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sur 4390 notes
En 1967, alors jeune mère et professeur de lettres modernes, Annie Ernaux revient quelques jours chez ses parents affronter la mort du père. Faire son deuil imposera d'écrire, pour retrouver l'homme et comprendre ce qui les a séparés de manière infime, indicible, irrévocable. Un changement de classe sociale qu'elle ne peut vivre que comme une forme de trahison en même temps que d'accomplissement des souhaits d'un homme qui l'espérait « mieux que lui ». C'est à cette intime contradiction que ce magnifique ouvrage, couronné du Prix Renaudot en 1984, s'attaque.

Découvrant encore l'univers stylistique d'Annie Ernaux, c'est avec bonheur et admiration que je goûte la puissance évocatrice de ce qu'elle appelle « l'écriture plate », dont la densité en mots fait la richesse de signifiants. C'est bouleversant.
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C'est bien écrit. J'ai beaucoup aimé les mots en italique qui représentent le langage patois. Je trouve que ça manque de sentiments et de psychologie. On aimerait savoir un peu plus ce qu'elle ressentait vraiment pour son père, comment elle vit dans un milieu social qui ne ressemble pas à celui dans lequel elle a été élevée.
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J'aime beaucoup ces petits romans d'Annie Ernaux qui se lisent en une soirée, structurés comme si l'autrice était dans mon salon et me racontait ses souvenirs du passé. Ici son récit s'étale du début du siècle dernier jusqu'aux années 1960. Ambiance vintage garantie !

Dans « La place », l'autrice rend hommage à son père en retraçant sa vie, en tant qu'homme et en tant que père de famille. C'est une suite de souvenirs, d'anecdotes, de réflexions sur sa vie et sur les valeurs qu'il chérissait.

L'image qu'elle dépeint de son père est très intéressante, toute sa vie il a été partagé entre ses origines modestes et ses ambitions de réussite sociale. Cette dualité entre qui il est et ce qu'il veut montrer de lui prend une place importante dans le récit, j'ai aimé l'analyse de l'autrice sur le sujet et son propre positionnement dans cet environnement familial.

J'ai bien retrouvé son style d'écriture, avec une succession de faits. Il n'y a pas de chapitres, ce n'est pas ce que je préfère, mais heureusement le texte est découpé en grands paragraphes assez aérés.
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Dans ce court récit autobiographique, Annie Ernaux revient sur la personne de son père quelque temps après sa mort. Elle essaie de se remémorer cette figure paternelle lors de son enfance et jusqu'à quelques temps après son mariage. Ce n'est pas un récit linéaire, chronologique. L'auteure s'attache plutôt à montrer, à travers des souvenirs ponctuels, des impressions, la place qui était celle de son père dans la société. Lui, issu de la paysannerie, n'a eu de cesse que de se sortir de cette condition et permettre à sa fille de monter encore d'un cran. Pourtant, au moment où elle y parvient grâce à ses études, à sa profession (professeur de lettres), le gouffre se creuse entre eux, ils n'arrivent plus à communiquer et se comprendre. Cette obsession du père quant à l'image qu'il renvoie aux autres, à la société est très marquante et a d'ailleurs profondément marqué l'auteure dans sa construction personnelle. Malgré tout, j'ai été étonnée par ce récit dans le sens où il y a très peu de sentiments évoqués entre les personnes, que se soient de bons ou de mauvais sentiments. On a l'impression que les personnes sont là, côte à côte mais sans plus: pas d'effusion, pas de drame ou de colère, juste des gens qui avancent ensemble. C'est un petit livre agréable à lire et qui me donne l'envie de lire d'autres titres d'Annie Ernaux.
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n petit livre de 112 pages mais…tellement riche…

J'ai aimé ce récit sobre, réaliste au style dépouillé, ainsi que les phrases brèves et courtes que l'auteur utilise pour faire le portrait de son père. Cet homme issu de la classe ouvrière aux origines plus que modestes, qui a lutté toute sa vie pour avoir une petite place au soleil.

C'était un homme de la campagne, un homme gai et simple.
Pour lui, pas de musée, mais un arbre en fleur, la propreté d'un jardin. Il n'avait pas besoin de musique ni de livres pour vivre.
De plus, travailler des mains, c'était travailler…
A l'adolescence, une distance s'installe entre sa fille et lui. Elle émigre doucement vers le milieu petit bourgeois.
A présent, elle veut réhabiliter ce père qu'elle aime.
Comme tous les pères, il désirait le meilleur pour sa fille, ce qui en fait un sujet toujours d'actualité.

