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EAN : 9782070760954
201 pages
Gallimard (30/11/-1)
3.36/5   83 notes
Résumé :
Un premier roman livré par un poète chevronné. Un roman qui ne devrait pas passer inaperçu. Les raisons (les bonnes bien sûr) ne manquent pas. À commencer par le sujet. Un été autour du cou relate l'histoire d'un petit garçon de 11 ans, Simon, séduit puis abusé par une odalisque d'une quarantaine d'années, la Monette, pulpeuse, délicieuse, à la voix rauque, "aux seins d'opéra" et "a... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (19) Voir plus Ajouter une critique
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Souviens-toi de cet été, torride, genre des perles de sueur qui coulent entre les seins de la Monette. Des seins généreux qui se gonflent de désir à chaque inspiration. Laisse-moi rêver que j'ai encore onze ans, cela fait des années que j'ai onze ans et que je replonge dans les fantasmes d'un adolescent, le temps d'un été qui se prolonge autant de fois que le soleil plonge dans les champs de blé, mon regard plongeant dans le décolleté outrageant de la Monette, la quarantaine sonnée, assomme-moi de ta poitrine assumée.

Pour l'heure, j'imagine ses lèvres se poser sur les miennes, un rouge à lèvres cerise, tiens et si je prenais un yaourt à la cerise. Ne cherche pas le rapport, il n'existe que dans mon imagination, lubrique diraient certaines, peu importe. de toute façon, je ferme les yeux alors des frissons me parcourent l'échine, lorsque je sens ses lèvres se poser délicatement, ses lèvres qui s'ouvrent, humides, sa langue qui glisse et lèche le long de mon corps… Il fait chaud, j'l'ai déjà dit, du haut de mes souvenirs, torrides, la sueur qui coule le long de ses hanches. J'aime son acidité, j'aime sa salinité, soif de découverte, soif d'envie, ça coule, le long, ça dégouline… J'ai onze ans.

Il est temps de me réveiller, d'ouvrir les yeux. Elle me fait face, croise et décroise ses jambes, le sourire éclatant comme autant d'étoiles qui brillent dans le noir, comme un phare dans la nuit qui guide mon désir ardent. Croise et décroise, furtivement, j'aperçois un petit coin de son étoffe noire, un buisson ardent prêt à s'enflammer aux températures anticycloniques de nos deux corps. Un instant de poésie s'ouvre à moi, aussi sensuel qu'un vers de Verlaine, ses longues jambes s'écartent et me chevauchent, le buisson capte l'humidité de cette chambre aux volets tamisés. le souffle court, la musique d'une nuit, d'une vie, lancinante, nos corps s'échangent, et la cire coule le long de la bougie. Elle souffle la flamme, la lumière s'éteint, celle d'un été, ses jambes autour de mon cou. Un instant furtif de poésie cruelle, fin de l'histoire d'amour de Simon, onze ans et de la Monette, âge « mure », tu reprendras bien un verre d'anisette.
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Une page blanche s'ouvre à l'adolescence pour y inscrire ses amours, ses sentiments, ses premiers émois, ses découvertes du corps et de sa connectivité avec le coeur, l'âme et l'esprit. Cette page fait partie de l'intime et quiconque ose la froisser sans laisser le temps lier le fantasme à l'initiative est un voleur, un bourreau.
De ses yeux d'adulte averti, Guy Goffette nous conte le parcours initiatique d'un jeune homme de onze ans dont l'innocence ne permet pas de rester maitre face à une instruction destructrice.
Si le thème est dérangeant, l'écriture est fabuleuse tant dans sa forme souvent poétique mais aussi dans son fond. le regard de l'adulte sur son passé et sa douloureuse expérience, donne tout entier, conseil de méfiance à ce petit qu'il a été.
Si mon être a en quelque sorte, rejeté cette histoire ou plutôt cette femme sans scrupules, mon esprit a adoré cette écriture et cette façon respectueuse de conter l'inacceptable sans vulgarité.
Guy Goffette est poète avant d'être romancier et je ne manquerai pas de poursuivre la découverte de sa plume dans le registre de la poésie.
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Si je ne recevais pas le bimestriel "Le carnet et les instants" (1), j'ignorerais probablement l'existence de cet auteur gaumais dont on on y rappelle régulièrement l'existence. À force de zapper son patronyme dans le magazine, il se logea dans quelque circonvolution neuronale et finit par se manifester, il y a peu, quand ce nom de friandise wallonne tomba sous mon oeil en quête, dans le dédale de la bibliothèque provinciale, dont une main solidaire avait astucieusement placé un roman dudit poète sur présentoir.

