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4,05

sur 3366 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Le merveilleux , le fantastique , l'incontournable , le légendaire - j'en fais trop là , peut-etre ? - le Soleil des Scorta , je l'avais trouvé...correct tendance grose baffe sur le coin de la truffe ! La chance du débutant qui en était , quand meme , à son troisieme roman , que je m'étais dit ! Que nenni , Eldorado vient confirmer le talent de ce tout jeune auteur Français en traitant d'un sujet d'actualité toujours aussi récurrent avec une justesse de ton ébouriffante ( dixit Kojak ) assortie d'un regard distancié ( dixit Dalida) propre à le crédibiliser !

L'émigration clandestine , une statistique globale objet de bon nombre de fantasmes irraisonnés pour certains ( Hortefeux , Besson...) . Un sujet puissant ou l'humain y aurait enfin toute sa place pour d'autres ! Piracci , Soleiman et Jamal , Boubakar ( rien à voir avec France Gall , merci !) , sont les héros désenchantés de ce conte crépusculaire . Quatre destins uniques , quatre trajectoires distinctes tendant vers un ailleurs sublimé , quatre brutales désillusions confrontées aux murs d'une réalité politique bien trop pragmatique pour leurs reves idéalisés!
Piracci , capitaine de frégate solitaire , se rend compte du non-sens de sa vie ! Sauveteur patenté de ces forçats de la mer Nord-Africains toujours plus nombreux à vouloir rejoindre l'ile de Lampedusa , véritable sésame pour l'Europe , il n'en reste pas moins celui qui les confie aux divers centres de rétention , synonymes de retour au pays assuré , une fois sa mission accomplie . Sa seule échappatoire , démissionner pour tenter d'expier ses fautes passées et renaitre en ce pays qu'il ne connait que par les diverses nationalités qu'il arraisonne : l'Afrique !
Soleiman et Jamal sont freres . D'origine Soudanaise , ils prennent le parti d'un déchirant déracinement au profit d'une vie meilleure , ailleurs...Leur union fusionnelle fait leur force et leur donne le courage nécéssaire à ce périple qu'ils savent dantesque , à défaut d'etre mortel !
Gaudé , d'une plume simple , sensible et évocatrice , place l'humain au coeur de ce drame magnifique et cruel . En véritable conteur fictionnel se basant sur une réalité avérée , il narre magistralement avec force détails le terrifiant voyage de ces otages en devenir ! Otages de passeurs indélicats ; de capitaines de navire n'hésitant pas à les abandonner en pleine mer apres les avoir spoilés de tous leurs biens ; de ces carabiniers frontaliers , beaucoup plus zélés qu'humanistes , toujours prompts à ouvrir le feu sur ces fantomes haves , dépenaillés et affamés mais cependant déterminés comme jamais lorsque vient le temps de l'ultime épreuve !
Leur chimere a un prix qui a souvent le goût du sang...
Un récit coup de poing présentant deux trajectoires diamétralement opposées appelées à se croiser sur fonds de croyance Africaine . le propos est douloureux mais le ton jamais larmoyant ! Gaudé fait dans le factuel vériste en nous brossant magistralement le portrait de ces doux utopistes , véritables aventuriers des temps modernes !
Un beau et grand bouquin à mettre entre toutes les mains afin d'appréhender ce fléau non plus comme un chiffre abstrait mais comme une tragédie concrete mortellement ancrée en l'Humain !

Eldorado , tout ce qui brille n'est pas or...
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Un beau roman, pétri d'humanité, de ceux qui font réfléchir le lecteur ...
Un thème toujours très d'actualité car la tragédie des Africains qui tentent de gagner clandestinement l'Europe au péril de leurs vies n'est pas près de s'arrêter : tragédie humaine car bon nombre d'entre eux trouveront la mort sur le chemin de l'exil, tragédie identitaire pour tous ceux qui abandonnent leur pays et leur identité dans l'espoir d'un meilleur futur et au prix de leur culture. Et au bout du voyage, pour la plupart, la désillusion et l'effondrement de leurs rêves d'un avenir meilleur... Tragique et lucide, jamais larmoyant, j'ai personnellement été beaucoup plus touchée par Eldorado que par le Soleil des Scorta...
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Sorti en 2006, ce roman continue malheureusement à résonner dans notre actualité.

