AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782707320797
522 pages
Editions de Minuit (09/04/2009)
4.06/5   9 notes
Résumé :

Je reste persuadé que la vie est ce qu'on en fait, et qu'il n'est pas d'âge qui soit particulièrement malheureux si ce n'est celui où l'on abandonne la partie et on peut l'abandonner à tout âge. Je trouverai la vie laide le jour où je me mettrai assis et ne voudrai plus me relever. Pour le moment - pour moi -, vingt ans, c'est l'âge d'une grande décision ; c'est l'âge où je risque ma vie, mon avenir, ... >Voir plus
Que lire après LettresVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Relire les lettres de Koltès fut un tel bonheur que j'envisage de garder le livre toujours à proximité pour pouvoir y plonger à ma guise.
Il me semble que son frère François avait dit que c'était la meilleure des biographies et c'est vrai. On y découvre un Koltès très attaché à sa mère à qui il voue une immense admiration, quelqu'un toujours soucieux du bien-être de ses proches. C'est aussi un grand amoureux de la vie qui a parcouru le monde en bafouant souvent les normes bourgeoises qu'il connaissait bien puisqu'il en était issu. Il s'est offusqué du mépris des plus grands pour les minorités et écrit des pièces de théâtre dénonçant l'absurdité du monde, la vanité des êtres et les injustices. Déterminé à réussir dans le théâtre en dépit de tous ses échecs et donc de toutes ses galères matérielles, il s'est montré ensuite intransigeant avec les mises en scène et les traductions de ses créations, jusqu'à la toute fin de sa vie.
Ces lettres révèlent un homme attachant, parfois facétieux, qui s'amusait sans cesse à brouiller les pistes pour se confondre avec le commun des mortels. Il ne manque jamais d'humour. le style est à la hauteur de ses productions littéraires, révélant une capacité innée pour l'écriture.
Bref, c'est un livre qui me nourrit à chaque fois que je l'ouvre et c'est, évidemment, l'un de mes livres préférés.
Commenter  J’apprécie          70
les lettres conservées par ses correspondants et qu'ils ont bien voulu confier - aucune lettre reçu par lui qui ne les gardait pas - constitue une sorte de journal qui serait à facettes, les lettres adressées à certaines occasions présentant selon les destinataires des similitudes mais aussi des différences qui peuvent métamorphoser complètement le point de vue. Admirables lettres à sa mère, pour tenter de lui faire comprendre ce qu'il y a de vital pour lui dans leurs différences, sans que soit remis en cause l'amour qu'il a pour elle.
Commenter  J’apprécie          10

Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
Pour en revenir à mon personnage, la question est de savoir s’il a d’autres moyens que celui-là d’avoir un rapport d’amour avec les autres ; pendant toute la durée du texte, précisément, il explique pourquoi tous les autres moyens lui ont été ôtés ; il y a un degré de misère (sociale ou morale, ou tout ce que tu veux) où le langage ne sert plus à rien, où la faculté de s’expliquer par les mots (qui est un luxe donné aux riches par l’éducation, et voilà le fond de la question) n’existe plus. Or, (crois-moi sur parole) il y a parfois un degré de connaissance, de tendresse, d’amour, de compréhension, de solidarité, etc. qui est atteint en une nuit, entre deux inconnus, supérieur à celui que parfois deux êtres en une vie ne peuvent atteindre ; ce mystère là mérite bien qu’on ne méprise aucun moyen d’expression dont on est témoin, mais que l’on passe au contraire son temps à tenter de les comprendre tous, pour ne pas risquer de passer à côté de choses essentielles. »
Commenter  J’apprécie          40
« En bref : je me suis trouvé en contact – pour la première fois peut-être, en tout cas d’une manière aussi violente – avec ce qui doit constituer le plus bas niveau de la classe exploitée, ou du moins celui qui m’a le plus bouleversé, sans doute parce qu’ils avaient moins de vingt ans, qu’ils me ressemblaient sur le plan des aspirations, et qu’enfin ils portaient la marque horrible d’une vie détruite déjà, sur leur visage. Te donner les détails serait trop long, inutile peut-être ; mais disons qu’il s’en ai suivi une conversation de toute une nuit, jusqu’à 10 heures le matin, qui m’a fiat un choc tel que je n’arrive pas encore à calmer mon esprit. Je n’ai pas pu ouvrir la bouche ; pour la première fois que je suis au Parti [communiste], je me suis senti du mauvais côté, et , enfin, j’ai fui comme un voleur, avec une honte dont je n’arrive pas encore à bien à voir quelles en sont les causes. […] Ainsi, ces exploités de vingt ans, c’est la part malheureuse, c’est – toujours métaphysique ! – la part de Dieu, sans conteste possible. Mais si, de l’autre côté, Rothschild, de Wendel, l’argent, et tous ses profiteurs, sont le Mal incontestable, nous, où sommes-nous ? Je me dis : je suis au Parti communiste, j’ai choisi mon camp ; mais quand la situation me catapulte à la figure me vrais exploités, je vois l’énormité du luxe de mon existence. J’ai choisi mon camp, me dis-je ? Mais en cas de catastrophe, sur quelle solidarité compterais-je, sinon sur celle de l’argent, et pourquoi pourrais-je y compter, sinon à cause de mes origines ? Sur quelle solidarité, eux, peuvent-ils compter ?
Commenter  J’apprécie          20
Camarade, Il m’arrive de craindre une vraie fatalité de l’histoire sur les destins individuels : suffit-il d’une option intellectuelle (même doublée de militantisme) pour que son propre destin soit changé ? – ou : suffit-il d’être communiste pour être dans le camp des révolutionnaire ? […] Je sens bien que, à l’envers, je risque de reconnaître l’héritage honteux des années noires du colonialisme : je suis tant tenté de reconnaître la supériorité de la race noire sur la race blanche ! Alors, je me contiens, j’affirme ma lucidité, je ne sanctionne pas par une opinion mes impressions esthétiques, je refoule toutes ces choses le plus bas possible, je les emballe hermétiquement et mets les pieds dessus en disant : « Tout cela, c’est des histoires de cul ». Mais je demeure rêveur : tant de choses sont des histoires de cul. Je crains d’avoir emballé la politique dans le même paquet, et me voilà obligé de tout redéfaire pour y voir clair. […] Pourquoi moi, dois-je, aujourd’hui, payer le prix d’un siècle d’histoire imbécile ? À qui réclamer ma réhabilitation ? Quel témoignage produire ? […] Là, dans l’ombre, comme barrant l’entrée, – ses genoux sont repliés sur son ventre, un bras soutient sa tête, tandis que l’autre, de minute en minute, chasse mollement quelques moustiques – dort la future révolution. […] Chaque camp semble dessiné aussi précisément que sur un plan, dans la lutte des classes, et l’on ne traverse pas un chantier sans la profonde impression de l’imminence de la révolution, violente, sans doute, sous les ciels rouges des puits de pétrole. […] L’oppression permet de croire en la capacité infinie de la révolte de l’homme ; à mesure que la liberté lui est donnée se prouve sa totale impuissance : ce langage révolutionnaire est à la base, semble-t-il, de toute conversation politique ici. […] On m’abreuva d’informations : qu’il me suffisait d’une semaine ici pour devenir raciste […] Le même jour, un Africain était mort sur le chantier, écrasé par le carterpillar. On m’en mit plein la vue pour me montrer à quel point le fait était banal, presque quotidien, risible, sain, et prouvait à quel degré cette petite société, réunie autour d’un verre, parlant si gaiement entre Blancs, était faite d’hommes, durs, expérimentés, souverains, des vrais, quoi.
Commenter  J’apprécie          10
En fait, les personnes et les personnages m'apparaissent d'une toute autre manière. L'ensemble d'un individu et l'ensemble des individus me semblent tout constitués par différentes « puissances » qui s'affrontent ou se marient, et d'une part l'équilibre d'un individu, d'autre part les relations entre personnes sont constitués par les rapports entre ces puissances. Dans une personne, ou dans un personnage, c'est un peu comme si une force venant du dessus pesait sur une force venant du sol, le personnage se débattant entre deux, tantôt submergé par l'une, tantôt submergé par l'autre. On a donné parfois à l'une le nom de Destin, mais cela me paraît trop schématique – et trop facile ! Dans les rapports entre les personnes, c'est un peu comme deux bateaux posés chacun sur deux mers en tempête, et qui sont projetés l'un contre l'autre, le choc dépassant de loin la puissance des moteurs. Bien au delà d'un caractère psychologique petit, changeant, informe, il me semble y avoir dans chaque être cet affrontement, ce poids plus ou moins lourd, qui modèle avec force et inévitablement une matière première fragile
Commenter  J’apprécie          20
Je vois avec regret partir chaque jour les derniers restes de ma juvénilité ( ! ) et de mon pucelage, et cela me laisse un goût un peu amer. Je me sens m’asseoir, m’affirmer, vieillir en un mot. Mais enfin, je n’ai que vingt et un ans, et je me console provisoirement en pensant que j’ai encore un peu de temps pour vivre jeune, mourir jeune, et être un beau cadavre ! Ce qui est terriblement vicieux de la part de la Nature, c’est que le sentiment de la vieillesse approchante nous fait avoir des élans furieux de désir de vivre et de jouissance, et qu’en contrepartie, chacun de ces élans nous jette une ride de plus sur le front, un pli plus désabusé sur les lèvres, une intonation plus grave dans la voix, ou, plus invisiblement mais plus efficacement, une désillusion de plus dans l’esprit. Je redoute déjà le jour où tous ces sillons creusés dans la chair et dans le cerveau éclateront, et, en une nuit, désagrégeront toute cette carapace de fausse jeunesse et me feront pourrir sur pied, plus effectivement que la vérole ou la peste, avec cette odeur écœurante de putréfaction difficilement cachée que l’on dégage dès vingt-cinq ans.
Commenter  J’apprécie          10

