Je suis le vent - Les jours s'en vont

Vu mon engouement pour les deux premières pièces lues de cet auteur (Quelqu'un va venir - le fils), je me suis évidemment précipitée vers d'autres oeuvres de ce même auteur.

Directement, j'ai retrouvé le même univers. Un peu trop peut-être.

Mais surtout que, ici, hasard des rencontres livresques, l'espoir est encore plus absent que dans les premières pièces.

Je ne conseille donc pas ces oeuvres-ci en premier.

Mais l'univers de cet auteur est cohérent, aucun doute après ces premières lectures. Il y a autant de force que de beauté obscure. Il faut juste avoir le moral !

Dans ces deux pièces, Jon Fosse s'est judicieusement débarrassé des didascalies sur les décors et la scénographie que je trouvais poussiéreux et suranné dans "Le Nom" et "L'Enfant". Tout est fait pour se focaliser sur les personnages et laisser notre imagination leur dessiner un environnement. Les personnages pourraient être tout le monde : L'un, l'autre, une jeune femme, un jeune homme, une femme âgée, etc. Beaucoup de courts silences dans les dialogues ou des suspensions, des hésitations. On a beaucoup de mal à exprimer ce qui compte vraiment, notre rapport à l'existence, le sens de toute cette agitation. Alors on s'arrête, on réfléchi, on s'interroge, on comble cette angoisse par des futilités, on s'accroche aux habitudes. Comme dans les tropismes de Nathalie Sarraute. Et la vie de ses personnages est belle par instants. C'est furtif, mais c'est joyeux et agréable.

Ce recueil contient deux pièces de nature existentielle, qui peuvent décontenancer. Elles interrogent de manière indirecte le rapport à la vie, à l'être, faut-il partir ou rester, tout ne semble qu'un éternel recommencement.

Je suis le vent met en scène deux personnes, L'Un et L'Autre, sur un bateau imaginaire, qui échangent des bouts de phrases, des mots, mais "ce sont justes des mots".

Dans Les jours s'en vont, plusieurs couples occupent le même espace, la même maison : le jeune homme et la jeune femme, le vieil homme et la vieille femme, la femme mûre et l'homme mur, etc. Ils entrent et quittent la scène comme on entre et quitte une vie. On s'interroge sur leurs relations, leurs attentes et leurs doutes.

Ces deux pièces, composées de phrases suspendues, de silence, de choses non dites et de répétitions donnent une impression étrange et hypnotique qui envoûte. L'être humain semble terriblement seul et incompris, les phrases peinent à se former, il s'agit surtout de bribes, d'instants qui expriment le manque et le doute, l'absence et l'attente. Seule la mélancolie et une infinie tristesse englobent tous les personnages dans une quête qui semble perdue d'avance.

A la fin de la lecture de ces textes, il reste l'impression d'avoir pénétré au plus profond d'une oeuvre d'art, comme devant un tableau abstrait ou contemporain. On se demande si on a vraiment tout compris, mais les émotions sont là, la magie opère et une fois le livre refermé, on a envie d'en recommencer la lecture pour entrer encore plus avant dans cet univers quasi immatériel et d'une singularité marquante.