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Citations de Amadou Hampâté Bâ (231)


Instruis-moi, O toi qui est de l'or enveloppé dans un vieux chiffon et jeté sur des ordures entassés dans la rue, pour mieux cacher ta qualité de grand maître et tes vertus de connaissance. Je suis prêt à te donner la moitié de ma fortune et partager avec toi mon royaume. Et si cela ne suffisait pas, c'est bien volontiers que je deviendrais ton esclave pour delier les lanières de tes sandales.
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A l'école, nous apprenions surtout - avec des maîtres remarquables, il est vrai - les rudiments de l'arithmétique, l'écriture et la langue française, un peu de littérature classique, et surtout l'histoire de France et une certaine version de l'histoire coloniale.
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L'amour de Tierno Bokar pour les hommes dépassait largement le cadre de son groupe confessionnel, il s'étendait à l'ensemble du genre humain. Mieux, il débordait cet ensemble pour embrasser la création tout entière, jusqu'aux plus humbles des créatures de Dieu.

Un jour de cette année 1933 que je passai auprès de lui, il était assis dans la case où il devait mourir sept ans plus tard. S'adressant aux aînés de ses élèves, il développait la signification ésotérique du chapelet Tidjani. Nous étions tous sous le charme. A l'extérieur, le vent soufflait. Il faisait courir le sable dans la cour et retroussait les plumes du coq qui s'obstinait près du pilon. Une rafale plus violente ébranla la charpente. Sous le choc, un nid d'hirondelle, qui était situé en équilibre en haut du mur, sous l'avancée du toit, s'entrouvrit. Un poussin tomba en piaillant. Nous lui jetâmes un regard indifférent ; l'attention de l'auditoire n'avait pas faibli un instant. Tierno termina sa phrase, puis se tut. Il se dressa, promena un regard attristé sur ses élèves et tendit les doigts, qu'il avait longs et fins, vers le petit oiseau :

- Donnez-moi ce fils d'autrui.

Il le prit dans ses mains réunies en forme de coupe. Son regard s'éclaira :

- Louange à Dieu dont la grâce prévenante embrasse tous les êtres ! dit-il.

Puis, déposant l'oisillon, il se leva, prit une caisse et la posa au-dessous du nid. Il sortit et revint peu après. Entre ses doigts, nous vîmes une grosse aiguille et un fil de coton. Il monta sur la caisse, déposa le petit d'hirondelle au fond du nid qui s'était déchiré et répara celui-ci avec le même soin qu'il mettait autrefois à broder les boubous. Puis il redescendit et reprit sa place sur la natte. Nous attendions impatiemment la suite de sa leçon ; mais au lieu de reprendre le chapelet qui servait de base à ses explications, il le laissa de côté. Après un moment de silence, il s'adressa à nous :

« Il est nécessaire que je vous parle encore de la Charité, dit-il, car je suis peiné de voir qu'aucun de vous n'a suffisamment cette vraie bonté du cœur. Et cependant, quelle grâce ! ... Si vous aviez un cœur charitable, il vous eût été impossible d'écouter une leçon, portât-elle sur Dieu, quand un petit être misérable vous criait au secours. Vous n'avez pas été émus par ce désespoir, votre cœur n'a pas entendu cet appel ... Eh bien ! mes amis, en vérité, celui qui apprendrait par cœur toutes les théologies de toutes les confessions, s'il n'a pas de charité dans son cœur, il pourra considérer ses connaissances comme un bagage sans valeur. Nul ne jouira de la rencontre divine s'il n'a pas de charité au cœur. Sans elle, les cinq prières ne sont que des gesticulations sans importance ; sans elle, le pèlerinage est une promenade sans profit. »

La scène de ce jour-là s'est gravée à tout jamais dans ma mémoire. Je le revois encore, dressé dans son tourtil blanc, réparant délicatement la demeure de ce « fils d'autrui » dont nous n'avions pas su entendre l'appel, tout préoccupés que nous étions de nous-mêmes.

