AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Carlo Lucarelli (144)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Une affaire italienne

L’intrigue se déroule à Bologne sur une courte période, débutant quelques jours avant Noël. Nous sommes en 1953. Une femme a été assassinée dans un petit appartement. La voisine qui habite l’étage situé au-dessous a prévenu la police.



La victime est Stefania, l’épouse du professeur Cresca, victime quelques mois plutôt d’un étrange accident qui a causé également la mort d’un enfant. On fait appel aux lumières du commissaire De Luca, plus ou moins sur la touche car policier durant la seconde guerre mondiale, donc suspecté de collusion avec les fascistes…



Il est assisté dans son enquête par un jeune policier, Giannino, féru de jazz et on va suivre le duo à un concert où ils vont rencontrer une jeune femme dont la voix ressemble à celle de Lena Horne.



J’ai beaucoup aimé me retrouver à cette époque si particulière : la seconde guerre mondiale n’est pas si loin, la guerre froide bat son plein, on ne sait plus qui espionne qui et on a la gâchette facile… il y a des règlements de compte dans l’air, des policiers ripoux…



Bologne, dans le froid de l’hiver : il neige et il faut bien dire que le chauffage n’était pas particulièrement au point à l’époque. L’atmosphère est glauque, et les méthodes d’investigation limitées, les experts n’étaient pas encore entrés en scène.



Quel plaisir d’arpenter ses rues où l’on peut se faire trucider à tout instant, sur fond de jazz et de musique italienne, de belles brunettes, aux jambes divines qui aiment bien se déplacer pieds-nus, et surtout notre belle chanteuse Claudia, alias Facetta Nera, dont notre commissaire s’éprend au passage… sur fond de cuisine italienne qui fait saliver alors que De Luca est quasiment anorexique et soigne son insomnie à la caféine (ah les vertus de l’expresso !)



De Luca, ex-commissaire qui pourrait le redevenir, que l’on appelle Ingénieur, est un personnage sympathique et attachant qui met un point d’honneur à résoudre une enquête plombée d’avance, sous les ordres du commandeur d’Umberto qui s’empiffre de bomboloni, sorte de beignets à la crème, plutôt du style barbouze, ripoux comme on veut…



Carlo Lucarelli multiplie les pièges, les fausses pistes jusqu’au bout du roman pour notre plus grand plaisir. Il nous offre au passage des coupures de journaux de l’époque de la guerre froide, ce qui intéressait la population à cette époque pour nous donner le temps de souffler un peu entre deux coups d’accélérateur sur la belle voiture de Giannino dont la « conduite sportive » comme disent les djeuns donne souvent le tournis.



C’est la première fois que je lis un polar de Carlo Lucarelli et cela me donne envie de continuer à explorer son univers. Son style est plaisant, ses réflexions sur le démenti plausible, ou le crime parfait ou perfectible ou encore la manière de « gérer l’imperfection » ou ses comparaisons avec les différentes races de chien pour étiqueter les flics, les ripoux, ceux qui sont doués…



Un grand merci à NetGalley et aux éditions Metailié qui m’ont permis de découvrir ce roman ainsi que son auteur.



#Uneaffaireitalienne #NetGalleyFrance
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
Commenter  J’apprécie          587
Albergo Italia

