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EAN : 9782072906640
64 pages
Gallimard (25/02/2021)
4.64/5   7 notes
Résumé :

Entre 1780 et 1830, les artistes femmes accèdent en France à une visibilité inédite. Transformé par la Révolution française, l'espace de production artistique s'ouvre de manière inédite aux femmes. Sont ici présentées les oeuvres d'Élisabeth Vigée Le Brun, Adélaïde Labille-Guiard, Marguerite Gérard, Marie-Guillemine Benoist ou Constance Mayer, aux côtés de nombreuses autres plasticiennes célébrées en leur temps : Angélique Mongez, Henriette Lorimier, Pauline... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
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« Jusqu'à présent on n'attendait de leur pinceau que de l'agrément et de la propreté ; elles montrent aujourd'hui de la vigueur et de la noblesse. Elles sont enfin les dignes rivales de notre sexe, et les hommes qui s'étaient attribué sur elles toute la supériorité des talents, peuvent désormais craindre la concurrence » - Commentateur du Salon de 1783

L'exposition « Peintres femmes 1780-1830 » vient enfin d'ouvrir ses portes jusqu'au 4 juillet prochain au musée du Luxembourg à Paris.
Le petit « carnet d'expo » aux pages cartonnées que je feuillète tient peu de place. L'air de rien, il réussit le tour de force en une soixantaine de pages de nous présenter ces peintres femmes, et non femmes peintres insiste Martine Lacas la commissaire de l'exposition. Des dépliants judicieusement insérés à l'intérieur permettent de visionner une vingtaine de tableaux en couleur et en font un magnifique petit livre pour découvrir l'exposition.

Peu d'époques ont été aussi agitées dans notre histoire de France : 50 années, coincées entre l'Ancien Régime et la Restauration, en passant par la Révolution Française et l'Empire. Dans cette période, étonnement, les femmes en France vont occuper une place importante dans le monde des arts. Auparavant, celles-ci avaient accès aux professions artistiques, mais étaient vouées aux genres dits mineurs, comme les fleurs, les paysages ou des scènes de genre. Douées pour le beau, le décoratif, c'était tout ! La décence ne leur permettait pas le nu, surtout masculin, leur interdisant ainsi l'accès à la peinture d'histoire.

1783 est la grande année pour deux peintres femmes exceptionnelles qui sont admises à l'Académie royale de peinture. La plus connue, la très jolie Elisabeth Louise Vigée le Brun, peintre officiel de la reine de France Marie-Antoinette dont elle fait de nombreux portraits, est déjà considérée à 28 ans comme une très grande portraitiste. Grâce à l'intervention de la reine, l'Académie la reçoit avec une peinture d'histoire, genre noble traditionnellement réservé aux hommes : une allégorie « La Paix ramenant l'Abondance », confirmant ainsi son appartenance officielle à l'élite artistique française comme peintre d'histoire. le même jour, Adélaïde Labille-Guiard est également reçue à l'Académie.

La révolution va tout chambouler. En 1793, L'Académie royale est remplacée par l'Institut. L'art n'est plus le monopole des élites fortunées. Cette démocratisation profite aux femmes qui s'engouffrent dans la brèche. Et ces dames sont nombreuses. Elles ont la possibilité d'étudier dans des ateliers d'élèves tenus non seulement par des femmes, comme celui de Labille-Guiard, mais aussi par des hommes comme Greuze ou David. Elles y étudient le dessin, copie des toiles anciennes et assistent à des séances de pose de modèles masculin et féminin. Ces lieux sont à la mode, permettant ainsi une mixité sociale entre les jeunes filles de la bonne société qui veulent apprendre la peinture. Catherine-Caroline Cogniet-Thévenin nous montre ses dames au travail dans sa toile « Atelier de jeunes filles ».

On n'a jamais vu autant de femmes artistes. En ce début du 19e siècle, celles-ci sont présentes dans l'espace de création artistique. La féminisation des beaux-arts est devenu un fait. Comme les hommes, elles en font leur métier, reçoivent des prix et vendent leurs oeuvres. Certaines osent même le grand genre de la peinture d'histoire mais préfèrent les portraits qui plaisent à un public plus ouvert au plaisir esthétique du « sentiment ». Non sans humour, avec malice, Nicole Vestier se peint surveillant son bébé en tenant sa palette de peintre à la main « L'auteur à ses occupations, 1793 ».

