La mort de Don Juan

Au fond, ce que j’aimais dans l’acte d’amour, et ce que j’aime depuis, c’est cela : embrasser une femme, la tenir dans mes bras, lui signifier ma protection en échange de sa tendresse. Le reste n’a que peu d’importance.

L’amour, j’en aurai décliné bien des nuances depuis l’adolescence. Et je ne m’en suis jamais lassé. J’ai tout essayé, ou presque, avec toujours l’idée ou le désir violent de cette inaccessible vallée, derrière la montagne, de plus en plus loin.

Silencieux, je séduisais. Disert, je séduisais encore, parce que je parlais peu de ma personne, et beaucoup d’elles. Les femmes adorent qu’on les écoute et j’adorais les écouter, sans me forcer. Elles se sentaient soulagées, soutenues, et se réfugiaient alors parfois dans le creux de mon épaule.

Je suis un intégriste du sexe, un forçat de l’innocence amoureuse.

J’en ai revu certaines, ou simplement croisé, bien plus tard. J’aime le charme de ces retrouvailles. Certaines se révélaient lascives, avec dans l’œil une pointe de nostalgie, avouant au grand jour leur écart passé. D’autres ne disaient rien, ne montraient rien, juste un imperceptible signal destiné à n’être décrypté que par moi seul. Elles me faisaient savoir que notre histoire était restée secrète et que, de longues années plus tard, elle avait gardé un goût exquis. D’autres enfin me regardaient, incrédules et glaciales : comment donc ai-je pu succomber à ce bellâtre ?