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EAN : 9782072802027
256 pages
Gallimard (04/10/2018)
3.76/5   29 notes
Résumé :
«Ce livre n’est pas une biographie. Mais une promenade dans la forêt des romans, en compagnie d’une femme assez brave pour affronter, dans la société victorienne, l’ostracisme social que lui vaut sa liberté de mœurs et d’esprit. En gardant présente à la mémoire celle qui avait emprunté des chemins parallèles : une George encore, Sand, à laquelle Eliot vouait une affection passionnée.
Que dit la morale dans un monde déserté par l’intervention divine? Comment, ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Bretonne, historienne et philosophe, Mona Ozouf introduit son étude en remerciant l'institutrice qui lui a révélé George Eliot et son père dont la bibliothèque est un monument bâti à la gloire de la Bretagne et à sa culture multi-séculaire. L'homme étant un héritier, je regrette donc que les origines des deux George, Eliot et Sand, ne soient pas davantage visitées dans cet ouvrage par ailleurs remarquable.

L'historienne rappelle la fracture induite en 1829 par « la question catholique », la chute de Wellington, la mort de George IV, qui bascule le Royaume Uni de l'époque agraire, assise sur la propriété de la terre, à l'époque industrielle, avec les chemins de fer et les fortunes développées sur les titres boursiers.

L'emprise du passé est le cadre dans lequel s'insère le Moulin sur la Floss » ; les aménagements du présent structurent Middlemarch ; l'imagination du futur dessine Daniel Deronda.

Mais George Eliot et son modèle George Sand ne sont pas uniquement témoins de leur temps, elles sont acteurs et leurs plumes au service d'une éthique, d'une politique et d'une culture proposent aux femmes d'épanouir leurs talents dans une autonomie, une liberté et une créativité et leur ouvrent des domaines « non encore cartographiés » et leur offrant de vivre ainsi un amour responsable dans l'égalité et la complémentarité des sexes.

Avec beaucoup de finesse psychologique, et une ironique cruauté, Mona Ozouf se penche sur l'épaule de Casaubon rédigeant sa demande en mariage pour Dorothea, en se concentrant égoïstement sur ses propres travaux et loisirs oubliant ainsi des millénaires de civilisation occidentale qui ont gravé dans le marbre le tiercé gagnant « vous, je, nous » qui dicte toutes les déclarations d'amour. Cette seule page du chapitre «l'artiste » justifierait l'acquisition de ce folio.

Cette rencontre avec les deux George m'a enchanté par sa subtilité et sa culture qui suggèrent de lire ou relire les romans de ces ceux grandes dames.

PS : mon ressenti du Moulin sur la Floss
Lien : https://www.babelio.com/livr..
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"(...) dans l'oeuvre d'Eliot, Fernand Brunetière voyait "le plus bel épanouissement littéraire" après -La Comédie humaine, Charles du Bos égalait -Middlemarch à Anna Karénine,
Proust disait ne pouvoir lire deux pages d'elle sans pleurer. Et je plaiderais pour apporter quelques fleurs à cet immense génie. Car aujourd'hui ces voix louangeuses se sont tues, en France du moins. Et beaucoup de mes amis, grands lecteurs pourtant, parmi lesquels une très fine romancière, me demandant perplexes, après s'être enquis de mon travail : mais qu'est-ce qu'il a écrit, au juste,ce George ? (p. 19)"

Quelle belle entrée en matière que cet extrait dithyrambique... en hommage en effet à George Eliot [ de son vrai nom, Marian Evans], aussi talentueuse que l'autre George [ Sand] !

Très joyeuse de cette découverte au fil d'une flânerie... double petit bonheur entre mon intérêt pour l'historienne-philosophe, Mona Ozouf, ainsi que ma curiosité très lointaine pour George Eliot [ le Moulin sur la Floss et Middlemarch... sont dans les listes d'attente, et lacunes à combler depuis des lustres, me semble-t-il !!]qui va être nourrie généreusement,
car curieusement Mona Ozouf a cette romancière anglaise dans son Panthéon personnel... depuis une éternité. Ce qui m'a fait aussi très plaisir d'apprendre... que cet enthousiasme pour cette auteure a été induite, provoquée par une professeure de français de Mona Ozouf, qui n'était autre que Renée Guilloux, épouse de l'écrivain, Louis G.