Un petit polar sympa pour passer l'ete. Un ete polars pour passer le temps. Ils ne viendront pas cet ete. Ils sont bien venus passer deux jours, tous ensemble. Tous, beaucoup de bruit. Pour rien. Ils sont restes deux jours a se reconnaitre, a s'agglomerer, et sont vite repartis. Je me dis que c'est normal, ils ont passe l'age. Pingre consolation. Les plus grands vont faire du stop, je ne sais d'ou, eux ne savent pas vers ou. Les plus petits veulent les parcs d'attractions et les piscines des resorts ou leurs parents se prelassent. Finies les colos chez les grands-parents. Les jeux de table et de plein air (mais aurais-je eu encore assez de souffle pour leurs longs jeux?), les randonnees (mais au lieu de les mener, n'aurais-je pas ete dernier de cordee?), les lectures du soir (va savoir si le cercle autour de moi ne se serait eparpille pour rejoindre les smartphones). Oh, il reviendront. Pour encore deux jours de bruit et de fureur ou je serai un meuble qu'on embrasse. Ma femme prend ca mieux que moi. Elle me console comme elle peut. “-Tiens, j'ai fait des keftas et une salade cuite pour aller avec, comme tu aimes. Mais ne mange pas trop de pain, tu as pris du ventre. Maigre comme tu es tu as l'air d'une corde avec un noeud au milieu”. Je souris et pose mon livre. Un polar italien tres sympathique. Ca se passe en Erythree, fin 19e siecle, pendant l'occupation italienne. Un meurtre qui s'avere cacher une magouille plus importante au niveau national italien. J'ai aime les personnages des enqueteurs. Un capitaine de carabiniers qui souffre de sa solitude et du climat (ou des climats) erythreen, et son aide, un “zabdiye" autochtone. Ces deux la s'entendent a merveille, se completent, et je parierais fort qu'il y a entre eux, sans mentionner le mot, de l'amitie. J'ai aime les descriptions de lieux, de maisons traditionnelles, d'habits, de coutumes de politesse et d'hospitalite. J'ai aime le rendu des relations complexes colonisateurs/autochtones. Et puis il y une intrigue qui se complique mais finit par etre resolue. Enfin, presque, parce qu'il faut croire qu'une affaire resolue n'est jamais un point final dans cette Italie fin de siecle. Un polar tres sympa. Vraiment. Surtout pour un ete sans colo.
Commenter  J’apprécie          568
Meurtre aux poissons rouges

QUESTURE DE BABELIO

BRIGADE CHRONIQUEUSE



PROCES VERBAL

DE PREMIERE DEPOSITION





Le 29 mars 2024, à 15h20, dans les locaux de la brigade, la soussignée agente DIX-SEPT MH, chroniqueuse judiciaire à BABELIO, a lu l'ouvrage MEURTRE AUX POISSONS ROUGES co-écrit par MM. CAMILLERI Andrea, né à le 06 /09 /1925 à Porto Empedocle et décédé le 17/ 07/ 2019 à Rome et par LUCARELLI Carlo, né le 26/ 10/ 1960 à Parme, et a déclaré ce qui suit :



-je connaissais Andrea depuis quelques années. Je l'avais rencontré dans les rayonnages « gros caractères » de la médiathèque de mon quartier, du fait que nous étions tous deux passionnés de littérature policière, lui comme auteur reconnu et moi comme lectrice bigleuse , et j'ai continué à le fréquenter assidûment même après son décès. En revanche, j'ignorais l'existence de M.Lucarelli. Et encore moins de cet ouvrage ludique écrit en étroite collaboration, avant de tomber sur lui dans une librairie.



-À Bologne, le 28 mai 2006, à 11h30, on a retrouvé à son domicile, le cadavre d'Arturo Magnifico, mort étouffé, la tête dans un sac plastique. À ses côtés gisent trois poissons rouges et une seule chaussure. Mais, dans l'appartement, nulle présence d'aquarium.

En découvrant que la victime est originaire de Vigàta et que certains détails de l'autopsie lui ont été dissimulés, l'enquêtrice Grazia Negro contacte, dans le plus grand secret, son confrère sicilien, Salvo Montalbano, qui accepte de l'aider pirsonnellement en pirsonne. Les deux policiers se tiennent informés de leurs avancées respectives par courriers manuscrits interposés non officiels « glissés sous la porte » et autres messages codés y joignant pièces à conviction, rapports de police, photos-montages, collages et articles divers.



-Le petit giallo de 150 pages, sans atteindre les sommets du genre, est surtout amusant dans sa forme. Il manque toutefois la truculence de Camilleri et la présence de Catarella qui s'est trompé de train, après avoir commis une belle bourde dont il a le secret. Grazia Negro est une femme d'action, très compétente. Elle semble vivre avec un enseignant non-voyant. Je n'en écrirai pas davantage car Livia la maîtresse de Salvo qui est fort jalouse, pourrait lire cette chronique. On sent surtout que les deux auteurs, amateurs de belles filles à forte poitrine, se sont bien amusés en l'écrivant. Daniele di Gennaro, l'éditeur italien, révèle en fin d'ouvrage comment les deux compères s'y sont pris.



