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sur 223 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Le lecteur trimard
Lire Mathias Enard, c'est accepter une séance de CrossFit pour ses neurones sans les tapes dans la main d'inconnus surexcités en sueur qui vous encouragent à vous faire encore plus mal pour perdre trois grammes.
Son exigence d'écriture impose de l'attention et il est agréable de suivre un auteur qui fait suffisamment confiance à l'intelligence de ses lecteurs pour ne pas tout leur écrire, pour ne pas mâcher toute l'imagination.
Son dernier roman raconte deux récits différents en surface, entrelacés dans des chapitres alternés.
D'un côté, un soldat sans nom a déserté pour échapper à la violence et aux atrocités d'une guerre. Pour fuir le monde, il se réfugie dans une cabane isolée de son enfance. Une femme, également en fuite, va croiser son chemin et troubler ses projets. du Cormac McCarthy mixé avec du Giono avec un auteur marqué au moment de l'écriture par la guerre en Ukraine.
L'autre histoire est un hommage à la mémoire de Paul Heudeber, un mathématicien poète est-allemand, qui a inventé bien plus que le fil à couper le beurre, meilleur en géométrie qu'en géopolitique, incapable de résoudre l'équation de l'effondrement du mur de Berlin. Sa fille Irina restitue le déroulement d'un colloque à bord d'un paquebot de croisière en septembre 2001. Sur le rafiot, outre des universitaires et des savants, se trouve, Maja, le grand amour empêché de la vie de Paul. L'ancien rescapé de Buchenwald n'abandonnera jamais son militantisme communiste. Maja choisira elle une carrière politique de l'autre côté du mur et le récit offre des extraits de correspondances de cet amour à distance.
Deux récits différents mais qui partagent des destins broyés par l'histoire. La question de la violence de la guerre est au coeur de l'oeuvre de Mathias Enard. le soldat a déserté son armée pour sauver son âme, La jeune femme a déserté un village, Paul Heudeber a déserté la réalité pour ne pas perdre ses illusions idéologiques, Maja a déserté son couple pour l'action politique.
Toujours aussi inventif dans la forme et novateur dans la ponctuation, Mathias Enard glisse toujours beaucoup de poésie dans ses pages. Son érudition et la puissance de sa réflexion transpirent dans ses mots. Il n'y a jamais de phrase gratuite chez lui.
Si le récit du déserteur m'a vraiment embarqué, autant je suis un peu resté à quai du paquebot sur lequel se réunissaient les amis, collègues, élèves et amours du mathématicien pour évoquer son oeuvre et sa vie. Peut-être parce que j'ai toujours été nul en math. La simple vision d'un rapporteur me traumatise encore. Peut-être parce que la forme de l'hommage génère un peu trop de distance avec l'histoire. le passé n'est jamais simple quand il est trop composé.
Mathias Enard reste néanmoins un auteur majeur et je ne déserterai pas ses prochaines parutions.
Chez Enard, 1 + 1 = 1.
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Deux histoires en une, voilà ce que nous propose Mathias Énard avec « Déserter »
Le premier qui ouvre le bal est un soldat qui fuit une guerre, laquelle on ne sait pas, le lieu non plus mais toutes les guerres se ressemblent, non ? Et lorsqu'on est déserteur, on reste quand même un soldat avec ses réflexes et ces souvenirs qui collent à la peau.
« Tu es encore des leurs, tu portes toujours des armes, des munitions et des souvenirs de guerre, tu pourrais cacher le fusil et les cartouches dans un coin et devenir un mendiant, laisser le couteau aussi, les mendiants n'ont pas de poignard. »
La seconde histoire est plus complexe, avec de nombreux personnages qui gravitent autour de Paul Heudeber, ce mathématicien de génie auteur de « Les conjectures de Buchenwald » oeuvre à la fois mathématique et littéraire écrite durant son internement à Buchenwald. C'est à travers les témoignages d'amis, de confrères qui admirent ses travaux, les lettres adressées à sa compagne et le récit de sa fille unique, Irina que va se reconstituer sous nos yeux la vie de Paul. Irina qui ne sait pas grand-chose de ses parents et découvre, longtemps après la disparition de son père, quel couple étrange il formait avec sa mère Maja dont il était éperdument amoureux -les lettres le prouvent- mais qui a choisi de vivre loin d'elle. le mur les sépare. Tandis que Maja vit à l'ouest, Paul, communiste et antifasciste convaincu, est resté à Berlin Est, Irina se souvient des va et vient entre les deux Allemagnes pendant l'époque du rideau de fer. Lui, ce n'est pas son pays qu'il déserte et, pourtant, campé dans son obstination de ne pas affronter la réalité, il déserte le réel pour se plonger dans les mathématiques. Mais est-ce que l'infinité des nombres premiers jumeaux peux protéger de la vie et des désillusions ?
Il écrit à sa femme : « Les mathématiques sont un voile posé sur le monde, qui épouse les formes du monde, pour l'envelopper entièrement. »
Sa fille dit de lui « Mon père marchait sur deux jambes : l'algèbre et le communisme. Ces deux membres lui permettaient de parcourir la vie entière. Ces deux mondes lui avaient permis de survivre à la déportation. «
Irina, qui va aussi fuir toute sa vie en vivant et travaillant à l'étranger, revient sur le passé de ses parents. Tandis que son père se réfugie dans ses recherches, sa mère poursuit sa carrière et devient une personnalité du SPD. Peu à peu se construit comme un puzzle, l'histoire du couple qui a vécu les soubresauts de l'histoire du XXe siècle. Une lettre de Linden Pawley, chercheur en mathématique, lui apprend qu'il a été l'amant de sa mère Maja, mais qu'il avait conscience qu'il n'avait pas le génie de Paul Heudeber.