D'une manière générale, il nous enseignait de ne jamais tuer un animal sans nécessité, fût-ce un simple moustique. Pour lui, la nature entière, animaux et végétaux compris, devait être respectée car elle était non seulement notre Mère nourricière, mais encore le grand Livre divin où tout était symbole vivant et source d'enseignement. (pp. 160-162)
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Parmi ceux qui venaient entendre Tierno, tous n'étaient pas toujours de l'Ordre Tidjani. Un jour, de nombreux Qadri - appartenant à la confrérie qadriya, l'une des plus anciennes de l'Islam - avaient assisté à son cours. Quand vint le moment d'effectuer le grand dhikr (psalmodie en commun du nom de Dieu), un élève demanda à Tierno :

- Ceux qui ne sont pas Tidjani vont-ils assister au dhikr ?

- Faites le dhikr sans vous préoccuper d'eux, répondit-il. Si certains d'entre eux veulent y participer, vous n'avez pas le droit de les en empêcher. Et s'ils préfèrent partir, vous n'avez pas le droit de les retenir.

Le dhikr eut lieu, en présence de nombreux Qadri. Quand il fut terminé, Tierno dit :

L'arc-en-ciel doit sa beauté aux tons variés de ses couleurs. De même, nous considérons les voix des divers croyants qui s'élèvent de tous les points de la terre comme une symphonie de louanges à l'adresse de Dieu qui ne peut être qu'Unique.

Nous déplorons amèrement la méprise de certains religieux sur la forme des choses divines, méprise qui les amène souvent à rejeter comme discordant l'hymne de leur voisin. Pour lutter contre cette tendance, frère en Dieu, quelle que soit la religion ou la congrégation à laquelle tu es affilié, médite longuement sur ce verset :

« La création des cieux et de la terre,
la diversité de vos langues et de vos couleurs
sont autant de merveilles(1) pour ceux qui réfléchissent. »

(Coran XXX, 22.)

Il y a là de quoi méditer pour tout le monde.

(1) Le mot arabe ayat signifie à la fois « merveille», « miracle », « signe » et « verset ». Si les versets révélés sont des «signes" de Dieu, à l'inverse, on peut également dire que toutes les «merveilles" qui existent dans la création sont également des « signes », donc un autre mode de la Révélation divine. Selon cette perspective, tout est Révélation. C'est nous qui ne savons pas lire. (pp. 145-146)
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" Mais enfin, Tidjani, s'étonna le commandant, dis-moi pourquoi ni mauvaise nouvelle ni mauvais traitement n'ont de prise sur toi.
- Mon commandant, on ne peut m'annoncer une nouvelle plus grave que celle que le destin m'a assignée au jour de ma naissance en me disant : "Tu es entré dans une existence dont tu ne sortiras pas vivant, quoi que tu fasses", et nulle force humaine ne pourra me loger plus étroitement sur cette terre que je ne le serai dans ma propre tombe. C'est pourquoi aucune mauvaise nouvelle ne peut m'assombrir. J'ai appris à voir venir la mort avec le même calme que je vois tomber la nuit quand le jour décline. A chaque réveil, je me considère comme un condamné en sursis. Mais je ne suis pas pessimiste pour autant, mon commandant, et je ne serai nullement surpris si, un jour, je redevenait le grand chef que j'ai été. La vie est un drame qu'il faut vivre avec sérénité".
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"Amadou n'ira jamais dans cette école des Blancs où l'on va faire de lui un infidèle! Je m'y opposerai par tous les moyens! Je vais le racheter, et s'il le faut, je vendrai pour cela la moitié de mon cheptel!"
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Ces relations de bon voisinage et d'acceptation mutuelle reposaient sur le vieux fond de tolérance religieuse de l'Afrique traditionnelle animiste qui acceptait toutes les formes de pratique religieuse ou magico-religieuse et qui, de ce fait, ignora les guerres de religion. 193
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Ce n'est pas pour conserver des idées dans une bibliothèque que j'écris, mais au contraire pour assurer la plus large diffusion possible de nos valeurs traditionnelles, afin que chacun puisse s'y référer, méditer, et peut-être, ajouter et créer. En me livrant à ce travail de récolte et de fixation par l'écriture, mon but a été également de servir d'exemple, afin que d'autres continuent dans la même voie. Je ne fais que jouer le rôle du devancier, dont le symbolisme se retrouve dans les danses sacrées : le vieux se met en avant, il danse, et tout le monde le suit au rythme de son pas.
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Tout ce que nous sommes et tout ce que nous avons, nous le devons une fois seulement à notre père, mais deux fois à notre mère
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L'homme est l'être qui s'aime si bien qu'il ne sent sa propre mauvaise odeur mais répugne à la moindre odeur chez les autres
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Ô Biga ! Comme l'a dit l'ancêtre Aga Aldiou : "Si on lave une culotte le soir alors qu'on l'a mise propre sur soi le matin, ce n'est sûrement pas pour rien..." Il doit bien y avoir une raison, nous la connaîtrons un jour. Attendons...
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On appliquait en effet la loi du talion et toutes les peines corporelles prévues par la loi musulmane. Toutefois, la femme étant très respectée dans la coutume peule, une femme libre ne recevait jamais de coups : ceux-ci étaient appliqués sur le toit de sa case ou sur un objet lui appartenant et la touchant de près. Ce simulacre public était aussi humiliant pour la coupable que si le châtiment lui avait été administré réellement.
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Le tempérament d'un homme peut-il se modifier selon qu'il est en état de guerre ou en état de paix ? Comment des hommes qui furent braves au feu peuvent-ils devenir des peureux dans la paix ?
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Indigné, Mamadou Koné s'avance : "Hé, toi, bonhomme mal fagoté ! Sais-tu ce qu'il va t'en coûter de ton geste de fou furieux ?" Le colosse éclate de rire et brandit sa hache : "Espèce de malappris de sa mère et d'imbécile de son père, je n'ai pas besoin de savoir ce que me vaudra ta menace, mais je vais te dire tout de suite comment je vais refaire de toi un incirconcis et remettre à sa place le prépuce qui recouvrait le gland de ton pénis !"
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La parole écorche et coupe. Elle modèle,
déforme et module.
Elle irrite, amplifie, apaise, réhausse et
abaisse.
Elle perturbe, guérit, rend malade et selon
sa charge parfois tue net.
Une fois émise on ne peut plus la rattraper.
Elle déclenche ou termine tout.


