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Arthur Adamov (Autre)
EAN : 9782851810472
63 pages
L'Arche (13/06/1997)
3.74/5   35 notes
Résumé :
Pour moi qui ne crois pas à l'au-delà, mon enfant était un gage d'immortalité ; elle était pour moi la seule chose éternelle.
Qu'on me la prenne, et ma vie s'arrête.
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Ecrite en 1887, la pièce sera créée à Berlin en 1890. Une fois de plus, les rapports du couple sont au centre de l'oeuvre de Strinberg. le capitaine et sa femme Laura sont en désaccord sur l'éducation à donner à Bertha, leur fille. le capitaine a décidé de l'envoyer en ville, suivre des études qui lui permettraient éventuellement de devenir institutrice. Bertha est d'accord avec ce projet, mais Laura y est opposée : elle ne veut pas que sa fille soit éduquée par d'autres, et qu'elle puisse se détacher d'elle. Elle ourdit un stratagème, en distillant dans l'esprit de son mari le doute sur sa paternité, elle essaie de le pousser vers la folie, le coupe de ses amis, et le met en posture d'être déclaré aliéné.

C'est une pièce très sombre, dans laquelle les relations entre les époux se résument à une lutte de deux volontés, une lutte pour le pouvoir. Laura est la plus forte, car elle est sans scrupules, prête à user de la ruse, et de tous les stratagèmes possibles pour arriver à ses fins. le pouvoir de la femme s'appuie sur la certitude, celle de savoir qui est le père de l'enfant, et par là décider du futur, de la transmission. L'homme quand à lui ne peut que faire des conjectures, il est dans l'ignorance, dans une forme de dépendance.

La pièce n'échappe pas à une forme de misogynie : Laura est vraiment terrifiante, elle précipite en pleine connaissance de cause son mari vers la folie, et n'a de cesse que de triompher complètement de lui, alors que le capitaine est de bonne foi, il est dépeint comme généreux, même si sans doute trop naïf, et donc désarmé devant les menées de sa femme, qui par exemple n'hésite pas à mentir, à présenter sous un jour inquiétant au médecin qu'elle a fait venir, les comportements de son mari.

Mais on peut aussi lire ce drame comme celui d'un homme à qui sa raison échappe lorsqu'il prend conscience des limites de l'esprit humain, de l'incertitude sur les choses les plus essentielles. le capitaine est présenté comme un savant, comme un scientifique reconnu dans son domaine. Il ne peut pourtant savoir avec une certitude absolue, si Bertha est bien sa fille. Plutôt que d'interpréter toutes les interrogations autour de cette question comme des indices d'un basculement dans la folie, on peut aussi les voir comme une sorte d'angoisse métaphysique, d'un homme confronté à sa finitude. Là aussi Laura s'avère inférieure : pas sur le plan moral mais intellectuel cette fois, ce type de questionnement étant en dehors de sa portée. Dans tous les cas, pour triompher, elle utilise les aspects nobles de son mari, sa sincérité, sa droiture, son intellect, pour le mener vers l'abîme et le détruire. L'homme et la femme semblent dans la pièce des ennemis mortels, presque des représentants de deux espèces différentes, irrémédiablement en conflit, qui résulte de leurs natures opposées.

Pessimiste au possible, pas dépourvu d'une forme de mauvaise foi, mais très fort, très intense.
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August Strindberg fait partie de ces auteurs qui continu à scandaliser, il suffit de lire son pamphlet misogyne "De l'infériorité de la femme – et comme corollaire : de la justification de sa situation de subordonnée selon les données dernières de la science" (1895) pour comprendre. Il fascine autant qu'il ne fait polémique mais est sans aucun doute l'auteur suédois le plus important du 19ème siècle tant son oeuvre aussi bien romanesque que théâtrale a marqué son temps et a influencé de nombreux écrivains, réalisateurs ou dramaturges.

En 1887, deux semaines et demie de février suffirent à Strindberg pour écrire le Père, une courte, brutale et puissante pièce en trois actes écrite quasiment d'un seul trait. Un drame conjugal qui marque un tournant pour Strindberg car il s'agit ici de sa première pièce psychologique qui sera ensuite suivit par "Mademoiselle Julie" (1888) ou encore "Créanciers" (1889).