Et que devient le déserteur, celui que nous avons laissé dans une cabane au milieu du maquis ? Il va croiser une femme en fuite avec son âne borgne. Ces deux-là ne peuvent s'entendre, et pourtant, ils fuient la même horreur et cherchent l'oubli au-delà de la frontière. Encore faut-il l'atteindre au milieu des dangers. Cette histoire, c'est une sorte d'allégorie qui semble écrite uniquement pour nous ramener à cette idée brute de désertion. Ces retours à l'histoire sans date et sans nom de lieux du soldat déserteur font comme des pauses dans le récit complexe de Paul.

Ce que j'aime chez Mathias Énard, ce sont ces morceaux d'histoire dans lesquels évoluent ses personnages. On traverse ainsi, par récits juxtaposés, une période sombre du XXe siècle. A travers le colloque consacré à Paul Heudeber et qui se déroule précisément le 11 septembre 2001, jour de l'effondrement des tours jumelles, il nous rappelle ainsi une des grandes tragédies de ce début de siècle. Et il y a jusqu'à la guerre d'Ukraine qui sera évoquée au passage.
Le récit de Mathias Énard est d'une construction précise et documentée, il ne nous emmène pas n'importe où. Par contre, j'ai eu du mal avec les concepts mathématiques, j'avoue que ce n'est pas ma tasse de thé, et, malgré mes efforts je n'ai pas vu l'aspect littéraire dans l'énumération mathématique. (Voir page 191)
J'avoue m'être un peu perdue dans les méandres du récit mais, malgré cet écueil, j'ai aimé cette histoire qui plonge ses racines dans les mystères de la grande histoire.

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Une première de couverture magnifique, forte de singularité. Un titre simple, beau de concision.
Voici deux accroches efficaces pour se démarquer de la multitude de romans et m'attirer.
Deux, c'est aussi le choix narratif de l'auteur qui entrelace dans ce roman deux histoires autour du mot déserter.

*
« Déserter », c'est l'histoire d'un homme qui fuit la guerre et se réfugie dans les montagnes de son enfance. Là, à l'abri des regards et des hommes, se trouve la cabane où il a vécu enfant. Il espère pouvoir se reposer et panser ses blessures psychiques avant de poursuivre sa route vers la frontière.
Il y a une forme de dualité chez lui : je l'ai senti vulnérable, méfiant, apeuré, mais aussi capable d'une grande violence.

Au travers de cette narration, on imagine sans peine le paysage montagneux dévoilé dans sa beauté et sa grandeur écrasante. Elle s'exprime de la manière la plus douce pour se dérober l'instant d'après et devenir sauvage et impitoyable.
En effet, les mots de la guerre se cessent de s'immiscer dans les descriptions de la nature. La mer en contrebas, assombrie de teintes allant du bleu violacé au gris, forme une ligne inquiétante, hostile, celle du front. le regard de l'homme est constamment attiré par cet horizon sombre, déclenchant des souvenirs de guerre d'une extrême violence.
Exécutions. Tortures. Viols.

Et puis, arrive une jeune femme avec son âne qui fuit également la guerre pour d'autres raisons que lui. Elle le reconnaît, elle l'a déjà croisé dans son village. Il est comme tous ces hommes qui portent l'uniforme et brandissent une armes : un assassin, un tortionnaire, un violeur.

L'auteur croise leur point de vue, mettant en lumière leurs émotions, leurs sentiments. Cette rencontre va soulever des questions et exiger inévitablement, pour chacun d'eux, de faire des choix.
La vie ou la mort.
La paix ou la haine.
La confiance ou la peur.
L'entraide ou la violence.

*
C'est autour des théories mathématiques que se construit le deuxième récit.

