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EAN : 9782913372481
106 pages
La Fabrique éditions (30/09/2005)
3.98/5   45 notes
Résumé :
Hier encore, le discours officiel opposait les vertus de la démocratie à l'horreur totalitaire, tandis que les révolutionnaires récusaient ses apparences au nom d'une démocratie réelle à venir.
Ces temps sont révolus. Alors même que certains gouvernements s'emploient à exporter la démocratie par la force des armes, notre intelligentsia n'en finit pas de déceler, dans tous les aspects de la vie publique et privée, les symptômes funestes de l'" individualisme d... >Voir plus
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«La haine de la démocratie » prend le contrepied d'une idée fort ancienne et fort répandue : le pouvoir revient de droit à tous ceux qui y sont destinés par leur naissance ou appelés par leur compétence. Peu ou prou, chacun à notre manière, nous cédons à ce chant des sirènes de la compétence, du charisme et, plus souvent qu'à notre tour, nous nous plaignons du peuple et de ses moeurs, des " sans-part " se prévalant de l'égalité. Il faut toute la rigueur, dans cette période troublée, d'un Jacques Rancière pour raison garder.


L'auteur dans son oeuvre avance l'axiomatique de l'égalité des intelligences. Cette égalité n'est pour lui ni un constat empirique, ni un objectif. Il s'agit d'un présupposé qui fait figure de condition de toute action ou pensée émancipatrice et qui est reconnu dans le principe même de démocratie. En effet, « pas de service qui s'exécute, pas de savoir qui se transmette, pas d'autorité qui s'établisse sans que le maitre ait, si peu que ce soit, à prendre en considération cette égalité avec celui qu'il commande ou instruit. La société inégalitaire ne peut fonctionner que grâce à une multitude de relations égalitaires. C'est cette intrication de l'égalité dans l'inégalité que le scandale démocratique vient manifester pour en faire le pouvoir commun ». C'est pour cela qu'il est envisagé un titre à gouverner disjoint de toute analogie avec ceux qui ordonnent les relations sociales, disjoint de toute analogie entre la convention humaine et l'ordre de la nature (c. à d. un titre à gouverner distinct des relations parents-enfants, jeunes-vieux, chefs-subordonnés, biens nés-hommes de rien, forts-faibles, savants-ignorants). La démocratie veut donc dire un gouvernement fondé sur rien d'autre que l'absence de tout titre à gouverner écrit Jacques Rancière. Dès lors, les gouvernements se réclamant de la démocratie sont obligés de se figurer comme instance du commun de la communauté séparés de la seule logique des relations d'autorité.


Jacques Rancière fait la distinction dans son travail entre la police et la politique. La première désigne l'ordre social existant, c'est-à-dire l'ensemble des moyens mis en oeuvre afin que se stabilise et perdure la distinction inégale des statuts et des richesses dans un corps social (les "parts"). La politique se dit des phases de contestation de la police. Elle intervient quand ceux qui ne sont pas comptés dans l'ordre social (les "sans-part") font, se prévalant de l'égalité, irruption sur la scène de l'histoire. La politique veut dire quelque chose qui s'ajoute à tous les autres pouvoirs qui tentent d'imposer leur leadership dans la communauté humaine. La politique n'existe que s'il y a un titre supplémentaire à ceux qui fonctionnent dans l'ordinaire des relations sociales. Politique et égalité sont pour l'auteur une même chose. Dans nos sociétés inégalitaires bien évidemment il n'y a pas un gouvernement intégralement démocratique. le système parlementaire est une forme mixte entre représentation et démocratie. La représentation permet à l'élite d'exercer, au nom du peuple, le pouvoir qu'elle est obligée de lui reconnaître. L'élection n'est pas toujours la voix du peuple, elle peut être dans ce cadre l'expression d'un consentement demandé par les élites. Les luttes démocratiques s'opposent donc à cet état de fait et remettent sans cesse en cause l'oligarchie (politique) ; l'oligarchie quant à elle sans cesse reconquière les positions perdues (police). Il existe par conséquent une sphère publique de rencontre et de conflit entre ces deux logiques opposées : celle du gouvernement de n'importe qui, et celle du gouvernement des compétences sociales. La pratique spontanée de tout gouvernement oligarchique tend à rétrécir cette sphère publique, à en faire son affaire privée et pour cela à rejeter du côté de la vie privée les interventions et les lieux d'intervention des acteurs non étatiques. Jacques Rancière appelle para-politique cette dépolitisation des problèmes qui prétend abolir la dimension conflictuelle de la politique. Ainsi, en se déclarant aujourd'hui simples gestionnaires-experts des retombées locales de la nécessité historique mondiale nos gouvernements se débarrassent du peuple et de la démocratie ; en inventant des institutions supra étatiques qui ne sont comptables devant aucun peuple, ils dépolitisent les affaires politiques. Et lorsque la science des gens de pouvoir n'arrive pas à s'imposer c'est forcément en raison de l'ignorance et de l'attachement au passé. Les "sans-part" luttent naturellement pour une déprivatisation et pour l'élargissement de la sphère publique. L'élargissement a pour objectif de faire reconnaitre la qualité d'égaux et de sujets politiques à ceux que la pratique étatique rejette vers la vie privée des êtres inférieurs ; à faire reconnaitre le caractère public d'espaces et de relations qui sont laissés à la discrétion du pouvoir illimité de la richesse (comme l'affirmation du travail comme structure de la vie collective).


