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EAN : 9782070408832
120 pages
Gallimard (02/02/2000)
3.54/5   1249 notes
Résumé :
Paris, 1931, l'Exposition coloniale. Quelques jours avant l'inauguration officielle, empoisonnés ou victimes d'une nourriture inadaptée, tous les crocodiles du marigot meurent d'un coup. Une solution est négociée par les organisateurs afin de remédier à la catastrophe. Le cirque Höffner de Francfort-sur-le-Main, qui souhaite renouveler l'intérêt du public allemand, veut bien prêter les siens, mais en échange d'autant de Kanak. Qu'à cela ne tienne! Les "cannibales" s... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (184) Voir plus Ajouter une critique
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sur 1249 notes
Qui sont les vrais cannibales ? Ceux qui mangent l'âme de leurs semblables en les privant de liberté .
J'ignorais ce pan de l'histoire, un de plus qui allonge la liste de l'ignominie du racisme et de l'intolérance , ça me laisse un goût de rance.
Et si l'on organisait une exposition de tous ceux qui ont commis l'impensable, que ce soit lors de l'Exposition coloniale de Paris 1931, dont j'ignorais tout avant cette lecture, ou de tout le reste? Nulle scène ne serait assez grande pour ça.

Un récit court et efficace, sans haine.
Un témoignage de plus pour prévenir les horreurs de demain, enfin j'espère.
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J'ai pioché Cannibale dans la boîte des Passeurs de Livres de ma ville. Bonne pioche! Il s'agit d'une édition scolaire et, après lecture, j'ai été ravie que ce livre soit étudié dès le collège.

Le récit de ces jeunes Kanak envoyés à Paris pour représenter la colonie de Nouvelle-Calédonie à l'Exposition coloniale de 1931 est d'autant plus marquant qu'il s'agit d'une histoire vraie. Les peuples indigènes colonisés sont humiliés, obligés s'amuser un public en quête d'exotisme. Un passage particulièrement poignant: lorsque le narrateur découvre que la pancarte désignant la reconstitution d'un village kanak présente son peuple sous les traits d'anthropophages polygames. Il y a là de quoi frémir d'indignation!
Mal nourris, houspillés lorsqu'ils n'interprètent pas leur "rôle" correctement, la coupe déborde pour le narrateur et son meilleur ami lorsqu'une partie des siens - dont sa fiancée - sont séparés du groupe et emportés vers une destination inconnue. Les deux hommes s'évadent et partent à la recherche des leurs dans Paris.

On est bien loin ici des comiques tribulations d'Un indien dans la ville. La jungle de la capitale s'avère nettement plus dangereuse et hostile que leur terre natale. le périple est néanmoins l'occasion de surprenantes rencontres qui montrent que solidarité et respect existent malgré tout.

Le récit raconté avec brio par Didier Daeninckx nous renvoie à des pages sombres de l'Histoire coloniale française. La conquête de territoires s'est effectuée par l'asservissement et l'acculturation des populations autochtones.
Le rapport à l'Autre, la tolérance, le respect sont autant d'éléments qui émanent de ce brillant roman.
A lire et partager et méditer le plus largement possible.
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Bref , puissant et efficace: Trois termes pour définir cet ouvrage de Didier Daenincx.
L'auteur, inspiré autant qu'engagé, revient sur ces ignominies perpétrées à l'encontre de Kanaks lors de l'Exposition coloniale de 1931 et les relie au présent des années 80. C'est simple, direct et sans appel!
L'infamie n'a pas besoin, chez Daninckx, de nombreuses pages pour être dénoncée.
Les saloperies, nous dit l'auteur, nous reviennent toujours dans la figure.
Daeninckx, et il le fait très bien, gratte et raconte là ou ça fait mal à l'histoire et à la mémoire parfois restrictive et sélective.
Un livre qui joint l'utile à l'agréable, en somme. À lire.
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Les zoos humains. Cela a existé. Et pendant bien longtemps. Des blancs regardant des ours ou des « cannibales » (à défaut de crocodiles) accompagnés de leur petits qui ne faisaient pas la différence, c'était normal, pour les petits. Mais les grands ? On ne les comprend vraiment pas aujourd'hui. On parle de l'esprit de l'époque, du colonialisme. de racisme (et encore, on cherche surtout à justifier l'abject). Comment ont-ils pu faire une chose pareille ? Cela paraît si fou, indigne, une négation de l'être humain. Zoo humain, cette expression choque. Mais à bien y regarder -c'est le mot juste- est-ce que cela ne continue pas ? Quel prétexte allons-nous bien pouvoir trouver aujourd'hui ? Certainement pas le manque d'information. Je ne comprends toujours pas. Et on continue à enfermer dans des cahutes des gens, on les filme et on leur envoie des cacahuètes et de l'alcool (ça débride les inhibitions). Aujourd'hui on dit « téléréalité »
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Paris est en pleine effervescence. On est en 1931 et l'Exposition Coloniale s'apprête à ouvrir ses portes. Les représentants de chaque colonie sont venus en groupes du monde entier. Mais loin de vouloir mettre en valeur leur culture, leur singularité et leur richesse, on leur demande de se comporter en sauvages. Parquée dans un enclos, entre les lions et les crocodiles, une tribu de Kanak (c'est à dire les habitants de Nouvelle-Calédonie) va ainsi subir les mauvais traitements des français et va devoir jouer le rôle d'anthropophages primaires, ne communicant que par les grognements et par la danse ! Et, comme si cela ne suffisait pas, une partie de la tribu va être envoyée dans un cirque en Allemagne en échange du même nombre de crocodiles afin de remplacer ceux morts de manière inexpliquée dans l'enclos d'à côté… Pour Badimoin et Gocéné, chargés de protéger leur clan, s'en est trop et tous deux décident de se lancer à la recherche des disparus sans se douter de l'hostilité qui les attend dans la capitale…