Ayant trouvé une nouvelle conception, plus moderne, de la tragédie dans les écrits de Schopenhauer, August Strindberg décide de mettre en scène des personnages ordinaires pour rendre cette tragédie plus convaincante et montrer que la fatalité n'est pas le propre des grandes tragédies mythologiques grecques mais qu'elle peut aussi bien s'abattre sur une famille suédoise déchirée par le doute. C'est une vraie volonté de Strindberg de s'éloigner des «sujets grandioses» de l'Histoire et de laisser derrière lui ses pièces historiques du début des années 1870 ("Den Fredlöse", "Maître Olof").

La pièce de théâtre le Père est le récit d'une lutte, la lutte entre le Capitaine et Laura, entre un père et une mère, un homme et une femme. C'est d'abord à propos de l'éducation de leur unique enfant Bertha que le capitaine et son épouse Laura entrent en conflit. Lui veut qu'elle parte en ville préparer un diplôme d'institutrice, mais Laura elle, veut que Bertha reste à la maison et devienne une artiste peintre. A partir de ce moment-là, chacun tente de légitimer son autorité sur le devenir de l'enfant. L'un utilise la loi tandis que l'autre met à mal l'autorité maritale en faisant passer son époux pour un aliéné mental. Mais ce qui va entrainer la chute du père est une simple réplique de Laura : «Tu ne sais pas si tu es le père de Bertha !» Cette phrase va alors réveiller l'incertitude de ce père quant à sa paternité sur l'enfant à une époque où le recours aux tests ADN n'était bien évidemment pas très répandus. Tel un poison, ce doute universel va ronger le capitaine jusqu'à finir par le détruire. C'est une véritable guerre des sexes où la suggestion est une arme de destruction massive que Strindberg décrit. Dans cette pièce, Laura est une mante religieuse qui dévore le mâle.

August Strindberg avec le Père, pensait avoir offert à la Suède son premier drame naturaliste. C'était sans compter sur le principal représentant de ce mouvement, Émile Zola, à qui Strindberg avait envoyé une traduction de sa pièce qui, bien qu'impressionné par la puissance de celle-ci, ne la considère pas comme un drame naturaliste tant l'abstraction y est présente. Il tentera de s'approcher du naturalisme zolien mais ne réussira jamais complètement. Il s'en éloigna même par la suite et se mit à produire des oeuvres plus symboliques comme "La Danse de mort" (1900), "Le Songe" (1901) ou "La Sonate des Spectres" (1907).

Lorsque l'on se met à lire du Strindberg, il est pertinent de s'intéresser à la vie de cet auteur tant elle connut de nombreuse phase qui ont eu une influence certaine sur ses écrits Dans la majeure partie de l'oeuvre de Strindberg, l'histoire vécue et l'histoire écrite se mélange. Bien que moins évidente que dans la trilogie "Inferno" (1897), "Legender" (1898) et "Ensam" (1903) où la paranoïa et les angoisses de l'auteur sont largement partagées par le narrateur, cette autobiographie dissimulée est aussi présente dans le Père. le conflit entre le capitaine et Laura peut se lire comme étant la transposition littérale de sa relation tumultueuse avec sa première femme Siri von Essen et par extension, le conflit permanent que Strindberg a eu avec les femmes. Strindberg nous montre dans cette pièce les frustrations et les souffrances de l'homme dans le couple, des sentiments qu'il a lui même connu dans son mariage.
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August Strindberg écrit « Père » en 1887, il a 38 ans. C'est une pièce qui fait partie d'un cycle naturaliste, avec « Mademoiselle Julie » (1888) et « Créanciers » (1889), notamment. L'auteur suédois, ancre son texte dans un réalisme social avec un sujet centré sur un drame familial, celui de la guerre des sexes, de la crise du couple et de la dislocation du foyer.