Laurent Gaudé renoue avec la veine qui lui est propre.
Le tragique, la lutte et la colère font partie de la règle de trois de l'auteur.
Dans ce roman polyphonique, il met en scène avec une acuité et une intensité glaçante la question des migrants. Roman humaniste, le réel est palpable et la lecture se mue vite en prise de conscience.

Remise en question, colère et espoir, on parcourt à contre-courant l'histoire d'êtres humains en quête de leur Eldorado.

Dans ce roman tragique, l'écriture poétique et lyrique de Laurent Gaudé fait souffler des bourrasques dans la tête des lecteurs.


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S'il n'est point question de chercheur d'or derrière ce titre, vous pourriez pourtant bien tomber sur une petite pépite. L'Eldorado de ce roman est celui que l'on fait miroiter aux migrants. Mais tout ce qui brille n'est pas d'or. Qu'en est-il une fois passé de l'autre côté du miroir ? Et plus encore, qu'en est-il de cette fameuse traversée ? En seulement 200 pages, Laurent Gaudé nous offre un roman d'une belle intensité, douce et sensible.


Les premiers mots sont d'une puissance évocatrice incroyable : ils nous transportent immédiatement en Sicile, dans la peau du Commandant Salvatore PIRACCI. Garde-côtes, il est chargé de récupérer les migrants qui prennent la mer pour atteindre Lampedusa. Il arrête bien sûr les bateaux avant qu'ils n'accostent et l'on découvre que, dans la plupart des cas, les passeurs payés pour assurer la traversée ont en réalité quitté le navire avant de se faire prendre, abandonnant à la dérive leur cargaison de migrants en mode sardines, qui demeurent parfois longtemps sans vivres, ni sans personne à la barre… « Cela arrive. de plus en plus souvent. Des bateaux remplis à craquer. Dans un état de vétusté totale. Jetés à la mer et qui dérivent en attendant la mort. Les passeurs se paient et abandonnent leurs clients en pleine mer. J'en ai vu d'autres de ces navires et certains sont silencieux lorsque nous les abordons, d'un silence horrible que l'on reconnaît tout de suite… » Mais Piracci est également chargé de repêcher les naufragés signalés en mer et s'il y met tant de coeur, y compris durant de fortes tempêtes, ce n'est pas tant pour les arrêter que pour les sauver. Hélas, il ramène parfois aussi des corps déjà morts, échoués sur les rives, lorsqu'il arrive trop tard. Alors son humanité, et la nôtre, en prennent un sacré coup.


L'incipit, j'y reviens un instant, nous cueille sur le marché au poisson de Catane, où habite Piracci, qui déborde de chair fraîche jusqu'à la nausée, à ne plus savoir qu'en faire : « Qu'avaient fait les habitants de Catane pour mériter pareille récompense ? Nul ne le savait. Mais il ne fallait pas risquer de mécontenter la mer en méprisant ses cadeaux. Les hommes et les femmes passaient devant les étals avec le respect de celui qui reçoit. En ce jour, encore, la mer avait donné. Il serait peut-être un temps où elle refuserait d'ouvrir son ventre aux pêcheurs. Où les poissons seraient retrouvés morts dans les filets, ou maigres, ou avariés. le cataclysme n'est jamais loin. L'homme a tant fauté qu'aucune punition n'est à exclure. La mer, un jour, les affamerait peut-être. Tant qu'elle offrait, il fallait honorer ses présents. le commandant Salvatore Piracci déambulait dans ces ruelles, lentement, en se laissant porter par le mouvement de la foule. Il observait les rangées de poissons disposés sur la glace, yeux morts et ventre ouvert. Son esprit était comme happé par ce spectacle. Il ne pouvait plus les quitter des yeux et ce qui, pour toute autre personne, était une profusion joyeuse de nourriture lui semblait, à lui, une macabre exposition. »