Je confesse ma négligence coupable: Guy Goffette s'est fait une place dans le territoire littéraire et il n'y a pas tant de belges qui en tiennent une aussi méritoire. Son oeuvre poétique a été reconnue par l'Académie française et le Goncourt, par d'autres prix aussi, et à défaut de l'avoir encore bien découverte, j'ai englouti son premier roman, édité chez Gallimard en 2001.

Il y a en tout lecteur cette part intime, un peu limbique, qui le pousse à regarder par le trou des serrures, à devenir voyeur. C'est sans doute celui-là qui lui fera courir ces pages pour refermer le livre avec un brin de confusion pour abus d'intimité. Guy Goffette ne manifeste aucune gêne et il écume : "...j'enrage, j'enrage encore de voir ce qu'une éducation approximative et brutale fait d'un enfant gauche, timoré, précocement pubère et d'une curiosité crasse,..." À douze ans Simon perd ses illusions dans les doigts d'une femme instable et perverse. Il ne rencontrera pas la jeune fille aux jambes nues, la douce qui l'accompagnera; celle-là l'a mal initié. Il dit ses faiblesses (sont-ce des torts ?), la naïveté, l'attirance précoce pour les sens. le récit est sans nul doute une peu de l'enfance de Guy Goffette, qui d'autre pourrait si bien raconter cela, de si secret, sans l'avoir un peu vu ? "... ; si seulement elle me les avait montrés avec un brin de retenue, de la délicatesse, que sais-je, en rougissant un peu, au lieu de me les enfourner comme un paquet de linge sale dans la gorge ;...."

La distance est prise grâce à la troisième personne, vrai-faux double, ce gamin Simon. "Et s'il existe une autre façon de récupérer son enfance, de la replacer dans sa vie comme la pièce manquante du puzzle, que de se la raconter sans cesse, sans cesse, qu'on me le dise,...." La narration oscille entre je et ce gamin que, pathétiquement, il voudrait autre que lui. L'enfant vit sous la colère d'un père autoritaire, buveur, le "roi-tabac", et la tendresse maladroite d'une mère, Tili, un nom de chat ou d'oiseau, qui connaît les désillusions et le manque d'argent des gens d'en bas.

L'essayiste et poète Yves Leclair, dans son récent Guy Goffette, sans légende(2), écrit avec empathie: "....écrivain public des gens de peu, le Rom du langage, un cycliste du vers,... (...) ...un poète commun des mortels, mendiant d'amour, rose à jamais amoureux de la femme,..." Une opportunité d'approcher les obsessions, les ancrages et la rhétorique lyrique de l'ancien instituteur.

Voilà un livre attachant et sincère, où les soldats de plombs sous la table s'émeuvent de blancheurs troublantes de salle de bain. La confession, la complainte d'un exilé de l'amour. Goffette a l'image forte — c'est un poète —, rien que le titre déjà, cet été comme un bas noir de femme autour du cou.

(1) L'abonnement à ce magazine bimestriel des lettres belges est gratuit sur demande écrite. Toutes les informations sur
http://www.promotiondeslettres.cfwb.be/index.php?id=1588

