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Critiques de Angélique Villeneuve (278)
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La belle lumière

Je connais l'histoire d'Helen Keller depuis fort longtemps. Beaucoup de livres (notamment en jeunesse) lui

Angélique s'est mise dans la peau de Kate Adams Keller, s'appuyant sur la documentation qu'elle a trouvée. Elle retrace l'existence de cette jeune mère, confrontée au lourd handicap de sa fille, rendue quasi-sauvageont été consacré. Angélique Villeneuve reprend le flambeau, d'une façon originale . Elle fait de Kate, la mère d'Helen, le personnage central de son ouvrage. Quelle bonne idée !



Pour ceux qui ne connaîtraient pas Helen Keller (je ne sais pas s'ils sont nombreux), il s'agit d'une auteure, conférencière et militante américaine, née en 1880 et morte en 1968. Helen, devenue sourde et aveugle à l'âge de deux ans, est la première personne handicapée à avoir obtenu un diplôme universitaire. Ce parcours exceptionnel ne s'est pas fait sans difficultés, notamment dans la petite enfance. La prise en charge par une préceptrice d'exception, Ann Sulivan, a littéralement sauvé l'enfant des ténèbres.





Kate Adams Keller par son incapacité à communiquer. Angélique imagine le regard des autres et les difficultés quotidiennes de tout parent confronté au handicap d'un enfant. Mariée à un homme plus âgé qu'elle (il s'agit pour lui d'un remariage), la jeune femme cumule les difficultés et doit se battre pour s'affirmer.



Bien que les deux histoires n'aient rien à voir l'une avec l'autre, je n'ai pas pu m'empêcher de faire le lien entre "la belle lumière" et "la mère d'Eva", lu précédemment. Dans les deux cas, l’héroïne est une femme confrontée à un enfant "hors norme" qui bouscule la famille et remet en question l'équilibre de celle-ci. Etre mère n'est pas un long fleuve tranquille, toutes les mères le savent, mais certaines sont plus malmenées que d'autres. Kate Keller fait partie de cette catégorie.



Helen est née en Alabama dans une famille de planteurs. En toile de fond , nous découvrons le contexte sociétal et racial de l'époque. Au sein de la famille Keller, les domestiques noirs sont bien traités mais ce n'est pas le cas partout. Les tensions raciales sont fréquentes, notamment en ville.



L'écriture sensuelle et poétique d'Angélique Villeneuve restitue à merveille le climat chaud et moite de ce coin d'Amérique ainsi que sa végétation luxuriante. Nous sommes immergés au cœur de la plantation, en compagnie de la famille Keller. La description de la gestuelle de l'enfant, qui évolue dans le temps, est particulièrement réussie. Nous sommes aux côtés de l'enfant, hypnotisés par sa fascinante évolution.



Un court extrait pour vous donner une idée du style :



"Comme la petite se rue sur elle, ardente, explosive, elle attrape ses poignets. Une odeur de chien, de lait aigre et de buis bondit autour d'elles, mêlée au monologue infini qui repend, de mimiques et de halètements."



Je suis admirative de la capacité d'Angélique Villeneuve à se renouveler. C'est encore un très beau roman qu'elle nous offre pour cette rentrée.



Une parfaite réussite !
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La belle lumière

En Alabama en 1880, Kate a quitté ses parents pour suivre Arthur, ce veuf de vingt ans son ainé. Mais la vie n'est pas facile pour cette jeune femme qui sait bien qu'elle ne prendra jamais la place de la première épouse trop tôt disparue. La naissance de son premier enfant est vécue comme une fête. Helen est une enfant comme les autres, aimée de ses parents, élevée dans cette grande maison au bord du Tennessee. Jusqu'à ces journées de fièvre, Helen a dix-neuf mois, qui laissent la mère et la fille exsangues et changent à jamais le cours de leurs vies.

Vont suivre des années de recherche tous azimuts pour cette mère aussi obstinée que pugnace, médecins, oculistes, médecines alternative, eaux ou plantes qui guérissent, tout y passe mais rien n'y fait. L'enfant grandit, sauvage, exigeante, indocile.

La relation quasi-charnelle et si forte qu'elle a avec sa fille lui dit qu'elle peut faire quelque chose pour elle. Alors Kate s'obstine, laisse Helen vivre, toucher, crier, mordre, blesser, fuir. Kate cherche et trouve enfin une école pour malentendants et aveugles, l'école Perkins à Boston et convainc son époux de faire venir Ann Sullivan, une jeune femme qui prend en charge l'éducation d'Helen. Plus qu'éduquer, il lui faudra dompter la jeune Helen, et soumettre à rude épreuve ces parents aimants qui ne comprennent pas forcément la difficulté et l'exigence de cette éducation.

