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EAN : 9782251722238
272 pages
Les Belles Lettres (15/09/2014)
4.14/5   11 notes
Résumé :
Quittant la ville, un homme tente de s'installer à la campagne pour retrouver la paix intérieure. Mais très vite, tout autour de lui se fait menaçant : les paysans, roublards ou jaloux, la nature elle-même, quand il se met à pleuvoir sans discontinuer. Bientôt des hallucinations s'emparent de son esprit.
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Ce recueil, paru en Septembre 2014 aux éditions «Les Belles Lettres», rassemble quatre nouvelles d'Haruo Satô (1892-1964) écrites entre 1917 et 1919, avec une traduction et une postface remarquable de Vincent Portier. Il s'ouvre par la longue nouvelle éponyme considérée comme le chef d'oeuvre de l'auteur.

Le narrateur de «Mornes saisons», un récit inspiré de la vie de Haruo Satô, a renoncé à la capitale pour s'installer à la campagne avec son épouse et ses deux chiens, afin de s'éloigner du rythme frénétique de la vie en ville et des angoisses qu'elle provoque. Dans une maison entourée d'un jardin autrefois magnifique, mais laissée depuis longtemps à l'abandon, les espoirs d'une vie nouvelle et idyllique vont progressivement laisser place à la mélancolie, chez cet homme submergé par le spectacle de la sauvagerie et du tumulte de la nature, puis cloîtré dans sa maison à contempler des pluies incessantes et monotones. Son espoir glisse alors vers une dépression émaillée d'hallucinations visuelles et auditives. Au cours de cette longue introspection, les sensations du narrateur se découvrent par touches d'une infinie subtilité, de l'espoir à l'émerveillement et à la peur.

«Cette végétation diverse avec ses branches et ses feuilles foisonnant sans retenue, au regard de l'ensemble du jardin, était d'une sombre mélancolie, comme le spectacle de cheveux en désordre pendant sur le front couleur de plomb d'un fou. Ces plantes et ces arbres avaient une pesanteur invisible, écrasant le jardin qui n'était pas si large, et on avait aussi l'impression qu'ils avaient encerclé à distance le bâtiment qui se trouvait en leur centre et étaient sur le point de l'engloutir.
Mais ce qui lui donna le plus grand sentiment d'horreur, ce n'était pas la violente détermination dont faisait preuve la nature. C'était au contraire les derniers vestiges d'élégance d'une organisation agencée par la main de l'homme, qui conservaient une existence tenue au sein de ce chaos. C'était le fantôme d'une volonté.»

«La maison de l'épagneul», courte nouvelle qui fit connaître Haruo Satô, est comme un rêve détaché de «Mornes Saisons», un conte merveilleux mais néanmoins teinté d'un voile d'inquiétude. Au cours d'une promenade en forêt avec son chien Flatté, le narrateur découvre et pénètre dans une maison singulière au milieu des bois, dont l'occupant semble s'être récemment volatilisé, n'ayant laissé qu'une cigarette encore fumante dans un cendrier. Comme le dit superbement Vincent Portier dans sa postface : «Tout est légèreté dans ce récit, comme la fumée de cigarette, ce gracieux fil d'eau qui s'écoule de la maison, le chien Flatté que son maître laisse filer à toute allure sur la route selon son bon plaisir. Elle est bien loin, la sourde mélancolie, l'angoisse qui étreignent le maître du même animal dans «Mornes Saisons».»

Inspirées par la littérature fantastique occidentale et particulièrement par Edgar Allan Poe auquel l'auteur fait explicitement référence, les deux nouvelles suivantes forment un couple fascinant à l'articulation similaire, concluant ce recueil par «Clair de lune», rêve surnaturel et enchanteur.