On présent immédiatement que l'histoire à venir pourrait tenir toute entière dans cette image, cette parabole, ce parallèle. C'est bien ce qui, après toutes ces années de service, commence à rendre notre ami Piracci de plus en plus malade : Lui qui vit, simplement parce qu'il est bien né, dans cette cité d'opulence alors que, juste à côté, chaque nuit la mer produit et recrache son quota d'hommes, de femmes et d'enfants échoués eux aussi « retrouvés morts dans les filets, ou maigres », voire « yeux morts et ventres ouverts »… Cet océan d'injustice croissante et diffuse, dans lequel il parvient difficilement à surnager lui-même plus les années l'épuisent, va recevoir la goutte d'eau qui le fera déborder, emportant Piracci dans un tsunami d'émotions incontrôlables et pas toujours bonnes conseillères. Cette goutte d'eau, c'est sa rencontre avec une migrante sauvée quelques années auparavant. Elle va aujourd'hui lui faire prendre une direction inattendue. « Comment fait-on pour obtenir ce que l'on veut lorsqu'on n'a rien ? de quelle force et de quelle obstination faut-il être ? » Parallèlement, nous suivront Soleiman, un migrant qui décide de prendre la route en payant un passeur. Mais comme presque toujours, rien ne va se passer comme prévu. « Il n'y a pas que les difficultés que nous rencontrons, l'argent à trouver, les policiers marocains, la faim et le froid. Il n'y a pas que cela, il y a ce que nous devenons. Je voudrais demander à Boubakar ce que nous ferons si, une fois passés de l'autre côté, nous nous apercevons que nous sommes devenus laids. »


Je ne vous dirai rien de plus que ce début d'histoire qui vous semble peut-être avorté, car c'est une aventure humaine qu'il vous appartient de vivre, avec vos propres bagages. Comme dans Ceux qui partent de Jeanne Benameur, et comme dans toute vie humaine, il s'agit surtout de rencontres. Mes deux seuls bémols sont que je ne saurai pas ce qui arrive à la rescapée à l'origine de cette histoire, et que j'ai trouvé le changement de vie de Piracci un peu vain pour être crédible et me convaincre tout à fait : je ne suis pas parvenue à le comprendre viscéralement mais seulement à le toucher du doigt. Mais il sert si bien la fin que je reste sur une bonne impression. Une âme à la dérive qui part à la rencontre de corps à la dérive… Deux vies qui vont se croiser puisque chacun fait le chemin dans le sens inverse de l'autre, à la recherche de ce que possède l'autre. Car oui, même lorsqu'on semble tout avoir, il peut nous manquer l'essentiel. Que possède le migrant que n'a pas ou plus le commandant, et dont il prend conscience lors de sa rencontre au marché ? J'admire dans ce roman ce que j'admirais déjà dans le Passeur de Stéphanie Coste, à la fois plus violent et plus poétique (je vous mets le lien en bas) : Ce que d'autres ne pourraient faire qu'en 500 pages, Laurent Gaudé le transmet en si peu : les routes poussiéreuses, les campements clandestins, les descentes de police, les barbelés des frontières et les noyades, les cas de conscience, les superstitions… On vit plusieurs vies dans ce roman qui invite à l'empathie plus qu'à la condamnation.


« Pendant vingt ans il avait mené une vie qui lui convenait. Il allait prendre une autre direction et il sentait qu'il serait tout aussi juste dans cette nouvelle existence. Dans combien de vies peut-on être ainsi soi-même ? Dans combien d'existences qui n'ont rien à voir les unes avec les autres et sont peut-être même antinomiques ? »

Lien : https://www.babelio.com/livr..
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Eldorado fait partie de ces romans de Laurent Gaudé qui prennent aux tripes.
Il en émane une lumière si particulière, éclatante par sa force de compassion et sombre par sa cruauté. C'est cette même lumière que j'avais ressentie en lisant Ouragan et Danser les ombres.
Le destin des hommes y est lié par un événement dramatique qui va profondément bouleverser leur regard sur la vie et leur façon d'appréhender les autres.
C'est une lumière qui éclaire le lecteur sur la détresse humaine mais qui le guide vers la beauté, vers un certain état de grâce.

On a tous en nous un Eldorado.
" L'herbe sera grasse, les arbres chargés de fruits. de l'or coulera au fond des ruisseaux, et des carrières de diamants à ciel ouvert réverbéreront les rayons du soleil. Les forêts frémiront de gibier et les lacs seront poissonneux. Tout sera doux là-bas. Et la vie passera comme une caresse. L'Eldorado. Ils l'avaient tous au fond des yeux."

C'est cet Eldorado qui pousse les Maliens, les Camerounais,les Nigérians, les Somalis, les Irakiens, les Afghans, les Iraniens, les Kurdes... à franchir l'inaccessible et à mettre leur vie en danger bien au-delà du supportable.

" Aucune frontière ne vous laisse passer sereinement. Elles blessent toutes."