Videos de Bernard-Marie Koltès (10) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Bernard-Marie Koltès
Au théâtre Nanterre-Amandiers, le metteur en scène Ludovic Lagarde se saisit du "Quai Ouest" de l'écrivain Bernard-Marie Koltès, cette pièce troublante écrite au tournant des années 80, qui rassemble marginaux et bourgeois désabusés dans un hangar désaffecté : lumière sur une société déclinante.
Comme souvent dans les pièces de Koltès, tout part d'un lieu : dans "Quai Ouest", il s'agit de ce grand hangar désaffecté plongé dans l'obscurité. Pour Ludovic Lagarde, ce hangar est « un décor-personnage. le lieu est le départ de la pièce. » Par les failles et les trous de cet endroit, se faufilera bientôt la lumière de l'aube, mais avant cela a lieu une rencontre entre un bourgeois suicidaire chaperonné par sa secrétaire et la communauté de marginaux exilés qui habite le hangar. Arrivé en jaguar, Maurice Koch perturbe l'équilibre de la communauté en leur offrant une opportunité de fuite. Les désirs des uns et des autres germent, s'entrechoquent puis s'annulent.
C'est toute une époque qui vient s'échouer sur le "Quai Ouest" : les utopies et les rêves exprimés dans les marges s'effritent sous une menaçante vague de néolibéralisme et de financiarisation. Pour Koltès, ce lieu est l'occasion de rencontres improbables et de faire survivre la poésie dans un monde où elle s'érode. Un monde avec de nombreuses résonances avec le nôtre : la question du bouc émissaire lorsque Cécile, émigrée frustrée libère sa haine face à Abad, mais aussi « la colonisation et la _décolonisation_. À la fin de la pièce, Cécile parle en quechua, le langage de ses origines qu'elle ne connait pas elle-même. Cette décolonisation de la personne est intéressante vis-à-vis des débats qui font rage aujourd'hui en France. L'extrême droite en France vient sur un terrain colonial, au moment où le mouvement de décolonisation et la déconstruction de ces dominations interviennent. » analyse Ludovic Lagarde.
Olivia Gesbert invite à sa table le metteur en scène Ludovic Lagarde pour nous présenter cette nouvelle pièce.
#Théâtre #QuaiOuest _____________
Prenez place à La Grande Table pour rencontrer d'autres personnalités qui font l'actualité de la culture, ici https://www.youtube.com/watch?v=P3e3n1f0N4E&list=PLKpTasoeXDrpsBVAaqJ_sANguhpPukaiT&index=5&t=3s&ab_channel=FranceCulture ou sur le site https://www.franceculture.fr/emissions/la-grande-table-1ere-partie
Suivez France Culture sur : Facebook : https://fr-fr.facebook.com/franceculture Twitter : https://twitter.com/franceculture Instagram : https://www.instagram.com/franceculture
+ Lire la suite
>Littérature (Belles-lettres)>Littérature des langues romanes. Littéraure française>Lettres, correspondance littéraire (87)
autres livres classés : correspondanceVoir plus
Les plus populaires : Non-fiction Voir plus


Lecteurs (29) Voir plus



Quiz Voir plus

Titres d'oeuvres célèbres à compléter

Ce conte philosophique de Voltaire, paru à Genève en 1759, s'intitule : "Candide ou --------"

L'Ardeur
L'Optimisme

10 questions
1295 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature française , roman , culture générale , théâtre , littérature , livresCréer un quiz sur ce livre

{* *}