Car « Déserter », c'est aussi l'histoire d'Irina qui organise à Berlin, sur un bateau de croisière, un colloque pour rendre hommage à un grand mathématicien est-allemand décédé, Paul Heudeber, qui fut également son père.
Nous sommes le 10 septembre 2001, la veille de la plus grande attaque terroriste perpétrée aux Etats-Unis, une date qui restera gravée à jamais dans les mémoires de ceux qui ont vu les terribles images de l'effondrement des tours du World Trade Center.

L'auteur nous fait entrer dans la tête d'Irina, ses pensées remontent le cours du temps, reviennent sur le temps présent et la violence du monde d'aujourd'hui.
Ses souvenirs forment un puzzle où chaque pièce permet de reconstituer l'histoire de ses parents, Paul et Maja. C'est une belle histoire d'amour, entrecoupée de lettres que Paul adresse à sa compagne. Mais au fil du récit, des failles apparaissent. Non-dits, silences, peines, absence, solitude, espoirs et désillusions.

« Maja mon amour,
Les mathématiques sont un voile posé sur le monde, qui épouse les formes du monde, pour l'envelopper entièrement ; c'est un langage et c'est une matière, des mots sur une main, des lèvres sur une épaule… »

J'ai aimé le personnage de Paul. Sensible et rêveur, rescapé de l'enfer du camp de Buchenwald, il croyait en un monde nouveau et meilleur, un monde plus juste, plus pacifique, plus humain.

« … les mathématiques étaient l'autre nom de l'espoir. »

Le destin de ce couple est également l'occasion de voyager à travers l'espace et le temps, entre l'Allemagne de l'Est et l'Allemagne de l'Ouest, entre le présent et le passé, en particulier durant la seconde guerre mondiale et la guerre froide.

*
L'écriture est forte et subtile dans ce croisement de personnages, de lieux et d'époques. Pourtant, un fil conducteur unit ces deux récits, celui de l'intime.
L'auteur parvient à tisser des liens autour du mot « déserter ». Peu à peu, le lecteur établit des parallèles, entrevoit des connexions, découvre des analogies entre les deux récits où les hommes sont à la fois acteurs et victimes de la violence et de la guerre. Chaque personnage se retrouve face au miroir de leur conscience qui leur renvoie leurs actions, leurs trahisons, leurs pensées, leurs rêves, leurs émotions, leur manque de lucidité, leurs réussites et leurs échecs.

*
Ce que j'aime dans la littérature, c'est lorsque l'écriture se pare de poésie, de couleurs, d'odeurs, de sensation, de sensualité, d'émotions. En cela, le roman de Mathias Enard a tout à fait correspondu à mes goûts littéraires.

Dans le premier récit, celui du déserteur, la nature est très présente, elle forme comme un écrin printanier. J'ai aimé ce récit poétique, imprégné des odeurs rassurantes du feu de bois, des plantes aromatiques et des souvenirs d'enfance. En effet, l'écriture de Mathias Enard est sensorielle, elle nous permet de percevoir les parfums, les couleurs, les bruits, les textures, de donner corps à ce paysage montagneux, sûrement méditerranéen, qui présente deux visages.
Ce qui m'a particulièrement plu aussi, c'est la présence de l'âne qui amène une prise de conscience de ce que les hommes deviennent en temps de guerre, des monstres.

« … il se rend compte soudain que l'âne est borgne, son oeil droit est bleu et blanc comme une bille vitreuse, à demi recouvert par la paupière, son dos porte des blessures qui suppurent, il faudra peut-être l'abattre,
tu ne sais rien d'autre qu'abattre, tu ignores tout des ânes et des animaux, ils ont l'innocence de leur bestialité, pas toi, tu t'enroules dans la brutalité comme dans un manteau, … «

Dans le second récit, le langage des mathématiques renferme un côté plus âpre et froid. Néanmoins, il garde une dimension poétique, une forme de mélancolie et de nostalgie, d'espoir et de courage, de souffrance intérieure.
Plus complexe à lire, il m'a paru mais même temps plus profond.

« Les mathématiques sont un voile posé sur le monde, qui épouse les formes du monde, pour l'envelopper entièrement. »

*
Mathias Enard signe un beau roman où l'intime et la guerre s'entremêlent avec subtilité.
A découvrir.
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C'est toujours un évènement quand sort un roman de Mathias Enard.
Je me réjouissais donc par avance en contemplant la couverture avec une photo en contre-jour d'un animal – on pense rapidement à un âne lorsqu'on entre dans le récit.

Contre-jour : un terme qui pourrait être un fil conducteur - mais n'allons pas trop vite.

« Déserter » raconte deux histoires en parallèle.

