Le Christ à la carabine, bien que publié à titre posthume, est d'après moi un des meilleurs livres de Ryszard Kapuściński, tant par l'agencement des chapitres que dans la cohérence globale de l'ouvrage.
Les thématiques abordées ne dévient pas de la trame de l'oeuvre du reporter polonais : conflits et voyages, tyrans et religion, discussions avec les passants et aventures rocambolesques du journaliste.
L'auteur revient sur le conflit palestinien et sur certaines de ses caractéristiques, s'attardant pertinemment sur la Syrie laissée à l'écart des négociations entre la Jordanie et Israël, alors que seule Damas peut être garante d'une situation stable dans la région.
Il égrène ensuite les nombreux coups d'État sud-américains, sur fond de spoliation territoriale par United Fruit, et dresse un tableau attristant de la Bolivien, du Guatemala, du Salvador et de Saint-Domingue...Sans hésiter à dénoncer le soutien patent des États-Unis aux dictatures.
S'éloignant de ses pérégrinations, Kapuściński brosse également un portrait comparatif de Allende et de Guevara, listant leurs méthodes et leurs idéaux pour bâtir un monde meilleur.
Si les thèmes abordés sont moins nombreux que dans ses autres ouvrages, ils sont d'après moi plus cohérents ici, plus fouillés ; la sensation de perte au milieu d'un fouillis d'époques et de contrées différentes que j'ai souvent éprouvée à la lecture de Kapuściński s'estompe ici au profit d'une impression d'un exposé clair et concis, sans digressions intempestives. La lecture n'en est que plus agréables !