C'est un texte d'une violence froide qui ne laisse pas indemne parce qu'il fait réfléchir sur la relation homme-femme et la paternité.
Le Capitaine et son épouse Laura forme un couple bourgeois. Leur mésentente se cristallise autour de leur fille Bertha. Laura fait naître chez son mari un doute sur sa paternité.
Engagé dans une lutte d'autorité avec sa femme, le Capitaine questionne sa légitimité. Un doute s'installe alors en lui : comment être sûr qu'il est le père de Bertha ?
Ce doute, alimenté par le comportement de Laura, le ronge jusqu'à le faire sombrer lentement dans la folie.

Voilà un couple qui s'est aimé. Puis l'amour s'est transformé en haine et l'homme et la femme essaient de tuer l'autre à coups de mots.
Cette Tragédie a sans doute été inspirée par les expériences malheureuses de Strindberg. Je crois qu'on l'a accusé d'être myosine mais, moi, je n'y ai vu que des perdants, que ce soit l‘homme où la femme.
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Une pièce moins connue de cet auteur suédois du 19e siècle, que j'ai lue à la fac il y a bien longtemps, au programme de littérature comparée.
J'avoue ne plus en avoir de souvenirs, peut-être l'histoire d'une fille et de ses rapports avec son père. Tout cela était bien ennuyeux...
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Une très belle pièce au court de laquelle on est témoin du déchirement originel entre l'homme et la femme. Une femme pas tout à fait nette laisse croire à son mari que des choses auraient pu lui échapper. Lui c'est un capitaine et donc il ne tolère aucune opposition, encore moins si celle-ci vient d'une femme (et toujours encore moins si c'est la sienne). La tension monte assez rapidement dans ce court récit pour atteindre un climax dans la dernière page. le langage est d'une surprenante modernité et les propos, les sujets abordés et les points de vue le sont tout autant. Et l'on sent poindre aussi tout le long de la pièce l'ombre de Nietzsche lorsque les personnages masculins virils évoquent la toute puissance de la volonté conquérante. Un cadeau que nous a laissé Strindberg, à lire et à méditer.
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
LAURA
Tu pleures, toi, un homme!
LE CAPITAINE
Oui, je suis un homme, et je pleure. Un homme n'a-t-il pas des yeux ? N'a-t-il pas aussi des mains, des sens, des inclinations, des passions? Ne se nourrit-il pas, tout comme une femme ? N'est-il pas blessé par les mêmes armes, glacé par les mêmes hivers, brûlé par les mêmes étés ? - Notre sang, à nous, ne coule-t-il pas lorsqu'on nous pique? Ne rions-nous pas lorsque vous nous chatouillez? Pourquoi un homme devrait-il ne pas gémir ? Pour quoi un soldat devrait-il ne pas pleurer ? Parce que c'est indigne d'un homme ? Pourquoi serait-ce indigne d'un homme ?
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" Pense à ce qu'était notre vie et à ce qu'elle est devenue. Tu ne voulais pas qu'elle devînt cela, je ne le voulais pas non plus, et pourtant elle est devenue cela. Qui dirige la vie ? "
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LAURA
Peut-être y a-t-il eu en moi une obscure aspiration à t’éliminer comme on élimine un obstacle. Tu crois découvrir derrière ma conduite un plan concerté ; il se peut qu’il existe sans que je le sache, il se peut aussi qu’il n’existe pas. Je n’ai jamais réfléchi à ce qui se passait, tout s’est glissé dans le sillon que tu as tracé toi-même. Aussi puis-je me déclarer innocente devant Dieu et devant ma conscience, même si en fait je ne le suis pas.
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LE CAPITAINE
Je crois que vous êtes toutes mes ennemies. Ma mère, qui ne voulait pas me voir venir au monde parce qu’elle devait m’enfanter dans la douleur, était mon ennemie : elle m’a sevré trop tôt, faisant de moi un demi-infirme. Ma sœur était mon ennemie, car elle voulait me réduire à l’état d’esclave. La première femme que j’ai connue était mon ennemie, car pour prix de mon amour elle m’a donné une maladie qui dura dix ans. Ma fille est devenue mon ennemie lorsqu’elle a dû choisir entre toi et moi. Et toi, ma femme, tu as été mon ennemie mortelle, car tu ne m’as pas lâché avant que je ne sois étendu par terre, et sans vie.
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LE CAPITAINE : [...]Mais peut-être pourrais-tu m'expliquer pourquoi vous, les femmes, traitez les hommes adultes comme s'ils étaient encore des enfants ?

