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Citations de Abdulrazak Gurnah (143)


Chez nous, si le coupable exprime des remords, nous hésitons à le punir, surtout si le châtiment prévu est rigoureux; ses compagnons viennent plaider pour lui, ses amis sont compatissants. Mais c'est tout le contraire avec les Allemands : plus la punition est sévère, plus ils sont implacables. Une fois qu'ils ont décidé de vous punir, et je crois qu'ils y prennent plaisir, vous pouvez les supplier jusqu'à ce que votre bouche se dessèche, ils vous écoutent, le visage impassible, il faut se soumettre et subir le châtiment. Ils sont comme ça, les Allemands rien ne les fait changer d'avis. P142
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Puis le président déchanta à propos des Américains. En raison notamment du concert grandissant de reproches qu’on entendait alors dans toute l’Afrique à leur encontre. Ils avaient trop ouvertement montré leur rôle dans l’assassinat de Patrice Lumumba au Congo – des vantard de la CIA n’ayant pu s’empêcher de diffuser des informations qui auraient dû rester anonymes. Dans leur pays, on tuait des Noirs pour avoir simplement réclamé le droit de vote et l’égalité des citoyens. Ces aspirations nous étaient chères à tous à l’époque et rejoignaient notre révolte contre l’arrogance et l’oppression qui s’exerçaient sur les peuples non-européens partout dans le monde. Des photographies de la police américaine lâchant les chiens sur des manifestants noirs ont paru dans la presse en miroir d’images montrant la redoutable police de l’apartheid agissant de la même façon. Les Américains et la CIA semblaient vouloir interférer en tout, manipuler et contrôler chaque évènement, petit ou grand, qui attirait leur attention.
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Brisejambe était le rebouteux. Il devait son surnom à la fâcheuse réputation qu'il avait acquise dans la réduction des fractures. Il lui fallait souvent rebriser l'os qu'il avait mal ajusté, afin que celui-ci se ressoude droit. Dans certains cas, il avait dû s'y prendre à plusieurs fois. Tomber entre les mains de Brisejambe pouvait ainsi tourner au cauchemar. Anxieux de devoir faire appel à ses services, les parents tremblaient quand leurs enfants chutaient. Car personne d'autre que lui ne savait réparer les fractures.
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Elle m'a offert la liberté, comme si c'était un cadeau. Ils peuvent t'enfermer, t'enchaîner, se moquer de tes modestes aspirations, mais la liberté n'est pas quelque chose qu'ils peuvent t'enlever. Le travail qu'on m'a donné à faire, c'est le jardin. Qu'est-ce que cette femme peut m'offrir qui me rende plus libre ?
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Ni lui ni ses amis ni qui que ce soit qu’il connaissait n’avaient la moindre idée de qui étaient ces gens qui habitaient ces immenses demeures, sauf qu’ils étaient les maîtres du pays et s’arrangeaient en toutes circonstances pour ne pas se mêler au reste de la population. Il y avait évidemment des personnes qui savaient qui ils étaient et ce qu’ils faisaient : leurs domestiques, ou le personnel des bureaux d’où ils dirigeaient tout... p186
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Pour Rashid, cette maison sentait la décrépitude. Ses sens anticipaient déjà les nuages de poussière que soulèverait l’effondrement de ses étages. Elle sentait aussi les déchets de poisson, la fiente de volaille et l’haleine des hommes, comme à l’intérieur de quelque chose de vivant.... Elle restait debout, année après année, au bord de l’écroulement, têtue comme l’histoire. p137
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Mais j'étais quant à moi sur mon petit nuage, j'avançais comme débarrassé de mes chaînes, j'entrais dans une autre vie. C'était ce sentiment que ma vie antérieure était arrivée à son terme, que j'entamais une existence nouvelle et que la précédente avait pris fin à jamais.
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J'avais l'habitude des fonctionnaires qui vous dévisagent et vous invectivent au moindre accroc, qui s'amusent de vous et vous humilient pour le seul plaisir d'exercer leur autorité sacrée. Aussi j'attendais du hamal de l'immigration derrière son guichet qu'il exprime quelque chose, qu'il prenne un ton hargneux ou qu'il secoue la tête, qu'il lève lentement les yeux sur moi et me fixe avec la superbe du nanti face au suppliant. Mais, ayant parcouru mes faux papiers, il m'a regardé avec une joie contenue, comme un pêcheur qui a senti la touche. Pas de visa d'entrée.
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(...) j’en vins à me considérer avec un sentiment croissant de déplaisir et d’insatisfaction, et à me voir avec leurs yeux. À me regarder comme quelqu’un qui mérite l’antipathie qu’on lui porte. J’ai d’abord cru que c’était à cause de ma façon de parler, parce que j’étais médiocre et maladroit, ignorant et muet (...). Puis j’ai pensé que c’était à cause des vêtements que je portais, des vêtements bon marché, sans allure, pas aussi propres non plus qu’ils auraient pu l’être, et qui peut-être me donnaient l’air d’un clown ou d’un déséquilibré. Mais les explications que j’essayais de trouver ne m’empêchaient pas d’entendre les paroles offensantes, le ton irrité dans les rencontres au quotidien, l’hostilité contenue dans les regards fortuits.
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Je ne sais peut-être pas qui est Dieu, je ne me souviens pas de ses milliers de noms et de ses millions de promesses, mais je sais qu’il ne peut pas être ce tyran que vous adorez.
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The radio has broken down and we can get no news. The water has been cut off for most of the day because something has broken down in the pumping station. We no longer know how to make anything work. We don't know how to make anything for ourselves, not anything we use or desire, not even a bar of soap or a packet of razor blades. How did we allow ourselves to get into this state ?