Dans l'une des deux, un soldat – il n'a ni nom, ni identité particulière – fuit la guerre. On suit ses mouvements au quotidien, il chemine vers la maison abandonnée d'un proche, il est seul, et c'est difficile. Il va rencontrer à proximité un âne (ça se confirme). Et une femme (dont on apprendra l'histoire par bribes). Et ils vont tenter de fuir ce qu'on imagine être un bord de mer pour une frontière, au Nord, qu'ils tentent de rejoindre cahin-caha.
Dans l'autre, on apprend dès le second chapitre qu'un hommage est rendu à un homme, Paul Heudeber, mathématicien allemand. Dans un très grand flash-back, on va découvrir son histoire : son amour immodéré pour Maja, leur fille Irina, dans un contexte de frontière entre la RFA et la RDA. On apprendra que Paul aura été déporté à Buchenwald, qu'il en ressortira, le tout au travers de courriers qu'il a écrit à ses proches, ou des témoignages de Maja et d'Irina.

Le thème principal de « Déserter » c'est la guerre. C'est le XXème siècle. Même s'il y a quelques incursions dans le XXIème (on va évoquer par exemple la Guerre en Ukraine, on n'en aura jamais fini) c'est plutôt le siècle qui a connu deux guerres mondiales dont il est question. Et comment en sortir.
Soit en fuyant, comme avec ce personnage de soldat, ou en slalomant entre les mauvaises gouttes de l'histoire quand on vit en Allemagne.
Le terme « déserteur » est plutôt négatif (même si une belle chanson en a fait son titre). Mathias Enard nous fait vivre l'après-guerre au quotidien, avec un tout univers sensoriel très développé : il nous donne à voir, à entendre et même à toucher un univers qui nous semble soudain très proche, il y est beaucoup question d'odeurs, mais aussi de paysages et de sons de guerre au lointain.

C'est âpre. C'est dur.

Que sont devenus en effet tous ces militants communistes, laminés par la dictature de l'URSS, qui a douché tous les espoirs d'un monde plus fraternel ? Il réussira à écrire « Les conjectures de Buchenwald » une curieuse oeuvre poétique mathématique et littéraire conçue à Buchenwald. le totalitarisme de la RDA va passer par là, et Paul Heudeber apprendra peut-être que les mathématiques sont l'autre nom de l'espoir.

C'est sombre.

Je me suis accrochée à ce récit comme un alpiniste sur un fragment de roche, c'était difficile, j'ai eu du mal à entrer en empathie avec les deux principaux personnages, je l'avoue.

Avec le soldat on pense au regretté Hubert Mingarelli, et à ses « Quatre soldats » que je vous recommande ou à « Un repas en hiver » que j'avais chroniqué en son temps – la douceur en moins.

Pour le mathématicien allemand, je ne sais pas. On pense au film « la vie des autres », sur l'espionnage d'un couple d'artiste, beaucoup plus qu'au film « Good bye Lenin ! » avec son côté jubilatoire.
Mais je ne sais pas. Est-ce à cause de côté « Contre-jour » si sombre ? Peu d'espoir en effet dans ces deux histoires parallèles.

J'ai lu que plusieurs Babeliotes aussi avaient eu du mal avec le mathématicien berlinois, sur un thème pourtant très intéressant posant la question de ce qui reste de tous ces intellectuels communistes du XXème Siècle.

Comme toujours chez Mathias Enard c'est très érudit, très bien écrit (l'alternance du « il » et du « tu » dans le même paragraphe côté soldat rendant la scène très présente) mais je ne me suis pas autant plus à lire « Déserter » que j'ai pu le faire dans d'autres récits », comme » Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants » - beaucoup plus léger, ou « Boussole » qui a eu le Prix Goncourt ou « Rue des voleurs.

Un « Déserter » qui mérite néanmoins qu'on s'y attarde, qu'on s'y rallie, qu'on y revienne, voire qu'on s'y engage pour citer quelques-uns de ces antonymes.
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Le mathématicien et la politicienne

Mathias Enard nous revient avec un roman dans lequel s'entrecroisent deux destins pris dans la folie guerrière, un déserteur cherchant à fuir les combats et un survivant du camp de Buchenwald. le Prix Goncourt 2015 y mêle aussi poésie et mathématiques, horreur et espoir.