Comme toujours, la plume de Laurent Gaudé m'a profondément touchée.
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L'Eldorado, c'est l'Europe pour les Africains pauvres ou qui fuient un régime dictatorial.
Ce roman est très bien écrit ; il est à double entrée.
D'un côté, Jamal et Soleiman viennent du Soudan ; ils veulent passer en Europe à partir de la côte libyenne.
De l'autre, en Sicile, Salvatore est garde côte ; il doit récupérer tous les migrants qui longent Lampedusa pour les remettre aux autorités italiennes.

Deux drames touchent les deux personnages : Soleiman perd son frère, qui, malade, retourne avec leur mère.
Salvatore est abordé par une ancienne migrante qui lui demande un révolver. Cette demande va bouleverser la vie de Salvatore.

C'est un bon roman, et le moment où les trajectoires du héros et de l'anti-héros Salvatore se croisent à Ghardaia, d'une façon improbable semble magique, irréel.
En nous mettant dans la peau du garde côte, dont le métier contient une contradiction, Gaudé arrive à nous convaincre que sauver des humains pour les donner aux autorités afin de les renvoyer au pays, est absurde.
D'un autre côté, l'auteur arrive très bien à nous faire rentrer dans la peau de Soleiman et Boubakar, de par l'intensité de ce qu'ils vivent.

Deux phrases m'ont particulièrement touché par l'image qu'elles donnent :

" Il n'était plus tout à fait en lui, comme s'il se décollait de sa vie."
et :
"Il avait quasiment disparu de lui-même."

On peut faire un parallèle avec "Candide", De Voltaire, quand celui-ci pénètre dans l'Eldorado qui, pour le coup, est en Amérique du Sud.
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« Deux étrangers au bout du monde, si différents
Deux inconnus, deux anonymes, mais pourtant... »

Mais pourtant...

Lui. Il s'appelle Soleiman. Il s'appelle Boubakar. Il s'appelle Abdou ou Djouma. Il rêve d'une nouvelle terre promise, d'un Eldorado où l'herbe est verte et où la terre est fertile. Où l'argent coulerait à flot aussi. Un anonyme parmi les milliers d'ombres que la mer, de ses flots voraces, coulerait bien avant que son argent donné aux passeurs, comme une expiation de sa vie passée, comme une mise à nu, ne soit dépensé.

Il n'était pas né du bon côté de la mer mais il marcherait vers elle pour lui faire face. Pour lui montrer qu'il ne craint pas sa colère. Comme un défi pour abolir les frontières. Combien de Soleiman, de Boubakar, d'Abdou et de Djouma pouvaient y parvenir ? Ils avaient pour eux les esprits de Massambalo. Les pères et mères de tous les espoirs. Que pouvaient-ils bien craindre ?

Lui. Il s'appelle Salvatore. Entre son port de Catane et cette petite île de Lampedusa, île de tous les espoirs, il en a vu défiler des vagues humaines embarquées à la merci de vagues de sel meurtrières. Des Soleiman, Boubakar, Abdou ou Djouma, ses yeux vides et secs n'en ont vus que trop, avalés puis rejetés par la mer. Des complaintes de désespoir, il n'en a que trop souvent entendues dans ses nuits d'encre, à écouter les vagues.

Combien d'entre eux ne connaîtront de Lampedusa que son cimetière de l'Eldorado ? Et tous ces autres qu'il avait pu sauver depuis tant d'années en les arrachant à cette grande Bleue, ont-ils pu connaitre un jour un monde meilleur ?

Il était fatigué de cette vie. Il devait fuir lui aussi.

Ces deux anonymes, le destin leur donnera pourtant un nom l'un pour l'autre... Dans leurs exils en chassé-croisé.


Laurent Gaudé se sent comme un poisson dans l'eau sous le soleil du sud de l'Italie et sa mer porteuse d'espoirs. Sous sa plume, elle se fait tantôt douce et apaisante, tantôt tumultueuse et sauvage. Son style est propre, clair et limpide comme l'eau cristalline. Après le Soleil des Scorta, Laurent Gaudé revient dans sa région fétiche pour une nouvelle ode à la mer et aux espoirs que les hommes mettent en elle. Ceux-ci sont migrants, ils viennent de Lybie, du Soudan, de Syrie ou du Liban. Et Laurent Gaudé nous livre là un bien beau roman sur leur vie, leur rêve, leur espoir.
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Merci Laurent Gaudé, pour ce roman d'actualité enlevé et construit.