Avec « Cannibale », Didier Daeninckx pointe du doigt un épisode particulièrement honteux de notre histoire dont, pour ma part, j'ignorais tout. le récit, raconté par Gocéné des années plus tard, nous plonge dans le Paris des années 30 vu par les yeux d'un étranger qui ne comprend pas le monde qui l'entoure mais qui le ressent et se heurte à ses dangers, ses préjugés et son hypocrisie. C'est le récit sincère, juste et néanmoins sans rancune, d'un homme qu'on a avili, humilié et traité comme un animal dans le simple but de divertir un public en mal d'exotisme… Un texte court, facile à lire et cependant d'une grande richesse, qui donne à réfléchir et bouleverse par sa brutalité et l'injustice à laquelle il renvoie. Je comprends mieux pourquoi il est si souvent prescrit au collège !
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Citations et extraits (91) Voir plus Ajouter une citation
Tout le monde nous court après, et toi, tu nous aides. Pourquoi? Tu ne nous connais pas, tu ne sais rien de nous...
Des enfants sont passés en chahutant, de l'autre côté de la cloison. Fofana s'est raclé la gorge pour s'éclaircir la voix, puis il a souri.
- On a un peu la même couleur, bien que vous ne veniez pas d'Afrique, et quand des Noirs sont poursuivis par des policiers, je ne sais pas pourquoi, je suis du côté des Noirs... Moi, je suis sénégalais. Je suis né en Casamance. Presque tous les jeunes de mon village sont morts à Verdun. A cause des gaz... Les soldats blancs ne voulaient plus monter à l'assaut, et c'est à nous, les tirailleurs des troupes coloniales, que le général a demandé de sauver la France. On s'est dégagés dans la boue des tranchées au petit matin, sans masques, poussés par la police militaire et les gendarmes qui étaient protégés, eux, et qui abattaient les frères qui essayaient de fuir le nuage de mort... Je me suis jeté dans un trou d'obus. Il y avait un cadavre. Je me suis barbouillé avec son sang, et j'ai fait comme si j'avais été touché... Le nuage planait au-dessus de moi... Je n'en ai respiré qu'un peu... Cela fait quatorze ans que je suis sorti de ce trou, mais le souvenir est toujours-là, devant mes yeux. Il est devenu mille fois plus précis quand je vous ai vus courir devant les policiers...
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— Ah, c’est enfin vous, Grimaut ! Cela fait bien deux heures que je vous ai fait demander... Que se passe-t-il avec les crocodiles ? J’ai fait le tour du parc ce matin, avant de venir au bureau, je n’en ai pas vu un seul dans le marigot...
Grimaut commence à transpirer. Il baisse les yeux.
— On a eu un gros problème dans la nuit, monsieur le haut-commissaire... Personne ne comprend ce qui a bien pu se passer...
— Cessez donc de parler par énigme ! Où sont nos crocodiles ?
— Ils sont tous morts d’un coup... On pense que leur nourriture n’était pas adaptée... Á moins qu’on ait voulu les empoisonner...
L’administrateur reste un instant sans voix, puis il se met à hurler.
Grimaut déglutit douloureusement.
— Morts ! Tous morts ! C’est une plaisanterie... Qu’est-ce qu’on leur a donné à manger ? De la choucroute, du cassoulet ? Vous vous rendez compte de la situation, Grimaut ? Il nous a fallu trois mois pour les faire venir des Caraïbes... Trois mois ! Qu’est-ce que je vais raconter au président et au maréchal, demain, devant le marigot désert ? Qu’on cultive des nénuphars ? Ils vont les chercher, leurs crocodiles, et il faudra bien trouver une solution... J’espère que vous avez commencé à y réfléchir...
L’adjoint a sorti un mouchoir de sa poche. Il se tamponne le front.
— Tout devrait rentrer dans l’ordre au cours des prochaines heures, monsieur le haut-commissaire... J’aurai une centaine de bêtes en remplacement, pour la cérémonie d’ouverture. Des crocodiles, des caïmans, des alligators... Ils arrivent à la gare de l’Est, par le train de nuit...
— Gare de l’Est ! Et ils viennent d’où ?
Grimaut esquisse un sourire.
— D’Allemagne...
— Des sauriens teutons ! On aura tout vu... Et vous les avez attrapés comment vos crocodiles, Grimaut, si ça n’est pas indiscret ?
L’adjoint se balance d’un pied sur l’autre.
— Au téléphone, tout simplement. Ils viennent de la ménagerie du cirque Höffner, de Francfort-sur-le-Main. C’était leur attraction principale, depuis deux ans, mais les gens se sont lassés. Ils cherchaient à les remplacer pour renouveler l’intérêt du public, et ma proposition ne pouvait pas mieux tomber...
