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L'Herne (01/01/1900)
4/5   4 notes
Résumé :
Retrouvez dans ce coffret trois carnets de Romain Gary :

Un soir avec Kennedy :
Dans ce carnet sont réunis quatre textes issus du Cahier de L’Herne consacré à Romain Gary (2005). Chacun de ces textes – qu’il s’agisse de portraits ou de considérations sur la littérature anglo-saxonne – constitue un éclairage singulier sur la société américaine telle que l’a observée Romain Gary.

A bout de souffle :
"Vous êtes marié vous? J... >Voir plus
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Que lire après Un soir avec Kennedy - À bout de souffle - Le GrecVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Je reviendrai à la fin du billet, après avoir parlé des textes, sur la présentation des Carnets de L'Herne, cette " collection de textes rares et précieux, courts et radicaux, inédits ou disparus, des penseurs et écrivains les plus importants de notre siècle. Ils ouvrent un accès direct aux réflexions aussi bien qu'aux fictions de ces auteurs qui ont formé la pensée et la littérature contemporaines. "

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Carnet 1 - "Un soir avec Kennedy" - 51 pages, 2008, 9,50 euros

Dans ce carnet, il y a quatre textes. Dans les trois derniers, les plus courts, Gary-le-chroniqueur parle de la littérature américaine dans des articles percutants publiés dans la presse française, dans les années 60-70.

2 - "Les vrais esclavagistes du sud, les voilà"
Pour Gary ce sont les écrivains sudistes comme Faulkner, Carson McCullers, Tenessee Williams, William Styron. Car tout au long de leurs oeuvres, ils n'abandonnent jamais, des générations après, leur culpabilité de descendants d'esclavagistes, incapables de fouetter d'autres chats, comme dit Romain Gary.

3 - "lls bouffent leur société avec appétit"
Quelques paragraphes pour mettre en opposition la vitalité "physique" de la littérature américaine avec le nouveau roman français, anémique (à l'image de la société, écrit Gary) et sans force créatrice.

4- "Norman Mailer ou le mythe américain de la virilité"
Portrait d'un modèle du rêve américain incarné en écrivain.

Le premier texte, plus long, donne son beau titre au carnet : "Un soir avec Kennedy".
Gary-le-diplomate, invité avec Jean Seberg à la Maison-Blanche pour un dîner très peu protocolaire avec les époux Kennedy, nous offre un témoignage étonnant et précieux. On comprend que cette soirée a eu lieu en 1963, quelques mois avant la tournée électorale du Président pour un second mandat, et la visite fatale à Dallas.
Ce soir-là Gary est tombé sous le charme de John, jusqu'à rendre ses propres armes de séducteur, de diplomate et même d'écrivain, ébloui par un homme d'exception, lui qui en était un également !
Aveuglé peut-être même, car il dépeint le bonheur du couple présidentiel avec une admiration un peu naïve :
" Il est difficile d'imaginer un couple plus heureux. Comblé des dieux comme on dit. "
Et si c'était Romain Gary qui avait vu juste ce soir-là ?
Il note aussi en conclusion de son compte rendu :
" Il est difficile en le regardant de ne pas se dire : "Voilà un homme qui est né sous une heureuse étoile." Il est difficile de ne pas se dire : "La chance". [...] Un de ces hommes providentiels auquel il ne peut rien arriver. "

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Carnet 2 - "A Bout de souffle", 77 pages, 2007, 8,50 euros

C'est étrange ce titre volé au film de Godard alors que le sujet n'a rien à voir. le seul rapport me paraît être Jean Seberg...
Ce n'est pas une nouvelle, mais l'ébauche d'un roman inachevé, écrit en anglais. Pourtant le héros et narrateur de l'histoire qui se déroule aux États-Unis, se prénomme Romain, est français et porte la Légion d'Honneur... Il a cinquante trois ans et c'est lui qui se retrouve, à bout de souffle, au comptoir d'un snack à burgers, pour "tuer" le temps, puis dans la chambre de son motel où il va attendre son "tueur". On se croirait dans les tableaux de Edgar Hopper. En quelques pages magnifiques et brutales, Gary raconte une vie d'homme, fait ressentir son mal de vivre, sa lassitude, sa tentation d'en finir.

Les trois autres courts textes du carnet sont de Gary-l'aviateur, le soldat qui sera fait Compagnon de la Libération par De Gaulle.

2- "Géographie humaine"
Où il est question de cartes et de territoires. Dans un mess anglais, devant une carte d'Afrique, de jeunes aviateurs se remémorent leurs opérations, le désert, les copains abattus, faits prisonniers. Comment la simple représentation en deux dimensions du continent africain fait naître les images, les souvenirs bons et mauvais, les émotions, le partage.

3 - "Dix ans après ou la plus vieille histoire du monde"
Réunion d'équipages, des années après la fin de la guerre, pour constater les dégâts causés par la vie et parler du vieux temps.