-Je lirai un giallo de Carlo Lucarelli.



MH DIX-SEPT
Commenter  J’apprécie          5414
Le temps des hyènes

Un deuxieme Lucarelli pour moi, une deuxieme enquete du capitaine des carabiniers royaux Colaprico pour l'auteur. Pas tres content, le capitaine. Les italiens ayant fait d'Asmara la capitale administrative de leur Erythree, il a du s'y transplanter, et il souffre du climat plus sec et de l'air qui semble rarefie en ces hauteurs. Il preferait nettement la chaleur moite du port de Massaoua. Par contre son adjoint, son bachi-bouzouk, le zabdie Ogba, s'y sent beaucoup mieux, etant plus pres de sa maison, ou l'attendent patiemment sa femme et ses enfants.



Le duo d'enqueteurs va devoir elucider nombre de morts mysterieuses. Trois abeshas (abyssins) et un ferengi (un europeen), un marquis italien grand proprietaire de terres, pendus a un sycomore sacre. Suicides? Apres qu'une vieille sorciere solitaire soit assassinee, ils commencent a se douter qu'il s'agit de meurtres. Mais comment sont ils lies? Qui est, ou qui sont, les meurtriers? Et pourquoi? Nos enqueteurs, apres bien de peripeties ou ils devront se battre et failliront y laisser leur peau, arriveront a desembrouiller les mauvaises pistes et decouvrir les coupables grace a une serie de coincidences. Et a leur flair surtout, parce que le zabdie Ogba ne croit pas aux begatami, aux coincidences. Tout ce qui a l'air berghez, evident, est pour lui suspect. Il n'arrete pas de repeter: kem fulut negher zeybahriawi yelen, il n’y a rien de plus trompeur que l’evidence. Et Colaprico, grand lecteur de Conan Doyle, de s'emerveiller: mais c'est une phrase de Sherlock Holmes! Eh oui, dans cette histoire, Colaprico est le superieur, le patron d'Ogba, mais il n'y tient que le role du docteur Watson.



J'ai apprecie l'intrigue et ses revirements, tres bien menee par Lucarelli, mais j'ai surtout apprecie, peut-etre plus que dans Albergo Italia, le rendu des relations entre colonisateurs italiens et colonises autochtones, qu'ils ne comprennent pas vraiment. “Ogba aurait voulu s’approcher, s’asseoir devant le capitaine et lui expliquer calmement mais fermement que meme si les ferengi – et encore pire ces cullu ba’llei d’Italiens je-sais-tout – pensaient que les abesha etaient tous pareils, faits pareils, noirs pareils, au caractere et au temperament pareils, en realite ce n’etait pas ainsi. Riches, pauvres, puissants, miskín, catholiques, orthodoxes, musulmans, facons de parler differentes, dialectes differents, comme les Italiens, avec les memes lieux communs que les t’lian attribuaient a leurs compatriotes : ceux du Serae sont orgueilleux, ceux de l’Acchele Guzai sont des emigrants, ceux de l’Hamasien asha sont stupides, ceux du bas plateau ne veulent rien faire. Meme noirs nous ne sommes pas pareillement noirs, pensait Ogba, il y a les keyeh, les clairs, les kedereiti, comme lui, les tzada et aussi les haroro, tellement sombres qu’ils semblent brules”.

Et j'ai aime les descriptions de la nature, des villages aux maisonettes agglomerees, les toucouls, differentes des huttes isolees de bergers, les edmo aux toits de chaume; ainsi que celles des nouveaux quartiers europeens a Massaoua et Asmara.

J'ai aime que Lucatelli insere dans ses dialogues, en plus de mots et d'expressions erythreennes, differents dialectes italiens et leurs savoureux jurons: boja d’e jeval, misère du diable; boja d’una vigliaca putena troja, nom d’une garce de putain de salope, et son equivalent d'une autre region, porca putena d’una vaca boja. Chacun traitant tous les autres de stronzoli, budiulo e ir budello di su ma, connards, batards et fils d’une grande pute.

Et j'ai aime les allusions litteraires a Rimbaud (qui fait du trafic d'armes), Baudelaire (a qui on doit le cafard, dont souffrent des fois nos heros), et bien sur Conan Doyle.