Le difficile parcours de cette mère qui aime sa fille et se bat contre tous pour lui donner une vie "normale" est magnifiquement dépeint par les mots, la force et la douceur de l'écriture de l'auteur.



lire ma chronique complète sur le blog Domi C Lire https://domiclire.wordpress.com/2020/08/31/la-belle-lumiere-angelique-villeneuve/
Lien : https://domiclire.wordpress...
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Ce qu'ils font est juste

En 2015, suite à l'émoi international suscité par l'affaire Aylan Kurdi, l'enfant syrien noyé et échoué sur un rivage en Turquie, l'éditeur Points avait publié Bienvenue !, un recueil de nouvelles rédigées par « 34 auteurs pour les réfugiés », tous bénévoles, dont les droits seraient reversés au Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (UNHCR). Des noms célèbres avaient participé à cette publication, par des nouvelles très courtes.

En 2017, l'éditeur Don Quichotte (groupe Seuil) repropose une initiative semblable, au bénéfice des associations La Roya citoyenne et Terre d'errance, par un recueil de nouvelles sur le thème de l'accueil et de la solidarité aux migrants. Le titre : « Ce qu'ils font est juste » se réfère à la désobéissance civile à l'ignoble article L 622-1 qui, depuis un décret-loi de 1938 (antérieur donc à Vichy et jamais révoqué), instaure un « délit d'hospitalité ou de solidarité », indépendamment de la nature onéreuse ou gratuite des actes d'accueil – instrument juridique, donc, qui n'est pas utilisé uniquement pour la lutte contre les réseaux de passeurs clandestins, comme le prouve encore récemment l'affaire Cédric Herrou (étudiant aujourd'hui agriculteur à Breil-sur-Roya) et qui pourrait à tout moment rendre hors la loi et justiciables (sans modification législative) les centaines d'associations, organisations caritatives et de collectifs français qui portent assistance et secours aux migrants.

Cet ouvrage collectif, sous la dir. de Béatrice Vallaeys, comporte, après une section les planches du dessinateur Enki Bilal, les nouvelles de 27 auteurs. Par rapport à l'ouvrage de 2015 (en format poche), et malgré un nombre inférieur de participants, le nombre de pages de ce livre est pratiquement doublé : les nouvelles sont généralement beaucoup plus longues, et la « liberté fictionnelle » par rapport à la thématique impartie est également plus grande. Sans doute, la thème de l'hospitalité envers l'étranger se prête-t-il à une élaboration plus métaphorique que celui de la migration, peut-être le lectorat, en quelques années, s'est-il préparé à entendre des voix encore plus disparates et hétérogènes sur ces sujets. Toujours est-il que, grâce aussi à deux nouvelles traduites de l'italien et une de l'anglais, l'éventail des genres littéraires (y compris l'humour, la science-fiction, la mythologie antique, la poésie etc.), les cadres historiques et géographiques des récits, outre les styles s'avèrent très variés.

Ma préférence personnelle, pourquoi le dissimuler ?, va quand même aux nouvelles qui ont un ancrage dans le réel – contemporain ou historique.

Pour nommer quelques textes qui m'ont marqué, je mentionnerai : « Les étoiles de Platon » de Fabienne Kanor, « Laissez passer les loups » de Serge Quadruppani et « Est-ce ainsi que les hommes vivent ? » de Pascal Manoukian, qui met en scène un certain Pal, refoulé de France en 1948, et son fils Nicolas, qui naîtra (en 1955) et grandira en Hongrie, et sera donc décoré parmi les cadets du Parti, plutôt que d'accéder au Palais de l'Élysée...

La postface de Béatrice Vallaeys, « L'immigration, ça fait toujours des histoires », qui retrace l'histoire du fameux article L 622 en citant abondamment Patrick Weil – dont les essais sur les politiques françaises de l'immigration sont absolument essentiels – est également très appréciable.
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Maria

Maria a tissé un lien poétique, empli d'amour avec son premier petit-fils, Marcus, trois ans. Si elle retient ses remarques sur le fait que l'enfant arbore au gré de ses envies cheveux longs, maquillage et robes, elle sera sous le choc quand, à la naissance de leur deuxième enfant, sa fille et son gendre refuseront de révéler le sexe de celui ou celle à qui il sont attribué un prénom non genré.

Cette attitude radicale à laquelle les jeunes gens refusent obstinément de déroger entraînera bien des changements dans la vie affective tout autant que professionnelle de Maria.

On ne peut qu'être bousculé par ce roman où l'on retrouve avec un plaisir sans faille l'écriture sensible et poétique d'Angélique Villeneuve. Qu'on ait l'âge de Maria ou celui de sa fille, que l'on soit homme ou femme, ce roman vient remettre en question tout ce qu'on tenait pour acquis. Il m'a fallu le temps de laisser infuser ce roman que je n’oublierai pas de sitôt.
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Grand paradis

Dès le début, j’ai senti une voix, une sensibilité particulière, comme si l’auteur,venait me murmurer à l’oreille, au coeur l’histoire de Dominique, une jeune femme que l’on devine fragile, un peu hors-normes, et comme s’il fallait tourner les pages de sa quête avec retenue et délicatesse.



C’est une vieille enveloppe moisie et trois photographies mystérieuses qui vont entraîner Dominique jusqu’à l’hôpital Charcot, à Paris, sur les traces d’une patiente, d’une parente soignée pour hystérie. Les lignes intérieures de l’héroïne bougent elles aussi et laissent entrevoir des bribes de sa propre histoire, un puzzle qui se reconstitue peu à peu comme dans la douleur d’un enfantement. Des fenêtres d’air pur s’ouvrent malgré tout, avec les retours au grand paradis de l’enfance.



