Ce qui peut rendre appétissante l'oeuvre de
Marc-Edouard Nabe, c'est sa mauvaise réputation. Sauf qu'il ne la mérite pas toujours. «
le Vingt-Septième Livre », par exemple, c'est du
Bernanos en plus drôle, du Céline en plus court, et même, si on veut enfiler les références comme des perles, du Perec version free jazz. Nabe raconte l'histoire du 103 rue de la Convention à Paris 15ème. Il nous raconte comment son voisin, un certain
Michel Houellebecq (qu'il rebaptise « Quelconque Ier ») est devenu une star alors que lui a fini paria et, même, dit-il, « déchet nucléaire ».
Sauf que Nabe aurait sûrement pu avoir le Goncourt, le Grand Prix des lectrices Elle, le prix France Culture-Télérama et une place réservée chez
François Busnel. Mais il voulait échapper à la mafia du bon goût et être un poux sur la tête de Mme La Littérature française. C'était assez noble. le problème, c'est que ça a donné des questions du type « Nabe est-il antisémite ? » et peu importe la réponse à la rigueur : dès la question, j'ai envie de me tirer. Il y a assez de questions graves comme ça pour pas s'épuiser à chercher des bonnes réponses à des mauvaises questions. Tout antisémite est un abruti, donc si Nabe est antisémite, etc. Fin de la discussion.
Perso, j'ai lu un petit livre amusant, pas bien méchant, intitulé «
le Vingt-Septième-Livre » et je ne comprends pas bien pourquoi je me sens obligé de me justifier de m'être bien régalé. La faute à qui ? Aux bienpensants que Nabe conchie ? A Nabe lui-même ? J'ai bien envie de dire : les deux, mon capitaine. Main dans la main, ils ont réussi à enterrer le talent d'un écrivain plein de charme et fantaisie sous une tonne de clashs et de polémiques dont je me fous pas mal.