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EAN : 9782330076832
176 pages
Actes Sud (05/04/2017)
3.05/5   52 notes
Résumé :
Le Déméter entre dans le port de Whitby en pleine tempête. À bord du navire sans équipage, le capitaine gît, sans vie, attaché au gouvernail tandis que, dans la cale, dorment de mystérieuses caisses pleines de terre. C’est ainsi que Dracula, dans le roman de Bram Stoker, arrive à Londres.
À partir des quelques lignes retrouvées dans la poche du capitaine, José Luis Zárate reconstruit la tragédie de la traversée.
La brûlure du soleil, la morsure du sel,... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (18) Voir plus Ajouter une critique
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Dans beaucoup de roman, des personnages secondaires sont là pour jouer leur petit rôle puis disparaissent aussi rapidement qu'ils sont venus. C'est dans l'ordre des choses, aussi attachants ou intéressants qu'ils puissent être. Mais parfois, cinquante ou même cent ans après leur bref passage dans la littérature, un nouvel écrivain les ressort et invente les aventures qu'ils auraient dû vivre. Par exemple, Kamel Daoud l'a fait avec l'Arabe de L'étranger. Mais, dans le cas qui nous concerne, l'auteur mexicain José Luis Zarata a imaginé le voyage du capitaine du Déméter, ce bateau malheureux qui a transporté le comte Dracula de sa Transylvanie natale en Angleterre. Je ne dévoile pas l'intrigue, la quatrième de couverture fait mention du célèbre vampire. Et les premiers mots de l'histoire sont « À bord du Déméter, de Varna à Whitby ». Avec ces trois noms propres mis bout à bout dans la même phrase, pas moyen de se tromper… Et c'est peut-être une bonne chose de le savoir dès le début. Au lieu de se questionner ce qui se passe (ça peut paraître confus et le lecteur peut se demander où l'auteur veut l'amener), on guette les manifestations surnaturelles, craignant la suivante, se laissant entrainer par l'atmosphère claustrophobique. Dans tous les cas, ça a fonctionné avec moi, j'ai bien apprécié cette lecture.

Dans l'oeuvre originale de Bram Stoker, l'arrivée du Déméter est entourée de mystère. le peu qu'on en sait, on l'apprend à travers les coupures des quotidiens et le journal de bord du capitaine. Ce qu'on en retient, c'est que le voyage fut un enfer, que les membres de l'équipage ont sombré dans la folie et sont disparus un à un. Ce fut suffisant pour José Luis Zarata pour écrire La glace et le sel.

Le roman est divisé en trois parties. La première raconte l'embarquement des caisses qui contiennent la terre de Transylvanie, et incemment Dracula, puis leur déplacement jusque dans la mer d'Égée. Mais aucune mention n'est fait du célèbre vampire. L'auteur s'attache à décrire le capitaine du Déméter, son travail, ses penchants homosexuels qu'il ne peut satisfaire auprès de son équipage composé de Russes ou de Roumains aux noms étranges, sa relation trouble avec un certain Mikhail, mort dans des circonstances tragiques depuis un certain temps. Toutefois, l'auteur attache autant d'importance, sinon plus, à créer une atmosphère glauque. Les marins vivent dans un monde rude, rempli de légendes folkloriques (il faut dire que le début du 19e siècle s'y prête plus que notre époque moderne) comme celles des vrykolakas, des morts noyés qui viennent hanter les vivants…

Mais le danger n'émane pas seulement des peurs surnaturelles, il peut venir de tous les côtés. Il y a d'abord ces tziganes qui ont apporté les caisses de terre, ces hommes sans foi ni loi sont prêts à tout. Et que dire de ces Turcs à qui on ne peut faire confiance ? Finalement, il y a le brouillard puis la mer, cette terrible maitresse qui peut se transformer en tombeau pour les marins. Ainsi, le sentiment de tension est bien présent.

Dans la deuxième partie, une menace plus précise commence à se faire sentir. Les rats sur le bateau ont un comportement bizarre, les nuits une ombre est aperçue sur le pont, l'équipage est fatigué. Et qu'est-ce que cette marque sur le coup de Petrovsky ? Quand les marins commencent à disparaître dans des circonstances étranges, la terreur s'empare petit à petit du reste de l'équipage. Et du lecteur par la même occasion. La troisième partie du roman nous entraine dans leur folie, particulièrement celle du capitaine.