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Les hôtes de Hamid parlaient des Européens avec stupéfaction, ils étaient impressionnés par leur férocité et leur brutalité. Ces étrangers prenaient les meilleures terres, disaient-ils, sans payer un sou, ils s’arrangeaient pour forcer les gens à travailler pour eux au moyen d’artifices, ils mangeaient n’importe quoi, même de la nourriture avariée. Leur appétit était démesuré, comme celui d’un essaim de sauterelles. Taxes pour ceci, taxes pour cela, et pour les récalcitrants la prison, le fouet, ou même la pendaison. La première chose qu’ils construisaient, c’était un hangar fermant à clé, ensuite c’était une église, puis un marché couvert pour avoir l’œil sur tout le commerce et prélever leur part de bénéfice. Et tout cela avant même de se construire une maison. Avait-on jamais vu chose pareille ?
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« C’est la faute à l’esclavage, voyez-vous. À l’esclavage et aux maladies qui les minent, mais à l’esclavage surtout. Esclaves, ils ont appris l’oisiveté et la dérobade. Ils ne peuvent plus concevoir de s’impliquer dans le travail, d’assumer des responsabilités, même contre paiement. Ce qui passe pour du travail dans cette ville, ce sont les hommes assis sous un manguier à attendre que les fruits murissent. Regardez ce que la compagnie a fait de ces terres. Les résultats sont impressionnants. Des cultures nouvelles, l’irrigation, l’assolement, mais il a fallu pour y parvenir radicalement changer les mentalités. »
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Ils ne l'auraient pas lâché de toute façon avant qu'il n'ait promis, invoquant à la fois leur propre douleur et leur crainte de le voir couvert d'opprobre, et Amin avec sa gentillesse et son sens du devoir n'était pas armé pour résister à leur amour. Peut-être même que ce fut plus simple encore, et qu'il a su ce qu'il avait à faire dès l'instant où ils en ont appelé â la confiance qu'ils avaient placé en lui. Il avait toujours été celui sur qui l'on pouvait compter. C'était l'image qu'il avait de lui-même, c'était ainsi qu'il avait gagné l'amour et le respect de ses parents et au-delà; il lui était, j'imagine, impossible d'envoyer promener tout cela.
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Mumbo jumbo, dirait-on chez nous. Savez-vous que ces deux mots désignaient de petits bouts de tissus accrochés aux branches des arbres ?
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Amina demeura muette, mais elle était si immobile qu'il comprit que son silence était délibéré. Il fit mine de s'éloigner dans le jardin pour voir si elle le rappellerait.
" Quelquefois, je reste ici à te regarder ", dit-elle.
Il se retourna et se rapprocha lentement d'Amina.
" Ce travail a l'air de tant te plaire que je t'envie, fit-elle d'un ton léger. Quand le Maître n'est pas là, je vais quelquefois me promener le soir dans le jardin. Un jour, tu as trouvé une amulette...
- Oui ", dit Yusuf, en la tâtant à travers sa chemise. Il la portait autour du cou, enfilée à une ficelle. " J'ai découvert que, rien qu'en la frottant, je peux appeler un bon djinn pour qu'il exécute tout ce que je lui ordonne... "
Amina rit doucement, puis soupira. " Qu'est-ce qu'il t'a donné, ton bon djinn ? demanda-t-elle.
- Je ne lui ai encore rien demandé, il faut que je réfléchisse d'abord. Ça ne vaut pas la peine de le déranger pour rien, il pourrait être vexé et ne plus revenir...
- Quand je suis arrivée ici, j'avais une amulette, mais un jour je l'ai jetée par-dessus le mur; dans le jardin, dit la jeune femme.
- C'est peut-être la même.
- Non, elle n'était pas accompagnée d'un bon djinn...
- Pourquoi tu l'as jetée ? demanda Yusuf.
On m'avait dit qu'elle me protègerait du malheur et ce n'était pas vrai. J'espère que la tienne te protégera mieux.
- Rien ne peut nous protéger du malheur ", dit Yusuf en s'approchant lentement d'Amina, mais celle-ci referma aussitôt la porte.
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J'ai alors compris que pour le vieux gardien, l'île était peuplée d'une vie enchantée, d'officiers de la marine britannique, de médecins anglais et de patients convalescents, de serpents et de femmes emprisonnées qui chantaient dans la nuit, des méchants djinns noirs qui parcouraient sans fin les mers en quête de repos.
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Youssouf avait l'impression de s'éveiller de mauvais rêve. disait à son compagnon que pendant l'expédition, il s'était senti comme un petit animal sans coquille, sans défense, misérable et grotesque, avançant péniblement dans la pierraille et les épines. La terreur qu'il éprouvait ce n'était pas de la peur, c'était comme s'il n'avait plus d'existence réelle, comme s'il vivait dans un rêve, à la limite de l'anéantissement. Il avait vu des choses qu'il n'aurait jamais pu imaginer.
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Je pense à Zanzibar tous les jours, plusieurs fois par jour. Les lieux ne vivent pas seulement là où ils sont, ils vivent en vous. Alors je pense à tout ça, la vie c'est ce que tu en fait. Certaines sont bonnes. Certaines sont mauvaises. Mais tu as fait un choix et c'est ce qu'est la vie
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C'est peut-être cela vieillir, quand le soleil et la pluie ont effacé les uns après les autres les contours et changé les images en une ombre pelucheuse. Même si tout ce flou et ce vague laissent encore des traces, fragments, toujours plus rares de ce qui constituait le tout : le regard chaleureux d'un visage oublié, un parfum, une musique dont la mélodie échappe, une chambre, alors que le souvenir de la maison ou son emplacement nous fuit, une prairie le long d'une route au milieu du néant.
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