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Ce livre ce compose de 4 parties de longueurs inégales. A part l'Empreinte, dont l'intrigue s'apparente presque à une enquête ayant pour protagoniste un fumeur d'opium, les autres récits sont plus ou moins des variations autobiographiques sur la contemplation de la nature, et un rejet du monde.
La nouvelle intitulée "L'empreinte", que je trouve un peu confuse, est celle que j'ai le moins aimée. En revanche, celle qui donne le titre au recueil, "Mornes saisons", et la dernière "Clair de lune", sont celles que je préfère pour leurs descriptions contemplatives de la nature.
Haruo Sato s'inscrit pleinement dans son époque.
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Comment se fait-il que Haruo Satô ne fût jamais traduit en français avant que les éditions (Les Belles Lettres) ne publient ce recueil de nouvelles « Mornes saisons » ? Difficile de l'expliquer… D'autant plus que Haruo Satô a été, selon Wikipédia, le maître de deux très grands écrivains japonais traduits en français depuis longtemps et que j'apprécie énormément, à savoir Masuji Ibuse et Osamu Dazai. Voici donc un écrivain japonais reconnu dans son pays, il fut distingué de « L'ordre de la Culture », et enfin publié en France (cinquante ans après son décès). Alors que j'aime tout particulièrement la littérature non contemporaine venant du pays du soleil levant, il n'en fallait pas plus pour attiser ma curiosité. Connaissant par ailleurs les éditions Les Belles Lettres ainsi que leur collection consacrée à la littérature asiatique (Japon/Chine), je n'ai pas hésité un instant à me procurer ce livre.

« Mornes saisons » est donc un recueil de nouvelles composé de quatre histoires et dont la première (qui est aussi la plus grande) donne le titre à l'ensemble du livre. D'ailleurs, je ne vais parler ici que de la première histoire, mais à titre informatif voici le titre des trois autres textes : « La maison de l'épagneul », « L'Empreinte » et « Clair de lune ».

Ainsi, le narrateur décide de s'installer avec sa femme à la campagne. Ce dernier veut fuir la capitale, sa vie tumultueuse et son rythme frénétique. Accompagné de ses deux chiens, ce couple souhaite renouer avec une vie plus harmonieuse, plus simple, plus naturelle… La ville est si bruyante alors que la campagne est si calme. Aussi, cet homme et cette femme tombent sous le charme d'une vieille maison abandonnée, son jardin qui subit l'ingérence de l'ancien propriétaire était autrefois magnifique, on le devine encore, car il n'a pas encore basculé complètement à l'état sauvage. « Mais ce qui lui donna le plus grand sentiment d'horreur, ce n'était pas cette violente détermination dont faisait preuve la nature. C'était au contraire les derniers vestiges d'élégance d'une organisation agencée par la main de l'homme,qui conservaient une existence ténue au sein de ce chaos. C'était le fantôme d'une volonté. » Dans un premier temps, tout se passe bien et le narrateur semble retrouver sa joie de vivre, sa femme est rassurée. Cependant, petit à petit le mari est gagné par la mélancolie. Il contemple cette nature morne et pluvieuse qui finit par l'oppresser, comme s'il avait été vaincu par elle. Dépressif, il essaie de cacher son état à sa femme, mais il commence à entendre ce que personne n'entend et à voir ce que personne ne voit, ce qui n'existe pas… le narrateur s'inquiète pour ses chiens qui ne répondent plus à ces appels, il lutte contre ce qui l'entoure, contre ce qu'il est venu chercher, la nature et le calme. le mari veut croire à ses obsessions tandis que sa femme finit par comprendre sa déraison.

L'écriture de Satô Haruo est toujours juste, mais aussi profondément délicate. Dans la première partie du texte, l'auteur ne parle quasiment que de la nature, du jardin qui entoure la maison, ainsi que des plantes qui le composent. C'est si merveilleux… On aime ce qu'on lit, on est attiré par cette nature si magnifiquement décrite, on se sent apaisé par elle, on est heureux. Pourtant, on commence à douter tout comme le narrateur de ce lieu idyllique. S'agit-il d'un jardin d'Éden ? L'apaisement cède sa place à l'irritation et l'agacement. Alors certes, cette nouvelle aborde le sujet de l'homme et de son rapport à la nature, mais pas seulement. « Mornes saisons » parle aussi de la solitude. Enfin, c'est ce qu'il me semble… Comme vous l'aurez compris, j'ai beaucoup aimé cette nouvelle ainsi que les autres textes, que je vous invite à découvrir, dans ce recueil de nouvelles. Je me demande si d'autres traductions de cet auteur sont prévues, mais j'aimerais tant découvrir « Mélancolie rurale » et « Mélancolie urbaine » de Haruo Satô.

