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Citations de Alessandro Baricco (1425)


Le feu était vert, et la femme traversa la rue. Elle marchait en regardant le sol, parce qu'il venait de cesser de pleuvoir et dans les creux de l'asphalte des flaques étaient restées, en souvenir de cette pluie soudaine de début de printemps. Elle marchait d'un pas élégant, mesuré par la jupe serrée d'un tailleur noir. Elle voyait les flaques d'eau et les évitait.
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C’est la musique qui est difficile, voilà la vérité, c’est la musique qui est difficile à trouver, pour se dire les choses, quand on est si proches l’un de l’autre, la musique et les gestes, pour dissoudre le chagrin, quand il n’y a vraiment plus rien à faire, la juste musique, pour que ce soit une danse, un peu, et non pas un arrachement, de partir, de se laisser glisser loin de l’autre, vers la vie et loin de la vie, étrange pendule de l’âme, salvateur et assassin, si on savait danser cette chose-là, elle ferait moins mal, et c’est pourquoi les amants, tous, cherchent cette musique, à ce moment-là, à l’intérieur des mots, sur la poussière des gestes…
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On croyait qu'elle allait grandir et que ça lui passerait. Et en attendant, on déroulait des tapis dans tout le palais parce que ses propres pas, bien sûr, l'effrayaient, des tapis blancs, partout, une couleur qui ne fasse pas de mal, des pas sans bruit et des couleurs aveugles.
Dans le parc, les sentiers étaient circulaires, à la seule et audacieuse exception de deux ou trois allées qui serpentaient en dessinant des boucles douces et régulières - psaumes - et c'est plus raisonnable, il suffit en effet d'un peu de sensibilité pour comprendre que tout angle mort est un guet-apens possible, et deux routes qui se croisent une violence géométrique et parfaite, capable d'effrayer quiconque serait sérieusement doté d'une vraie sensibilité, et à plus forte raison elle, qui à proprement parler 𝘯𝘦 𝘱𝘰𝘴𝘴é𝘥𝘢𝘪𝘵 𝘱𝘢𝘴 un tempérament sensible mais é𝘵𝘢𝘪𝘵 𝘱𝘰𝘴𝘴é𝘥é𝘦, pour employer un terme exact, par une sensibilité d'âme incontrôlable, explosée à tout jamais en un quelconque moment de sa vie secrète - une vie de rien, elle était si jeune - puis remontée au cœur par des voies invisibles et dans les yeux et dans les mains et partout, comme une maladie, mais ça n'était pas une maladie, c'était quelque chose de moins, s'il y avait un nom pour ça il serait très léger, le temps de le dire et il a disparu.
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Il a attendu que j'aie fini, sans dire un seul mot. Et puis il m'a demandé:
"- c'était quoi?
- Je sais pas"
Ses yeux se sont mis à briller.
" Quand tu ne sais pas ce que c'est, alors c'est du jazz."
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Hervé Joncour n'avait jamais vu cette jeune fille, et en fait il ne la vit pas non plus cette nuit-là. Dans la chambre sans lumière, il sentit la beauté de son corps, et il connut ses mains et sa bouche. Il l'aima pendant des heures, avec des gestes qu'il n'avait jamais faits, se laissant enseigner une lenteur qu'il ne connaissait pas. Dans le noir, ce n'était rien de l'aimer, et de ne pas l'aimer, elle.
Un peu avant l'aube, la jeune fille se leva, remit son kimono blanc, et partit.
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Le ciel au-dessus du palais se noircit du vol de centaines d'oiseaux, comme explosés de la terre, des oiseaux de toutes sortes, étourdis, qui s'enfuyaient de tous côtés, affolés, et chantaient et criaient, pyrotechnie jaillissante d'ailes, nuée de couleurs et de bruits lancée dans la lumière, terrorisés, musique en fuite, là dans le ciel, à voler.
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Tu sais ce qui est beau, ici ? Regarde : on marche, on laisse toutes ces traces sur le sable, et elles restent là, précises, bien en ligne. Mais demain tu te lèveras, tu regarderas cette grande plage et il n'y aura plus rien, plus une trace, plus aucun signe, rien. La mer efface, la nuit. La marée recouvre. Comme si personne n'était jamais passé. Comme si nous n'avions jamais existé. S'il y a, dans le monde, un endroit où tu peux penser que tu n'es rien, cet endroit, c'est ici. Ce n'est plus la terre, et ce n'est pas encore la mer. Ce n'est pas une vie fausse, et ce n'est pas une vie vraie. C'est du temps. Du temps qui passe. Rien d'autre
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A acheter et vendre des vers à soie, Hervé Joncour gagnait chaque année une somme suffisante pour assurer à sa femme et à lui-même ce confort qu'en province on tendrait à nommer luxe. Il jouissait avec discrétion de ses biens, et la perspective, vraisemblable, de devenir réellement riche, le laissait tout à fait indifférent. C'était au reste un de ces hommes qui aiment assister à leur propre vie, considérant comme déplacée toute ambition de la vivre. On aura remarqué que ceux-là contemplent leur destin à la façon dont la plupart des autres contemplent une journée de pluie.
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Mourir de nostalgie pour quelque chose que tu ne vivras jamais.
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Il était un fil d'or qui courait droit dans la trame d'un tapis tissé par un fou.
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Il cherchait une solution, et celle-ci le rattrapa, comme il arrive souvent, en le surprenant par derrière alors qu'il remontait le chemin — de tous, le plus mystérieux — de la mémoire. Ce fut comme une bouffée. Un courant d'air filtrant par les serrures de l'oubli.
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A propos d' "Une oeuvre déchirante d'un génie renversant " de Dave Eggers