Livre choral à mi-parcours entre les deux pans d'une méditerranée limes, frontière vague au sens latin, no man's land absurde, désert des Tartares liquide à la Dino Buzzati, ce récit est aussi un entre deux stylistique. Témoignage d'un drame contemporain essentiel, parfois oublié au profit de la crise Covid, alors que les bouleversements qui en résultent sur notre société-monde en sont peut-être plus grands.... près de 300 millions de personnes en errance... il offre aussi l'occasion d'une réflexion philosophique renouvelée sur la lutte, l'espérance, l'humanité active ; face à l'indifférence coupable et molle qui nous saisit, nous, sédentaires repus, face aux barbelés et au sens de vivre... ou survivre.

Au travers du destin de ses deux personnages principaux, Piracci et Soleiman, Laurent Gaudé parvient à situer son roman dans la longue tradition du conte méditerranéen, accents orientaux et italiens se mêlant en une tentative désespérée pour réduire la fracture de nos temps modernes. Les mots simples et beaux ne trahissent cependant pas le propos de l'auteur : dénoncer -dès 2006, 15 ans déjà, et cela dure...- le drame quotidien et insupportable d'inhumanité de corps jonchant nos plages européennes, tas de vêtements roulés par le sel et le malheur , rapidement enlevés pour ne pas polluer l'odeur rassurante des huiles solaires.

Bienveillant, sans trop en dire, Laurent Gaudé nous invite à suivre deux guides dans leur quête d'exister, se débattant dans la torpeur destructrice d'un monde contemporain où une vie se monnaye, parfois à moindre prix qu'un baril de mazout ... et laisse chacun découvrir... une lueur d'espoir là où on ne l'attendait pas forcément...

Merci au hasard des boîtes à livres aussi, qui m'a fait rencontrer ce livre à 30 mn de cette mer qui berce mes douleurs du moment, et dont l'impassibilité efface tout des hommes, souvenirs, drames et intentions manquées. Chaque jour du haut de mon village refuge je vois ces migrants -les vivants, les chanceux- passer d'Italie, le plus souvent se faire attraper, abandonner au bord du chemin valises creuses et vêtements épuisés. La plume de Laurent Gaudé imprime ainsi dans ma conscience ce que mes yeux seraient tentés d'ignorer.

Un beau livre, venu à point nommé me remettre sur le chemin de l'ouverture aux autres, exigeant, critique, parfois décourageant, trompant par son titre évocateur ma tentation d'oubli dans des pages de paillettes d'or et de fortune.

Au prochain passager d'Eldorado je souhaite à son tour de se laisser emporter par ces rouleaux de méditerranée brassant nos vies de fétus... le temps d'une confortable lecture... inaccessible à ces déracinés si proches, si dangereusement réels, que le roman nous rend soudain supportables.


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Avec un titre aussi évocateur et une première de couverture attirante, le roman de Laurent Gaudé est bien loin de ce que je m'imaginais.
L'auteur traite ici d'un sujet délicat: l'immigration clandestine. Nous suivons le destin tragique de deux hommes: un Africain et un Italien, que rien ne semble rapprocher.
Salvatore Piracci, commandant de la frégate militaire a pour mission d'arrêter les clandestins qui veulent rentrer en Europe. Au hasard d'une rencontre, il se rendra compte de la lassitude et du non-sens de cette vie.
Soleiman, lui, veut absolument rejoindre cette "Belle Europe", par tous les moyens et au prix de nombreux sacrifices.
Avec une écriture poétique et humaniste, Laurent Gaudé nous livre un roman sensible et intimiste, où l'espoir a peu de place.
Une véritable tragédie humaine et contemporaine, qui interpelle quant au sort de tous ces hommes...
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Quelle claque, bon sang ! Voici un roman qui informe bien plus qu'un commentaire journalistique sur la condition des migrants venus d'Afrique, essayant de traverser la Méditerranée, et qui échouent (quand ils survivent) à Lampedusa.
Voici un roman qui vous tient éveillé, la grandeur et la décadence humaines y sont remarquablement dépeintes.
Un petit bémol quand même, je n'ai rien à reprocher à la qualité littéraire du texte, bien au contraire l'écriture est sobre et percutante, non, mon bémol concerne le personnage du commandant Piracci. Je trouve qu'il perd de sa crédibilité au fur et à mesure de son errance, et les dernières pages me semblent inutiles.
Mais ce livre, c'est sûr, laissera son empreinte...
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