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EAN : 9782330012892
352 pages
Actes Sud (03/10/2012)
3.83/5   15 notes
Résumé :
Chirurgien dans le plus grand hôpital d’Addis-Abeba, Hailu a deux fils : Yonas enseigne l’histoire à l’université, il est marié et père d’une petite fille ; Dawit est étudiant en droit, épris de liberté et de justice. Si leur mère n’était pas malade depuis de longs mois, la famille vivrait dans l’harmonie, sous un même toit, à l’abri des soucis matériels et du fracas du monde.
Mais l’Histoire réserve de ces bourrasques qui n’épargnent personne : 1974, la révo... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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A la lecture des premières pages, ce n'était pas gagné que j'aille au bout de ce roman qui, à l'aide d'un stylo affûté comme un scalpel, tresse des images de silence et d'horreur dans cette Éthiopie des années soixante-dix. Décennie qui voit l'empereur Sélassié se faire déposer par une révolution très vite confisquée par la junte militaire du Derg, laquelle instaure une dictature répressive sous couvert d'une propagande socialiste.

Le récit s'ouvre sur la famine qui frappe le nord du pays avec une écriture minutieuse, implacable, sans marque d'émotion ni de jugement comme si les faits étaient des actes inévitables. Les personnages croisés semblent frappés d'accablement, devenus comme nus après la mort de l'héritier d'une dynastie contemporaine du roi Salomon.
Même Hailu, médecin à l'hôpital dans la capitale, semble au début à peine perturbé par la situation du pays et cette junte marxiste totalitaire, il est vrai la maladie de sa femme est suffisamment préoccupante pour lui et les deux fils. Mais il suffit d'un choix, d'une décision pour voir son destin basculer et découvrir un monde où les individus sont réduits à des grains de sable.
Le récit s'enfonce alors dans le désarroi, un désespoir semé de violence, exprimé sans un mot de trop à travers une écriture sans inhibition qui n'édulcore, ni ne masque la brutalité des faits. le roman aurait pu être d'une absolue noirceur et le lecteur frappé de torpeur si l'auteure n'avait pas eu l'intelligence de centrer l'intrigue sur la famille de Hailu accompagnée d'une galerie de personnages gravitant autour et la force vitale de l'amour filial.

Le roman puise véritablement sa force dans cette famille, d'êtres de chair et d'esprit pris dans un conflit déshumanisé. J'ai été comme absorbée par cette famille désunie sous le poids des convictions et des tempéraments qui isolent chacun de ses membres. Une famille fracturée par des décisions et des promesses trahies. Mais les temps chaotiques ont le pouvoir de ressouder ce que les vicissitudes de la vie peuvent défaire, et les résignations consenties comme les épreuves endurées tendent à rendre solidaires ces êtres en souffrance.

Ce n'est pas un bouquin que je recommanderais facilement tant les actes de barbarie rapportés sont terrifiants. Accordant peu de place à la vie quotidienne, c'est un roman féroce dont quelques passages se lisent la gorge serrée et laissent la conscience effarée. Il y a eu la crainte de se perdre sur les chemins éthiopiens parsemés de cadavres mais l'émotion née de la poésie de la relation difficile entre les membres d'une famille a été salutaire. Je me suis même sentie happée par la douleur mutique de ces individus meurtris à laquelle Maaza Mengiste a su donner une vibration unique.
Un roman au souffle long, maladroit parfois aussi, comme beaucoup de premiers romans. Mais il est parvenu à me captiver et à m'atteindre en plein coeur.
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A travers les membres d'une famille de classe moyenne supérieure éthiopienne dans les années 70, c'est la chute de l'empereur Selassié et l'arrivée du Derg à laquelle nous assistons dans ce roman.
Comment chacun vit, survit, réagit à cette guerre, cette terreur du quotidien, en s'adaptant, en résistant ou en protégeant (chacun à sa manière) les siens, voici finalement le sujet de ce roman choral fort intéressant, qui décrit par de courts chapitres l'histoire et les choix de ses nombreux personnages.

Sous le regard du lion est un livre puissant, mais qu'il faut savoir accueillir pour pouvoir se laisser emporter par l'histoire. Il m'a fallu une bonne centaine de pages (la première partie donc) pour pouvoir m'en imprégner. En effet dans cette première partie, les très nombreux personnages se croisent, s'entremêlent, mais sans que j'ai pleinement réussi à les assimiler et comprendre tous les liens. Heureusement, j'ai réussi à me remotiver grâce aux critiques de certains babelionotes qui ont pu ressentir cette même gêne et qui m'ont remotivée, sans le savoir, dans ma lecture.

Une fois arrivée en seconde partie, les personnages sont installés et leurs péripéties ont pris davantage de sens, me permettant d'accélérer ma vitesse de lecture et mon intérêt.

J'ai ainsi appris un certain nombre de choses sur l'histoire de l'Ethiopie et ses conflits à cette période, avec des personnages réalistes et attachants.

