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EAN : 9782266028646
216 pages
Pocket (01/12/1989)
3.45/5   65 notes
Résumé :
Pour le petit Jean, orphelin de mère, la vie s'écoule, monotone et triste, entre le lycée et l'appartement de sa tante.
Mais une secrète attente illumine sa vie. L'attente d'un père parti faire fortune en Amérique et dont le seul nom évoque pour lui la fantaisie, l'enthousiasme, l'aventure. Aussi quel bonheur lorsque le " père prodige " revient à l'improviste et annonce à son fils qu'ils vivront désormais ensemble ! C'est le début d'une lente découverte mutue... >Voir plus
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Pour Jean, son père est « cet homme aux larges épaules et aux yeux d'enfant dont les belles mains laissaient couler sur nous une intarissable pluie de miracles », un être fabuleux sorti des meilleures histoires. À la mort de sa mère, Jean est envoyé chez sa tante, loin de son père. Chérissant le souvenir d'un modèle, Jean est surpris de retrouver un homme à qui rien ne réussit. Guillaume brasse mille idées, milles projets dont aucun ne prend forme. Avide de gloire et de richesse rapides, il dilapide les quelques économies de la famille et entreprend des investissements qui mènent à la ruine et à la pauvreté. Mais l'échec n'est pas tout : Guillaume n'est plus l'homme superbe des souvenirs d'antan. « Je souffrais de voir que ces étrangers, non seulement n'admiraient pas mon père, mais encore le méprisaient et parfois se moquaient de lui. »
Car Guillaume, bel homme aux manières charmantes et au bagout indéniable, est un fantoche. Il jette de la poudre aux yeux et tente d'éblouir avec des discours éculés et mille fois répétés. Désormais, quand Jean regarde son père, il n'éprouve plus aucune admiration, mais plutôt « le sentiment d'une duperie grotesque, d'une infinie dérision. » La révélation de la véritable nature du père, d'abord douloureuse, finit par alimenter une haine intense. L'enfant assiste avec dégoût à l'éternelle représentation que donne son père. « C'est qu'à présent, je ne me bornais pas à mépriser mon père, mais il m'en coûtait de savoir que d'autres ne le méprisaient pas. Toute admiration qu'on lui portait révoltait en moi un obscur sentiment de justice. Je la sentais imméritée, volée. Je m'irritais à la pensée que ma qualité de fils, non seulement m'interdisait de dévoiler aux yeux du monde la véritable nullité de mon père, mais encore m'associait à lui dans le mensonge, m'obligeait à le suivre, à le soutenir, à le couvrir contre mon gré. »
Alors que Guillaume ne cesse de former des plans sur la comète, qu'il fréquente des femmes falotes et qu'il traite avec des filous, Jean se surprend à devenir la réplique de son père. La même inertie brièvement parcourue d'éclairs d'énergie se saisit de lui. Mais cette assimilation est écoeurante. « J'avais fini d'espérer en mon père. » Ce dernier aveu formulé, Jean assiste placidement à la déchéance de Guillaume. le dénouement, nécessairement tragique, laisse un enfant seul, à tout jamais privé de figure paternelle.
Henri Troyat s'y connaissait dans la peinture des nauséabonds sentiments familiaux, ainsi qu'il l'a prouvé avec L'araigne, prix Goncourt en 1938. Ici, c'est la relation père-fils qui est mise au pilori. Si Jean tue symboliquement le père, il n'en retire aucune gloire et il ne dépasse en rien le modèle renversé. Guillaume a saboté tout seul l'emprise qu'il avait sur son fils et l'issue n'est qu'un gâchis de sentiments : Jean aurait voulu aimer ce père, en être le digne prolongement. Il n'est en fait que l'aboutissement nécrosé d'une vie médiocre et vulgaire. Pour Jean, peu d'espoir, même pas celui de perpétuer le souvenir de son père.
Le sujet est gênant et le lecteur est plusieurs fois mis en position de voyeur, étant brutalement introduit dans l'intimité chiche du couple père-fils. Et c'est l'enfant, avec la narration directe, qui attire ainsi le lecteur dans un maelström de dégoût et de rejet. du père, on ne voit que les manifestations extérieures de ridicule comme on assisterait aux gesticulations bouffonnes d'une marionnette trop souvent sortie de son coffre. Peut-on avoir pitié de Guillaume ? Rien n'est moins sûr. Mais on aimerait vraiment que Jean lui pardonne tout et soit un véritable soutien. Assister à l'inexorable détachement de l'enfant est le plus douloureux.
Le texte est brillamment écrit et rend parfaitement les brefs emportements du père et le lent recul de l'enfant. La scène initiale, au pied d'un lumineux arbre de Noël, porte en elle tout le drame à venir. de fait, on entre dans le récit au moment du climax, la suite n'est que dégringolade. Et Henri Troyat saisit cette débandade familiale avec une plume toujours talentueuse.
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Ce livre est le tout premier roman d'Henri Troyat. Et c'est étonnant de voir à quel point il est abouti. le sujet en est simple et universel, l'amour et l'admiration qu'un enfant peut porter à son père. Et d'autant plus que ce géniteur absent, auréolé de la gloire du voyageur qui parcourt l'Amérique, se pare de mille qualités sans cesse renouvelées dans l'imagination fertile de son descendant.
Jusqu'au jour où, de retour, il faudra bien confronter les souvenirs avec la réalité. Et si illusion il y a, elle ne durera pas. L'innocence perdue face à des actes et des attitudes jugés dégradants, le géniteur chutera de son piédestal, le modèle tombera des sommets où l'avait juché son fils pour se retrouver au plus bas. La désillusion dans une âme d'enfant n'ayant pas encore la conscience de relativiser sera d'autant plus grande que les hauteurs où il l'avait hissé.
Très bon livre d'Henri Troyat écrit en 1935 et se déroulant à cette époque, assez court, il se lit d'une traite. Ce roman a obtenu, à sa sortie, le prix du roman populiste, prix inconnu pour moi mais qui existe encore de nos jours et qui prime les romans privilégiant les milieux populaires.
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C'est le tout 1er roman d'Henri Troyat. Il nous dépeint un personnage qui a une tendance à la mégalomanie et met en oeuvre divers projets de création d'entreprise calamiteux qui avortent tous les uns après les autres. Son fils adolescent vient le rejoindre après une séparation et le regarde d'abord avec une grande admiration. Mais petit à petit, il prend conscience du caractère velléitaire de son père, sous des dehors extravertis. Pour autant, malgré sa révolte et leur condition matérielle qui se dégrade de plus en plus, il ne cessera pas de l'aimer.
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Publié en 1935, ce premier roman d'Henri Troyat met l'accent sur la psychologie de la relation père/fils vue par les yeux du fils jouant le rôle de narrateur. de construction classique avec un déroulement chronologique et des caractères de chacun des personnages bien affirmés, ce roman se déroule en trois temps: l'admiration du père, puis le rejet absolu de son comportement social et familial, enfin la difficile acceptation de cet être ambigu et infantile qui ne peut s'empêcher de se mettre en avant pour attraper des chimères tout en fuyant les responsabilités de ses actes. On peut aussi y voir en creux un roman du passage de l'enfance à l'adolescence puis à l'âge adulte, reflété par l'évolution psychologique du narrateur.
On tient avec Faux Jour un roman bien construit dont la psychologie paraît souvent sommaire et stéréotypée et qui a souffert du passage du temps mais dont la lecture reste agréable et palpitante.
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Personnellement je connaissais Troyat -- de son vrai nom, Lev Tarassov -- essentiellement pour ses ouvrages biographiques qui ne représentent pourtant qu'une infime part d'une bibliographie prolifique .

