On aurait tort de tôt se gendarmer devant l'accueil fait dans le roman, au travers essentiellement de son héroïne, à la représentation de la famille Bertram et de proches amis de la pièce de Kotzebue, « Das Kind der Liebe » (l'Enfant de l'amour, 1791), traduite plus modestement en anglais par « Lovers's vows » (Serments d'amour). Des esprits éclairés pourraient s'insurger devant la condamnation d'un mélodrame aussi anodin, surtout lorsqu'ils sauront que dans sa jeunesse la romancière avait vu jouer diverses comédies au presbytère de Steventon par des frères et une cousine enthousiastes. S'agirait-il d'un mouvement d'aigreur, d'un raidissement dû aux années ?
La vérité est tout autre. Depuis plus de dix ans, Kotzebue était la cible des moralistes conservateurs anglais. « Serments d'amour » leur déplaisait, peut-être plus particulièrement d'avoir été adapté en 1798 avec beaucoup de succès par Mme Inchbald, qu'ils considéraient comme une « jacobine ». En 1799, la pièce avait déjà connu douze éditions. Pendant leur résidence à Bath (1801-1805), les Austen eurent six fois l'occasion de la voir. Elle était encore populaire en 1830. Combattre Kotzebue en 1811 n'était donc en aucune façon faire preuve d'originalité, mais ce n'était pas non plus une entreprise tout à fait caduque, ni tout à fait vaine. Depuis longtemps on avait tout dit que le caractère pernicieux de la pièce, il s'offrait cependant toujours à la critique avec autant d'évidence et d'actualité. Kotzebue s'y faisait, par esprit de tolérance, le défenseur du crime. [...] (Jane Austen) nous montre les effets de la contagion des idées libérales avec la séduction par Henry Crawford de Mme Rushworth. [...] À l'inverse de ce qui se passe dans une autre pièce de Kotzebue jouée en Angleterre sous le titre de « The Stranger » (l’Étranger), dans « Mansfield Park » la femme adultère n'est pas pardonnée. Ce faisant, l'auteur ne démontre pas une rigueur personnelle à l'égard du péché. Il joint sa voix à celle des évangéliques qui déplorent le laisser-aller des moeurs et réclament une adhésion plus stricte aux règles de vie chrétiennes. (Pierre Goubert, dans la notice du tome II des « Œuvres romanesques complètes » de Jane Austen aux éditions de La Pléiade).
Anhalt : lorsque deux cœurs qui se comprennent s'unissent dans l'état de mariage, la vie des gens mariés peut à bon droit être considérée comme heureuse. Si un couple de cette sorte voit son chemin semé de ronces et d'épines, chacun voudra, pour le bénéfice de l'autre, les ôter par la racine. Leur faudra-t-il escalader une colline, s'extraire d'un labyrinthe ? Le plus expérimenté marchera le premier et servira de guide à son compagnon. La patience et l'amour les accompagneront durant le voyage, tandis qu'ils laisseront loin derrière mélancolie et discorde. Main dans la main, ils continueront leur route, du matin jusques au soir, toute la journée de leur été. Puis la nuit de la vieillesse approchera, le sommeil de la mort surprendra l'un des deux. L'autre, dans l'affliction et le deuil, maintiendra son regard tourné vers ce séjour de lumière où il retrouvera son compagnon ou sa compagne toujours vivant, parmi des arbres et des fleurs qu'eux-mêmes auront plantés, dans des prés éternellement verdoyants.