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EAN : 9782878580839
173 pages
Viviane Hamy (29/01/1997)
4.44/5   18 notes
Résumé :
Quand l'Etranger arriva, Askanius fut son bon génie : il lui prêta la somme pour ouvrir son cabinet d'avocat.
Une fois installé, Edouard Libotz voulut se faire des amis, se marier, „ faire sa vie ». « Il fit le bien et résista au mal parce qu'il ne pouvait faire autrement : la vertu était son destin. Mais Libotz ne réussit pas à sauver son ami Askanius du désastre déclenché par le procureur — symbole du mal absolu —, pas plus qu'il ne parvient à se faire acce... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Le pouvoir de la haine

Édouard Libotz n'a pas eu une enfance facile. Son père, épicier de son état, l'a toujours plus ou moins maltraité et le jeune homme a rapidement pris conscience du tragique de la destinée que son passage sur la terre lui réservait. Il réussit pourtant à faire des études de droit et s'installe dans une petite ville de Suède dont la principale caractéristique est d'être une station thermale assez recherchée. Les débuts sont difficiles pour Libotz et les clients se font cruellement attendre. Il reçoit aide financière et encouragement de la part d'Askanius, l'aubergiste qui devient plus ou moins son ami. Mais notre héros n'est pas au bout de ses peines. Pour les habitants de la ville, il est un étranger et le restera quoiqu'il fasse. Bien que son étude d'avocat commence à avoir du succès, il est en butte à la haine et à l'hostilité générale. Pourtant, Libotz n'est pas méchant au contraire, il est même rempli de bonne volonté et n'hésite pas à aider dans la mesure de ses moyens ceux qui sont dans la misère et la peine. Mais on dirait que toutes ses bonnes actions se retournent contre lui. Plusieurs événements viennent perturber la vie de la petite ville, des drames se jouent et des destins s'accomplissent. La haine domine la petite communauté et cette haine a besoin de quelqu'un pour la canaliser, un bouc émissaire qui fait qu'au lieu de se déchirer entre eux, les habitants s'unissent et concentrent toute cette haine sur une seule et même personne : Libotz !

Avec ce livre, j'aborde l'oeuvre de ce grand auteur dramatique que fut Strindberg, réputé particulièrement pour ses pièces de théâtre. Et ce livre rappelle effectivement une pièce de théâtre par la construction magistrale du récit et la place immense que prennent les différents personnages. Je ne peux m'empêcher de faire un rapprochement avec le film « Dogville » de Lars von Trier. C'est puissant comme récit, tant par l'écriture dépouillée et efficace que par la façon dont l'auteur met en place toutes les pièces qui mèneront au dénouement tragique de ce drame enfanté par la méchanceté intrinsèque de l'être humain et sa mesquinerie légendaire.

Un livre qui recèle une analyse particulièrement fine et réaliste des relations humaines et des âpres luttes que doivent mener les humains entre eux pour rester vivants et réussir à tirer leur épingle de ce jeu cruel et cynique qu'on appelle la vie. Un chef-d'oeuvre !

« Cette attitude était la conséquence d'une confiance fondée non pas sur une méconnaissance de la méchanceté foncière de l'être humain, mais sur une position de principe : il faut croire au bien, se forcer à penser du bien de son prochain et tâcher de lui trouver des excuses et de lui pardonner coûte que coûte, en cas de déception. Il était ainsi fait, il était né avec ces idées sur le monde, sur les hommes et sur sa propre destinée, et il appelait cela sa « religion » ».

« Ils causèrent, avidement, tel un couple de naufragés sur une île déserte. »

« Il se garda bien de s'enorgueillir de sa victoire, mais il emprunta désormais les rues principales et y marcha la tête haute. Les regards haineux des passants ne l'atteignaient plus, il était immunisé contre les injures, qu'il n'entendait même pas, et il évitait de regarder les vitrines où toutes les semaines, s'il en avait envie, il pouvait voir sa caricature. Ainsi vivait-il, revêtu d'un scaphandre hermétique, ne recherchant le commerce ni des grands ni des petits. »
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Quelle pépite que ce roman écrit en 1906 qui sera la dernière oeuvre de August Strindberg, l'auteur suédois le plus connu. Mais à la lecture, il pourrait se passer de nos jours, tant la stupidité de l'homo sapiens n'a pas évoluée. Déjà, seuls les sans scrupules s'en sortent. Comme dit l'auteur : la vie est une suite d'épreuves qu'on doit surmonter.
Libotz, avocat vient s'installer dans une petite ville pas très accueillante. Il se rend, chaque jour pour se restaurer, chez Askanius, le propriétaire, qui l'aidera, sans le trouver sympathique. On ne peut pas l'aimer : c'est l'étranger. Il acceptera que tout lui échappe : le travail, l'amour, la vie, quoi… persuadé qu'il n'est pas fait pour le bonheur, regrettant que le monde soit fait ainsi. Les scènes de dialogues sont les points culminants qui dévoilent, peu à peu, une fine analyse de l'espèce humaine. On a l'impression de voir des lions dans une cage qui se battent pour avoir le meilleur morceau de barbaque.
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C'est Fanny, une des héroïnes de Rue du bonheur d'Anna Fredriksson, qui m'a donné envie de relire du Strindberg. le bouc émissaire est le dernier roman de Strindberg, et certains critiques le considèrent comme le plus important. Avec Strindberg , on sait qu'on va à la rencontre des destins, du duel entre classe supérieure et classe inférieure, des affrontements entre individus et des changements d'opinions et d'attitudes. Et aussi d'un regard déprimant sur l'homme et la société.


