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José Watanabe (Autre)Philippe Dessommes Flórez (Traducteur)
EAN : 9782377471836
262 pages
UGA Editions (09/07/2020)
4.5/5   2 notes
Résumé :
José Watanabe (1945-2007) est l'une des voix les plus singulières de la poésie hispano-américaine contemporaine, saluée par ses pairs mais également par un large public espagnol.
Cette anthologie propose la traduction inédite en langue française de 136 poèmes. Chacun d'entre eux nous offre l'accès au fruit d'une lente maturation et méditation dont la saveur nous accompagne durablement. La contemplation, acte indissociable pour Watanabe de l'expérience poétiq... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
La poésie de José Watanabe est une méditation sur le monde quotidien., au rythme mesuré et contemplatif. Poésie faite de parabole, de pudeur, empruntant à la tradition biblique, à celle du haïku, ses poèmes expriment la lente détérioration de l'existence tout en mettant à nu le difficile exercice de l'écriture poétique.
Mais ses poèmes témoignent aussi d'un processus de construction identitaire : c'est en écrivant qu'il a pu se définir comme péruvien d'origine japonaise et andine. Eduqué dans une famille culturellement ouverte, cet héritage a largement influencé son travail de poète.
Lien : https://tandisquemoiquatrenu..
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Citations et extraits (22) Voir plus Ajouter une citation
Mon œil a ses raisons
Je crois que mon œil a un critère de sélection arbitraire.

À l’évidence, le paysage alentour offrait davantage :

impossible que nous ayons été seuls elle et moi sur ce brise-lames.

Je me répète, comme tout le monde. J’imagine donc

s’il y avait de la brume

lui avoir déclaré : des canots dans le brouillard sont peut-être des mirages ou des

reflets,

et cité l’ancien haïku de Harumi :

“Dans la brume

Je touche le canot incertain.

Ensuite je m’embarque.”

S’il y avait du soleil

l’avoir photographiée au creux de ma main et peut-être effarouchée

en lui disant : prends la pose seins face au vent.

Et s’il est passé des mouettes et qu’elle les ait admirées, lui avoir rappelé

que ce sont là des oiseaux carnassiers, que seul leur chant hideux est honnête.

Mon œil voyait tout, n’écartait rien.

Nous nous sommes avancés dans la mer par ce brise-lames de rochers déchiquetés.

Sur un saillant, elle a ramassé sa jupe

et fait glisser ses pied...
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Sur la poésie

L’enfant a pénétré dans l’ombre de son arbre hors les murs

où il déposait quotidiennement le fruit de son labeur intestinal.

Si à l’arbre voisin un autre enfant s’accroupissait

et se soulageait

naissait entre eux

l’honnête complicité dans l’élimination

qu’ont les bêtes bien portantes.

Cette fois-ci, cependant,

une vision le tient en suspens, le fige

dans sa stupeur

sous son arbre :

au milieu d’une précédente évacuation

poussait

une petite plante frémissante et nouvelle.

L’enfant s’est ému en imaginant le voyage

de la petite graine

parcourant tout son corps, sa traversée sans encombre,

indemne,

toute à la défense

en son centre intime et délicat

de l’embryon vivant.

Et dans la mémoire de l’enfant,

avec un plaisir rétif,

a commencé à s’élever pour toujours

la plante minuscule, ton principe, ta petite bannière verte,

...
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La cure

La coquille lisse de l’œuf

tenue dans le creux de la main maternelle

passée sur le corps de son fils, là-haut, dans le nord.

J’ai vu ceci :

une femme plus élémentaire que toi

effarouchant la mort par des rites privés, chantant

un œuf dans la main, prêtresse

plus modeste jamais je n’en ai vu.

Je la regardais égrener au creux de ses genoux

le maïs du déjeuner

tandis que le chien de rue s’évanouissait côté ombre

et léchait

la douleur jetée à terre

avec l’œuf miraculeux.

C’était ainsi. La vie passait sans simagrées

au milieu de gens parcimonieux, père et mère

me demandaient si je me sentais soulagé. Le seul courage

était celui de vivre.

Les nuages passaient par la claire-voie

et les poules alignaient dans leur ventre les ovules bénis

et ma mère attendait de nouveau l’œuf le plus frais

avec une conviction :

...
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Colin-maillard (Goya)

Tu bouges le pied sur le gond de ta cheville

un peu comme les timides dirigent la musique, et ensuite

sollicité

tu entres dans le jeu de colin-maillard sans grand entrain,

puis, mi-erratique, mi-maladroit,

tu écoutes les cris des petits groupes, tu imagines

la cadence lourde des petites fesses en poire.

Toutes ces voix profèrent nettement, mais parmi elles il te faut en choisir une

qui te relaie.

Cette demeure n’est pas la placette démagogique et poussiéreuse

où tu échangeais prestement ton rôle

pour celui d’un autre gamin modeste

et manquant.

Ces voix que tu entends sont tes nouvelles voix. Elles auraient pu

susciter ta rancœur prévisible, mais non.

L’agnostique qui te confie son désir de croire en Dieu,

la démariée qui semble vulnérable comme biche loin du sous-bois,

l’orthodoxe et celui qui repasse les choses au crible, tous

sont honnêtes

chacun à sa manière.

Elles ne suscitent pas ta rancœur, ni non plus ton

...
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Sur la route du nord

Ces minuscules oratoires

au bord des routes, jamais plus hauts

que quiconque priant à genoux, commémorent un corps

qui fut là démantibulé et tué.

À l’intérieur, dans sa nef infime, s’accommode

la mémoire de ce corps

comme un chien aérien blessé.

Où allais-tu, le corps,

quels parents quels travaux s’abolirent avec toi. Ici s’affrontèrent

avec fracas

ton passé et ton avenir

et tu fus réduit à un battement aveugle du monde, sans mémoire,

absurde, égal à zéro.



Et nous, les 60 corps vivants qui voyageons dans cet autocar véloce

nous nous fêtons

joyeusement comme des insensés, nous nous embrassons

parce que la bouche est un bienfait

et nous chantons d’aimables chansons de voyage

qui ne parlent de la finalité ni de celui-ci ni d’aucun autre voyage.



Je crois que nous voyageons librement. Et vous, paradoxaux

démantibulés, vous êtes

un meilleur rappel

à notre bref supplément d’avenir

que ces ponctuelles bornes kilométriques.
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