Je reste néanmoins à 3,5, car l'abandon fut très proche, heureusement la suite et la fin méritaient de m'accrocher.
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C'est un pan de l'Histoire éthiopienne que nous présente Maaza Mengiste : Les prémices de la chute de l'empereur Hailié Sélassié dont l'ascendance d'origine biblique ne lui épargna pas une fin étouffante ; la prise de pouvoir du Derg, organe militaire dont les exactions ne tarderont pas à égaler celles de son prédécesseur à la tête du pays…

Pendant ce temps la famine engrange des morts et des bruits de guerre avec la Somalie se font entendre. Etranglé, le régime d'obédience socialiste se retrouve sous le joug soviétique, non sans conséquence géopolitique en ce temps de guerre froide.

L'auteure fait croiser la fiction et la réalité pour retranscrire l'impact du récit national au quotidien, à travers le prisme d'une famille qui vivra tous ces soubresauts dans sa chaire.
Un bel ouvrage.
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Si vous n'êtes pas trop jeunes vous avez peut-être le souvenir de la famine en Ethiopie dans les années 80, ces photos atroces d'enfants au ventre gonflé, la peau sur les os, les yeux globuleux dans des visages décharnés ... ces images de famines africaines que j'aimerais ne jamais revoir. C'est avec cette famine que commence le roman et avec le Negus, le roi des rois, Haïlé Sélassié, vieil empereur complètement déconnecté de la réalité de son pays . La révolte gronde et va s'emparer du pays , mais la révolte quand elle tombe aux mains des militaires est rarement source de bonheur...

C'est au travers d'une famille de classe moyenne aisée que l'on suit cette longue période de violence et de misère. On voit le pays se disloquer sans que vraiment le peuple en profite par contre la terreur se répand au plus profond des villes et des campagnes.

Ce roman est terriblement réussi , réussi car il n'y a rien d'exagéré que ce soit dans la description du contexte ou dans le comportement des personnages, terriblement parce qu'il ne nous épargne rien non plus et tant mieux la situation n'est pas à édulcorer .

Un roman à découvrir pour lui-même et pour l'Éthiopie et les Ethiopiens.
Lien : http://theetlivres.eklablog...
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C'est un magnifique premier roman qu'il est difficile de lâcher. L'auteure nous plonge dans le quotidien d'une famille et nous fait découvrir les bouleversements connus par l'Éthiopie à la chute de l'empereur et à l'instauration de la dictature militaire. Nous y voyons la révolution et la résistance, les massacres perpétrés sans aucune hésitation, la peur et les dénonciations. Mazda Mengiste a installé avec brio une ambiance pesante, nous tremblons pour les personnages auxquels nous nous attachons et craignons pour leur vie.
Les personnages sont très différents les uns des autres, ils n'ont pas la même attitude face à certaines situations, ayant chacun leur façon de réagir. Cela est d'ailleurs un réel reflet de la réalité où il n'y a pas que des héros et des résistants. Leurs sentiments sont bien décrits, notamment la peur et l'impuissance ressenties,. J'ai aimé leur force morale et leur volonté, leur espoir en l'avenir et le désir de vivre coûte que coûte. J'ai également trouvé très intéressant leur attachement à la religion qui semble les aider à tenir. J'ai particulièrement aimé le personnage de Sara, femme forte et déterminée.
Les faits qui se déroulent dans ce roman sont terribles, avec les massacres, la violence et la torture. Attention certains passages peuvent d'ailleurs être difficiles à lire. Mais j'en garde malgré tout une note positive. Je conseille donc vivement ce très beau roman qui nous parle des années sombres de l'Éthiopie.
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
La police était partout ces jours-ci, à la recherche de suspects à qui imputer l'épidémie de bus brûlés et de magasins pillés qui avait déferlé sur la ville. Ces actes téméraires de violence et de rébellion, qui devenaient de plus en plus fréquents, poussaient la plupart des citoyens à se barricader chez eux sitôt le soleil disparu derrière l'horizon.
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- Tu veux sauver des gens, alors sauve les vivants.» Solomon se leva, repoussa sa chaise qui heurta la table. «Ceux qui sont morts ne valent pas la peine qu'on meure pour eux.»
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- [...] Un gouvernement de combattants ne sait pas diriger, seulement engendrer d'autres guerres.
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Il avait commencé à tricoter et à repriser ses nerfs et ses muscles. Son corps s'adaptait à une existence sans souffrance. J'ai avalé mes propres dents, je n'ai nulle part où aller pour vomir mon propre refus et j'ai failli mourir de faim avec un ventre rempli uniquement de culpabilité et de peur.
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Il avait utilisé l'écorce du plus gros arbre poussant sur les terres de son père. Ses racines s'enfonçaient dans la terre comme des doigts avides : "Je voulais fabriquer une porte à partir d'un arbre qui refusait de laisser la vie s'échapper", avait dit un jour Hailu.
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