En bref, j'ai tout aime dans ce roman. C'a ma ete une joyeuse lecture, tres raffraichissante. L'immersion dans la chaleur de Massaoua ridiculise la canicule qui nous frappe ces jours-ci. Et quand on prend - virtuellement - la direction des hauts plateaux d'Asmara, on respire beaucoup mieux .

Commenter  J’apprécie          543
Une affaire italienne

Giallo alla bolognese.

Nous avons connu cette série ancrée dans la République de Salò, puis dans l'après-guerre (Carte blanche,'L'Eté trouble et Via delle Oche).

Nous somme en 1953, le commissaire De Luca n'est plus en odeur de sainteté. Cantonné à des tâches subalternes, il est réintégré sous une fausse identité pour enquêter en sous-marin sur l'assassinat de l'épouse d'un universitaire .



Intrigo italiano. Il retorno del commisario De Luca.est un giallo classique, dont on suit l'intrigue avec un peu de distance. Se détache plutôt de ce roman noir la figure de Claudia une jeune femme métisse, fille d'un Bolonais et d'une Abyssine , qui a grandi en Italie, travaillé comme repiqueuse dans les rizières ambiance Riz amer de Giuseppe de Santis , combattu avec les Partisans dans les montagnes, et qui chante désormais dans les clubs de jazz en rêvant de faire un disque et de se présenter au festival de SanRemo.

Se détache également, et c'est là que Carlo Lucarelli donne la pleine mesure de son talent de romancier , le portrait d'un pays portant encore les séquelles de la guerre, mais en pleine mutation sociale - l'Affaire Wilma Montesi est en train se secouer le pays-, culturelle -l'American Way of Life, le jazz- et surtout politique, le pays entrant de plein pied dans le jeu de dupes que mènent les Etats-Unis et l'URSS en Europe comme partout ailleurs.



De Luca toujours aussi investi, intellectuellement et affectivement dans ses enquêtes, va devoir louvoyer et apprendre de ces nouveaux enjeux politiques et stratégiques différents de ceux avec lesquels il avait dû composer sous Mussolini.

Une Affaire italienne semble donc marquer un tournant dans l'existence pourtant riche du commissaire De Luca, comme dans celle de la politique internationale de l'Italie, à suivre dans Peccato Mortale et L'inverno più nero.



Je remercie les éditions Métailié pour l'envoi de ce roman noir reçu dans le cadre de l'Opération Masse Critique Mauvais Genres.
Commenter  J’apprécie          543
Le temps des hyènes

« Mais putain c'est qui ce Sherlock Holmes? » Eh oui, on se le demande à la lecture du Temps des hyènes. Carlo Lucarelli semble s'être bien amusé en rédigeant cette nouvelle aventure du duo formé par le capitaine des carabiniers royaux Colaprico et Ogbà, son assistant abyssin. Nous les avions laissés à la fin d'Albergo Italia, nous les retrouvons sur les hauts plateaux d'Asmara pour enquêter sur une vague de suicides plus que suspects. Dans la colonie italienne d'Érythrée, la découverte des corps de trois Africains retrouvés pendus ne perturbent guère les autorités mais lorsque le quatrième cadavre s'avère être le marquis Sperandio, figure importante de la colonie, cela change la donne. Colaprico et Ogbà doivent quitter Massaoua pour l'intérieur des terres.



Le temps des hyènes permet à Lucarelli de poursuivre son incursion en terre abyssine, de tirer de l'oubli cette période méconnue de l'histoire italienne, de montrer l'absurdité d'une entreprise de colonisation plus qu'hasardeuse qui semble avoir été décidée pour faire comme les voisins. Il dépeint le quotidien d'hommes issus souvent des régions pauvres de l'Italie sur un continent qui leur est totalement étranger et les conséquences de cette présence dans la vie des Erythréens.

L'évolution de la relation entre Colaprico et Ogbà prend un tournant des plus intéressants. Le capitaine des carabiniers royaux, grand lecteur de Conan Doyle, dont il collectionne les écrits publiés dans The Strand Magazine jalousement gardés dans sa caisse militaire, est sûr de ses capacités de déduction. Or il est souvent, pour ne pas dire toujours, pris de vitesse par son zaptié Ogbà , fin connaisseur du pays, des nombreuses langues locales, de l'italien, et des Italiens… Intuitif, observateur, il trouve toujours les indices avant Colaprico. Sherlock Holmes n'est pas celui qu'on croit.