Un homme marche dans la montagne. Il se bat contre le froid et la faim, contre son corps endolori et contre une suite d'événements qui l'ont poussé à fuir, à tenter de rejoindre la masure où sont rassemblés quelques souvenirs d'enfance.
Alors qu'il chemine, le romancier change de registre et choisit d'évoquer un colloque scientifique organisé en septembre 2001 sur un bateau naviguant sur la Havel et la Spree, du côté de Berlin. Les invités, parmi lesquels bon nombre de ses anciens élèves, sont venus rendre hommage au mathématicien Paul Heudeber en présence de Maja, sa veuve.
Vingt ans plus tard, la narratrice – leur fille Irina – se souvient : «J'ai passé ma vie d'adulte à écrire, à parler et à écrire, et aujourd'hui que je viens de fêter mes soixante-dix ans, pour la première fois c'est ma propre vie que je raconte. de quelle façon celle de Paul s'y reflète, celle de Maja.»
Comme on va le découvrir un peu plus tard, ce besoin impérieux de témoigner est lié à la Guerre froide et à la partition de l'Allemagne, qui a contraint Irina une grande partie de sa vie à voir Maja et Paul «se courir après d'un côté à l'autre du Rideau de Fer, d'un côté et de l'autre du mur de Berlin, d'un côté et de l'autre de l'Impérialisme». C'est elle qui se sent désormais investie de la mission de raconter cette liaison très particulière entre le «personnage public célèbre et célébré de l'Allemagne de l'Est, communiste fervent jusqu'à la déraison et elle, femme politique de l'Ouest, toujours soupçonnée d'intelligence avec l'ennemi.» Si Paul Heudeber ainsi que son livre «Les Conjectures de l'Ettersberg» sont nés de l'imagination de l'auteur, le contexte et certains personnages qu'il côtoie sont bien réels. J'y ai même retrouvé mon arrière-grand-oncle, Franz Dahlem, qui comme Paul a choisi de rester en RDA où il rêvait de construire un communisme à visage humain.
On suit en parallèle les réminiscences de la septuagénaire et le quotidien du soldat en fuite. Arrivé dans une cabane, qui lui permet de reprendre quelques forces, il va apercevoir une femme et son âne, s'imagine un danger potentiel, et décide de la tuer avant de changer d'avis et lui venir en aide. La cohabitation avec cet animal fourbu et cette femme meurtrie va paradoxalement l'aider dans sa quête, lui donner la chance de retrouver la part d'humanité qu'il s'imaginait perdue.
La clé du roman nous est fournie par l'Américain Linden Pawley, l'un des mathématiciens présents lors de ce colloque qui se déroule en 2001, au moment où les tours jumelles s'écroulent à New York. Dans une longue lettre-confession adressée à Irina, il détaille ses relations avec Maja et conclut : «J'ai parfois l'impression que tout cela est lié, obscurément, que nous sommes tous reliés les uns aux autres comme une suite de nombres, sans que nous ne comprenions très bien comment.»
Une grande partie, sinon toute l'oeuvre de Mathias Enard tourne autour de ces liens invisibles, de ces concordances entre dans événements éloignés dans le temps, mais qui construisent une histoire tout autant personnelle qu'universelle. Avec son style chatoyant aux images fortes, où la poésie et la sensualité se mêlent à la rigueur historique – et en l'occurrence aussi mathématique – il nous offre une sorte de bréviaire pour les temps difficiles, alors que la guerre tonne à nouveau en Europe.


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Voilà un roman singulier avec deux histoires entrelacées , narrées en parallèle ...

Un soldat, à une époque récente , est en fuite, il a déserté et veut rejoindre sa région natale, montagneuse où il espère se cacher dans la cabane qui fut celle de son père, suffisamment isolée du village.
C'est un homme qui a beaucoup de morts à son actif, des actes barbares et on sent le dégoût qui monte chez lui avec comme espoir que la vision de cette cabane et de ces souvenirs d'enfant lui donneront , si ce n'est le pardon de ses péchés , au moins le début d'une vie plus vertueuse même s'il garde son fusil, dernier lien avec la guerre et dont il a du mal à se séparer.
Seulement, sa solitude est rapidement interrompue par l'arrivée d'une jeune femme et de son âne, elle- même fuyant son village après avoir subi des violences.
On comprend vite que chacun est d'un camp opposé à l'autre et que le conflit peut se poursuivre entre eux , même s'il est inégal. ou bien s'aider l'un l'autre en se débarrassant de sa peur ...

L'autre partie du roman raconte un colloque scientifique se déroulant sur un bateau proche de Berlin, avec comme point d'orgue l'hommage rendu au mathématicien Paul Heudeber en présence de sa veuve, Maja et de sa fille Irina .
La date programmée étant le 11 Septembre 2001 , le congrès va bien entendu prendre une autre tournure.
Cet homme, Paul Heudeber était donc un mathématicien reconnu, habitant l'Allemagne de l'Est, très engagé politiquement , un communisme qu'il n'a jamais voulu renier ce qui lui a valu d'être emprisonné dans un camp de concentration, puis une RDA qu'il n'a jamais vraiment quittée .
Une fidélité à ses idées qui s'est avérée plus forte que son amour pour sa femme, vivant en Allemagne de l'Ouest.
Sa fille Irina évoque quelques années plus tard les souvenirs de ses parents en rencontrant ceux qui ont bien connu le couple et découvre une certaine partie cachée de leur vie , une sorte de désertion de l'un des deux à ses idéaux .