(2) Éditions Luce Wilquin, collection "L'oeuvre en lumière", 2012



Lien : http://marque-pages.over-blo..
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Premier roman de Guy Goffette, je retrouve la plume du poète tout dans la sensation. L'histoire est touchante, et Simon blessé dans ce passage de l'enfance insouciance à un monde d'adulte sans pitié m'a beaucoup touché.
Cela aurait pu être un conte de fées, si la Monette ne s'était pas montrée aussi cruelle, aussi perverse envers cet enfant qui ne voulait que regarder, rêver, tatonner juste un peu des yeux ce monde tant convoité par les jeunes garçons innocents, car il faut quand même préciser que l'éducation de cette époque n'était pas celle d'aujourd'hui. On était informé de la chose tant bien mal et plutôt mal que bien soir par hasard, par un grand frère ou un ami mais sûrement pas clairement ni en détails.
Alors notre petit Simon si fier de pouvoir soulever le voile de l'inconnu et tant convoité, a bien dû ravaler sa fierté, abusé, il fut meurtri à jamais.
J'aimais retrouver cette ambiance campagnarde de cette époque avec le langage que j'ai pu connaitre auprès de ma grand-mère frontalière belge, j'ai aimé ce petit garçon charmant et j'ai haï cette Monette.
Un premier roman touchant qui aborde un sujet aussi sensible que grave sur l'abus sexuel des enfants. Toutefois, l'auteur fait part de cette douloureuse expérience avec beaucoup de pudeur.
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Simon, fils d’un épicier tyrannique et d’une mère affectueuse mais effacée, n’a pas douze ans quand cet été là la Monette lui ouvre sa porte. La Monette, trente de plus que le garçon, voit passer beaucoup d’hommes dans sa vie. Femme infidèle, provocante et gourmande de mâles, elle va initier Simon à ses jeux d’adultes. Il faut dire aussi que le jeune garçon est attiré par cette femme langoureuse prête à lui révéler tous les mystères féminins. Précocement pubère, le sexe opposé l’attire beaucoup et ce n’est pas sa petite copine Pauline qui pourra satisfaire ses fantasmes. Alors quand la Monette lui ouvre son lit, Simon s’y engouffre. Mais la Monette est une ogresse, une dévoreuse d’hommes. Elle consomme puis jette. Après l’insouciance de son monde d’enfant, Simon va découvrir toute la perversité et la cruauté des adultes.

A travers une écriture poétique et légère, Guy Goffette nous présente un conte très noir, l’histoire tendre et cruelle d’une éducation sentimentale rustre. La Monette, à n’en pas douter, est de ces femmes insatiables pour qui le plaisir de la chair fait oublier tous ses longs moments de solitude. Les mâles sont ses mets préférés, et peu importe leur âge. Simon vient lui aussi assouvir ses propres envies, mais des envies de gamins qui ressentent les premiers émois de la chair. S’il rêvait d’une initiation en douceur, il découvre avec la Monette une relation perverse et cruelle, sans affection. Car au final, c’est de bien de cela qu’il s’agit pour le jeune garçon, de sentiments. Simon, malgré les attraits et les rebuffades qui le plongent dans l’incompréhension et la honte, persiste à voir en la Monette une femme aimante. Bien mal lui en a pris : à se frotter aux jeux des plus grands, c’est rempli de colère et de dégoût que Simon entre dans le monde des adultes.

Le sujet peut déranger mais l’auteur ne tombe jamais dans le scabreux et le voyeurisme. Au contraire, Guy Goffette offre ici un beau roman initiatique et autobiographique – au récit certes très noir – sur le passage trop rapide de l’enfance au monde des adultes.
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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
Toute la question était est-ce qu’on peut retenir un nuage en lui arrachant les ailes aux pieds de la table ; capturer l’ombre qui bouge en lui sautant dessus ; enfermer sous ses paupières l’odeur d’une mère, cannelle et petit-beurre, quand elle se penche pour le baiser du soir, et puis regonfler à loisir les seins entrevus pour y boire le lait de la nuit, est-ce qu’on peut ? Simon n’avait pas trouvé de réponse, pourtant il avait tout essayé. En vain : sa mère lui échappait. Souvent même, il s’était battu comme un lion avec le roi-tabac, rigolard et puant la vinasse, pour la protéger des grosses mains velues qu’il promenait comme des mygales sur ses fesses rebondies en regardant, moqueur, le gamin déchiré, furibond, maintenu à distance par le bras ou le pied, tandis que maman se défendait mollement avec des petits cris gloussés de dindon qui rend l’âme, et faisait mine de s’écarter avec des Georges, oh Georges, enfin, voyons, ce n’est pas le moment, Georges, le petit.
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Marilyn Monroe en personne, m’offrant ses lèvres de velours en pâture, ne m’aurait pas fait plus d’effet que n’en fit à Simon, ce matin-là, dans le salon redevenu salon, l’apparition de la Monette, campée sur ses pieds nus, plantureuse et fraîche, les mains retenant sur ses hanches les pans largement ouverts d’une robe de chambre en satin rouge qui ne cachait rien du secret qu’elle avait entre les jambes. Un beau buisson ardent, avec un grain de beauté près de la fourche. Sitôt vu sitôt disparu, hélas, derrière l’étoffe retombée du théâtre vivant, dressé devant Simon, la voix grondeuse et le sourcil froncé :
- Petit vicieux ! A ton âge. On ne t’a donc pas appris qu’il faut regarder les dames dans les yeux.
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Le soleil pouvait bien se rouler dans le blé comme un perdu, le ciel filer un bleu sans couture, le vieux tambour de la terre résonner comme un neuf: pour moi, le fond de l'air était triste. Triste comme un proviseur, une cour de collège et le tilleul au milieu dans son collier de fer, qui s'en va feuille à feuille; comme le village qu'on quitte, l'odeur du café, les cris des joueurs de cartes quand Julos par Dieu sait quel tour de passe-passe d'une seule main gagne pour la troisième fois la partie; triste comme les soldats de plomb pêle-mêle dans la boîte à chaussures au-dessus de l'armoire et le lapin replet au fond de son clapier obscur, d'avance résigné au four dominical; triste comme tout, rien, cet été au bord de la route parce que le cœur tout à coup clapote dans les larmes.