La glace et le sel est un roman assez court, 168 pages. Même les paragraphes sont courts, plusieurs ne comptant que deux ou trois phrases. Parfois même une seule. Comme si l'auteur nous sussurait son histoire en brèves saccades. Ça ajoute au malaise et à l'exarcerbation des sentiments. D'autant plus que l'histoire est racontée à la première personne, du point de vue du capitaine, cet être torturé (avant même le chargement du vampire), frustré dans ses penchants homosexuels, dont les rêves érotiques sont surement manipulés par Dracula. le roman tout entier semble empreint d'une certaine sensualité qui, avec les éléments fantastiques et gothiques, en font une oeuvre vraiment originale.
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"Tous furent saisis de stupeur quand ils se rendirent compte que la
goélette, comme par miracle, n'était entrée au port que guidée par la
seule main d'un mort."
(Bram Stoker, "Dracula")

Si vous avez apprécié le livre de Stoker, vous vous souvenez surement de cette phrase.
"Déméter", un bateau fantôme au nom païen, arrivant en pleine tempête au port de Whitby. Aussi surement que comme s'il était guidé par la main d'un capitaine expérimenté... ramenant dans sa cale une chose pire encore que la Mort elle-même.

La nouvelle de Zarate raconte le voyage de "Déméter" à sa façon. C'est un récit inquiétant, oppressant, d'un poétisme glacial. Tout en images - la brume qui transforme les choses, la glace qui brûle, le sel qui ronge. Le sang.
Le capitaine livre le stricte nécessaire à son journal de bord (qui reprend, presque mot par mot le livre de Stoker), mais au lecteur il fait des confidences dérangeantes. Son combat éternel avec la mer. La culpabilité de son passé. Son attirance pour les marins de son équipage, qui hante ses rêves.
Ses rêves....

Il y a quelque chose encore plus funeste à bord de ce bateau, quelque chose qui repose au fond de la cale dans une des caisses remplies de terreau.
Quelque chose qui se mélange à ses rêves...
Quelque chose qui fait fuir les rats.
Va t-il réussir à sauver ses hommes, qui commencent à disparaître l'un après l'autre ?
Va t-il réussir à sauver au moins son Âme ?

C'est une belle nouvelle compacte comme un poème; et je pense qu'il faut le lire un peu comme ça - se laisser porter par cette atmosphère dans les tonalités vert-de-gris...
Quand je me rappelle le voyage de "Déméter" dans les films que j'aime, dans chacun il y a une petite parcelle de "La glace et le sel"; mais le seul qui procure la même sensation de "présage inquiétant" est celui de Werner Herzog.

Tous ces bateaux fantômes qui voguent sur l'océan; toutes ces histoires qu'ils inspirent...elles sont rarement drôles. Saura t-on jamais ce qui s'est passé ? Parce que, parfois...
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La glace et le sel est un court roman mais très intense !

Des personnages psychologiquement torturés, un navire ou le bois grince, une sensation de brouillard permanent, l'auteur nous livre le voyage en mer de Dracula jusqu'en Angleterre, mais surtout le voyage de l'équipage qui lui ne comprend pas ce qui lui arrive.

Le récit se décompose en deux parties, premièrement la suggestion, le flou, l'envie, le desir sexuel, la virilité du marin à la limite du cliché mais il y a beaucoup de noirceur dans le récit qui finalement nous embarque assez vite vers la seconde partie du récit qui s'avère explosive de sensations fortes.

Hallucinations, disparitions, scènes crues, compréhension en demi-mesure des événements du point de vue des marins et de leur capitaine, cette sensation de brouillard glaçant qui nous enveloppe dans une sorte de malaise permanent jusqu'au final digne d'une ballade en chambre froide qui a elle seule vaut le récit.

Ne vous attendez pas à tout comprendre, l'auteur nous ballade dans une beauté malsaine et brouille délibérément les carte en donnant des informations au compte goutte au début puis par suggestions et métaphores, mais l'écriture est tout de même très maîtrisé et ressemblerait presque à une écriture classique.
(Attention ce récit est à réserver à un public averti de part ses scènes de sexe explicites.)

Voir la chronique sur mon blog :

Lien : https://unbouquinsinonrien.b..
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J'ai pris ce livre en étant attirée par le titre prometteur. En plus, il est etiqueté Coup de coeur. Je ne suis pas parvenue à comprendre ce capitaine de navire retenant ses pulsions envers son équipage. Ses rêves sont étranges, son carnet aussi... J'ai beaucoup aimé les belles phrases poétiques de José Luis Zaraté mais je ne suis pas arrivée à rentrer dans cette histoire qui racontait l'origine de Dracula. Peut-être fallait-il avoir lui ce même Dracula de Bram Stoker pour saisir les nuances évoquées ?
Passée totalement à côté...
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Très étonné par la note : Je l'ai lu en espagnol, alors c'est probablement que la traduction ne passe pas bien.
Cette route est celle du "dernier voyage du Demeter" dont un film d'horreur réussi, nous a parlé récemment. C'est de l'horreur gothique à son meilleur. Pleine de fiel cauchemardesque dans une lente descente vers une réalité floue.
La route de la glace et du sel est présentée sous forme d'extraits du journal de bord d'un capitaine de navire du 19e siècle qu'il entreprend avec sept membres d'équipage, transportant une cargaison du port Varna (en Bulgarie) à Whitby (en Angleterre). Cependant, durant le voyage une présence malveillante se manifeste à plusieurs reprises et décime l'équipage.
L'épisode est tiré du "Dracula" de "Bram Stoker" (1897), mais Zárate l'élargit en se concentrant sur la figure du capitaine et sa propre perspective : D'abord, le vampire n'est jamais identifié comme tel, puisque ni le capitaine ni son équipage ne connaissent l'identité ou la nature de l'entité diabolique qui peu à peu décime leur nombre. de plus, l'histoire est enrichie en expliquant les différentes manières dont les créatures de la nuit sont considérées dans la tradition folklorique de plusieurs pays dont les côtes parcourent le navire, qui ont été utilisées par Stoker lui-même comme source d'inspiration lors de la création du vampire mythique de son propre roman. le principe est assez simple, mais son efficacité réside précisément dans cette simplicité.