MARGRET : Je ne suis pas bien savante. Mais c'est peut-être que vous êtes tous, les vieux comme les jeunes, les enfants des femmes...
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Videos de August Strindberg (13) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de August Strindberg
« Rares sont les auteurs suédois qui ont joué un rôle dans la littérature mondiale. Swedenborg (1688-1772) fut l'un d'eux […]. Un autre fut le Strindberg (1849-1912) des dernières années […]. » (Kjell Espmark)
« La voix de Tomas Tranströmer (1931-2015) est celle d'un homme de notre temps, un homme dont les poèmes nous apprennent qu'il a voyagé […] ; un homme qui est surtout très ordinairement père de deux enfants, qui prend sa voiture pour se rendre à son travail, dort parfois dans des hôtels, et plus souvent encore dans sa propre maison en Suède. […] Rien là qu'un lecteur de cette fin de siècle n'ait pu vivre lui-même. […] […] ses poèmes nous semblent […] un « parti pris des choses ». […] Un monde complexe s'étend sur la page : ainsi la nature suédoise, rugueuse sans être inhospitalière - des fortes profondes, des racines tortueuses, des fjords semblables à des déchirures dans la terre, des pierres partout, la neige surtout. […] Tranströmer ne se voue pas, en le recensant, à la banalité du monde contemporain. […] Trop humble, Tranströmer, c'est-à-dire trop rieur ; il déclarait discrètement éprouver ce litige en évoquant toutes ces « choses qu'on ne peut écrire ni passer sous silence » […] Qu'elle soit métaphore, analogie ou comparaison, l'image redouble la chose, la sort de cette indifférence où le langage que Tranströmer dit « conventionnel » la tient ; la sort de son idiotie en lui donnant un reflet, cette différence dont notre regard nécessairement la doue. Sans doute ce langage « conventionnel » suffit-il à désigner les objets que nous plions à nos usages : leur silence, c'est-à-dire leur façon d'être absents des mots, signale assez notre familiarité avec eux. Mais lorsque soudain nous réalisons leur présence dans son épaisseur et sa différence véritables, alors leur altérité radicale nous apparaît. Ni les noms communs ni nos usages quotidiens n'épuisent ce surplus […]. Ce surplus est l'appel auquel l'image répond […]. Réaliser, c'est prendre conscience et rendre réel ; c'est réponde à la nécessité que deux vérités s'approchent, « l'une de l'intérieur, l'autre de l'extérieur », l'une dicible, l'autre visible, et dialoguent par-delà leur séparation. […] Tel est le sens du face-à-face que crée la poésie. […] le pouvoir infini de création verbale qu'exprime l'image poétique est la métaphore de notre rapport infini au monde. Par lui, nous accédons à la conscience de ce qui nous dépasse. […] » (Renaud Ego)
« […]
Un an avant ma mort, j'enverrai quatre psaumes à le recherche de Dieu. Mais cela commence ici.
Un chant sur ce qui nous est proche.
Ce qui nous est proche.
Champ de bataille intérieur où nous les Os des Morts nous battons pour parvenir à vivre.
(Tomas, Tranströmer, Un artiste dans le nord) »
0:00 - Les pierres 0:45 - Kyrie 1:19 - de la montagne 2:03 - Sombres cartes postales II 2:20 - Haïkus I 2:31 - Haïkus X 2:45 - Générique
Référence bibliographique : Tomas Tranströmer, Baltiques, traduit par Jacques Outin, Éditions Gallimard, 2004
Image d'illustration : https://sis.modernamuseet.se/objects/83349/tomas-transtromer
Bande sonore originale : So I'm An Islander - Lonely Secrets We Had Lonely Secrets We Had by So I'm An Islander is licensed under a CC BY-SA 3.0 Attribution-ShareAlike license.
Site : https://www.free-stock-music.com/soimanislander-lovely-secrets-we-had.html
#TomasTranströmer #Baltiques #PoésieSuédoise
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