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La porte s'ouvre à ce moment-là: la Monette, cheveux plaqués, enveloppée dans une grande serviette de bain blanche où ses seins, comme de gros melons dans un sac, dodelinent en marchant.
-Tu viens ? c'est prêt. et comme tu vois je n'ai pas pu résister, j'ai trempé un pied, et le reste a suivi. Plouf !
Elle a des pieds minuscules, mais pleins, appétissants comme des petits pains chauds, et des chevilles d'une finesse que la rondeur du mollet affine davantage encore, et une chair crémeuse et si blanche qu'on a tout de suite l'eau à la bouche.
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C'est ainsi qu'un jour on a onze ans. Qu'on se nomme Simon ou Simsi, comme m'appelaient mes copains, ne change rien à l'affaire. On a grandi trop seul pour pouvoir distinguer la mauvaise herbe de la bonne, et la gifle qui calme du baiser distrait qu'on efface pareillement d'un revers de manche une fois la porte fermée. On est un animal bien sage sous la table du salon, qui gagne ses galons d'homme au milieu des soldats de plomb et dans des batailles sans merci, sans cadavre.
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Videos de Guy Goffette (13) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Guy Goffette
Avec douze écrivains de l'Anthologie Avec Anne le Pape (violon) & Johanne Mathaly (violoncelle) Avec Anna Ayanoglou, Jean d'Amérique, Camille Bloomfield & Maïss Alrim Karfou, Cyril Dion, Pierre Guénard, Lisette Lombé, Antoine Mouton, Arthur Navellou, Suzanne Rault-Balet, Jacques Rebotier, Stéphanie Vovor, Laurence Vielle.
Cette anthologie du Printemps des Poètes 2023 proposent 111 poètes contemporains et des textes pour la plupart inédits. La plus jeune a 20 ans à peine, le plus âgé était centenaire. Tous partagent notre quotidien autour de la thématique corrosive des frontières. Leurs écrits sont d'une diversité et d'une richesse stimulantes. Ils offrent un large panorama de la poésie de notre époque. Avec notamment des textes de Dominique Ané, Olivier Barbarant, Rim Battal, Tahar Ben Jelloun, Zéno Bianu, William Cliff, Cécile Coulon, Charlélie Couture, Jean D'amérique, Michel Deguy, Pauline Delabroy-Allard, Guy Goffette, Michelle Grangaud, Simon Johannin, Charles Juliet, Abdellatif Laâbi, Hervé le Tellier, Jean Portante, Jacques Roubaud, Eugène Savitzkaya, Laura Vazquez, Jean-Pierre Verheggen, Antoine Wauters…
Mesure du temps La fenêtre qui donne sur les quais n'arrête pas le cours de l'eau pas plus que la lumière n'arrête la main qui ferme les rideaux Tout juste si parfois du mur un peu de plâtre se détache un pétale touche le guéridon Il arrive aussi qu'un homme laisse tomber son corps sans réveiller personne Guy Goffette – Ces mots traversent les frontières, 111 poètes d'aujourd'hui
Lumière par Iris Feix, son par Lenny Szpira
+ Lire la suite
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