Annie Ernaux témoigne, elle est véritablement témoin de son époque, Elle évoque les préjugés, la mentalité de ce monde rural où le qu'en dira-t-on a tellement d'importance Les habitudes, les expressions de langage.
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Il faut le faire pour s'attaquer au père.

La place est impressionnant de concision.
A travers ce récit autobiographique court nous avons l'impression de connaître le père d'Annie Ernaux depuis toujours.
S'il est possible de s'identifier et de trouver un réel intérêt à l'oeuvre en reconnaissant des gens qui nous sont chers a travers les divers personnages, je trouve qu'elle est aussi très intéressante pour son côté sociologique avec l'étude de la question des classes sociales.

J'ai été particulièrement touchée par la façon qu'a l'Autrice d'aborder la mort. Ce côté factuel, détaillé comme un compte rendu concis met aussi mal à l'aise qu'il fait éprouver une sorte d'admiration.
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La place

Un nouvelle lecture d'Annie Ernaux dont je souhaite découvrir l'oeuvre car sa plume me plait beaucoup : ses textes courts et puissants me marquent et le prix Nobel de littérature reçu cette année a permis une mise en lumière de l'autrice qui a fini de me convaincre.

Dans cet ouvrage, Annie Ernaux aborde le décès de son père, dont elle a été témoin adolescente, dans la maison familiale.

Elle dresse alors son portrait. Celui d'un homme qui a peur d'être trahi par ses manières paysannes. L'histoire de cet homme qui cherche à s'émanciper et se libérer de son milieu ouvrier, en déménageant puis devenant commerçant.

"Il ne buvait pas. Il cherchait à tenir sa place. Paraître plus commerçant qu'ouvrier."

Annie Ernaux réussi à formuler ce malaise, comme la différence de classe sociale. Ce sentiment de trahison ressenti quand on n'a plus les mêmes codes que ses parents.
C'est touchant de voir à quel point elle cherche à se faire une place dans le Monde, différente de celle de ses parents. La place, c'est aussi celle que son père cherche à se faire auprès de sa fille, qui a changé de monde.

"Il s'énervait de me voir à longueur de journée dans les livres, (...)
Devant la famille, les clients, de la gêne, presque de la honte que je ne gagne pas encore ma vie à dix-sept ans, (...) Il disait que j'apprenais bien, jamais que je travaillais bien. Travailler, c'était seulement travailler de ses mains."

On met en évidence ici l'éloignement crée par l'école. L'écart creusé avec son milieu social d'origine.

Cette phrase prononcée par son père m'a rappelé Marcel dans "Billie Pretty a disparu" de Sophie Astrabie : "Il fallait bien vivre malgré tout".

Vous l'aurez compris, j'ai adoré ce livre et je comprends qu'il ai obtenu le Prix Renaudot en 1984. Ce livre court mais intense montre la puissance des souvenirs, dans leur simplicité, et la distance qui se crée avec nos parents en grandissant et en changeant de milieu. Il interroge sur l'importance du lien parental fondamental que l'on peut chérir et préserver, même si l'on s'éloigne.
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Annie Ernaux, en tant que narratrice nous livre un récit autobiographique , une collection de souvenirs sur ses origines modestes : celles de son père qui avait réussi à se faire "une place"...."La place" en reprenant un commerce avec sa femme, la mère d'Annie. Une place toute en discrétion.
Elle nous fait partager cette distance qui existait entre son père et elle après ses études, cette différence inévitable de classe sociale.
Il l'avait voulu pourtant cette ascension sociale pour sa fille mais il ne savait pas la partager, c'était bien trop différent de son essence , de ses origines qui l'avaient fondé.
L'auteure parle de son père en le désignant par "il", avec beaucoup de respect, en éliminant les petits détails et en gardant les moments les plus importants.
On voit les scènes qu'elle raconte défiler devant nous comme des photos, racontées avec un vocabulaire simple mais qui sonne tellement juste, avec des phrases très sincères.
Se sont-ils rencontrés ces deux-là ? En tous les cas, j'ai eu l'impression qu'ils s'étaient compris, tout en silence.
Une très belle lecture dont j'ai savouré chaque mot.
Ce qui n'est pas difficile, le livre compte à peine 114 pages.
Elle l'a écrit en 1982 un peu après la mort de son père.
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La place faisait partie des livres qui étaient sur la liste des textes que je présentais au Bac de français il y a un peu plus de 20 ans... Entre temps, Annie Ernaux a été récompensée du Prix Nobel, et pourtant il me semblait que j'avais trouvé ce roman creux. Alors lorsque je l'ai trouvé dans une boîte à livres prêt de chez moi je me suis dit que c'était l'occasion de retenter l'expérience.