La partie avec le soldat et la femme est assez prenante, on sent bien la tension entre le déserteur et la femme en fuite , chacun épiant l'autre et malgré cette ambiance étouffante , il y a les descriptions magnifiques de la nature sauvage : la mort en balance avec la beauté ...

J'ai trouvé celle sur la vie du mathématicien plus difficile d'abord, assez technique et sêche, laissant peu la place à l'émotion, le constat de cet hommage est plutôt amer sur la réalité des sentiments des uns et des autres sauf ceux d'Irina ballotée entre ses parents même à l'âge adulte ...

Alors le lecteur se pose la question de ces deux récits, comment les relier ? D'un coté la désertion et de l'autre la fidélité à ses engagements , c'est toute la dualité de l'être humain en somme !
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Déserter, chacun le fait à sa manière et pour des raisons qui lui sont propres.

Mathias Enard a su, une nouvelle fois, distiller les petites vies dans la grande histoire.
La lecture de « Déserter » ne m'est pas apparue plus aisée que celle de « La boussole », peut-être même plus tiraillante encore. Cela ne tenait pas au fait qu'il y racontait deux histoires totalement différentes. Ni qu'il avait laissé un flou total dans celle du déserteur quant à l'époque à laquelle elle se jouait, à l'endroit où il se trouvait, ou quelle guerre il avait fuit. Probablement une guerre parmi les plus récentes. Tout cela tout amateur de littérature s'en accommode, voire en joue lui aussi.

Le style de l'écriture change elle aussi selon que l'on se trouve dans l'une ou l'autre des histoires racontées. L'écriture des chapitres concernant le déserteur renoue légèrement avec celle de « Zone », ce livre sans points, sans chapitre, écrit tout d'une traite. Cette fois on est loin de cette extrême, mais il la réutilise petitement sous forme de phrases sans point, il va à la ligne, poursuit par une minuscule, puis refait de même un peu plus loin, pour finalement mettre un point à la fin de longues phrases regroupant plusieurs idées. Ça n'est pas désagréable (beaucoup moins fatiguant que dans « Zone »), ça donne une espèce de respiration arythmique, une longue inspire, une courte expire ou inversement. Bref un drôle de rythme respiratoire quand on essaie de le décoder. Peut-être que dans une de ses interviews, Mathias Enard a expliqué ce qu'il avait envie de faire, de créer.

L'histoire de Paul Heudeber nous est raconté une décennie après sa mort, lors d'un colloque qui commémore son nomes ses travaux et qui débute le 10 septembre 200. C'est d'ailleurs un de ses confrères, le mathématicien américain Linden Pawley qui révélera la clé du roman. Un grand nombre de personnages vont traverser son histoire.
Sa fille Irina nous raconte la vie du couple qu'il a formé avec Maja. Paul, mathématicien, communiste, antifasciste vivait à Berlin Est, de l'autre côté du mur, alors que Maja, elle aussi scientifique, vivait à l'Ouest et était active dans le SPD. Leur amour n'a pas été moins que fou. Leur passion a traversé les frontières et le temps. Une idée à donner ? celle de Maja qui écrit ceci à Paul : « Il y a maintenant un mois que je ne t'ai pas vue et la vie gèle ». de pareilles phrases se retrouvent régulièrement dans leur échange épistolaire, celui que leur fille décortique.
Paul a également laissé des écrits aussi bien mathématiques que littéraires lors de sa détention dans le Camp de Buchenwald. Pour Enard tout est prétexte pour parler de la grande histoire du XXe siècle.

Le déserteur quant à lui, il compte ses morts, n'en peut plus et largue les amarres de la guerre. Il ne voit qu'un endroit pour se sentir en sécurité, celui de la cabane de son père dans sa région natale, dans un décor montagneux. On vit sa fuite avec les armes gardées sur lui, puis une rencontre avec une personne aussi scabreuse que lui. En dire plus serait dommage.
Les images ne sont pas faciles pour le lecteur mais Enard a su les rendre supportables.

On est de plus en plus loin de ses livres faciles comme « Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants », - livre qui reste parmi mes oeuvres préférées - mais j'enchaine vite en rajoutant : quelle extraordinaire culture historique il nous transmet maintenant.

Mon bémol, celui qui m'est propre, c'est que, même en étant de formation scientifique, rien n'y a fait, je suis restée comme sourde à la compréhension des « mathématiques littéraires » dont Mathias Enard fait la description. Pas grave, j'aime la prose d'Enard, j'aime sa culture, j'aime ses émissions radiophoniques. Un jour peut-être, je le comprendrais encore mieux.

