparition imminente de toute chose, allie étonnamment l'obsession d'... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
C'est avec curiosité que je suis entré dans la lecture de cette anthologie poétique de la grande femme de lettres danoise, aujourd'hui disparue, Inger Christensen. Avant cet ouvrage, je ne connaissais rien de cette auteure, par ailleurs romancière, dramaturge et essayiste.

Cette anthologie publiée chez Poésie Gallimard contient cinq de ses recueils, ceux qui, à des périodes différentes, lui ont offert une reconnaissance puis une place centrale dans la littérature danoise : Lumière (1962), Herbe (1963), Lettre en avril (1979), Alphabet (1981) et La Vallée des Papillons (1991).

Ce qui m'a marqué durant la lecture, c'est, très perceptible, son travail sur les mots, sur leur sonorité, leur fortuité, sur la mémoire que chacun renferme en lui et nous lègue. Dans beaucoup de ses textes, elle évoque souvent ce rapport particulier aux mots :

« Je reconnais là
une clairière dans la langue
les mots refermés
sont là pour être aimés
pour être répétés jusqu'au simple »

Dans son écriture, nous sommes comme dans un commencement, comme à la naissance de la parole au coeur du langage. Sa poésie se place dans le point d'intersection entre ce qui est prédéterminé et le fortuit, dans une tension entre l'immuable et l'imprévu. La poétesse tente de rassembler, de concilier ces deux parts inséparables de l'écriture. Elle y parvient avec beaucoup de justesse.

« Dessiner un cercle fragile
dans l'air ou dans l'eau
poser un doigt sur les lèvres
adoucir la foi
poser une mains sur le coeur
te répondre sincèrement :
ne rien répondre
ne rien souhaiter
défendre ta main étrangère
les bras ouverts
défendre les faibles
avec confiance
répondre aux forts
avec confiance
les forts et les faibles
qui ont tous des mains étrangères
qui ont tous des mains étrangères
elles bougent lentement et s'échangent
les faibles et les forts
te répondre sincèrement
dessiner un cercle
dans l'air ou dans l'eau »

Autre point qui m'a particulièrement plu dans la poésie d'Inger Christensen, c'est l'acte d'écrire considéré comme un double mouvement : il y a celui qui aspire, qui intègre en lui le rythme, le flux du monde, et celui qui remonte jusqu'à ce mouvement ordonné des choses pour se couler, pour se fondre dans tout le rythme de l'univers, dans la pleine conscience de celui-ci. Ce rythme puissant de l'univers qui contient notre fin, notre prédestination, contient aussi le fortuit du langage, son élan perpétuel.

« Il y a notre travail avec les images les mots pour
rapporter les choses à leur paysage d'origine. Celui
qui toujours a été le même en même temps. »

.
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Grande figure de la littérature danoise, Inger Christensen , décédée en 2009, a écrit, entre autres, de nombreux recueils de poésie. Plusieurs sont ici réunis.

Est-ce la traduction, pourtant effectuée par des amis de l'auteure, Janine et Karl Poulsen, et surtout la difficulté à rendre certaines contraintes textuelles? J'ai eu beaucoup de mal à entrer dans son univers complexe, déroutant et un peu froid, souvent.

" Je reconnais là
une clairière dans la langue
les mots refermés
sont là pour être aimés
répétés jusqu'au simple "

Effectivement, beaucoup d'anaphores, comme des mantras, et des mots qui ne se sont pas rouverts pour moi. Voici, par exemple, quelques vers bien énigmatiques et au vocabulaire fort recherché:

" pose sur mon âme
une feuille
septilobée atemporelle"

La partie " Alphabet" m'a agacée, l'auteure ayant voulu écrire des poèmes, où les mots du premier commencent par la lettre A, le suivant B etc... Déjà , je ne trouve pas cela particulièrement intéressant. Évidemment, ce procédé ne rend rien en francais. Et c'est tout un défilé de mots avec ce même refrain" ça existe".

Il m'a manqué de la compréhension, il m'a manqué aussi et surtout de l'émotion. Pourtant, certains textes m'ont fortement touchée, comme celui-ci, qui me permettra de ne pas conclure sur une note négative :

" Cueillir des fraises sauvages
dans un taillis d'épines
glisser ma main
en-dessous d'une crainte
d'une peine trop adultes
te donner mon coeur
petit enfant".

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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Croître est une chose
de même nature
Je pense un arbre
un oiseau une image
traversant toutes limites
des ailes écrivent
la croissance du rêve
Là où tu es tombé
le sommeil a d'autres gouffres
il délie les vents
du déjà délié

Je pense un chagrin
où il est tombé
l'oiseau encore
a suspendu un nid
aussi grand que le ciel
et mon âme l'habite
Croître est une chose
peut-être la même
qu'habiter le rêve
Aucun chagrin n'empêche
l'oiseau et l'image


(extrait de " Lumière ").

.
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L'HIVER



L'hiver s'attend à bien des choses cette année

L'hiver s'attend à bien des choses cette année
la plage est déjà raide
tout fera un fera un cette année
ailes et glace feront un dans le monde
tout changera dans le monde :
le bateau entendra ses pas sur la glace
la guerre entendra sa guerre sur la glace
la femme entendra son heure sur la glace
l'heure de la vie dans la glace de la mort
l'hiver s'attend à bien des choses.
S'attend aux maisons, aux villes
s'attend aux forêts, aux nuages
aux montagnes, aux ravins, à l'angoisse
au cœur, aux enfants, à la paix.

L'hiver s'attend à bien des choses cette année
la main est déjà raide
un enfant pleure dans la maison
nous serons un, une vie :
j'entends ma maison glisser avec le monde
elle crie tout ce qui fut crié
le cœur cogne sa coque contre la glace
les gardons bruissent au fond du bateau
l'hiver attend bien des choses.

Si je suis gelé dans la glace
si tu es gelé mon enfant
ma grande forêt qui l’été prochain
ma grande angoisse de venir
si tu es gelée ma vie :
je suis un vautour d’ailes et de glace
déchire mon foie, ma vie vivante
pour l’éveil de l’éternité.

Cet hiver peut s’attendre à bien des choses.


/traduit du danois par Janine et Karl Poulsen
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Je m’appuie tendrement contre la nuit



Je m’appuie tendrement contre la nuit
sur la rampe rouillée
je trouve ma joue, mon épaule,
je trouve ma tendresse :
fer et chair.
            Le reste ondoie, s’effrange
en silence, interroge dedans, dehors
dans l’espace de la nuit, dans l’espace de l’âme :
                                est-ce la mort ?
je pose ma main sur le visage
tremblant de la nuit,
enlève un peu de rouille sur ma joue


/traduit du danois par Janine et Karl Poulsen
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5
l’automne existe



l’automne existe ; l’arrière-goût et la réflexion
existent ; et le seul à seul existe ; les anges
existent, la mémoire, la lumière de la mémoire ;
et la lumière rémanente existe, le chêne et l’orme
existent, et le genièvre, la similitude, la solitude
existent, et l’eider et l’araignée existent,
et le vinaitre existe, et la postérité, la postérité


/traduit du danois par Janine et Karl Poulsen
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HERBE



AMOUR

Cueillir des fraises sauvages
dans un taillis d’épines
glisser ma main
en dessous d’une crainte
d’une peine trop adultes
te donner mon cœur
petit enfant

p.101


/traduit du danois par Janine et Karl Poulsen
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