La fin (que je ne peux vous dire, évidemment) m’a d’abord paru un peu décevante, avant qu’un billet de Gwenaëlle me rappelle opportunément qu’il suffit parfois d’un rien pour qu’une vie change, pour qu’une personnalité sorte de son cocon et ose vivre autrement, à la fois déliée de son passé et l’assumant pleinement. C’est sans doute une des clés (avec le goût pour les vieilles photos) de ce beau roman d’Angélique Villeneuve.
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Un territoire

Ils sont trois à habiter la maison. Elle, et eux. A l’étage le garçon et la fille occupent les chambres les plus agréables, la femme doit se contenter de la cuisine et du cagibi, où elle dort sur un matelas à même le sol. Elle s’y sentirait presque bien, dans ce cagibi, si son matelas n’était pas constamment humide… Elle leur sert de bonne, lave le linge, fait les courses, prépare les repas. Malentendante, elle vit dans son monde intérieur, d’une richesse et d’une poésie que nul ne peut percevoir, surtout pas eux, qui la considèrent comme une idiote.



Qui sont-ils par rapport à elle, quelle est l’histoire de ces lieux ? C’est ce que nous découvrons peu à peu, devinant les liens et reconstituant le puzzle de cette famille décomposée. Au fil des pages, on sent une évolution dans le comportement de la femme malentendante. Loin de se laisser abattre par les difficultés de son quotidien, elle tente de s’échapper par le rêve et la créativité. Tout en se remémorant son passé et elle prend son destin en main, laissant espérer une issue heureuse à cette histoire.



Angélique Villeneuve nous offre un texte riche et subtil, laissant une grande place à la suggestion. Le lecteur s’approprie l’atmosphère des lieux par les odeurs, le toucher, les non-dits, les images. Nous sommes presque dans l’univers du conte. Ce livre m’a fait penser aux « demeurées » de Jeanne Benameur tant au niveau du thème que de l’écriture. Je l'ai dégusté lentement, prenant le temps de savourer la richesse de la langue.



Beaucoup d’humanité dans ce roman fort bien écrit…



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Les ciels furieux

COUP DE COEUR



" Sa sœur Zelda, depuis toujours, est un horizon dans lequel se jeter."



A l'est de l'Europe, quelque part dans la Zone de Résidence où sont cantonnés les juifs en ce début du vingtième siècle.



Henni a huit ans et vit dans un village ordinaire avec sa famille, ses parents, son frère aîné, les bébés et surtout Zelda, sa sœur aînée, son modèle en tout. Henni et Zelda s'occupent des bébés. Un soir, à la fin de l'hiver, des hommes en furie pénètrent dans leur maison, comme dans tant de maisons ils sont entrés et entreront encore pour piller, pour punir et pour tuer. Dans l'affolement, une partie de la fratrie parvient à s'enfuir.



Le livre raconte vingt-quatre heures de la vie d'Henni après cette intrusion.



Ce roman m'a au départ surprise tellement il est différent des romans d'Angélique Villeneuve que j'ai déjà lus, j'ai eu quelques petites difficultés à rentrer dedans mais ce ne fut que l'histoire de quelques dizaines de pages.

L'auteure réussit merveilleusement bien à se mettre dans la peau de cette petite fille de huit ans lors de son périple dans des lieux où elle n'est jamais allée, dans des lieux saccagés par la folie humaine. A travers ses pensées, ses souvenirs, le monde qu'elle recompose en pensée, nous découvrons une personnalité inoubliable, sa force, son ingénuité bouleversent. Elle avance portée par les conseils de son père, par la voix de Zelda quand elle se retrouve seule. Sa famille est avec elle grâce à ses "doigts-personnages" car elle a attribué chacun de ses doigts à un membre de sa famille " Elle n'est pas seule. Il suffit de dire le nom de chacun dans sa tête."... Quelle magnifique idée !

L'écriture d'Angélique Villeneuve est comme toujours très poétique, très visuelle, elle fait appel à tous les sens, d'emblée l'atmosphère est là avec arbres et animaux, d'emblée les personnages sont fortement incarnés. Nous découvrons le quotidien tranquille et rempli d'apprentissages d'Henni avant le jour funeste, la place de Zela et de son père dans sa vie, son regard sur sa mère immobile dans son fauteuil, son amour pour son petit frère Avrom qui lui a été désigné comme "son bébé tout à elle", le plus beau cadeau qui pouvait être fait à cette petite fille qui rêvait de posséder quelque chose de vivant.

Un texte où sauvagerie et tendresse se côtoient, une sauvagerie qui n'est que suggérée et c'est une des grandes forces de ce roman où Angélique Villeneuve a choisi de se centrer sur la petite fille.

Un texte d'une rare puissance qui a une portée universelle car si nous devinons très vite qu'il s'agit de juifs, le mot n'est jamais précisé, cette histoire de persécution peut se passer n'importe où, n'importe quand et atteindre n'importe quelle communauté. La résonnance avec l'actualité est très forte.