Avec deux décennies de recul, je comprends pourquoi certaines personnes ont apprécié ce récit qui relève plus du témoignage que de la littérature en réalité.
Ce court roman s'ouvre sur la réussite de la narratrice à l'agrégation de Lettres (concours toujours prestigieux à l'époque alors j'imagine à l'époque..), puis vient l'annonce qui bouleverse cet instant de consécration : son père est décédé. C'est alors l'occasion pour la narratrice/romancière de revenir sur son enfance et surtout de nous faire un portrait de son père et de son milieu social.

Son père était un homme modeste et travailleur, passé de simple ouvrier agricole à ouvrier dans l'industrie puis propriétaire d'une petite épicerie, "un homme honnête (...) qui n'a jamais de tort à personne". Mais ça n'était pas "quelqu'un" (d'important) comme on pouvait l'entendre en France jusque dans les années 1950.

Loin de l'idéalisation de l'homme pauvre ou d'une certaine complaisance qu'on pouvait lire chez des auteurs comme Mauriac ou Proust qui ont davantage et mieux dépeint les milieux privilégiés dont ils étaient issus. Comme le formule Annie Ernaux :

"L'éternel retour des saisons, les joies simples et le silence des champs. Mon père travaillait la terre des autres, il n'en a pas vu la beauté, la splendeur de la Terre-Mère et autres mythes lui ont échappé".

"Quand je lis Proust ou Mauriac, je ne crois pas qu'ils évoquent le temps où mon père était enfant. Son cadre à lui c'est le Moyen Âge."

Elle qui a pu s'extraire de son milieu grâce à l'école évoque ses souvenirs contradictoires entre bonheur et sentiment de honte ou d'humiliation de venir d'un milieu qui manque de classe et de culture.

Cette seconde lecture n'a pas été plus agréable que la première, si ce n'est que je comprends qu'elle a plu plaire, rassurer ou avoir une dimension madeleine de Proust pour des nostalgiques de cette France (d'avant les bouleversements des années 1960-1970) . Je comprends aussi que ce roman peut attendrir et rassurer à une époque où la France cherche ses repères et son identité entre ultra-nationalismes ("réac'") et ultra-déconstructivisme ("woke") et ne sait plus ce qui fait sa singularité à l'heure où les minorités, descendants de "colonisés", femmes violentées qui ne veulent plus que leur sort soit banalisé,... C'est aussi un hommage à ces "petites gens" (qui parlaient encore les patois régionaux) qui se serrent la ceinture à l'heure où les patrons des grandes entreprises font des bénéfices record et expliquent aux "petits" qu'ils doivent se serrer la ceinture et se désintéressent des faillites d'artisans car eux profitent de tous les travers de la mondialisation.

Seulement voilà, l'autofiction, c'est loin d'être ce que je préfère, je ne vois toujours pas l'intérêt de cette "écriture blanche" et cet ensemble assez plat n'a pas de valeur sociologique (de témoignage oui, d'accord).
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Annie Ernaux nous parle de son père, ce n'est pas vraiment un hommage plutôt le récit d'une vie tout en gardant une certaine distance.
C'est cela qui m'a surtout gêné, le regard qu'elle pose sur les générations précédentes n'est pas sentimental, juste des faits énoncés sans fioritures. Il n'y a pas d'amour qui émane de ce témoignage, comme si ce couple était des étrangers.
Son père est passé de garçon de ferme à ouvrier puis commerçant. Une évolution donc, un changement de classe qui ne semble pas suffisant pour l'auteure.
Il y a eu une coupure à l'adolescence, la sensation d'être différente, une volonté d'évoluer, de s'extraire de cette condition, une honte même de ce que ses parents étaient. Et donc le désir de découvrir d'autres milieux, de laisser derrière soi ce qui lui rappele d'où elle vient.
Pas ou très peu de nostalgie, un témoignage froid qui m'a mis mal à l'aise. Je retiens surtout en point positif les descriptions intéressantes des conditions de vie de ces époques révolues.
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