Tout est donc affaire d'un équilibre jamais trouvé entre égalité et inégalité, entre illimitation capitaliste de la richesse et illimitation démocratique de la politique. La démocratie est la perturbation des relations que l'on conçoit le plus souvent comme naturelles. L'intensité de la vie démocratique avec son cortège de contestation permanente défie toujours l'autorité des pouvoirs publics, le savoir des experts patentés et le savoir-faire des demi-habiles. Ce qui fait dire à Jacques Rancière que la démocratie est le domaine de l'excès. Cet excès signifie la ruine du gouvernement, il est donc combattu pied à pied. le remède consiste très souvent à rejeter les individus vers la sphère privée et les bonheurs de la propriété, de la consommation, des liens sociaux, etc. … La lutte sur le terrain idéologique dans ce combat n'est pas moins âpre. Les antidémocrates d'aujourd'hui, pas sans quelques périlleuses gymnastiques intellectuelles, appellent ainsi démocratie ce que l'on appelait hier totalitarisme. le péché originel de la démocratie n'est plus, à les entendre et comme cela lui a été autrefois reproché, son collectivisme mais bien au contraire son individualisme critique. Les droits de l'homme à ce titre sont dénoncés par eux comme droits de l'individu égoïste, égalitaire et libéré du corps collectif. Ce qui est défendu par les dénonciateurs de l'individualisme démocratique n'est pas naturellement la collectivité en général mais la collectivité des corps, des milieux qui sont assimilés au savoir et à l'expérience. Pour prendre un exemple du livre de Jacques Rancière, l'ennemi que l'école républicaine affronterait aujourd'hui ne serait pas la société inégale à laquelle elle devrait arracher l'élève mais l'élève lui-même comme représentant par excellence de l'homme démocratique, l'être immature, le jeune consommateur ivre d'égalité.


Le soi-disant règne de l'homme égalitaire subsume toutes sortes de propriétés et de nombreuses identités. Aujourd'hui, on dénonce l'égoïsme de telle revendication corporative, de tel particularisme minoritaire, religieux ou ethnique ; demain, on appellera à l'unité nationale, à la guerre des civilisations … « La haine de la démocratie » est un ouvrage précieux qui permet une vrai réflexion sur la démocratie, ces enjeux, sa dynamique.
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Alors que la démocratie est exportée par certains gouvernements à la force des armes, tout en étant par ailleurs considérée comme « le désordre des passions avides de satisfaction », tandis que sont fustigés l' « individualisme démocratique » et l' « égalitarisme » qui détruiraient les valeurs collectives et forgeraient un nouveau totalitarisme, Jacques Rancière explique que tous ces discours officiels s'inscrivent dans la continuité de ceux qui dénonçaient, dès l'Antiquité, le scandale du « gouvernement du peuple ». Analysant les liens complexes entre démocratie, politique, république et représentation, il invite à retrouver la puissance subversive de l'idée démocratique.
(...)
Jacques Rancière figurait depuis longtemps sur notre liste des auteurs à lire. Une grande découverte. Fine analyse des rapports de domination dissimulés derrière les discours officiels.

Article (très) complet sur le blog :
Lien : https://bibliothequefahrenhe..
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Hier la démocratie était ”mobilisée” dans la lutte contre le totalitarisme du socialisme réellement existant mais ni contre le régime de l'apartheid en Afrique du Sud ni contre la dictature de Pinochet au Chili, aujourd'hui elle est ”exportée” au bout des fusils en Irak ou en Afghanistan. Dans le même temps, certains ”intellectuels” critiquent ”l'individualisme démocratique” ou l”égalitarisme” source d'un nouvel totalitarisme.