Un texte bouleversant qui offre une lueur d'espoir à la fin avec un dénouement ouvert qui laisse toute sa place au lecteur. Une lecture qui révolte mais qui éblouit par la grâce de l'écriture de l'auteure et par la force de son héroïne.
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Maria

magnifique moment d'une mamie avec son petit fils !!!

empêcher une femme de voir ses petits enfants ou ses enfants

est comme un crime !!

mais la Mamie en question finit par arranger tout cela !!

suspense ... je ne peux vous le dévoiler ....
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Maria

Je l’ai lu d’une traite ce court roman qui de manière très pudique et sans jamais prendre parti affronte le problème du « genre » et de l’amour inconditionnel de certains grands-parents pour ces petits-enfants qu’ils considèrent un peu comme les leurs mais sur lesquels ils n’ont pas autorité.

Angélique Villeneuve place son récit du coté de la grand-mère. Une grand-mère bien maladroite dans son désarroi. L’amour très fort qui l’unit à son petit fils y est subtilement décrit. Face à sa fille et son compagnon qui ont décidé d’élever leurs enfants à leur manière, sans les entraves liées au genre de l’enfant, que peux-t-elle faire, elle la rêveuse qui associe les gens à des couleurs et se passionne pour les oiseaux ?

J’aurai aimé seulement que l’auteure (oups! c’est genrée!) aille un peu plus loin tant dans son histoire que dans son analyse.


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Le doudou des bois

Le doudou des bois, Angélique Villeneuve, Amélie Videlo, sarbacane, 15€50



Georgette est haute comme trois pommes. Mais, manifestement, elle n’a pas froid aux yeux. Elle se promène seule dans la forêt, avec son ciré jaune et son doudou à la main. Au milieu des arbres aux magnifiques couleurs automnales, elle respire l’air du temps. La forêt n’a rien d’hostile, on sent que c’est son terrain de jeu. Elle se régale à sentir les odeurs de la terre mouillée et admire les couleurs chatoyantes qui l’entourent. Et les images de l’album rendent magnifiquement bien cette ambiance colorée et sereine.
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Nuit de septembre

La perte d’un enfant, voici la terrible épreuve à laquelle Angélique Villeneuve a dû se soumettre. Mariée, mère de deux filles et d’un fils, elle a retrouvé ce dernier pendu dans sa chambre par un matin de septembre. Un matin lors duquel tout a basculé, où sa vie a irrémédiablement changé. Qui est-elle maintenant ? Un enfant sans parent est un orphelin, mais perdre la chair de sa chair est une situation tellement anormale qu’il n’y a pas de mot à mettre sur cette tragédie dans la langue française. Des raisons pour lesquelles son fils a décidé de mettre fin à ses jours, nous ne saurons rien ; l’auteur estime que cette histoire ne lui appartient pas. Ce qu’elle va coucher sur papier, c’est sa vie d’après, emplie de l’absence de cet être qu’elle aimait tant, et de la nécessité de se reconstruire malgré tout.



Nuit de septembre est un ouvrage assez déstabilisant, puisque, par le procédé narratif en place, le lecteur ne peut que se sentir concerner. Bien évidemment, la douleur ressentie par cette mère est inimaginable, mais l’on en a un aperçu, car nous avons l’impression qu’elle s’adresse à nous. En effet, elle raconte sa propre histoire en s’interpellant elle-même par le recours au pronom personnel « tu ». Ainsi, nous pouvons par exemple lire : « Tu t’es posé cette question-là. Tu as dit que tu ne savais pas si, encore, tu pouvais dire, j’ai un fils. »



Dans ce récit autobiographique, point de passage larmoyant. Le propos est avant tout la reconstruction de cette mère brisée, qui doit parvenir à continuer malgré tout, car elle a deux filles et un mari qui l’aiment et qui ont besoin d’elle. Sa passion pour l’écriture lui est sans doute salutaire, et bien que l’on ne doute pas une seule seconde de la souffrance abominable qui l’accompagne au quotidien, même si le deuil qu’elle doit faire est impossible à surmonter, il y a beaucoup de grandeur dans cette femme. Elle ne désire pas cacher les faits, elle ne veut pas passer des mots sous silence, que les gens autour d’elle s’empêchent d’employer certains termes en sa présence.



Les chapitres, qui n’en sont pas vraiment, sont très courts (une ou deux pages généralement) et on découvre ainsi les petits pas qu’elle fait chaque jour pour aller de l’avant, même si parfois, elle aura davantage l’impression de faire marche arrière. Les premières fois depuis que son garçon n’est plus, une discussion avec une commerçante, les idées qui lui viennent lorsqu’elle voit un adolescent faire du skate… La plume est juste, aucune fausse note ici, mais surtout – et avant tout – beaucoup de respect et de pudeur pour cet enfant qui n’est plus, mais également pour sa famille. En effet, elle ne dévoile jamais l’identité de son époux ni de ses filles, et le prénom de son fils n’est connu du lecteur que dans les dernières pages. Nuit de septembre est à n’en point douter un très bel ouvrage qui, malgré tout, est d’une certaine façon porteur d’espoir.