Albert Pontevigne fronce les sourcils.
— Une proposition ? J’ai bien entendu... J’espère que vous ne vous êtes pas trop engagé, Grimaut.
— Je ne pense pas... En échange, je leur ai promis de leur prêter une trentaine de Canaques. Ils nous les rendront en septembre, à la fin de leur tournée.
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Nous avons longé la Seine, en camion, et on nous a parqués derrière des grilles, dans un village kanak reconstitué au milieu du zoo de Vincennes, entre la fosse aux lions et le marigot des crocodiles. Leurs cris, leurs bruits nous terrifiaient. [...] Au cours des jours qui ont suivi, des hommes sont venus nous dresser, comme si nous étions des animaux sauvages. Il fallait faire du feu dans des huttes mal conçues dont le toit laissait passer l'eau qui ne cessait de tomber. Nous devions creuser d'énormes troncs d'arbres, plus durs que la pierre, pour construire des pirogues tandis que les femmes étaient obligés de danser le pilou-pilou à heures fixes. [...] J'étais l'un des seuls à savoir déchiffrer quelques mots que le pasteur m'avait appris, mais je ne comprenais pas la signification du deuxième mot écrit sur la pancarte fichée au milieu de la pelouse, devant notre enclos : Hommes anthropophages de Nouvelle-Calédonie.
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- Tu vas te taire, à la fin ! Si tu n'essaies pas de t'échapper, si tu ne hurles pas, on ne te fera pas de mal... on veut seulement parler avec toi. Tu vas venir avec nous sans faire d'histoires...
Il a marmonné contre ma main, en roulant des yeux et en relevant ses sourcils. Badimoin a assuré sa prise puis il l'a obligé à escalader le monticule. Nous nous sommes arrêtés à l'autre extrémité du relief qui formait une sorte de terrasse naturelle au-dessus du marigot. On entendait distinctement les clapotements, les respirations inquiétantes, les claquements de mâchoires des sauriens affamés. J'ai fait glisser ma main, libérant ses lèvres.
- Qu'est-ce que vous me voulez tous les deux ? Vous vous croyez dans votre jungle !
Badimoin, qui lui interdisait tout mouvement s'est penché à son oreille.
- Si ça n'avait tenu qu'à nous, on y serait restés...
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Moi, je suis sénagalais. Je suis né en Casamance. Presque tous les jeunes de mon village sont morts à Verdun. A cause des gaz... Les soldats blancs ne voulaient plus monter à l'assaut, et c'est à nous, les tirailleurs des troupes coloniales, que le général a demandé de sauver la France. On s'est dégagés de la boue des tranchées, au petit matin, sans masques, poussés par la police militaire et les gendarmes qui étaient protégés, eux, et qui abattaient les frères qui essayaient de fuir le nuage de mort...
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Vidéo de Didier Daeninckx
Dans le 170e épisode du podcast Le bulleur, on vous présente le parcours de Missak Manouchian, récemment entré au Panthéon, à travers deux bandes dessinées sorties récemment chez Les Arènes BD et Dupuis. Cette semaine aussi, on revient sur l’actualité de la bande dessinée et des sorties avec : - La sortie de l’album Copenhague que l’on doit au duo Anne-Caroline Pandolfo et Terkel Rijsberg, publié aux éditions Dargaud - La sortie de l’album Le champ des possibles que l’on doit au scénario de Véro Cazot, au dessin d’Anaïs Bernabé et c’est édité chez Dupuis - La sortie de l’album L’homme miroir que l’on doit à Simon Lamouret et aux éditions Sarbacane - La sortie de l’album The Velvet underground, dans l’effervescence de la Warhol factory que l’on doit à Koren Shadmi et aux éditions La boite à bulles - La sortie de l’album Sept vies à vivre que l’on doit à Charles Masson et aux éditions Delcourt dans la collection Mirages - La réédition de l’album Mauvaises herbes que l’on doit à Keum Suk Gendry-Kim et aux éditions Futuropolis
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Cannibale

Dans quel lieu Gocéné et ses compagnons sont-ils emmenés ?

En Allemagne à Berlin.
Dans un zoo en Australie.
A l'Exposition Coloniale à Paris.
En Suède dans un parc d'attractions.

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