Ainsi Libotz, l'avocat qui vient de s'installer en ville, est « condamné à souffrir », c'est son destin. Ses propos sont souvent interprétés de travers et il est fréquemment considéré, à tort, coupable de mauvaises actions. Quoiqu'il fasse, cela a de grandes chances d'échouer et de se retourner contre lui. Tjarne, le procureur est d'une autre trempe. Il peut vite devenir arrogant, brutal et méchant. Il jouit de la souffrance d'autrui. Et on ne peut absolument pas lui faire confiance. Quant à Askanius, l'hôtelier, qui a - dans un premier temps - aidé Libotz pour son installation, tout d'un coup il s'en prend à lui et se montre froid à son égard. Askanius est orgueilleux et d'un avis changeant: il peut se métamorphoser en quelqu'un d'insupportable en un rien de temps! Quand Libotz se fait condamner pour quelque chose qu'il n'a pas commis, Askanius ricane et lui dit « Tu crois toujours à la justice et à la victoire des bons? » Et Tjarne, le procureur, ajoute: « C'est vrai, j'ai été déloyal, mais c'est mon métier ».


Strindberg a un style au rythme trépidant, précis et sans fioritures. Pas le temps de voir le paysage ou de s'attarder au temps qu'il fait. Il se concentre sur ses personnages. En conséquence, il faut de temps à autre poser le livre, pour souffler un peu et se récapituler tout ce qui vient de se passer en une seule page. Il a écrit ce roman comme une pièce de théâtre: peu de personnages, beaucoup de dialogues, et des descriptions d'attitudes ou de sentiments qui sont comme des indications pour le jeu des acteurs. Son talent tient d'abord dans la complexité de ses personnages, la façon qu'il a de leur donner vie et les retournements incessants de situation. C'est du grand art dans le genre roman de moeurs théâtral.
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Magnifique étude de caractères,tous les héros strindberghiens y sont.Askanius,le bon-mauvais qui succombe à sa folie des grandeurs,Libotz,qui se croit destiné au malheur et y succombe,et l'ignoble Tjarne,sans scrupules qui triomphera des deux?
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Excellent roman d'August Strindberg, son dernier, écrit 5 ans avant sa mort. En 150 pages, tout l'art de Strindberg. Certes, on le connait mieux comme dramaturge que comme romancier, mais les amateurs du théâtre de Strindberg devraient y trouver leur compte, tant tout dans ce petit roman rappel son théâtre : un petit nombre de personnages, une action dense qui avance essentiellement par les dialogues, et une unité de lieu qui ne s'encombre guère de descriptions lyriques. le propos du roman n'a pas vieilli : la gentillesse, la droiture, l'honnêteté sont-elles récompensées ? Pourquoi ceux qui truandent, volent, filoutent s'en sortent-ils trop souvent indemnes ? On éprouve de la pitié pour ce pauvre homme, droit dans ses bottes, qui se mortifie lorsqu'il commet un petit pas de côté, mais qui voit prospérer ceux qui ne s'encombrent pas des bons sentiments. le roman est suivi d'une excellente postface d'Elena Balzamo, la traductrice, spécialiste de Strindberg, qui redonne des éléments de contexte et un éclairage très intéressant.
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Les gens malhonnêtes sont attirés par la justice ; ils apprécient les lois dans la mesure où elles leur permettent de se mettre à l'abri des poursuites.
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Maître Libotz, avocat surnuméraire à la cour d’appel, avait effectivement débuté à la à la cour d’appel où il s’était vite rendu compte qu’on ne l’aimait guère. Incorruptible, ponctuel et efficace, il n’avait pourtant réussi à gagner ni ses supérieurs, ni ses camarades. Était-ce à cause de ses origines étrangères? On l’ignorait. Plutôt à cause de son physique, car aussi bien sa figure que tout son être laissaient facilement deviner le sort qui lui était promis. Il était condamné à souffrir, pour soi et pour les autres, et son entourage ressentait comme un devoir impératif de contribuer à l’accomplissement de ce destin en le faisant souffrir.
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La vie n'est qu'un tissu de mensonges, d'incompréhensions et d'erreurs. Strindberg
