Quand j'étais petit, j'aimais écouter les histoires de mon grand-père : la guerre de 14/18, des histoires d'intersignes mystérieux. Maintenant, je sais que c'étaient des histoires terribles. Mais c'est la « voix » de mon grand-père qui les rendait merveilleuses, qui me rassurait.
Aujourd'hui C'est
Pascal Quignard que j'aime lire, qui me rassure en quelque sorte.
Pas de récriminations chez
Quignard, « Dans ce que j'écris, il y a quelque chose qui essaie de compenser la fragilité de la vie et de son intense beauté. Ce n'est pas parce qu'elle diminue que je devrais la dire moins belle, elle n'en est que plus belle. Je comprends que des adolescents se révoltent… » Seulement ne pas épouser les valeurs furieuses des guerres civiles, nationales, religieuses…
Pascal Quignard est un solitaire, comme ces jansénistes dont il aime le retrait.
Pascal Quignard nous résume ainsi son projet : « Dans ce livre… il me faut recueillir ces ultimes vestiges : les chiffres et les dates. Les heures qui les assemblent. »
En écrivain de la digression.
……………………………….
Il partage avec nous des images, comme des trésors dénichés au fil de lectures.
C'est émouvant, profond, et cela donne du plaisir : qu'est-ce qu'une date ? Comment Jean de la Croix est-il mort ? Pourquoi appelle-t-on hortator l'homme qui, sur les navires de l'Antiquité, était chargé d'activer la cadence des rameurs ? Qu'est-ce qui rend cette Ève, la main gauche posée sur l'épaule d'Adam nu, si troublante sur une vignette du livre d'heures du duc de Berry ?
Des histoires où on perd l'oeil lors d'un combat sur une barricade à Paris en 1652.
………………………………….
Il salue ses défunts :
L'oncle Jean, érudit et spécialiste de
Flaubert, revenu de Dachau, « affolé d'avoir à revivre ».
Et puis le portrait intense de l'écrivain
Emmanuèle Bernheim, disparue en 2017. « L'amitié c'est aussi savoir se taire ensemble et dans ce cas nous avions été de prodigieux ami. L'amitié c'est aussi ne rien chercher à domestiquer de l'autre…. Laisser le farouche de l'autre exister ».
……………..
Courts chapitres à l'enchaînement musical. Tout ce qui, dans nos discours, est soumis à des règles : l'argumentation, les classifications, n'existe plus. On entre dans son écriture comme on entre dans l'eau.
Parfois Je ne comprends pas, mais c'est égal. Ne pas froncer les sourcils. Se laisser aller et écouter sa musique, sa »voix »