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Nuit de septembre

C’est triste forcément. C’est poétique aussi. C’est doux, tendre, d’une grande délicatesse. La douleur, celle qui découle de la mort d’un enfant, de son enfant, est écrite avec pudeur. L’auteure raconte, en effet, avec élégance ce que c’est que de vivre après le suicide de son fils: c’est reprendre le chemin de la vie un poids aux chevilles, c’est avancer avec une douleur dans la poitrine; une douleur qui surgit avec les souvenirs. Perdre un proche, un parent, un enfant, pour celles et ceux qui savent malheureusement, c’est vivre avec la mort; c’est vivre en sa compagnie. C’est se demander où est l’être aimé, pourquoi il est parti? C’est vivre avec une absence, un manque, une envie de voir, revoir. C’est prier pour l’avoir une fois, rien qu’une dernière fois, dans ses bras. C’est attendre et espérer. En vain … Nuit de septembre est à découvrir pour le talent de l’auteure qui parle de la douleur avec retenue et poésie.


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Les très petits cochons

Voilà une nouvelle version des trois petits cochons. Celle-ci est réussie, réjouissante, elle fait saliver... On retrouve la trame de l'histoire traditionnelle, les maisons, la fin tragique pour le loup .Mais pour le reste, les auteures ont emprunté une voie assez... alimentaire. Le premier petit cochon (Jambon) construit une maison en paille (mais des pailles... pour boissons), le second (Rillette) en pain grillé, le troisième (Lardon) en morceaux de sucre, et le loup finit en pâtisserie !

Les illustrations sont méticuleusement constituées avec des petits cochons, jouets ou objets en plastique et aliments, dans des décors soit fabriqués soit naturels. Un peu kitch tout cela mais très réussi. Un livre réjouissant à déguster (ou à dévorer c'est selon).
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Un territoire





La narratrice vit dans l’ancienne maison familiale. Celle où elle admirait sa Sœur partie depuis bien longtemps. Le cagibi lui sert désormais de chambre à coucher, elle s’occupe du Garçon et de la Fille, deux jeunes adultes qui la maltraitent par leurs attitudes et leurs comportements. Elle prépare les repas, fait le ménage et se plonge dans les souvenirs pour oublier le présent.



Dès les premières lignes, l’écriture déploie un univers particulier. Une écriture où chaque mot est pesé, une féérie de métaphores pour nous prendre par la main. La curiosité est titillée, on se demande quelles sont les relations entre la narratrice, ce Garçon et cette Fille. Pourquoi la Sœur tant adorée semble partie depuis bien longtemps ? Les réponses sont amenées au fil des pages. Délicatement comme pour trancher avec la condition de cette femme.



la suite sur :

http://fibromaman.blogspot.com/2012/01/angelique-villeneuve-un-territoire.html
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Les Fleurs d'hiver

Octobre 1918, Toussaint est de retour chez lui. Mais il n’est plus que l’ombre de lui-même. Une gueule-cassée comme on les appelle. Un obus et la moitié de son visage a disparu à Verdun, Côte du Poivre. Depuis il ne parle plus et veille scrupuleusement à cacher son visage avec une bande de tissu. Après de longs mois passés au Val-de-Grâce, il rentre chez lui rue de la Lune, pour y retrouver sa femme Jeanne et sa fille Léonie.



« Sans se dire les mots, elle voit bien que cet homme sur son édredon n’a rien d’un héros. Elle comprend qu’un Boche, Toussaint n’en a sûrement pas tué un seul, peut-être qu’il n’en a jamais vu, face à face, autrement que sous forme de macchabée. Il n’a tué ni sauvé personne, son mari, il est encore couvert de boue, de poux, de froid, de bruit, de colique et de peur. La guerre a creusé et creuse encore en lui.

Il est un creux immense, et Jeanne ignore s’il est possible de l’emplir. Si à deux ils en seront capables.

Elle pense au grand gâchis des hommes. »



Récit sensible et pudique du combat intime d’un homme brisé, d’un couple qui doit apprendre à vivre avec les séquelles de la guerre, c’est aussi un portrait touchant de femmes courageuses. Celles qui sont restées loin des combats, sans leurs hommes, qui ont dû trouver comment subvenir aux besoins de leur famille, résister au froid terrible de l’hiver 1917, affronter les deuils, ceux de la Grande Guerre bien sûr mais aussi ceux de la grippe espagnole qui frappe alors durement la France.

Angélique Villeneuve dans ce court roman, décrit avec beaucoup de délicatesse la solidarité qui unit toutes ces femmes, en particulier par la très belle relation que noue Jeanne avec sa voisine et amie Sidonie.



Premier roman que je lis de cette autrice, elle a su me convaincre et m’émouvoir avec ce récit tout en retenu et finalement plein d’espoir.
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Les ciels furieux

Mais quelle écriture !