Citation du grand poète Koullel, traduite par Amadou
Hampâté Bâ
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Quiconque ne tient pas compte de ce qu'il était hier, demain de sera rien, absolument rien.
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Tel fut mon père Hampâté, qui aurait dû mourir et qui pourtant vécut, qui refusa les honneurs offerts par un roi pour continuer de servir un vieux boucher, et qui préféra libérer une femme aimée plutôt que de la voir malheureuse auprès de lui.
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Humilité, p. 434
N'ouvre jamais ta malle en présence de qui que ce soit. La force d'un homme vient de sa réserve ; il ne faut étaler ni sa misère ni sa fortune. Fortune exhibée appelle jaloux, quémandeurs et voleurs.
N'envie jamais rien ni personne. Accepte ton sort avec fermeté, sois patient dans l'adversité et mesuré dans le bonheur. Ne te juge pas par rapport à ceux qui sont au-dessus de toi, mais par rapport à ceux qui sont moins favorisés que toi.
[…]
Si tu partages un plat avec des amis ou des inconnus, ne prends jamais un gros morceau, ne remplis pas trop ta bouche d'aliments, et surtout ne regarde pas les gens pendant que vous mangez, car rien n'est plus vilain que la mastication. Et ne sois jamais le dernier à te lever ; s'attarder autour d'un plat est le propre des gourmands, et la gourmandise est honteuse.
Respecte les personnes âgées. Chaque fois que tu rencontreras un vieillard, aborde-le avec respect et fais-lui un cadeau, si minime soit-il. Demande-lui des conseils et questionne-le avec discrétion.
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Le proverbe peul dit : "Laisse l'être aimer ce qu'il aime. Si tu persistes à vouloir l'en détourner, il en viendra à te haïr sans pour autant cesser d'aimer ce qu'il aime."
La loi du cœur est donc essentielle. C'est en vain que nous lui opposons nos lois conventionnelles et nos règles de bienséance.
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Un chef n'est pas une vache laitière, mais un berger qui doit savoir mener les laitières au pré.
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