Comme l'indique Jacques Rancière, il convient de remonter au scandale du gouvernement du peuple et saisir les liens complexes entre démocratie, politique, république et représentation.

Son petit livre est composé de quatre chapitres « de la démocratie victorieuse à la démocratie criminelle », « La politique ou le pasteur perdu », « Démocratie, république, représentation » et « Les raisons d'une haine ».

L'auteur nous rappelle que le mouvement démocratique est « un double mouvement de transgression des limites, un mouvement pour étendre l'égalité à l'homme public à d'autres domaines de la vie commune, et en particulier à tous ceux que gouverne l'illimitation capitaliste de la richesse, un mouvement aussi pour réaffirmer l'appartenance à tous et à n'importe qui de cette sphère publique incessamment privatisée. »

En reliant démocratie , république et représentation, l'auteur s'éloigne, à juste titre, des désincarnation abstraite de la démocratie, idéal toujours souhaitable mais surtout non-applicable pour ceux qui n'acceptent pas l'égalité réelle entre les humains ; dois-je rappeler ici, la notion d'universalisme, hier limité aux hommes (donc excluant les femmes), aujourd'hui limitée aux nationaux (excluant des populations vivant et travaillant sur le territoire).

La naturalisation des phénomènes sociaux et en particulier du marché, ne laisse plus beaucoup de place aux débats politiques et aux choix, donc à la démocratie. L'exemple du référendum sur la ”constitution européenne” montre, néanmoins, que contre la ”seule” solution réellement existante prônée par la majorité du personnel politique, les journalistes et les experts de toutes sortes, il est non seulement possible de mener les débats sur le fond, mais aussi de réhabiliter l'idée, et de la faire devenir majoritaire, de nécessaires choix politiques « La principale surprise du référendum a été celle-ci : une majorité de votants a jugé, à l'inverse, que la question était une vraie question, qu'elle relevait non de l'adhésion de la population mais de la souveraineté du peuple et que celui-ci pouvait donc y répondre non aussi bien que oui. »

Dans les relations entre les humains,les relations sont socialement construites, historiques situées, rien ne justifie un ”hors débat”, des décisions confiscatoires de la dispute politique. Contre les visions dominantes l'auteur nous rappelle que « La nouvelle haine de la démocratie n'est donc, en un sens, qu'une des formes de la confusion qui affecte ce terme. Elle double la confusion consensuelle en faisant du mot ”démocratie” un opérateur idéologique qui dépolitise les questions de la vie publique pour en faire des ”phénomènes de société”, tout en déniant les formes de domination qui structurent la société. »

Reste, après ces analyses réjouissantes, à débattre des formes et conditions possibles de l'exercice de la démocratie : égalité réelle, incursions dans la propriété privée, pluripartisme, articulation entre représentation directe et représentation universelle, place du tirage au sort, etc…..

Contre les confiscations par le marché ou par les experts de toutes sortes, il faut réaffirmer la puissance subversive de l'idée démocratique, du gouvernement du souverain par lui-même, de l'auto-organisation des populations.

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La haine de la démocratie est un court texte qui s'érige contre la tendance intellectuelle à assimiler prétendue pauvreté intellectuelle de la population et mauvaise gestion en démocratie, dans le contexte de la société de consommation.
La première partie s'attache à démontrer cette tendance et à la relier aux textes de différents intellectuels (actuels ou historiques), sans ébaucher de possibles alternative.
Une fois cette thèse construite et bornée, Jacques Rancière reconstruit avec précision une définition de la démocratie en s'appuyant entre autre sur la philosophie grecque, et en remettant en perspectives les penseurs des lumières. Il y rétablit en particulier le caractère d'utopie de la démocratie, en le détachant des modes de gouvernance d'un état démocratique qui se trouvent recadrés dans leur simple rôle de moyen pour accéder à l'idéal démocratique. La précision est utile et éclairante.
Je n'ai en revanche que peu compris la troisième et dernière partie qui veut expliquer les raisons pour lesquelles la "haine" décrite dans la première partie est apparue. On y parle de beaucoup de concepts différents, très imbriqués, et l'humain n'y apparait que très peu. En outre je n'ai trouvé qu'assez peu de nuances (voir pas) dans les déductions de cette partie, qui me parraitrait pourtant la plus complexe à cerner avec précision. Un raisonnement aussi limpide sur un sujet aussi complexe que l'histoire humaine me fait craindre que cette troisième partie soit plutôt une simplification de la réalité.
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Le livre de Rancière est ambivalent. En prenant en compte un phénomène daté, il met en place une réflexion juste et intemporel.

