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EAN : 9782742718825
160 pages
Actes Sud (04/06/1999)
4.5/5   1 notes
Résumé :
Le narrateur adresse toute une série de lettres à Kawabata, prix Nobel de littérature. Cette correspondance sans réponse (l'écrivain japonais est décédé en 1972) permet à l'auteur de dessiner peu à peu la biographie d'un homme qui lui ressemble comme un frère.
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Dans ce court texte, présenté comme roman, l'auteur écrit une sorte de lettre à Kawabata, déjà mort au moment de la rédaction du livre. Mais il ne sera finalement jamais question de Kawabata, de ses livres, de sa vie. L'auteur invoque le japonais comme il le ferait d'une divinité tutélaire et lointaine, dans la répétition de l'expression Cher Monsieur Kawabata. Mais c'est bien de la vie de Rachid El-Daïf qu'il s'agit. Né dans un village de chrétiens maronites, fils de pauvres paysans, son destin semble tracé, et son père projette de le retirer de l'école dès qu'il saura lire et écrire. C'est sans compter sur la volonté de sa mère, décidée d'en faire un fonctionnaire, sommet de la réussite à ses yeux, et à la volonté de l'enfant lui-même, pour qui l'école est une révélation, qui remet en cause l'univers tel que l'imaginent ses parents. le fait que la terre est ronde et tourne autour du soleil nous semble une évidence, mais ce n'était pas le cas pour ces paysans vivant dans des croyances ancestrales. le narrateur se fait donc le chantre de cette nouvelle représentation du monde, de la science, de la libération de l'homme qu'elle peut permettre. Il trouve des échos puissants de son combat dans La vie de Galilée de Bertolt Brecht. Et adhère à la fin de l'adolescence au communisme, et devient un combattant de la cause palestinienne.

Mais au final, le discours du communisme n'est pas différent du discours de la religion et de la tradition, c'est une interprétation du réel bâtie sur des présupposés, qui semblent logiques et cohérents, mais qui faussent le réel, l'amènent par un discours dans la direction souhaitée. Ce n'est pas une libération, mais une manière de fabriquer des hommes aliénés, dans le sens qui deviennent étrangers à eux-mêmes, à leur propre culture. Comme la tradition peut-être aliénante, si elle rend impossible à l'individu de se construire librement, en lui imposant les comportements et croyances de son milieu d'origine et le réduisant à cette seule appartenance.

Notre narrateur se retrouve donc à la fin du livre en train de vaciller, au point de se voir extérieur à lui-même. Ayant abandonné celui qu'il devait être de par son milieu, et celui qu'il avait rêvé d'être grâce au communisme, il lui reste à reconstituer une unité psychique, à donner sens, à se donner sens. Sans béquilles.

C'est incontestablement passionnant, mais en même temps pas si facile à suivre. Car l'auteur dans son aventure personnelle, traverse l'histoire du Liban sur quelques décennies, et si on ne la connaît pas très bien, on peut être perdu, avoir la sensation de quelque chose de fragmentaire. La lecture a donc été en partie frustrante pour moi.
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Peut-être aurais-je dû le lire d'une traite, comme on peut imaginer de lire jusqu'au bout la lettre qui nous est destiné. Certains écrivains ont imaginé, décrit le lecteur de leur texte ; le nom bien connu de l'écrivain japonais entraîne celui de Rachid El-Daïf à lire ce récit chaotique d'un autre point de vue. Un écrivain profond, plus touchant que drôle, d'une grande sagesse sans aucun doute... un écrivain mort depuis dix-neuf ans (la lettre est datée de 1991) bref, on prend de la hauteur d'une certaine manière.

Puisque le narrateur de cette lettre nous raconte ce qu'il a vécu entre 1945 et 1975, au Liban : des tensions avec les aïeux portés sur la doctrine traditionnelle, autorité de Dieu, refus de croire en la rotondité de la planète. Tensions liées à la guerre froide, puis à celle qui débute entre Israël et la Palestine. Meurtres, guerres civiles, violences révolutionnaires... c'est le contexte, et Rachid se raconte au travers de ce qu'on imagine semer un désordre moral pour celui qui le vit.

Mais Rachid se souvient de tout. Y compris du moment où sa mère accouchait de lui. le narrateur se contente cependant de dit qu'il se souvient, il ne le montre pas toujours. La narration vagabonde passe d'un sujet à l'autre. Ce qui ressort longuement de cette confession, c'est cet échange entre deux écrivains qui ont en partage la connaissance de la mort.
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Pourquoi, monsieur Kawabata, sommes-nous incapables, nous les gens bien ordinaires, ou bien encore nous, l'ordinaire des gens, d'évoquer le passé autrement qu'avec nostalgie ? Pourquoi ne pouvons-nous le faire de façon simplement impartiale ? J'aurais dit "objective", n'était-ce la prudence...
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