Sappho par Sapho.
Poèmes et fragments, c'est-à-dire ce qu'il reste – et quelle chose prodigieuse – des mots pensés et écrits par une femme qui vécut au VIIe siècle av. J.-C. C'était en Méditerranée, sur l'île de Lesbos, un temps où les bateaux faisaient du cabotage sur le littoral, de la terre ferme aux îles en vue.
Déjà, pourquoi passer à côté de cette rareté ? Ensuite, cette édition (1995, toujours disponible, autre prodige) présente le choix de la chanteuse Sapho qui, associant aux écrits ses sensibles pastels bleu cobalt et noire révèle une superbe plasticienne.
Quelle émotion particulière à lire : « quelqu'un se souviendra de nous plus tard j'en suis sûre »… Ou encore, à recevoir son dépit éprouvé : « la vantarde ! Te voilà fière d'avoir aux doigts un anneau ». Sans parler de ces bribes d'histoire sociale « Vous payez de neuf boeufs le droit de la garder / ô maris qui régnez sans partage sur les villes ! » C'est aussi sans compter sur l'effacement, la perte, l'amputation du texte qui offre de nouvelles fins sublimes comme celle-ci : « Mais il faut tout oser, puisque… »