L'auteur décrit un phénomène qui, il est vrai, est très précis dans l'histoire de la pensée intellectuelle. Ce phénomène il me semble, de dénigrer le terme « démocratie », n'est plus à l'oeuvre. Il est alors assez difficile de se positionner dans la pensée de Rancière, qui étudie un phénomène que le lecteur peut méconnaître. le phénomène actuel serait de prendre les mots et de les vider de leur sens.

Mais comment ne pas voir à quel point son analyse plus globale de notre démocratie est juste. Il a complètement raison quand il avance à demi-mot que l'on vit dans un monde parfaitement marchand et que les rapports qu'entretiennent le corps social, sont des rapports de classe. C'est surtout dans la dernière partie que son propos se révèle absolument juste et crucial pour comprendre notre système.

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Citations et extraits (36) Voir plus Ajouter une citation
Pour qu'il y ait politique, il faut un titre d'exception, un titre qui s'ajoute à ceux par lesquels les sociétés petites et grandes sont "normalement" régies et qui se ramènent en dernière analyse à la naissance et à la richesse. Le richesse vise à son accroissement indéfini, mais elle n'a pas le pouvoir de s'excéder elle-même. La naissance y prétend, mais elle ne le peut qu'au prix de sauter de la filiation humaine à la filiation divine. Elle fonde alors le gouvernement des pasteurs, qui résout le problème, mais au prix de supprimer la politique. Reste l'exception ordinaire, le pouvoir du peuple, qui n'est pas celui de la population ou de sa majorité mais le pouvoir de n'importe qui, l'indifférence des capacités à occuper les positions de gouvernant et de gouverné. Le gouvernement politique a alors un fondement. Mais ce fondement en fait aussi bien une contradiction : la politique, c'est le fondement du pouvoir de gouverner dans son absence de fondement.
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On peut donc, en premiere analyse, cerner le principe du nouveau discours antidémocratique. Le portrait qu'il trace de la démocratie est fait des traits naguère mis au compte du totalitarisme. Il passe donc par un processus de défiguration: comme si le concept de totalitarisme, taillé pour les besoins de la guerre froide, étant devenu inutile, ses traits pouvaient être désassemblés et recomposés pour refaire le portrait de ce qui était son contraire supposé, la démocratie.
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"Voilà donc pourquoi l'autorité du professeur est ruinée : par cette mise en ant de l'égalité, il n'est plus qu'un travailleur ordinaire qui a en face de lui des usagers et se trouve conduit à discuter d'égal à égal avec l'élève, qui finit par s'installer en juge de son maître." (citation de Jean-Louis Thiriet, L'Ecole malade de l'égalité)
Le maître républicain, transmetteur à des âmes vierges du savoir universel qui rend égal, devient alors simplement le représentant d'une humanité adulte en voie de disparition au profit du règne généralisé de l'immaturité, le dernier témoin de la civilisation, opposant vainement les "subtilités" et les "complexités" de sa pensée à la "haute muraille" d'un monde voué au règne monstrueux de l'adolescence.
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Ces embarras de l'oligarchie et ces difficultés de la démocratie permettent de comprendre les manifestations intellectuelles de la fureur antidémocratique. Cette fureur est particulièrement vive en France où existe un parti intellectuel déclaré comme tel, auquel sa place dans les médias donne un pouvoir inconnu ailleurs dans l'interprétation au jour le jour des phénomènes contemporains et la formation de l'opinion dominante.
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La démocratie n'est ni un type de constitution, ni une forme de société. Le pouvoir du peuple mais pas celui de la population réunie, de sa majorité ou des classes laborieuses. Il est simplement le pouvoir propre à ceux qui n'ont pas plus de titre à gouverner qu'à être gouvernés. 
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Vidéo de Jacques Rancière
Jacques Rancière professeur émérite au département de philosophie de l'université de Paris VIII, il est l'auteur entre autres de la Nuit des prolétaires (Fayard, 1981), La Mésentente. Politique et philosophie (Galilée, 1995), le Partage du sensible. Esthétique et politique (La Fabrique, 2000), Politique de la littérature (Galilée, 2007), le temps du paysage: Aux origines de la révolution esthétique (La Fabrique, 2020). -- 11/02/2022 Réalisation et mise en ondes Radio Radio, RR+, Radio TER
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