Lien : http://deslivresetdesfilms.c..
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De la littérature au sens noble du terme.
Le livre à lui seul est une oeuvre d'art digne d'être exposé
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Un des grands de la littérature japonaise du siècle dernier.A éviter sous aucun prétexte.
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critiques presse (1)
Telerama
15 octobre 2014
Cette belle traduction de son recueil Mornes Saisons devrait réparer cette injustice : le souffle y est coupé - d'angoisse, d'admiration, de recueillement.
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Il s'aperçut que, chez les êtres venant à la vie, malgré les différences entre un insecte et une plante, une image commune se révélait. La nature, en elle-même, n'était sans doute régie par aucune règle. Mais, en l'observant, à tout le moins, l'homme pouvait y discerner à sa guise telle ou telle loi. En regardant plus attentivement, il distingua, au beau milieu de la tête plate de l'insecte, quelque chose d'une petitesse extrême, d'une couleur de rubis, mais d'un éclat plus vif encore, qui s'y trouvait enchâssé à la perfection.
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On ne peut se lasser de la lune. Plus on la regarde, plus elle devient belle. Toute personne qui a une fois joui à satiété de la lune en tombe amoureux, c'est naturel. La lune croît, décroît, renaît. Ce cycle ravit, puis attriste tour à tour l'âme de ceux qui l'aiment, leur demande un amour plus grand encore. Lorsqu'il devient, comme à moi, impossible de dormir sans avoir au moins jeté un coup d'oeil sur la lune, on le comprend d'autant mieux.
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Quelle véritable richesse d'expression trouvait-on chez ces animaux ! Ils avaient beau avoir été trompés dans leur attente plusieurs fois de suite, ils refusaient de se départir de la conviction que leur maître était nécessairement plus adroit qu'eux pour attraper les sauterelles. A chaque fois qu'ils le voyaient se mettre en position et avancer son bras, ils abandonnaient l'insecte qu'ils avaient eux-mêmes déjà quasiment capturé, et surveillant sa main, ils restaient dans l'attente des bonnes grâces qu'il voudrait bien leur accorder, autant de temps que cela demandât. De la paume vide qu'il leur avait tendue, il caressa un moment la tête de ses deux chiens déçus. Peut-être satisfaits de ses caresses, les animaux remuèrent la queue. L'attitude de ses chiens – leur foi aveugle – et son incapacité à répondre à leur attente lui faisaient éprouver un sentiment douloureux.
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La vie était une force conquérant instant après instant tout ce qui l'entourait, l'avalant, en aspirant l'énergie à l'intérieur d'elle-même, et la transformant en un flot parfaitement uniforme. Sur le plan physique, c'était un phénomène qui se révélait très clairement. Et sur le plan de l'âme, tout comme sur celui de l'esprit, il devait en aller de même, certainement. Or cette force mystérieuse, qui fonctionnait en absorbant les substances extérieures pour les réunir en son sein, était alors en train de se retirer peu à peu de lui. Ou plutôt il n'était qu'en train, instant après instant, de laisser s'éparpiller son être propre, celui qu'il avait été jusqu'à présent.
Ce fut à ce moment qu'il remarqua que les ténèbres étaient une réunion compacte de choses en remous, et qu'elles possédaient en outre une pesanteur.
Ses émotions et ses peurs changèrent ainsi progressivement de forme, pour ne plus rien avoir de vraiment commun avec les émotions et les peurs des autres hommes du monde réel. La solitude, l'oisiveté et leurs sœurs sont douées d'une force des plus étranges.
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Cette végétation diverse avec ses branches et ses feuilles foisonnant sans retenue, au regard de l'ensemble du jardin, était d'une sombre mélancolie, comme le spectacle de cheveux en désordre pendant sur le front couleur de plomb d'un fou. Ces plantes et ces arbres avaient une pesanteur invisible, écrasant le jardin qui n'était pas si large, et on avait aussi l'impression qu'ils avaient encerclé à distance le bâtiment qui se trouvait en leur centre et étaient sur le point de l'engloutir.
Mais ce qui lui donna le plus grand sentiment d'horreur, ce n'était pas cette violente détermination dont faisait preuve la nature. C'était au contraire les derniers vestiges d'élégance d'une organisation agencée par la main de l'homme, qui conservaient une existence ténue au sein de ce chaos. C'était le fantôme d'une volonté.
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