Mona O. nous raconte la longue et fidèle fréquentation des textes de George Eliot, étudie en détails trois de ses romans : "Le Moulin sur la Floss", "Middlemarch" et "Daniel Deronda"...

un très beau livre... à la fois "érudit", passionné et plein de sensibilité sur la femme, la moraliste, et l'artiste qu'était George Eliot... Compagnonnage littéraire, féministe et social des plus prenants... qui s'achève par un parallèle entre les deux George, l'Anglaise et la Française....

Ouvrage à ne pas manquer pour tous les amoureux de Littérature, de romanesque... qui englobe un large miroir d'une société donnée...avec le portrait mouvementé d'une femme déterminée, qui s'est battue pour écrire et devenir Ecrivain, sans les barrières sexistes [ ce qui l'a incité à prendre un pseudo masculin... pour gagner en liberté et échapper aux jugements stéréotypés de l'époque...]

"Pourquoi le choix d'un pseudonyme masculin ? Une femme déjà, dont Lewes et Marian [ George Eliot ] aimaient les livres brûlants, les avait publiés sous un énigmatique nom de plume. Avaient-ils à l'esprit l'exemple de George Sand ? Sans doute, puisque les deux femmes ont emprunté à leur amant, l'une la moitié d'un nom, l'autre l'entier d'un prénom. Et toutes deux, pour couper court au procès de tromperie qui les attendait l'une et l'autre, ont usé du même argument : si elles se sont masquées, c'est pour que leurs livres soient jugés selon leurs mérites propres. (p. 160-161)

A la fin de l'ouvrage, une double bibliographie nous est proposée: les traductions en français, d'un côté et de l'autre, des biographies et des essais en anglais sur l'oeuvre de George Eliot...

Une lecture foisonnante qui mêle autobiographie, histoire littéraire, Histoire des mentalités ainsi qu'un hommage sans pareil à George Eliot, comme la "Résurrection" d'une auteure, méritant d'être redécouverte ou plus exactement, lue plus largement !!...