Citation :
Un extrait de lettre à Maja « Tu protégeais mes jours comme tu les protèges aujourd'hui, tu les adoucis même dans l'absence et Irina projette quelque chose de toi, une douceur, une consolation au passage du temps, un rayonnement qui provient de ton âme proche et lointaine. Tu es une maladie - ma passion à la maladie de l'infini, mon amour ne peut s'écrire autrement que par ton nom. Il n'y a pas d'autre façon de désigner l'amour, : te nommer. Reviens-moi vite. » Paul
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Deux fils narratifs, qui jamais ne se croiseront, constituent ce roman. Chacun a un ton qui lui est particulier. Les deux se rejoignent dans une certaine exigence formelle.

Le premier nous immerge dans un paysage méditerranéen aride et violent : la guerre y fait des ravages et les humains qui restent sont impitoyables. Un déserteur d'une armée qui ne sera jamais nommée cherche à fuir cette contrée, où il est né et qu'il connaît comme sa poche. le style de cette narration est puissant, à la manière du "Hussard sur le toit" si l'on veut en donner une petite idée. Une attention particulière est portée à la faune, la flore et à la nature dans ce qu'elle a de plus minéral et indomptable.

Le second est consacré à l'existence d'un mathématicien allemand (fictif), Paul Heudeber. Il aura traversé une bonne partie du xx° siècle. Il formait avec Maja un couple fusionnel alors qu'ils étaient le plus souvent séparés par le Mur de Berlin. Paul était resté fidèle à ses convictions socialistes et Maja avait choisi l'ouest... Leur fille, Irina, se souvient d'un congrès qui s'était tenu en 2001, la veille des attentats terroristes de New-York.

J'ai l'habitude de lire en parallèle plusieurs livres différents, donc cette construction inhabituelle ne m'a pas décontenancé. On peut tout de même s'interroger sur ce choix... Mathias Enard est assez doué pour l'imposer et s'en sortir avec les honneurs.
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N°1834 – Février 2024.

DéserterMathias Enard – Actes sud.

Ce roman, c'est d'abord un titre, laconique, sibyllin, une sorte d'invitation à la désobéissance, une envie de bouleverser les choses établies, la fidélité, l'engagement qu'on finit par trahir et par fuir. Deux histoires s'y entremêlent sans apparemment aucun lien entre elles. On retrouve cette démarche initiale dans la première évocation, celle d'un soldat anonyme qui quitte une guerre inconnue, parcourant prudemment à pied un paysage méditerranéen pour rejoindre une vieille bergerie délabrée et vide, perdue dans la montagne, berceau de son enfance, où il sait que personne ne viendra l'y chercher. Sur lui il porte les traces des combats, un treillis puant, des galoches usées, pleines de merde et de sang, un fusil, un sac… Une femme viendra qui le connaît et le craint et tout son passé refait surface, celui de l'enfance, de la guerre aussi.
C'est un personnage fictif, tout comme l'est celui de la seconde histoire, ce mathématicien et poète allemand, antifasciste, Paul Heudeber, rescapé d'un camp de concentration, auteur des « Conjectures de Buchenwald ». Ces deux histoires se juxtaposent sans qu'il soit possible, à tout le moins au début, d'en saisir Les points communs. Paul, génie des mathématiques, après la chute du Mur et l'effondrement du rêve communiste, a choisi de demeurer en Allemagne de l'est par fidélité à son idéal et ce, bien qu'il soit amoureux fou de Maja qui elle a choisi de vivre à l'ouest et d'y faire une carrière politique différente. Leur amour, sa fidélité à l'utopie marxiste, l'existence de leur fille Irina ne changent rien à sa détermination. Nous sommes le 10 septembre 2001, sur un lac près de Berlin et un congrès a choisi de rendre hommage à sa mémoire et à son oeuvre où les poèmes se mêlent aux raisonnements mathématiques. Maja est aussi une figure, elle à qui ses mots s'adressent malgré la distance, c'est une militante du féminise avant la lettre, une mère célibataire, une femme libre a la fois désirable et respectable.