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Allons-y, fit Tjärne. Ils pénétrèrent dans le restaurant sinistre […] Des sons de musique leur parvinrent du café: une marche, père-la-victoire. Ils ouvrirent la porte: Askanius, assis seul au milieu de cent tables vides, écoutait la musique en sirotant son champagne. Cette boisson de fête qui, pour donner sa mesure, a besoin de la présence des amis, des parents, qui a besoin d’une « occasion joyeuse » ou d’une jolie femme, les fit penser à un repas d’enterrement. Et ce concert invisible, avec ses trompettes bruyantes et ses tambours, avait une allure spectrale.
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Videos de August Strindberg (13) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de August Strindberg
« Rares sont les auteurs suédois qui ont joué un rôle dans la littérature mondiale. Swedenborg (1688-1772) fut l'un d'eux […]. Un autre fut le Strindberg (1849-1912) des dernières années […]. » (Kjell Espmark)
« La voix de Tomas Tranströmer (1931-2015) est celle d'un homme de notre temps, un homme dont les poèmes nous apprennent qu'il a voyagé […] ; un homme qui est surtout très ordinairement père de deux enfants, qui prend sa voiture pour se rendre à son travail, dort parfois dans des hôtels, et plus souvent encore dans sa propre maison en Suède. […] Rien là qu'un lecteur de cette fin de siècle n'ait pu vivre lui-même. […] […] ses poèmes nous semblent […] un « parti pris des choses ». […] Un monde complexe s'étend sur la page : ainsi la nature suédoise, rugueuse sans être inhospitalière - des fortes profondes, des racines tortueuses, des fjords semblables à des déchirures dans la terre, des pierres partout, la neige surtout. […] Tranströmer ne se voue pas, en le recensant, à la banalité du monde contemporain. […] Trop humble, Tranströmer, c'est-à-dire trop rieur ; il déclarait discrètement éprouver ce litige en évoquant toutes ces « choses qu'on ne peut écrire ni passer sous silence » […] Qu'elle soit métaphore, analogie ou comparaison, l'image redouble la chose, la sort de cette indifférence où le langage que Tranströmer dit « conventionnel » la tient ; la sort de son idiotie en lui donnant un reflet, cette différence dont notre regard nécessairement la doue. Sans doute ce langage « conventionnel » suffit-il à désigner les objets que nous plions à nos usages : leur silence, c'est-à-dire leur façon d'être absents des mots, signale assez notre familiarité avec eux. Mais lorsque soudain nous réalisons leur présence dans son épaisseur et sa différence véritables, alors leur altérité radicale nous apparaît. Ni les noms communs ni nos usages quotidiens n'épuisent ce surplus […]. Ce surplus est l'appel auquel l'image répond […]. Réaliser, c'est prendre conscience et rendre réel ; c'est réponde à la nécessité que deux vérités s'approchent, « l'une de l'intérieur, l'autre de l'extérieur », l'une dicible, l'autre visible, et dialoguent par-delà leur séparation. […] Tel est le sens du face-à-face que crée la poésie. […] le pouvoir infini de création verbale qu'exprime l'image poétique est la métaphore de notre rapport infini au monde. Par lui, nous accédons à la conscience de ce qui nous dépasse. […] » (Renaud Ego)
« […]
Un an avant ma mort, j'enverrai quatre psaumes à le recherche de Dieu. Mais cela commence ici.
Un chant sur ce qui nous est proche.
Ce qui nous est proche.
Champ de bataille intérieur où nous les Os des Morts nous battons pour parvenir à vivre.
(Tomas, Tranströmer, Un artiste dans le nord) »
0:00 - Les pierres 0:45 - Kyrie 1:19 - de la montagne 2:03 - Sombres cartes postales II 2:20 - Haïkus I 2:31 - Haïkus X 2:45 - Générique
Référence bibliographique : Tomas Tranströmer, Baltiques, traduit par Jacques Outin, Éditions Gallimard, 2004
Image d'illustration : https://sis.modernamuseet.se/objects/83349/tomas-transtromer
Bande sonore originale : So I'm An Islander - Lonely Secrets We Had Lonely Secrets We Had by So I'm An Islander is licensed under a CC BY-SA 3.0 Attribution-ShareAlike license.
Site : https://www.free-stock-music.com/soimanislander-lovely-secrets-we-had.html
#TomasTranströmer #Baltiques #PoésieSuédoise
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