4 - "Sergent Gnama"
Gary témoigne. 1941 : sur les bords du lac Tchad, un boy noir qui ne parle pas le français, chante en boucle un hymne patriotique dont il ne comprend pas les mots, comme une litanie, comme une prière. Il a appris le poème que Gary retranscrit, d'un aviateur français pour qui il travaillait, le sergent Gnama, dont on ne sait plus rien, sinon la chanson qu'il chantait, sans arrêt, sauf quand il dormait.

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Carnet 3 - "Le Grec", 86 pages, 2007, 8,50 euros

Dans ce carnet, un seul texte, un peu comme une nouvelle, mais ce n'en est pas une. C'est encore l'ébauche d'un roman jamais publié. Et là aussi, un vrai plaisir de lecture, comme avec un récit abouti.

Des décors comme au cinéma : petits ports grecs, tavernes, yachts, fonds sous-marins, épave.
Des personnages de film d'action : un mercenaire nageur de fond, un journaliste-espion britannique, des porte-flingues grecs, une passionaria aux lèvres douces.
Un contexte politique dramatique dont il reste étonnamment peu de traces dans la littérature : le régime liberticide des Colonels, la déportation des résistants sur des îlots inhospitaliers.

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à propos des éditions de L'Herne
http://www.editionsdelherne.com

La collection des Carnets de L'Herne existe depuis plusieurs années déjà. Je ne la connaissais pas.
Le catalogue des carnets est impressionnant et regorge de tentations.
La forme des carnets est aussi plaisante que le fond : sous la couverture vernie noire, des feuillets ivoire, imprimés en beaux cratères bleus.

Les carnets viennent en complément des monographies d'écrivains publiées sous la forme des Cahiers de L'Herne. Par exemple, celui dédié à Romain Gary (épuisé, disponible en pdf, 27 euros)
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A bout de souffle :

"Vous êtes marié, vous?"
Je sortis de mon portefeuille la photo d'une ravissante femme, au visage jeune sous des cheveux blancs, et je la lui montrai. J'étais tombé amoureux de ce visage plus de cinq ans auparavant et je l'avais découpé dans un magazine.

Trois textes composent ce carnet, mais c'est du premier que je vais vous dire quelques mots. Il s'agit de l'ébauche d'un roman inachevé, probablement commencé en 1969. Il s'agit d'une oeuvre de fiction (enfin, on l'espère, vu certains passages!), mais dans laquelle Romain Gary se met en scène. Il parle de sa liaison avec Jean Seberg, de son passé pendant la guerre, au cours de laquelle il a dû faire et vivre des choses plutôt atroces... Et de son retour aux Etats-Unis, dans une petite ville lambda, où il doit accomplir une certaine mission...
Comme j'aurais aimé lire la suite de ce début de roman! On retrouve la verve de Romain Gary, ce ton qui fait tout son charme. Un petit passage qui me semble assez révélateur du style de cette ébauche :
"J'ai une fille, qui est mariée à un éleveur de moutons en Australie". Quand on n'a pas de fille, rien ne vous empêche de la marier à un éleveur de moutons en Australie. Je fus soudain envahi par un puissant sentiment de réalité et par l'impression d'avoir les pieds solidement sur terre, si bien que je me demandai si je reverrais un jour ma fille. D'immenses espaces à ciel ouvert où paissaient les moutons. Au cours de mes années de lutte et de combat, j'ai vu tellement d'endroits et une si grande partie du monde, j'ai tué tant de gens pour si peu que le seul espoir qui me reste, c'est que ma fille qui n'existe pas, mariée au type qui n'élève pas de moutons en Australie, jouisse de la paix et du bonheur.


Journal d'un irrégulier :

Romain Gary a tenu pendant quelques années, au début des années 70, la "chronique d'un irrégulier" dans France Soir ; morceaux choisis de ces chroniques, ainsi que quelques autres articles journalistiques parus ici et là.

5 parties pour ce recueil : un groupement de chroniques, deux nouvelles, un questionnaire de Proust et un poème.

Les chroniques, puisque destinées au public français, m'ont "parlé". Romain Gary y moque nos hypocrisies, y parle avec ironie des médias qui nous manipulent... J'ai notamment apprécié la chronique dans laquelle il retranscrit ses réponses à un questionnaire visant à "dégager les traits communs à toutes les formes de création artistique".
"- Croyez-vous qu'une intense activité sexuelle soit incompatible avec la création artistique?
- Cela dépend des techniques d'expression. Lorsqu'on écrit à la main, l'autre main est toujours disponible. Lorsqu'on tape à la machine, il faut évidemment se faire aider par quelqu'un. [...]
- Un certain fétichisme littéraire joue-t-il, selon vous, un rôle dans la création littéraire? Eprouvez-vous le besoin d'avoir autour de vous, lorsque vous écrivez, un cadre particulier ou certains objets sur votre table de travai? Avez-vous, comme Balzac, une tenue favorite pour écrire?
- Je suis très fétichiste. Certains objets me sont indispensables : un stylo et du papier par exemple. Quant à ma "tenue favorite pour écrire", je mets des bas noirs, des souliers à hauts talons, des dessous roses et des jarretelles. Je ne peux pas, sans ça. [...]
- Estimez-vous que les écrivains ont plutôt intérêt à sa soumettre à la psychanalyse?
- Les écrivains, je ne sais pas, mais certains enquêteurs, sûrement".