Ce roman nous plonge dans l’enfance de Henni, 8 ans, juive et vivant dans un pays de l’Est. Elle raconte sa famille dont chaque membre a une place sur un de ses doigts des mains. La mère est physiquement là mais absente de son rôle maternel. Elle met au monde des enfants et cela l’épuise. Alors ce sont les filles qui s’occupent chacune d’un ou deux bébés. Elle se méfie de son grand frère, Lev, qui lui fait peur. Son père est bon et gentil, pas du tout comme les autres pères craints par leurs enfants. Dès l’âge de 4 ans, Henni est initiée aux tâches ménagères. Sa grande sœur, Zelda, lui apprend tout et lui sert de mère de substitution. Henni s’occupe de « son bébé », Avrom, avec amour, et Zelda, de deux bébés, Iossif et Kolia. Les deux sœurs se relaient les nuits.

On ne connaît donc pas exactement le lieu où se déroule cette histoire ni l’époque. En tout cas, on s’y déplace à cheval et il n’y a pas d’électricité. On comprend qu’il existe une forme de racisme envers les Juifs et que c’est certainement la raison pour laquelle sa famille est attaquée ce soir-là. Tout cela est vu à hauteur d’enfant avec des mots d’une enfant de 8 ans. Henni nous plonge dans son imaginaire, ses peurs et sa poésie.

Un soir donc, des hommes débarquent dans leur maison et les menacent. Lev, Zelda et Henni s’enfuient, courent dans la neige et se réfugient dans une briqueterie. Le roman se concentre sur cette nuit de peur et de froid vécue par Henni qui se retrouvent séparée de sa sœur à moment donné. Elle doit décider de son chemin, réfléchir pour éviter les dangers et surtout elle essaye de comprendre ce qu’elle voit et cela est totalement incompréhensible pour une petite fille.

Ce texte est puissant et ne peut laisser indifférent. Il ressemble par moment à un conte. L’écriture est centrée sur les sens, sur ce que ressent Henni. J’avoue ne pas avoir tout compris et il y a un certain nombre de questions qui restent en suspens à la fin de ma lecture. En tout cas j’ai ressenti tout l’amour de Henni pour sa famille. Une petite fille attachante qu’on a envie de protéger. Tout au long du roman, on espère qu’elle retrouvera sa famille, sa maison, sa vie, même si rien ne pourra plus être comme avant et qu’on sait que l’innocence et l’enfance de Henni sont désormais derrière elle. Une prouesse littéraire très réussie et bouleversante qui résonne malheureusement avec l’actualité. Si vous aimez être bousculé par vos lectures, celle-ci est de cette trempe !
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Les ciels furieux

Là où le péché a abondé, la grâce a surabondé

La grâce, c'est ce qui caractérise l'écriture d'Angélique Villeneuve. Une nouvelle fois, elle enveloppe ses lecteurs de ses mots à la poésie ténue qui a la légèreté des fils d'une toile d'araignée tissée avec savoir et patience.

C'est ainsi que nous sommes à hauteur de cette petite fille, Henni.

« Henni et la peur de rien. Ça n'est pas un mensonge mais pas une vérité non plus. »

L'incipit cloue le lecteur sur place, par la violence insidieuse de l'indicible, une petite fille fuit et elle a charge « d'âmes ».

Dans cette fuite éperdue, Henni convoque tout ce qui a fait son quotidien avant la déflagration de l'inhumanité.

Tous ces fragments de vie sont autant d'éclats d'obus qui déchirent notre chair.

Le biais par lequel nous découvrons cette jeune vie fait penser aux contes, ceux qui nous faisaient peur et pleurer.

Henni est une petite fille sage et laborieuse au sein d'une famille qui vit en dehors du village, on sait d'instinct qu'ils sont parqués là, à l'écart.

Comme tout enfant que la vie malmène Henni est adulte avant l'âge, elle apprend vite tout ce qui peut améliorer la vie de sa famille, pas un instant d'innocence, d'insouciance.

Tout est menace.

« Elle apprécie plus que tout l'heure où dans la maison les choses se rencoquillent dans le ronron du silence. »

Après l'intrusion, Henni reconstitue par fragments tout le précieux de sa jeune vie, sa famille.

Avec elle, nous respirons cet air dense, nous entendons ces chuchotements qui n'annoncent rien de bon, nous enregistrons les regards sombres, les mines angoissées des adultes, la tension qui règne sur la communauté dont elle fait partie, cette chappe de plomb qui dit que l'horreur resurgit. L'Histoire, celle que les hommes font, n'apprend rien du passé.

Un livre au coeur de l'actualité qui montre l'urgence à réagir. Il n'y a aucune justification aux actes de barbarie, aucune.

Pas de lieu précis, de date, juste quelque part dans le vaste monde. Chaque jour nous voyons que la bête immonde est là.

Certains mots ne sont pas prononcés cette absence fait sonner clair les noms des pourchassés, témoins de vie.

Penser au ressenti de cette petite fille symbole de l'indicible :

« On n'est plus qu'une fille qui s'appelle Henni et on ne sait pas exactement ce que ça veut dire, comment on va s'en sortir avec ça puisqu'on n'a rien d'autre.

Il y a le voile à l'intérieur du crâne qui empêche de penser, et qui gêne, et qui pèse. »

Ne pas s'habituer à la barbarie et se sentir tous concernés, un vœu pieu ?