Cependant deux obstacles l'empêchent de mener l'enquête à sa guise, et à son rythme. Le carabinier étant son supérieur hiérarchique, il doit attendre son assentiment ou ses ordres. Et surtout Colaprico est Italien, il est le colonisateur. Ogbà est l'indigène, le colonisé. Il doit aussi mesurer ses gestes et ses paroles et louvoyer pour que Colaprico parvienne aux mêmes conclusions que lui.

Lucarelli s'amuse donc beaucoup avec Le temps des hyènes, il dynamite les codes et bouleverse l'équilibre du duo d'enquêteur pour le plus grand plaisir du lecteur.
Commenter  J’apprécie          541
Péché mortel

L'été 1943 à Bologne.

L'Italie est fasciste, mais en quelques semaines elle passe de la domination de Mussolini à sa chute puis à l'occupation allemande.

Au commissariat, les policiers régissent différemment selon les individus.

De Luca, policier obstiné et désabusé, mène inlassablement ses enquêtes.

Dans la dernière en date, un cadavre sans tête, puis une tête sans cadavre.

Lui seul va s'y intéresser et découvrir que les deux ne correspondent pas, et qu'il met le doigt dans un trafic d'héroïne et dans un système mafieux.



Le ton du récit et le personnage du commissaire rappellent les polars de Philip Kerr et de son héros Bernie.

Quelques jours après la lecture, j'ai du mal à me souvenir des détails de la résolution, et pourtant j'ai l'impression de bien connaître De Luca, Bologne en cette année 1943 ainsi que ses habitants...

C'est ce qu'on appelle un roman policier d'atmosphère, cette atmosphère m'a bien séduite et j'y reviendrai !



Merci à Babelio/ Masse critique et Métailié.

Commenter  J’apprécie          530
Le temps des hyènes

Ce que j’ai ressenti:… L’étrange sensation de Aini berberè zeb’hi…



"-Le temps des rêves est fini, murmura-t-il, maintenant c’est le temps des hyènes."



Le temps des hyènes, c’est un temps de violences qui se cache au pied d’un sycomore…Sous une chaleur étouffante, des vies brisées, des morceaux d’Histoire,des tessons de légendes, des crocs sauvages, des débris de poussières de rêves…Un polar mosaïque aux couleurs chaudes: des pièces de faïences rougies de sang vengeurs, d’autres de couleurs d’or floues, certaines de terres pimentées…Et en fond sonore, un rire carnassier…



Nos deux enquêteurs auront bien du mal à lever le voile sur cette vague de mystères qui entourent ses suicides, mais un peu de génie de Sherlock Holmes semble habiter instinctivement l’un des deux alors, à force de détails et de situations incongrues, tous les petits secrets enfouis dans la terre rouge vont prendre forme dans ce patchwork de cupidité. On se plaît à suivre ce duo improbable, qui dans leur différences, ont toujours au fond des yeux, une marque de respect et la même envie de résoudre les équations que la mafia dissimule dans les sombres recoins…



"Il n’y a rien de plus trompeur que l’évidence."



Dans cette lecture, j’ai aimé l’authenticité. Ce mélange des langues et des expressions non traduit, cette effervescence bouillonnante du choc des cultures, la ronde des mots aux consonances d’ailleurs…Une bonne rasade savoureuse de chianti italien ainsi qu’un mélange de dialecte africain pimenté qui relève le roman noir de Carlo Lucarelli, pour mieux nous raconter les failles d’une colonisation sur les bords de l’Érythrée. Rien n’est évident dans ses relations entre les deux nationalités, mais l’auteur nous le fait ressentir avec une ardeur passionnée et teintée d’une touche de magie noire ensorcelante…



Ma note Plaisir de Lecture 9/10
Lien : https://fairystelphique.word..
Commenter  J’apprécie          480
La huitième vibration