Mais qui étaient ces femmes qui parvinrent à obtenir une reconnaissance et des succès commerciaux. Très nombreuses, je n'en citerais que quelques-unes. Elles sont toutes magnifiques :

- Elisabeth Louise Vigée le Brun, dont le superbe « Autoportrait de l'artiste peignant le portrait de l'impératrice Elisaveta Alexeevna », 1800, ouvre l'exposition.
- Nisa Villers : « Portrait présumé de madame Soustras laçant son chausson », 1802. Ce portrait est l'affiche de l'exposition : un regard séducteur, une gorge claire mise en valeur par le noir de la robe, une cheville érotiquement découverte.
- Adélaïde Labille-Guiard et son atelier : « Autoportrait avec deux élèves », 1785.
- Hortense Haudebourt-Lescot fait régulièrement salon : « Portrait de l'artiste »,1800.
- Marguerite Gérard, belle-soeur de Fragonard, peint des scènes de genre parfois voluptueuses : « Artiste peignant le portrait d'une musicienne », 1800.
- Rosalie Filleul de Besnes a 23 ans sur son « Autoportrait » peint en 1775. En 1794, elle abandonne la peinture après son mariage. Vigée le Brun dans sa correspondance écrit : « Hélas ! je me souviens qu'au moment où j'allais quitter la France pour fuir les horreurs que je prévoyais, Madame Filleul me dit : « Vous avez tort de partir, moi je reste, car je crois au bonheur que doit nous procurer la révolution », « et cette révolution l'a conduite à l'échafaud ».

Personnellement, je retiendrais la belle toile de Marie-Guillemine Benoist, formée par Vigée le Brun, connue pour son « Portrait d'une négresse » en 1800, renommé « Portrait d'une femme noire » ou « Portrait de Madeleine » qui est son chef-d'oeuvre, considéré comme célébrant l'abolition de l'esclavage dans les colonies par la Révolution française. L'esclavage sera d'ailleurs rétabli par Napoléon en 1802.

Toutes ces femmes de grand talent ont ouvert la voie. La féminisation moderne de l'espace artistique n'aurait pu avoir lieu sans ces pionnières de la fin du XVIIIe et des premières décennies du XIXème siècle.

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J'ai trouvé ce livre dans son genre assez remarquable. Consacré à l'éclosion en gros des femmes peintres (même s'il y avait eu auparavant des précédents) entre 1780 et 1830, c'est d'abord une véritable réussite esthétique. Belle présentation, jolies reproductions, très beau papier, agréable mise en page, le tout composant un livre relativement original sur le plan de l'édition. Et puis Martine Lacas (commissaire de l'expo qui a donné lieu à ce livre) a composé un ouvrage passionnant qui se penche par exemple sur les voyages en Italie des femmes peintres, sur leur place au salon, sur leurs relations avec les peintres hommes etc...
Outre l'inévitable Vigée-Lebrun on découvrira des artistes remarquable comme Marie-Denise Villiers dont un des tableaux était l'affiche de l'expo tenue au Musée du Luxembourg. Ce portrait présumé de madame Soustras laçant son chausson est d'un charme remarquable, mais Constance Mayer mérite également de l'attention.
le livre les montre aussi dans les regards des hommes. le portrait de Jeanne Philiberte Ledoux par Greuze est vraiment très beau.
C'est à la fois un livre d'histoire de l'art et un livre d'histoire tout cour, passionnant pour qui s'intéresse à l'histoire des femmes. Ainsi nombre d'entre elles furent les élèves discrètes de peintres hommes célèbres et l'attribution de leurs toiles fut longtemps mécaniquement attribué à leurs professeurs. Mais on distingue dans ce livre un élan puissant pour pouvoir exercer leur art. Dans un atelier de nombreux peintres s'exercent à peintre un modèle. Parmi eux une femme, concentrée. C'est elle qui d'une certaine façon est la star de ce beau livre passionnant !
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Ce petit Carnet d'exposition me fait regretter de ne pas avoir vu l'exposition sur les Peintres femmes au Musée du Luxembourg, en 2021.
On peut admirer les oeuvres grâce aux présentations en pleine page, aux dépliants et aux posters intégrés dans l'ouvrage.
A rebours des idées reçues, tant de l'époque considérée que d'aujourd'hui, on y apprend que les femmes ont été nombreuses à pratiquer la peinture et à vivre de leur art, et que leurs oeuvres furent très appréciées de leurs contemporains.
Il faut noter, entre autres, que les ateliers étaient des lieux de mixité sociale et les liens entre artistes s'y nouaient de façon durables. Que les peintres femmes étaient aussi filles, compagnes ou amies d'artistes. Que certaines, comme Louise-Joséphine Sarazin de Belmont ont remarquablement su mener leur carrière (cette dernière allant jusqu'à s'installer seule en 1830 dans une bergerie des Pyrénées pour "y saisir la nature sur le fait").
Une bonne introduction qui donne envie de se plonger dans les autres ouvrages de Martine Lacas.
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BEAUX ARTS - Les carnets d'expo de la collection Découvertes Gallimard sont toujours un réel plaisir ! Ils le sont d'autant plus en ce moment puisque les musées restent fermés aux publics. le dernier en date, Peintres femmes – 1780 -1830, à paraître ce 25 février et signé de la docteure en histoire et théorie de l'art, Martine Lacas, sort à l'occasion de l'exposition Peintres femmes -1780-1830 – Naissance d'un combat qui doit se tenir au musée du Luxembourg du 3 mars au 4 juillet. S'il semble exclu que nous puissions y aller dès le 3 mars peut-être nous est-il permis d'espérer de nous y rendre d'ici le 4 juillet.
Et à la vérité nous le souhaitons ardemment car la lecture de ce petit catalogue d'exposition nous met l'eau à la bouche. Nous y voyons les oeuvres d'Élisabeth Vigée le Brun, d'Adélaïde Labille-Guiard, de Marguerite Gérard, de Marie-Guillemine Benoist, de Constance Mayer, de Rosalie Caron, de Julie Duvidal de Montferrier, de Marie-Geneviève Bouliard et bien d'autres.

