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Citations de Agustin Gomez-Arcos (89)


Quand il gagna son lit, cette nuit-là, l'enfant sentit que les temps changeaient. Il s'endormit et l'ange du sourire vint entrouvrir ses lèvres. Toute la famille défila dans la chambre pour assister au miracle. Tous pensérent que la laideur du monde, si coriace soit-elle, s'éteint lorsqu'au hasard des rêves s'allume le sourire d'un enfant qui dort.
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Elle se retourna lentement et ferma les fenêtres du jardin. Comme tant de veuves rouges de la nouvelle paix spoliées du droit sacré à la douleur publique, elle resta dans l'ombre.
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Dans une poche pratiquée dans la housse de sa guitare, l'infirme transporte un livre. Compagnon de guerre, de route de vie. Un livre de poèmes qu'il ne peut plus lire. Il le sait par coeur. Ce sont les mots de ce livre qu'il apprend à Ana non. Il l'ouvre à une page que ses doigts reconnaissent avec précision, l'élève comme une hostie du verbe à la hauteur de ses yeux aveugles, chaque geste au ralenti comme s'il s'agissait d'un rite, et lit, pour qu'Anna Paücha apprenne :

Sur le vieil orme
Fendu par la foudre, pourri à moitié
Par les pluies d'avril et le soleil de mai,
Des feuilles nouvelles ont poussé.

"Ecris maintenant, petite. Ecris Sur, S, u, r."
Avec son bâton pointu, il dessine sur la terre la brève silhouette des lettres. Ana suit. Il dessine encore un mot. Puis un autre. Tout le poème. Ana suit.

