Bien étrange roman à une voix croisant le destin de la narratrice (auteure, professeur, mère de famille, aux échecs sentimentaux successifs, ayant vécu en Andalousie) et d'un fait divers crée de toutes pièces autour d'une héroïne aux nom et prénom des plus symboliques (le poète Frédéric Garcia Lorca et le musicien Vladimir Horowitz) ; une jeune femme terne d'apparence, Lorca Horowitz, peu qualifiée, mal aimée, à la mère sénile jouant de sa relative transparence et de sa faiblesse simulée pour se faire admettre au sein de l'affaire florissante d'un couple de riches architectes et à totalement la noyauter. Si la femme de son patron aux certitudes et à la position sociale bien établie et fortunée l'a prend dans un premier temps sous son aile et la nourrir de conseils pour s'affirmer un peu plus, Lorca va très vite dépasser ce stade en s'appropriant tout ce que cette dernière affiche, avec le plus grand mépris pour ses collègues ; à savoir un corps remodelé, devenu séduisant, sa couleur de cheveux, ses vêtements, bref en devenant son clone et de surcroît en escroquant le cabinet d'architecte jusqu' à le mettre en faillite. Un but devenir l'autre, celle dont la vie est idéale et en la poussant à se détruire pour prendre sa place et le faire sans que cela se voit, mis à part sa principale victime.
Fantastique mise en scène de la part d'Anne Plantagenet qui; pour le coup, monte et démontre à la fois les étapes du plan mis en place par l'objet de son récit et établit des parallèles avec ses propres déceptions sentimentales et frustrations privées quasi existentielles (ses hommes et ses maris, ses orientations professionnelles, son intérêt pour le travail d’Emmanuel Carrère...ses étudiants). Le tout en bribes bien rôdées,
Lorca va à la fois patiemment mais sans coup férir, s'approprier la vie de sa patronne, son apparence, ses habitudes, sans que son mari ne s'inquiète, s'inventer un petit ami thanatopracteur héritier d'un oncle (pour justifier son train de vie), faire le récit de cette nouvelle vie à une mère totalement sénile. Personnage complexe, mythomane absolue mais assez lucide pour savoir que cela ne pourra pas forcément durer, pire, accumuler les preuves qui serviront à son acte d'accusation....
Qui n'a pas rêver de se fabriquer un destin doré..... Lorca l'a voulu et la crédulité de ses futures victimes aidant, se l'est offert un temps...Quant à la narratrice, elle a peut-être ainsi voulu trouver une certaine prolongation dans ce personnage de ses propres attentes, freins, carences de sa personnalité....
Le texte et les récits croisés sont d'excellente qualité, sans excès de longueurs et la thématique originale. Un livre qui m'a plu.
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