La suite sur : www.actualitte.com

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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
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« C’est un homme que cette femme-là, entends-je dire sans cesse à mon oreille. Comme si mon sexe était éternellement condamné à la médiocrité, et ses ouvrages à porter toujours le cachet de sa débilité et de son antique ignorance. »
L’avis important d’une femme sur le salon de 1785 est emblématique du foisonnement d’écrits sur ce thème des années 1780 jusqu’aux années 1820. Que son auteur soit une femme et qu’elle énonce clairement, et dénonce, la négativité du meilleur compliment adressé alors à une artiste, prouve que des mutations essentielles s’opèrent à cette époque. Même si leurs effets ont tardé à faire battre en retraite des idées vieilles de plusieurs siècles, toujours vicace…

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On doit finalement se rendre à ce constat : à ne considérer les oeuvres des artistes femmes qu'à la lumière de leur statut de femme, qu'il s'agisse de démontrer comment elles en pâtirent, comment elles le transgressèrent ou comment elles le revendiquèrent, on ne fait que corroborer et maintenir les présupposés et les valeurs qui ont conduit le modèle historiographique dominant à oublier leur rôle, leur apport et leur place dans l'espace des beaux-arts entre 1780 et 1830, comment dans les importants mutations que celui-ci enregistre alors - mutations déterminantes pour la seconde moitié du XIXe siècle. Et on se prive du plaisir de contempler les oeuvres d'Henriette Lorimier, Pauline Ozou, Constance Charpentier, Marie-Éléonore Godefroid, Césarine Davin-Mirvault, Alexandrine Delaval, Isabelle Pinson, Hortense Hadebourt-Lescot, Rosalie Ducreux, Élisabeth Chaudet, Adèle Romanée, Rosalie Caron, Julie Duvidal de Montferrier, Louise-Joséphine Sarazin de Belmont et tant d'autres encore que leur siècle admira.
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Vidéo de Martine Lacas
L'artiste Rosa Bonheur (1822-1899) fait partie des quelques grandes figures féminines libres du XIXe siècle et sa vie est un véritable roman : elle peint lions, cerfs et vaches, elle porte les cheveux courts et les pantalons, elle fume le cigare.
Dans le cadre du cycle de conférence « L'Art en histoires», dont la seconde édition s'intéresse aux questions d'identités artistiques aux XIXe et XXe siècles, retrouvez l'historienne Martine Lacas qui s'attache à montrer, à travers la figure de Rosa Bonheur, les places qu'occupent les artistes femmes dans les sociétés françaises et européennes de l'époque.
En savoir plus sur le cycle « L'Art en histoires» de la BnF, pour s'initier aux principaux courants artistiques et comprendre les oeuvres d'art en regard de lectures critiques : https://www.bnf.fr/fr/agenda/lart-en-histoires
+ Lire la suite
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