Challenge ABC 2016-2017



En cette fin de 19ème siècle, l'Italie est une toute jeune nation, née de l'unification des différents petits Etats de la péninsule. Une nation avec un grand « N » ? pas tout à fait. Que manque-t-il donc à ce néo-royaume pour entrer dans la cour des grands ? Bon sang mais c'est bien sûr : une Colonie ! Ni une ni deux, voilà l'Italie partie à la conquête de la Corne de l'Afrique, accrochant l'Erythrée à son tableau de chasse. « Pourquoi sommes-nous ici ? Prestige national, dit Cristoforo, à part la Suisse, nous étions la seule nation civilisée à ne pas avoir de colonie outremer. Mission morale, nous devons apprendre à ces sauvages à porter des chaussures et à ne pas se promener les attributs à l'air... ». L'appétit venant en mangeant, l'Italie envisage de prendre pied en Ethiopie, et se prépare à affronter les armées du Négus Menelik.

C'est dans ce contexte que nous débarquons à Massaoua, port érythréen sur la Mer Rouge, en compagnie des renforts militaires amenés en prévision de la grande bataille. On s'immerge alors dans le microcosme de la colonie et dans sa chaleur de fournaise. A Massaoua, on traficote, on complote, on tombe amoureux ou on assouvit ses désirs simplement lubriques ou d'une perversité absolue, on mène des enquêtes secrètes, on jette des sorts, on rêve de gloire ou de sédition ou de cultiver des choux. On transpire, donc on boit, on se noie dans l'alcool, le khat ou pire encore. On sue, on crève de chaud et de langueur, on bout, on se consume. Jusqu'à ce que chaque petite intrigue implose dramatiquement à la tête des personnages, jusqu'à ce que la grande bataille d'Adoua explose à la figure de l'Italie en un désastre absolu alors que pourtant, jusque là, « aucune armée indigène n'a jamais réussi à battre une armée européenne bien encadrée ».



Sur un rythme lent (mais qui donc aurait l'idée saugrenue de se presser par cette chaleur infernale?), la construction chorale se met peu à peu en place, nouant plusieurs intrigues qui se recoupent parfois. Si je n'ai guère ressenti d'empathie pour les colons « civils », j'ai été bien plus touchée par le sort des soldats, les simples ploucs inexpérimentés fraîchement arrachés (« désignés volontaires ») à leurs champs sardes ou siciliens pour grossir les rangs du corps expéditionnaire, ou les officiers aguerris conscients que « ça va être un bain de sang », tous envoyés au casse-pipe par un commandement fumeux.

Intéressant pour l'Histoire qu'il aborde, captivant pour les histoires, les aventures et les personnages qu'il déploie, ce roman ne rend pas une image fort brillante de l'Italie : « Nous y sommes allés sans préparation, mal commandés et indécis et, ce qui est pire, sans le sou. En nous fiant à la chance, à l'art de s'arranger et à notre bonne mine. Nous l'avons fait pour donner un désert aux plèbes déshéritées du Midi, un débouché au mal d'Afrique des rêveurs, pour la mégalomanie d'un roi et parce que le président du Conseil doit faire oublier les scandales bancaires et l'agitation de la rue. Mais pourquoi est-ce que nous faisons toujours ainsi, nous autres, Italiens ? ». Il sauvegarde néanmoins un peu de poésie (et de morale) dans ce monde de brutes, en laissant doucement triompher la pureté et l'innocence.

« Ceci est la terre de la huitième vibration

de l'arc-en-ciel : le Noir.

C'est le côté obscur de la lune,

porté à la lumière.

Dernier coup de pinceau du tableau de Dieu »

(Tsegaye Gabrè Mehdin)
Lien : https://voyagesaufildespages..
Commenter  J’apprécie          433
Albergo Italia

Cette nuit j'avais rendez-vous avec Carlo, prière de ne pas déranger. Après 6 années de disette, Métailié nous offre enfin un inédit de Lucarelli, Albergo Italia, dont l'action se situe une nouvelle fois en Afrique coloniale à la fin du 19ème siècle.