Deux curiosités plus vives se dégagent après cette lecture : l'envie de lire (enfin !) le "Moulin sur la Floss" et "Daniel Deronda"... dont je ne connaissais pas l'existence, avant ce texte de Mona Ozouf !
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On sent qu'il y a chez Mona Ozouf une dette à l'égard de George Eliot dont la lecture lui avait été recommandée, alors qu'elle était encore une toute jeune fille, par son professeur de français, Renée Guilloux, la femme de l'écrivain du Sang noir.
Sait-on ce que va nous apporter une lecture – a fortiori un auteur – avant de nous être confrontés à la vie ? Lorsque nous découvrons un roman à l'adolescence, nous en aimons l'intrigue, les personnages. le temps passant, nous comprenons qu'il ne s'agit pas seulement de personnages mais de situations plus ou moins transposables à celles que nous croisons au fil de l'existence. Puis, sans doute s'opère-t-il une sorte d'alchimie entre l'auteur et le lecteur et, qu'au-delà du destin de la Maggie Tulliver du Moulin sur la Floss, ou de la Dorothea de Middlemarch, ou encore de la Gwendolen de Daniel Deronda, nous apparaît l'empreinte qu'a laissée le premier sur le second. Non pas que nos actes aient été gouvernés par la vision du monde d'un écrivain mais que, nous arrêtant un moment, nous nous soyons dit qu'il ou elle avait exactement compris ce que l'on pouvait ressentir face à certaines situations. Alors nous pouvons parler de « dette » au sens où l'on est redevable à un autre de nous avoir aidés à comprendre quelques fragments du monde qui nous entoure.
L'autre George est donc né de ce moment où l'on s'arrête, où l'on gratte de l'ongle un coin de la mémoire pour y trouver la trace laissée par une femme, cette Marian Evans devenue George Eliot. le talent de Mona Ozouf n'est pas tant dans l'analyse des oeuvres de l'écrivain – elle a sans doute plus tendance à raconter qu'à révéler ce qui en fait la richesse – que dans ce qu'elle dit de sa vie, de son érudition, de la place faite aux femmes dans l'Angleterre victorienne. J'ai aussi trouvé très intéressant le parallèle que Mona Ozouf fait entre les deux George, George Sand et George Eliot, se gardant d'enfermer chacune dans des stéréotypes.
Dans son introduction, Mona Ozouf évoque un libraire de Saint-Brieuc, Monsieur Basquin, chez qui sa mère et elle commandaient des livres. Juste hommage rendu à cet homme et à sa librairie qui habitent la mémoire des Briochins ou de ceux qui ont suivi leurs études secondaires dans cette ville, ce qui fut mon cas. Il n'y a pas d'amour des livres sans passeurs. Merci Mona de le rappeler.
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Mona Ozouf, avec beaucoup de clairvoyance et de tendresse pour l'auteure et ses héroïnes, nous guide à travers l'oeuvre de la grande écrivaine George Eliot. C'est si intelligent et si prenant que cela donne une furieuse envie de lire ou relire cette grande voix, à la fois profonde, subtile et bienveillante (non sans lucidité) de la littérature anglaise. Je me souviens avoir été éblouie par Middlemarch ( autant que par un autre chef d'oeuvre de Thackeray, celui-là, Vanity Fair) ; j'en suis au trois quart du Moulin sur la Floss et vraiment j'appréhende le moment où je tournerai la dernière page... j'aurais alors à ma disposition Daniel Deronda !
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Nous sommes prévenus dès la quatrième de couverture : ceci n'est pas une biographie. Et pourtant c'est une plongée dans le monde intime de George Eliot que nous offre Mona Ozouf à travers le décryptage fouillé des oeuvres de cette grande romancière. Trois chapitres pour trois romans majeurs - le Moulin sur la Floss, Middlemarch et Daniel Deronda - et quatre pour évoquer, toujours à travers ses oeuvres, l'écrivaine , la moraliste, l'artiste et la femme. Bien sur, il est impossible de parler de George Eliot sans évoquer l'autre George - la française. Deux femmes libres dans ce XIXe siècle sclérosé, deux romancières d'exception dont Mona Ozouf nous révèlent les forces et fragilités dans un dernier chapitre.
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critiques presse (3)
LeMonde
10 décembre 2018
George Eliot vue par Mona Ozouf devient une témoin de son temps, de même qu’une femme qui peut revendiquer l’égalité tout en chérissant la dissemblance, ou qu’une moraliste capable d’arbitrer entre ce dont nous avons hérité et ce que nous voulons choisir.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Bibliobs
30 novembre 2018
L'historienne consacre un essai à cette femme de lettres qui se cachait sous un nom d'homme.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
Liberation
04 octobre 2018
Mona Ozouf rend hommage à l’auteure britannique George Eliot, aussi affranchie et talentueuse que sa consœur Sand, et qui documenta les transformations de l’ère victorienne à travers ses récits.
Lire la critique sur le site : Liberation
Citations et extraits (74) Voir plus Ajouter une citation
Peu disposée à réserver ses récits aux nobles infortunes des dames à crinolines, elle ne croit pas une seconde devoir se soumettre au diktat de choisir des héros hors du commun. Et si elle plaide la cause des gens ordinaires, c'est qu'à ses yeux l'ordinaire n'est jamais simple. Aux communs, aux laids, à ceux qui n'ont pas été désirés, l'existence réserve aussi des joies et des tristesses. La variété des situations humaines est suffisante à assurer leur complexité. Se souvient-elle de la George française ? Celle-ci jugeait également superflu — ainsi, dans Lucrezia Floriani — d'aller chercher au loin l'extraordinaire. Car « la vie est assez fantasque : il y a assez de désordres, de cataclysmes, d'orages, de désastres et d'imprévus ».