Comment pourrait-on ne pas acheter un livre dont l'auteur a également réécrit le colophon à sa manière ?

Un autre début qui m'a figé sur place quand je l'ai lu. Ce qui m'a le plus frappé sur le moment, c'est la quantité d'énergie qu'il y a dans ce livre. C'est une caractéristique des premiers romans: après des années de retenue, de matière accumulée, de vie étouffée, le premier roman est comme une digue qu'on ouvre. C'est un torrent qui s'écoule et charrie de tout, c'est une cascade: avec un léger goût de gaspillage et un excès de générosité, qu'on passera le reste de sa vie à juger tout à fait stupides, et, dans le même temps, à regretter comme un geste dont on n'est plus capable. (p. 138)
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Belle la putain de Closingtown, belle. Noirs les cheveux de la putain de Closingtown, noirs. Des dizaines de livres, dans sa chambre, au premier étage du saloon, elle les lit pendant qu’elle attend, des histoires avec un début et une fin, si tu lui demandes elle te les racontera. Jeune la putain de Closingtown, jeune. Quand elle te serre entre ses jambes elle te chuchote : amour.
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Il avait quelques certitudes discutables qu’il résumait dans une maxime par laquelle il commentait depuis des années toutes les discussions : « Une main dans la surface est toujours volontaire, le hors-jeu n’est jamais douteux, les femmes sont toutes des putains.
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Fanny travaille, là-haut, le fils du pasteur entre les jambes. Amour. Le fils du pasteur s’appelle Young. Il a gardé sa chemise, et il a ses cheveux noirs trempés de sueur. Quelque chose comme une terreur, dans les yeux. Fanny lui dit Baise-moi Young. Mais lui se raidit et glisse loin des cuisses ouvertes – bas blancs avec dentelles jusqu’au-dessus du genou puis plus rien. Il ne sait pas où regarder. Il lui prend la main et la presse contre son sexe. Oui, Young, dit-elle. Elle le caresse, Tu es beau Young, dit-elle. Elle se lèche la paume de la main, en le regardant dans les yeux, puis elle recommence à le caresser, en le frôlant à peine. Oui, dit Young. Oui. Elle serre son sexe dans sa paume. Il ferme les yeux et pense je ne dois penser à rien. A rien. Elle regarde sa propre main, puis la sueur sur le visage de Young, sur sa poitrine, et de nouveau sa propre main qui glisse sur son sexe. J’aime ta queue, Young, je la veux, ta queue.
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"Je pensai que seuls les riches peuvent appeler maladresse un projectile tiré délibérément dans le crâne d'un être humain."
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Le destin n'est pas une chaîne mais un envol.
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Comment avons-nous pu ignorer, pendant aussi longtemps, tout ce qui se passait, et cependant nous asseoir à la table de chaque chose ou personne rencontrée sur notre chemin ? Nos coeurs tendres- nous les nourrissons de grandes illusions, puis au terme du processus nous marchons comme les disciples d'Emmaüs, aveugles, à côté d'amis et d'amours que nous ne reconnaissons pas - nous fiant à un dieu qui ne sait plus qui il est. Ainsi nous connaissons les choses à leur commencement puis nous en recueillons la fin, manquant toujours leur coeur. Nous sommes aurore mais épilogue- éternelle découverte tardive.
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C'était au reste un de ces hommes qui aiment assister à leur propre vie, considérant comme déplacée toute ambition de la vivre… On aura remarqué que ceux-là contemplent leur destin à la façon dont la plupart des autres contemplent une journée de pluie.
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C'était au reste un de ces hommes qui aiment assister à leur propre vie, considérant comme déplacée toute ambition de la vivre.

On aura remarqué que ceux-là contemplent leur destin à la façon dont la plupart des autres contemplent une journée de pluie.
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