Merci Masse Critique Babelio et les éditions le Passage pour ce privilège de lecture.

©Chantal Lafon



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Les ciels furieux

Ce roman raconte l'histoire d’une petite communauté juive en période de guerre dans un village d’Europe de l’est.



L’histoire est racontée sur 24h du point de vue d’une fillette, Henni, entre ses souvenirs d’enfance et l’attaque de sa famille par des soldats/mercenaires.



Tandis qu'elle réussi à s’enfuir avec ses ainés, elle cherchera par tous les moyens à revenir à son domicile, sûre d'y retrouver ses parents et ses petits frères... mais le chemin sera semé d'embûches et d'épreuves douloureuses pour son cœur d'enfant.



On ressent à travers le récit les peurs, les angoisses mais aussi l’espoir de cette petite dont l’innocence face à sa situation m’a beaucoup touché.
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Les ciels furieux

Poignant, hypnotique, tempétueux et merveilleusement déplié. La fureur indépassable, un cri dans la nuit noire.

L'est de l'Europe, si près de nous encore, « La Zone de Résidence » les juifs encerclés. Une prison à ciel ouvert, les limites d'une liberté sournoise. Seules, les âmes sont résistantes, car secrètes.

Ce livre est une page d'Histoire. Les paraboles sont des éclairs qui transpercent les toits et les coeurs. L'écriture capable et consciente. Une fiction qui proclame ce qui fût. L'implacable cruauté des pogroms sporadiques. La barbarie sourde et violente, l'acuité de la vérité.

L'élan de l'incipit annonce un chef-d'oeuvre. Un livre porte-voix et une enfant : Henni qui sera tout au long de ce sublime récit d'ombre et de lumière, l'héroïne et un symbole.

« Au moment précis, où, enfin, Henni s'apprête à s'enfuir au-dehors dans la neige, c'est le plus grand, le plus maigre des hommes entrés dans la maison qui arrache le dernier bébé du sein de Pessia et le soulève au-dessus de lui. le cri qui monte avec l'enfant emplit l'air de faisceaux, de fumées, de roches explosives ».

L'heure dramatique, la violence d'une lâcheté incommensurable. L'antre où vit Henni, une petite fille de huit ans va, dans une soirée au préalable tranquille et douce, subir l'horreur.

La trame va et vient. L'incipit est la pièce maîtresse et va oeuvrer à l'intrinsèque, au plein d'un récit bleu-nuit, magnétique et terrifiant.

Henni a un grand frère Lev, une grande soeur Zelda et une corbeille de bébés dont on aime le sacre de l'éducation. le père qui offre aux aînées, un bébé à choyer. Pour Zelda : Iossif et Kolia et pour Henni : Avrom. « C'est le système ».Ce qui sous-tend le bien fondé de cette famille. Cette parole sera récurrente tout au long de ce roman de velours et d'âpreté.

La mère est la nourricière. Silencieuse et effacée, elle est néanmoins d'abnégation et d'héroïsme. Les filles sont les maternantes et les consolantes.

« Quand l'un des trois petites se met à pleurer, la voix du père ou celle de Lev s'élève aussitôt. Zelda ! Ou alors Henni ! Ton bébé pleure... ».

« Avrom est le trésor d'Henni. Avrom est le coeur étincelant de son coeur ».

Nous sommes en plongée dans cette vaste lumière. Une sérénité chaumière pour la famille Sapojnik. Jusqu'à cet ultime instant où la nuit sombre va ouvrir la voie aux chiens qui vont attaquer. Métaphores du Mal, la maisonnée chavire, les bébés vulnérables, des proies pour les monstres.

« Les hommes sont restés à l'intérieur de la maison, avec le père assommé. La mère debout au milieu d'eux et l'éparpillement des bébés ».

Zelda et Henni fuient. Lev aussi. L'énigmatique, un garçon manichéen, un frère aîné dont on ne sait d'où percent ses regards entre fureur et pacte de paix.

Elles vont courir, se recroqueviller dans une briqueterie encore fumante. Entre les silences sinistres, la peur chienne et l'effroi des bébés oubliés. Le fil de l'histoire fait des boucles entre l'avant pogrom et l'après dans cette fin d'hiver qui signe le summum de l'incommensurable. La poésie, elle, encercle la quiétude. « Très vite, la figure dans le cou de sa soeur, Iossif avait arrêté de pleurer. Il était sauvé de la solitude des berceaux ».

« Marcher, c'est échapper. Est-ce qu'elle comprend ? Il y a le mal qui remplit l'air, ici, là, partout. Est-ce qu'elle se souvient de ce qui s'est passé? Personne ne doit les voir ».