Lors de la publication de La Huitième vibration en 2010, l'Italien avait déclaré au Monde « C'est le premier livre de ma deuxième vie d'écrivain ». Cette nouvelle vie avait pour cadre la première guerre italo-éthiopienne et l'apparence d'un grand roman d'aventure polyphonique et foisonnant. Nous ne cacherons pas notre surprise à la lecture d'Albergo Italia, dont l'action se déroule toujours à Massaoua, quelques années plus tard, mais dont le tableau historique a été quelque peu occulté par une intrigue à l'ancienne. Il semble donc que l'Italien revienne à ses premières amours, avec un roman à énigme solidement porté par un nouveau duo d'enquêteurs, Colaprico, capitaine des carabiniers admirateur des oeuvres d'Arthur Conan Doyle et son assistant Ogba, Docteur Watson Abyssin. Les hommages aux aventures de Sherlock Holmes sont toujours un plaisir à lire quand on les doit à de belles plumes comme celle de Boris Akounine avec sa Prisonnière de la Tour. Lucarelli est un grand nom du polar, qui réussit tout aussi bien dans cet exercice de style, avec l'aisance et l'humour qui le caractérisent. On se laisse porter sur les routes abyssines, par les parfums et la clameur des rues, redécouvrant le fonctionnement de cette colonie de 16.000 Italiens venus en Érythrée chercher la gloire et la fortune. "A Massaoua quand il fait chaud - et il fait toujours chaud- on peut entendre les rêves des autres". Lecteur, prends garde à la poussière ou Lucarelli te perdra sur les routes chaotiques érythréennes.

Albergo Italia est un roman au charme fou rempli de légèreté et de malice qui se lit d'une traite. Le nouveau duo créé par Lucarelli fonctionne parfaitement et on espère le retrouver bientôt ( apparemment dans Il tempo delle Iene). S'il n'est pas nécessaire d'avoir lu La Huitième Vibration avant de se plonger dans Albergo Italia, il serait dommage de se priver du plaisir de lire cette grande fresque, qui sort en poche (Métailié Suites) pour l'occasion.

Carlo, je regrette d'avoir fait du pied sous la table à Maurizio de Giovanni pendant ton absence, tu restes toujours le numéro uno.
Commenter  J’apprécie          420
Une affaire italienne

Rien de tel qu’un bon polar pour l’été.



Ici le personnage principal est un drôle de flic, De Luca, qui enquête incognito sur le meurtre d’une femme, assassinée dans sa baignoire, du sang partout dans l’appartement.

Le récit s’ouvre sur un accident de voiture. Notre héros est à bord, son lieutenant conduit sur une route italienne dangereuse sous la neige. Va-t-il mourir ?



Il n’est pas officiellement en mission – on comprendra pourquoi plus tard, son passé pendant la période fasciste n’étant pas reluisant. Pour le moment nous sommes à Bologne en 1953 et il fait froid.



De Luca doit déjouer de nombreux pièges et se concentrer sur l’enquête. Il a des indices, notamment ce jeune garçon, qui vit un étage plus bas que l’appartement où a été commis le meurtre, et qui a croisé un homme à tête de monstre : l’assassin peut-être ?

Mais il y a plein de chausse-trappes et De Luca doit déjouer les pièges pour rester en vie.



Et puis il y a le jazz, et cette rencontre improbable avec la belle chanteuse. Celle-ci a plusieurs identités : Facetta Nera, en référence à sa peau brune, mais aussi Claudia. Elle rêve de devenir une vraie chanteuse de jazz et de faire un album. Mais son Manager, ou bien celui qui la soutient dans ses démarches, est retrouvé pendu subitement : faut-il voir l’action de tête de monstre ?



Très documenté sur la période post-fasciste, le décor est très bien planté et l’intrigue bien cousue.

Nous sommes aussi en pleine guerre froide, et on découvre au fil de l’enquête qu’il y a de liens obscurs entre l’Italie et la Russie …



Carlo Lucarelli mène son affaire italienne avec talent, et nous le suivons avec plaisir, jusqu’au rebondissement final.

Un bon bol d’air frais qui nous replonge quelques années en arrière pour une équipée qui en vaut la peine : AVANTI !

Commenter  J’apprécie          336
Almost blue

Je pourrais vous le raconter en musique.



Jazz.

Chet Baker. Almost blue.

Almost blue, there's a girl here and she's almost you. Almost blue, almost flirting with the disaster..Almost blue, there's a part of me that's only true...

Heavy Metal.