Mais en fin de compte ce qui ressort le plus de cette oeuvre c'est la création du capitaine comme un personnage profondément individualisé, homosexuel, qui se défends de montrer le désir que provoque en lui les marins de son équipage car il a peur de reproduire un drame précédent et pense devoir cacher ses préférences sexuelles pour maintenir la discipline alors que son navire se précipite dans l'horreur.
Le capitaine a géré des dizaines d'équipages. Il rêve de rêves familiers : goûter le sel sur la peau de ses hommes, passer ses mains sur leur poitrine. Il aspire à la chaleur d'un amant qu'il ne peut pas avoir, fantasme de chair et d'étreintes frénétiques. Tout cela, il l'a fait auparavant, c'est une routine, une constante, comme les marées.
Le journal de notre capitaine parle de faim, de soif de sang (mais c'est celle qui enfle la verge que gagne l'excitation), de luxure et du désir de goûter la chair salée de ses coéquipiers. C'est une lecture assez érotique. Mais le ton du journal change à mesure que le voyage malheureux se poursuit et que la frontière entre réalité et rêve s'estompe.
Le désir est "queer" avec cette soif du capitaine pour le sel sur la peau de l'équipage qui disparaît peu à peu au fur et à mesure qu'elle est remplacé dans le récit par la soif de sang du vampire. Pour l'auteur les deux soifs ne sont pas du tout de même nature, celle du capitaine même si son frame passé l'oblige à la retenir, elle est belle, celle du vampire non. D'ailleurs se dernier va essayer de déstabiliser la capitaine en lui rappelant ce drame qu'il a vécu et en voulant le faire culpabiliser. Mais aussi perturbé que soit le capitaine à ce moment là, il saura répondre. En cela le vampire fait utilise l'homophobie pour tenter de "séduire" le capitaine...
Zárate fait un excellent travail en créant un personnage complexe et bien développé et en faisant de lui le narrateur de son histoire, en lui permettant d'être abordé du point de vue de quelqu'un dont la terreur grandit à chaque instant parce qu'il ne comprend pas ce qui se passe autour lui.
Les thèmes de la pourriture et de la décomposition du navire sont parallèles à la mort littérale des coéquipiers (et des rats).
C'est un livre à expérimenter, pas à "dévorer". le rythme est lent et peut s'avérer être un défi pour certains lecteurs non habitués à l'horreur gothique, mais il propose avec poésie une lecture incroyable en créant la tension et en brouillant la ligne de réalité.
Il s'agit d'une oeuvre littéraire ambitieuse qui peut être approfondie si le lecteur le souhaite.
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
Alors, soudain, je peux voir le vent.
Se rassembler, se condenser ; d'abord invisible, puis semblable à l'air frémissant de la mi-journée, comme de l'eau vive ensuite, des eaux profondes de mer gelée, et de la glace translucide, et de la brume, et du brouillard, de la neige noire et finalement, de la nuit sans lumière.
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La "Déméter" ralentit, presque jusqu'à l'arrêt. Rien d'autre que la mer alentour, et pas d'autres hommes que nous.

On voit le néant qui nous isole.

Quelque chose vient de s'achever. Le calme permet d'en profiter, de le ressentir par chaque pore de la peau.

Alors, je regarde l'aube et je comprends.

La lumière ne peut pas nous protéger de tout.
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Parfois, je me dis qu'il vaut mieux avoir peur de quelque chose de concret, qu'un pan de nuit fondant sur nous serait préférable au néant qui ronge nos nerfs.
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Et nous voici qui, malgré l'expérience de nos nombreux voyages en mer, nous en remettons à la tempête pour apaiser nos angoisses.
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La nuit, nous ne rêvons pas à des sirènes au sexe incertain mais à la caresse éternelle, infatigable, de la matière cachée dans le liquide.
Quand le soleil de midi sèche les voiles mouillées par la brise ou la tempête, une poudre blanche les recouvre, qu'on retrouve dans nos cheveux, entre nos doigts, qui s'immisce avec le brouillard salé de la mer nocturne.
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