Comment revenir ? Ouvrir le rideau d'ombres intestines. Frôler les forces maudites entre les bourrasques, les chemins à l'aveugle, oubliés et perdus. Revenir dans l'antre avec Zelda. Communier les courages aux espoirs. Où sont les bébés ? L'enfance égarée, Henni va-t-elle vaincre ses angoisses et ses peurs ? Elle, dont la fratrie est le battement même de son coeur. L'étoile arrachée de ses cheveux. Elle pleure les griffes et les crocs, avides de morts assassines. Elle est exemplaire, magnanime, écume et rage, loyauté et farandole. Elle est souveraine, fragile et pourtant tenace. Affronter la meute, le froid et la faim. Courir à toutes jambes vers son bébé. Où est-il ? Une nuit radeau de Géricault. « Voilà. Elle a l'oiseau posé en ailes de scarabée sur le dos et puis elle a l'idée. Les chiens et la rage bondissante, les mâchoires, les gueules révulsées de rouge ».

« Les ciels furieux » la pierre angulaire d'une littérature hors pair. Une urgence de lecture, un livre inestimable, beau sous le plein d'une écriture liane et triste de par l'évènementiel.

Une enfant inoubliable. L'emblème de la résistance.

« Les ciels furieux » est une apothéose. Un tableau sombre de l'Histoire. Tout ici tremble sous le poids de ce qui fût en vérité de ces hommes et femmes et enfants, juifs. Poussés dans le dos dans le froid de la neige haine. Il y a ce livre. Il y a ce témoignage à peine romancé. Tout en symbole et quintessence. le charme des bébés et la vulnérabilité comme un sanglot infini.

Lisez ce livre. Offrez-le, partagez-le comme le pain pour la faim et l'eau pour la soif. Afin de ne jamais oublier.

Après , « La Belle Lumière » « Maria » « Nuit de septembre »,« Les ciels furieux » d'Angélique Villeneuve est le sacre littéraire. Publié par les majeures Éditions le Passage.

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La belle lumière

La belle lumière, l'hymne à la persévérance.

Magistral, étonnamment lucide, mature, « La belle lumière » est un chef-d'oeuvre. Avant tout sachez que l'écriture d'Angélique Villeneuve est à elle seule déjà, un palais d'honneur.

« Elle se le promet. Elle aura vingt-deux ans dans dix jours. Loin du passé, apprendre à vivre dans l'Alabama. »

Kate et déjà si déterminée à contrer les angoisses les plus tenaces. Elle, dans cette plantation du Sud des États- Unis, éloignée des siens pour vivre avec Arthur. Kate puise entre landes et forêts, les paraboles à réinventer. Chercher au plus profond des clairières les conjugaisons qui feront d'elle la future mère d'Helen. Siamoises avant l'heure du bercement des jours, diapason et la maternité salvatrice.

« Quand les deux ne seront plus qu'un, quand le dedans sera le dehors et le dessus le dessous, alors tu entreras dans le royaume. »

Le récit n'est plus. Nous sommes dans l'histoire, celle retranscrite avec le chant des intériorités. La conviction d'un langage source, entrelac, et dévoré par un poignant qu'on n'oubliera jamais. Helen dix-neuf mois, malade, recroquevillée dans son petit lit. L'ombre étale ses craintes et attise l'inquiétude de la perte, celle de la mort. Bataille encerclée par les méandres des impuissances. La mère est devenue l'emblème des risques du monde et de l'irrévocable.

« Il existe huit sortes de fièvres. Celle d'hiver et celle des pluies, la grande, la petite, la jaune, celle qui n'en vise qu'un seul et celle qui ravage des familles ou des hameaux entiers, celle qui transforme les visages en charbon et les corps des humains en bêtes. »

Kate dessinant l'espoir au-delà des larmes sur la fragilité des épreuves vacillantes. Helen va survivre. La fièvre aura eu raison de ce petit corps brassé dans tous les sens, devenue aveugle, sourde et muette. Dix-neuf mois de lumière, de sons et d'un langage disparu à jamais. le néant, l'enfant est l'abîme où Kate plonge les bras en avant. Les cheveux accrochés aux racines de l'impondérable. le combat va être manichéen, opératif et spéculatif. Apprendre à Helen à vivre dans le sombre de ses nuits.Le toucher pour seule arme, le point d'appui d'une enfance brisée. Kate est tenace. L'amour d'une mère emporte avec lui les rayons d'une lumière résistante et altière. Elle va affronter les épreuves. Chercher de par le monde le vaste de l'espérance. La clef qui lui rendra sa fille. Helen va se métamorphoser en pépite d'or de courage et de ténacité. Grâce à Miss Sullivan, aux garants des possibilités mais et surtout grâce à elle-même. Kate sera l'abnégation. Céder sa place aux vents contraires et croire en sa fille Helen. Ce récit mémoriel est un flambeau.

« Helen est la première femme aveugle, sourde et muette de l'histoire à obtenir un diplôme universitaire. Elle crée en 1915 une fondation pour la prévention de la cécité et la lutte contre la malnutrition. Socialiste, elle milite toute sa vie pour le droit des femmes et la paix… En 1952, à l'occasion du centenaire de Louis Braille, la France la décore de la Légion d'honneur à Paris. »

« La belle lumière » est la conjugaison des renaissances. Il est un modèle. Crucial et incontournable, l'éclatante belle lumière, celle de la foi en l'autre. En lice pour le fabuleux prix Hors Concours des Éditions indépendantes 2021. Publié par les majeures Éditions le Passage.



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