Mathias Enard est un érudit qui s'est longtemps penché sur l'orient et cela se sent dans son oeuvre autant que dans son parcours personnel. Il affectionne le rythme syncopé par l'alternance des phrases courtes et d'autres parfois démesurées. Il serait intéressant de pouvoir percer le mystère de cette architecture assez inattendue où le lecteur se perd parfois. Il alterne les descriptions, les évocations et le narrateur interpelle les personnages mais aussi leur laisse la parole tout en adressant à Dieu des prières alternativement propitiatoires et jaculatoires. La poésie est omniprésente dans le récit consacré au soldat et seulement épisodique et sous forme de poèmes ou de mots d'amour dans celui des lettres échangées jadis entre Paul et Maja. Ces deux histoires s'entremêlent pourtant ; le thème du père est très présent dans le témoignage d'Irina et d'une façon plus estompée dans celui du soldat mais ce qui s'impose à mon esprit c'est aussi l'obsession de la solitude et de la mort. Dans ces deux récits il y a la guerre, lointaine mais bien réelle d'une part, plus larvée dans un contexte de lutte idéologique et politique d'autres part, l'auteur lui-même, sorte de troisième personnage s'inscrivant aussi dans ce contexte à raison de son parcours personnel dans un orient où les conflits sont permanents. Même l'occident n'échappe pas à la violence, l'effondrement des tours jumelles du World Trade Center à New-York, puis plus tard l'invasion de l'Ukraine par la Russie rajoutent de la barbarie dans un monde qui en regorge déjà. Cette irruption de violence vient contredire ce que capitalisme triomphant nous avait fait croire et qui s'effondre dans le fracas du 11 septembre, comme est interrompu le colloque sur Paul Heudeber. de même l'invasion de l'Ukraine rappelle à notre génération qui n'avait pas connu de guerre que l'homme porte en lui ses propres germes de destruction.

Mais revenons au titre, tous les personnages ont déserté leur milieu pour y échapper, parce que déserter c'est fuir, abandonner. Irina a toujours eu conscience du modèle écrasant et inaccessible pour elle que sont ses parents et a voulu y échapper par la distance mise entre elle et eux. Pourtant ce parangon maternel est entamé par la révélation par Pawley, un ami américain du couple, que Maja s'est accordé avec lui, il y a longtemps, une parenthèse amoureuse, tout juste ravivée lors de ce congrès, un détail qu'il veut révéler à Irina avant de mourir. L'image si forte de cette mère est aussi ébréchée par l'aveu fait à son amant d'avoir trahi Paul en ne le préservant pas de son arrestation par la Gestapo. Paul Heudeber a fui le monde réel parfois bien contradictoire pour celui des mathématiques et on laisse planer l'éventualité d'un suicide au sujet de sa mort, justifiée peut-être par sa prise de conscience des trahisons qui l'ont entouré et qu'il ne méritait pas. Les vérités « officielles » qu'on entretient sur les êtres, surtout après leur mort, ne sont que des apparences, des mensonges. La femme qui accompagne le déserteur fuit ce monde qui l'a vomie et déshonorée et lui cherche à échapper à la violence de la guerre et peut-être un peu lui-même parce que ce conflit lui a révélé sa propre image qui lui fait horreur. Il rachète cependant son passé fangeux par son attitude digne face à sa prisonnière, donnant ainsi une dimension humaine, voire religieuse à ce récit.

Mathias Enard a confié, dans une interview qu'il avait mis longtemps a écrire ce roman, comme s'il l'avait porté en lui sans pouvoir en tracer les lignes. Cela rajoute pour moi au mystère de l'écriture qui n'est pas qu'une histoire qu'un auteur raconte à son lecteur, c'est le résultat d'une quête, d'une souffrance autant qu'un exorcisme, une longue impossibilité autant qu'une obligation urgente. le livre refermé j'ai le sentiment de n'avoir pas tout compris ou d'avoir reçu quelque chose qui ne correspond pas forcément à ce que l'auteur voulait dire mais de me l'être approprié comme une vérité personnelle. Nous fuyons tous une forme de réalité qui peut s'avérer parfois intimement obsédante au point de ne pas vouloir nous l'avouer à nous-mêmes, de ne pas pouvoir y mettre des mots.


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Enchevêtrement spiralé, récit archétypal, écriture miroir...C'est un peu tout cela à la fois.
Comme une histoire de spectre, ou une chambre d'échos. L'Histoire se déroule comme un fil d'ADN. Lecture, écriture, mémoire, composition, recomposition, création. Il y a quelque chose de biologiquement mathématique dans ce récit dizygote.
Déserter/ Résister : à quel moment de l'histoire, sous quel angle se situe le courage ou la lâcheté ? L'histoire est une vis sans fin mais avec une origine commune. L'histoire.. est ce une question d'engagement ou de désengagement dans le couloir des temps ? Déserter est-ce trahir ? Résister est-ce créer ? Dans quel et vers quel espace s'envole le papillon de nos libertés ? Un excellent roman dont la structure narrative a interrogé sans discontinuer ma lecture.
La nuit des temps….ground zéro… et si une réponse existe alors serait-elle un nombre entier ? S'approcherait-on du "fils du mot" de Duras ? …. «  La vérité ce serait le chiffre encore incomparé, incomparable du nombre , le chiffre pur, sans commentaire aucun, le mot. »
Si il y a de la spiritualité dans l'art, alors elle réside très certainement également dans les mathématiques.

Astrid Shriqui Garain
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