Faux jour est son premier roman, et a été couronné du prix populiste de 1935.

Dans un discours de 1960 à l'Institut de l'Académie Française, au sujet de ce premier roman, le Maréchal Juin dira à Troyat:

"Mais ayant eu la surprise de constater dans vos premiers essais que votre écriture ne manquait pas de métier, vous vous avisâtes que vous pourriez bien être le grand écrivain anonyme que vous aviez si ardemment souhaité.

« Faux Jour », votre premier roman, édité en 1935 à l'âge de vingt-quatre ans, avait réalisé ce miracle....

http://lelabo.blogspot.com/2006/09/henri-troyat-faux-jour.html
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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
Je haïssais mon père avec une violence presque douloureuse, mais aussi avec précision. Je le haïssais pour son visage empâté, sa voix vulgairement chantante, ses gestes enveloppants. Je le haïssais pour ses costumes avachis et pour son odeur de tabac, d'alcool, de transpiration parfumée à l'eau de Cologne bon marché. Je le haïssais pour l'atmosphère de parlote creuse, de turbulent cabotinage, de sociabilité facile qu'il suscitait autour de lui. Je le haïssais au-delà de lui-même dans ceux qui l'admiraient, qui l'écoutaient, qui l'entouraient sans déplaisir. Je le haïssais en tout ce qui n'était pas moi. Je suffoquais de haine.
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. « C’est qu’à présent, je ne me bornais pas à mépriser mon père, mais il m’en coûtait de savoir que d’autres ne le méprisaient pas. Toute admiration qu’on lui portait révoltait en moi un obscur sentiment de justice. Je la sentais imméritée, volée. Je m’irritais à la pensée que ma qualité de fils, non seulement m’interdisait de dévoiler aux yeux du monde la véritable nullité de mon père, mais encore m’associait à lui dans le mensonge, m’obligeait à le suivre, à le soutenir, à le couvrir contre mon gré. »
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Se taira-t-il ? pensais-je. La vieille haine que j'avais endormie se réveillait en moi. Je me récitais avec un enivrement furieux la liste interminable de ses torts. Brassant d'inconsistantes affaires, multipliant d'inutiles amités, se dépensant en paroles creuses, en gestes sans lendemain, accumulant les erreurs, les parades, les mensonges, il nous avait en quelques mois amenés à la ruine. Mieux, il nous avait dépouilllés de cette considération des honnêtes gens, de cette estime propre, de cette fierté intime qui m'étaient si chères. Il nous avait déclassés.
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Et, comme je poursuivais l’évocation de cette période fébrile, un véritable affolement s’emparait de moi. Je sentais que, privé de mon père, je perdais la force et le goût de vivre. J’avais besoin de ce halo de gestes, de paroles, de regards, qu’il transportait avec lui. J’essayais d’espérer. Je me fixais une date à l’avance. Je m’affirmais que, ce jour-là, rentrant du lycée
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Le coup de bélier qui bousculera, jupes en l'air, cette vieille garce d'Europe peinturlurée et malade, d'où viendra-t-il ? Du Nord, du Sud, de l'Ouest ? Non ! Mais de l'Orient, mon cher. De l'Orient ...
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