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On comprend mieux, du même coup, pourquoi se presse dans les romans d'Eliot cette foule de personnages secondaires. Elle inspire à Brunetière un intéressant parallèle entre la littérature française et la littérature anglaise. Les Français, peuple révolutionnaire, sont restés trop aristocrates pour décrire les gens de peu. Le plus souvent, ils s'en passent. Quand ils s'exercent à les représenter, ils les transforment en Bouvards et Pécuchets. Les Anglais, et plus encore les Anglaises, savent, eux, leur faire une place équitable. Et rien n'illustre mieux pour Brunetière cette disposition insulaire que la tendresse de George Eliot pour les vies ordinaires, décrites avec une surabondance de détails qu'on peut juger tantôt vulgaire, et tantôt superflue.
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Pour ces procureurs qu'un bras nu rend fous, pareille condamnation morale appelle irrésistiblement l'image de l'autre George. Mais c'est souvent pour ajouter que si Sand est souvent immorale, elle est toujours « magnifique ». C'est dire — ainsi John Ruskin, le plus féroce des détracteurs d'Eliot — que la George anglaise a le tort supplémentaire de loger le désir, la passion et la tragédie dans la vie étroite et laide des gens ordinaires, personnages « pris derrière le comptoir et sortis du caniveau ». Touche sordide ajoutée à l'inconvenance du propos.
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Il y a donc toutes sortes de femmes. On n'en quitte pas moins les "Scènes de la vie cléricale" avec le soupçon qu'hommes et femmes n'habitent pas le même monde. Aux uns, la salle enfumée du bar du Lion Rouge, toute bruissante d'anathèmes, de vantardises, de véhémence vulgaire, dans l'odeur du brandy. Aux autres, le salon des demoiselles Linnet, où l'on s'occupe utilement à recouvrir les livres de la bibliothèque de prêt, fenêtres ouvertes sur le parfum du chèvrefeuille. On en retire la certitude que les femmes possèdent des qualités spécifiques, nées des conditions que la vie leur a faites. Elles sont des êtres liés, quand les hommes sont libres. Plus tôt qu'eux, autrement qu'eux, elles font connaissance avec la nécessité : une nécessité qui a presque toujours la forme de l' enfant, des soucis qu'il cause, de la vie qu'il occupe, submerge, et parfois dérobe ; si sacralisée pourtant qu'ils s'y soumettent religieusement. Comme elles obéissent aussi, et c'est toujours un trait féminin, à cette subtile tyrannie des souvenirs qui paralyse toute velléité de révolte : Janet, derrière la brute qui la terrorise, voit toujours le jeune homme assis à ses côtés dans une prairie de juin, et qui lui mettait des coquelicots dans les cheveux. Enfin, et une fois encore bien plus que leurs partenaires, elles sont victimes de l'opinion publique, de l'immémoriale conviction - partagée, semble-t-il, par la narratrice - que l'espace d'une femme aimante est défini par les murs de sa maison ; que le mari est l'unique médiateur par lequel elle puisse entrer en contact avec le vaste monde ; que toutes ses initiatives personnelles sont frappées de suspicion.
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L'objet du roman est bien moins de capter l'événement historique éclatant que de faire sentir l'invisible travail de la durée : celle-ci oublie et retient à la fois, dans un équilibre instable, et toujours à recomposer, entre l'être et le devenir, la fixité et le mouvement, l'ancien et le nouveau.
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Videos de Mona Ozouf (42) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Mona Ozouf
Alors que 2023 marque le 150e anniversaire de sa naissance, Colette est à l'honneur dans "La Grande Librairie". A cette occasion, Augustin Trapenard accueille Antoine Compagnon, pour "Un été avec Colette", publié aux Editions des Equateurs, Emmanuelle Lambert, pour "Sidonie Gabrielle Colette, édité chez Gallimard, et Frédéric Maget, pour "Notre Colette : Un portrait de Colette par ses lectrices", paru chez Flammarion. Frédéric Beigbeder, Amélie Nothomb, Chantal Thomas, Mona Ozouf et Simonetta Greggio sont également présents sur le plateau de l'émission, ainsi que Marie-Christine Barrault qui lira des textes de Colette.
Durant cette soirée, les invités vont revenir sur cette femme aux multiples facettes qui a marqué le XIXe siècle grâce à sa présence dans de multiples domaines. Tout au long de sa carrière, elle n'a cessé de changer de costume, entre celui d'écrivain, de journaliste ou encore de pantomime. Une situation qui lui allait à ravir puisque Colette a toujours refusé d'être étiquetée, mais aussi qui lui permettait de vivre de manière décente. En effet, comme elle l'a confié plusieurs fois, elle écrivait pour vivre, notamment après que son troisième mari Maurice Goudeket a été pris dans une rafle, le 12 décembre 1941. du fait de ses origines juives, il est arrêté par la Gestapo, lors de la rafle dite "des notables" et transféré au camp de Compiègne. Colette va alors tout mettre en oeuvre pour l'en sortir en faisait intervenir des personnalités très influentes. Il sera finalement relâché le 6 février 1942. N'ayant pas d'autres sources de revenus, Colette va continuer à publier pour des rédactions pas très fréquentables, mais sans jamais se compromettre dans des textes idéologiques ou propagandistes. 
Retrouvez l'intégralité de l'interview ci-dessous : https://www.france.tv/france-5/la-grande-librairie/
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