L'une des deux nouvelles s'appelle "La Paz : l'homme qui mangeait le paysage". Je l'ai trouvée très poétique, très belle... le narrateur (qui comme d'habitude présente des similitudes troublantes avec l'auteur) rencontre à La Paz un Français qui a une théorie pour le moins originale quant à la meilleure façon de savourer un magnifique paysage.
"Lorsqu'un spectacle de toute beauté s'offre à votre regard, il vous suffit de vous installer devant et, tout en le contemplant, de déguster un plat que vous aimez, un mets exquis, une des friandises dont vous raffolez. Il faut absorber une quantité suffisante de délicieuse nourriture pour ne plus jamais avoir faim de quoi que ce soit, pour vous setir détendu et satisfait, habité par l'impression paisible d'avoir savouré en même temps que ce que vous mangiez un peu de la grande beauté du monde".
Alors, que choisiriez-vous comme mets pour graver en vous à jamais les beaux endroits que vous visitez? Pour le narrateur, ce sont les cornichons à la russe!

Quant aux réponses de Gary au questionnaire de Proust, je les ai bien évidemment trouvées savoureuses! Je ne vais pas vous les révéler, il faut bien laisser un peu de mystère...


Un soir avec Kennedy :

Quatre textes de Romain Gary, réflexions ou récits de moments vécus, sur la société américaine.

Le premier texte est le récit d'un repas de Gary et sa femme Seberg chez Jackie et JFK. Moi qui ne connais quasiment rien à l'histoire américaine et à ses grandes figures, j'ai un peu appris qui était ce si fameux président, et je pense que ce petit récit est intéressant même pour les moins ignares que moi : c'est le Kennedy de l'intimité qui est ici dévoilé.

Les trois autres textes sont des réflexions de Gary sur la littérature américaine ; là encore, je ne m'y connais guère, mais son analyse semble diablement convaincante (bon, je suis partiale, j'avoue...). Il s'interroge d'abord sur le rapport des grands écrivains des Etats du Sud à la "question noire" ; puis il écrit quelques courtes pages sur la vitalité du roman américain par rapport au roman français ; et enfin, c'est sur Norman Mailer qu'il se penche. N'ayant jamais lu quoi que ce soit de ce dernier, je pense que je n'ai pas pu pleinement apprécier le point de vue de Romain Gary...


Dans l'ensemble, trois petits recueils que je suis ravie d'avoir lus. Je n'aime pas les formes courtes (je ne pensais pas lire des textes aussi brefs en demandant à lire ces ouvrages), mais j'aime Romain Gary, et ça a pris le pas!
Lien : http://kalistina.over-blog.c..
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A bout de souffle…on pense à Godard et à Jean Seberg forcément .. Dans cette ébauche de roman inachevé, l'auteur parle de lui , de son double, « au bout du rouleau » dans un snack à hamburgers crasseux de Sunset Stip où le destin l'attend. Marre de vivre, de courir , d'être nulle part à sa place…énigmatique, grand seigneur désespéré…c'est court, violent et sombre, sans issue…un peu comme la vie de Gary qui était d'un « autre temps », où les mots honneur, bravoure, amitiés signifiaient quelque chose.

Lien : http://sarawastibus.wordpres..
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
"J'ai une fille, qui est mariée à un éleveur de moutons en Australie". Quand on n'a pas de fille, rien ne vous empêche de la marier à un éleveur de moutons en Australie. Je fus soudain envahi par un puissant sentiment de réalité et par l'impression d'avoir les pieds solidement sur terre, si bien que je me demandai si je reverrais un jour ma fille. D'immenses espaces à ciel ouvert où paissaient les moutons. Au cours de mes années de lutte et de combat, j'ai vu tellement d'endroits et une si grande partie du monde, j'ai tué tant de gens pour si peu que le seul espoir qui me reste, c'est que ma fille qui n'existe pas, mariée au type qui n'élève pas de moutons en Australie, jouisse de la paix et du bonheur.
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Videos de Romain Gary (68) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Romain Gary
"Un monument ! Une biographie indispensable pour (re) découvrir Romain Gary, cet auteur incroyable ! " - Gérard Collard.
Dans le Jongleur, Agata Tuszyska peint un portrait unique de Romain Gary, unique auteur à avoir reçu deux fois le Prix Goncourt (pour Les Racines du Ciel et La Vie devant soi), diplomate, scénariste, pilote de guerre, voyageur; et montre comment son personnage va au-delà des limites de la pirouette artistique et des responsabilités humaines.
À retrouver en librairie et sur lagriffenoire.com https://lagriffenoire.com/le-jongleur.html
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