Sur l'antique terre calcinée du plateau de la Manche, où Don Quichotte et Sancho définirent à jamais l'angoisse du pays, Ana Paücha dessine lettre à lettre, mot à mot, le portrait de sa mort. De sa naissance.
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Voyageur, il n’y a pas de chemin.
On fait du chemin quand on marche.
S’il avait pris ces vers, mon père, comme guide de vie, il avait dû beaucoup souffrir, le jour où il avait arrêté pour toujours sa marche dans l’enclos sinistre de ce bureau.
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Don Ramiro Portal .... grand et mince , la cinquantaine aisément dépassée ....et l'élégance suspecte d'un ancien play-boy , ami de longue date de Monsieur le chef de la police locale qu'il ne voyait dernièrement que dans son cabinet de diététicien , en tant que patient .......
A partir du moment où les premiers symptômes des troubles de son ami Monsieur le chef ......., il a su qu'il s'agissait d'une maladie mortelle : LA PEUR . maladie qui ne pardonne pas .
La mort , la voici , couchée sur des honneurs , définitive . L'avant veille encore ce mort était vivant .....Mais nul médecin n'est en mesure de diagnostiquer à l'avance une paire de trous de fusil .
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La nouvelle paix s'annonçait conflictuelle, elle traînait sa cohorte de misères parmi lesquelles se dessinaient déjà délation, prison et famine. En bonnes amies elles accompagnaient la mort, ces trois coquines, elles sont et restent les demoiselles d'honneur du mariage des vaincus avec les tribunaux d'exception, avec les pelotons d'exécution.
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Pleurer, ça sert à quoi ? A vider son chagrin. Ou à se consoler.
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Agustin Gomez-Arcos
Un après-midi après un orage soudain qui a amolli le sol, Ana Paucha trace pour la première fois de sa vie, très profondément dans la terre, le mot 'amour'. Un mot d'où jaillit un ruisselet miraculeux d'eau de pluie. Amour liquide où le soleil reparu se mire.
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Ana Paücha sent un crachat lui monter à la bouche. Mais la haine, la vraie, ne se crache pas. Elle se ravale. C'est une nourriture.
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Le rire a lui aussi son côté mauvaise langue.
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Je n'ai pas eu de robe blanche, ni couronne d'oranger en cire, ni bouquet enrubanné, ni anneau d'or. ,on n'a que peu d'argent pour vivre au plus juste, on ne le dépense pas en symboles. On s'en passe. Nous avons payé l'église et le curé, la messe et la lecture de l'épître, les bans. Assez cher. Là, il ne s'agit pas de symboles, mais de trafic. Je n'ai pas eu de faire-part de mariage, de banquet de noce, de félicitations d'amis après la cérémonie. Mais j'avais Pedro Paücha. C'était lui ma robe blanche, ma couronne de fleurs d'oranger, mon bouquet enrubanné, mon anneau d'or, mon banquet. Il a remplacé avantageusement les faire-part de mariage écrits en lettres d'or qui auraient annoncé à tous qu'Ana, la petite Ana anonyme, épousait son homme.
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Quand la première pièce de monnaie, glacée comme une goutte d'eau bénite, lui tombe dans la main, sa peau se révulse à ce contact froid comme une gifle sur la joue d'un enfant qui dort à poings fermés. Comme un viol, tellement ce rond de métal lui mord la chair. Elle ne regarde pas les yeux de la personne charitable. Elle ferme le poing, le serre très fort jusqu'à ce que le feu de la honte gagne ses entrailles, la purifie. Qu'elle le sache une bonne fois pour toutes. Elle est pauvre. Honteusement pauvre. Une mendiante. Ana non.
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l'aumônier (...) fait placer sous l'énorme dais rouge et or une rangée complète de hauts fauteuils castillans (...). Les dames riches y prennent place pour contempler la pauvreté. (...) ces notables en jupon observent fixement les rangs serrés des mendiants, essayant de déceler sous tant de haillons et de saleté le plus petit signe de richesse : une pièce de monnaie cachée dans la chaussette, ou des bons du trésor étanches contre les rigueurs des intempéries. Sait-on jamais avec les miséreux ?
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Il y a deux misères, celle des haillons et celle de la grandeur.
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D'un bond arthritique, les doigts emmêlés comme des racines mortes autour de la poignée-bijou, Sa Révérence abandonne Sa Majesté sur son fauteuil et se dépêche, boiteuse, vers la salle de bains. Une traînée d'urine la suit. Sa Révérence fait demi-tour avant d'atteindre la porte :
-Inutile. Je n'ai jamais le temps de m'asseoir sur la cuvette. Tu ne peux pas imaginer les millions que cette maudite fuite m'a coûtés. En tapis persans, je veux dire. En être réduite à pisser debout comme n'importe quelle clocharde ! Regarde-moi bien, Maria Republica ! Quand tu deviendras supérieure de ce couvent, souviens-toi de moi à cette minute. Car celui-là sera ton châtiment. Je te ferai supérieure de ce couvent et tu continueras mon oeuvre. Je ferai en sorte de mettre ta révolte au service de tout ce que tu hais.
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Se mettre à genoux est la pire des morts. Peu importe : à la vie comme à la guerre. Il ne compte pas ces pièces. Ne les regarde pas. Ne les touche pas. Madame Ramona le lui a conseillé : "Ne pas faire sentir aux gens l'urgence de la misère. Ni son avidité. Un pauvre n'a pas de droits. Pas même celui de calculer ce que vaut l'aumône."
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Il y a deux misères, celle des haillons et celle de la grandeur.
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Depuis qu’il est à la merci de la charité des autres, il sent qu’il n’a plus les mêmes droits qu’eux. Ses droits ont rapetissé. Exemple : pour se laver les mains, se rafraîchir le visage, et pourquoi pas pour boire ? Il se tient à côté, pudiquement, et attend que les passants aient fini de se désaltérer. Pareil pour les trottoirs. Surtout s’ils sont étroits. Il s’assoit sur les bords, cède le passage, même aux chiens.
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De nos jours, la charité dépend des femmes d’un certain âge, d’une certaine aisance. Malheureusement, leurs beaux sacs ne recèlent que de la petite monnaie. Si petite qu’elles mettent un bout de temps à la trouver. Ça s’égare facilement, les piécettes ; ça disparaît sous les mouchoirs brodés, poudriers, trousseaux de clés, boîtes à pilules, chapelets.
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Nu sur les marches de l'escalier, j'ai vu les regards qu'ils échangeaient tous et qui se croisaient dans le hall comme des lignes tracées sur un graphique de température.
Mon frère Antonio a dit:
"Le petit, c'est moi qui m'en occupe depuis toujours. Ce n'est pas maintenant que les choses vont changer."
Plus de doute à présent. Dans la famille, on avait un penchant jamais négligé aux situations mélodramatiques. Personne ne s'en privait. Et l'âge de mon frère y ajoutait son insolence.
Antonio a dit à l'adresse de Maman:
"Il faudra peut-être faire un pansement à monsieur le spécialiste en cas perdus. Je vois que tu es prête. "
Après quoi, j'ai fini de monter l'escalier comme une vedette suivie par les projecteurs. Je ne voulais pas me priver, moi non plus, de ma sortie.
Derrière moi, je sentais que l'atmosphère était chargée d'électricité, mais il n'y a pas eu d'étincelles. Les conditions qui devaient provoquer le grand cataclysme ( s'il se produisait un jour) n'étaient pas encore réunies.
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