Nine Inch Nails: Reptile. Angel bleed from the tainted touch of my caress, need to contaminate to alleviate this loneliness..

Nine Inch Nails: Mr Self detruct. I am the voice inside your head, I am the lover in your bed, I am the sex that you provide, I am the hate you try to hide…and I control you. .

Nine Inch Nail; Heresy. Your God is dead and no one cares, if there is a hell, I will see you there..



Musique.

Don, don, don: cloches tonitruantes.

AC/DC: Hell's bells. My lighting's flashing across the sky. You're only young but you gonna die...

Musique.

Apaisée, féminine, tendre: Summertime.

Musique.

Almost summer ? Bluetime ?

Harmonie nouvelle. Accord parfait.

Finies, les cloches de l'enfer.



Ou voulez-vous que je vous le dise en couleurs?



A Bologne, la ville ROUGE aux arcades BISTRES, Simon, l'aveugle, plongé dans le NOIR et la "petite » inspectrice Grazia Negro à la voix BLEUE , traquent le monstre, l'Iguane à la voix VERTE.



Une traque.



Mais l'Iguane change de peau.

C'est à cause des cloches, c'est à cause de la bête qui grouille sous sa peau : on ne le trouve pas, seule sa voix verte, immuable, le trahit.

L'aveugle la connaît, cette voix. Il faut prendre l'Iguane de vitesse dans cette ville de Bologne pleine de mystères, de cours intérieures, de portiques assombris, d'étudiants clandestins…



Un polar original, un thriller terrifiant, servi par une écriture elliptique, nerveuse, dans un monde de sons, de couleurs, de synesthésies vibrantes qui restituent magiquement la belle ville de Bologne.



Des héros que leurs faiblesses rendent forts, émouvants, - Grazia la flic qui a mal aux pieds, mal au ventre, et Simon l'aveugle qui a peur de sortir, de toucher ce qu'il ne peut pas voir - face à des caricatures souvent cocasses –Vittorio le bellâtre, psychiatre romain macho et technocrate- ou à un monstre gravement déjanté – L'Iguane himself !



Un récit choral pas toujours simple à suivre –j'ai béni mon instinct qui me l'a fait lire en VF- auquel l'aveugle et l'iguane mêlent leurs voix.



Un petit « plus » pour les amateurs : à déguster en écoutant, en boucle, Almost blue…

Musique…



Commenter  J’apprécie          307
Le temps des hyènes

Ce livre sort des sentiers battus. Il nous plonge en pleine colonisation italienne, en Érythrée. Pendant que le Négus tente de mobiliser et envoie ses troupes au combat pour gagner l'indépendance de l'Éthiopie et de l'Érythrée, considérée comme une province, de riches Italiens exploitent les meilleures terres…



Grâce au Club des Explorateurs du polar de Lecteurs.com et aux éditions Métailié que je remercie, j'ai pu découvrir un roman intriguant, dépaysant et très intéressant.

Le temps des hyènes débute dans le village d'Afelba où Jàfet qui mène ses chèvres paître sous le sycomore, découvre un homme pendu. le lendemain, il y en deux autres ! Ce sont des ouvriers agricoles du marquis Sperandio… trois noirs, quelle importance ! Mais, un jour plus tard, c'est le marquis lui-même qui pend à l'arbre !

Carlo Lucarelli débute fort et son roman m'a plongé dans la vie quotidienne de ces Érythréens qui sont de différentes ethnies et tentent de survivre sous la domination de la monarchie d'Umberto 1er, roi d'Italie. L'auteur ne plaint pas les expressions, les formules de différents dialectes aussi bien érythréens qu'italiens.

Pour tenter d'éclaircir le mystère de ces quatre pendaisons, le capitaine des carabiniers royaux, Piero Colaprico, ancien ami du marquis, mène l'enquête, parfaitement secondé par son brigadier, le bachi-bouzouk des zaptiè, les carabiniers indigènes, Obgabriel Ogbà.

Le capitaine est un lecteur assidu des romans de Conan Doyle. Il se réfère évidemment à Sherlock Holmes pour orienter son enquête : « Il n'y a rien de plus trompeur que l'évidence. »

Au fil des pages, j'ai rencontré de nombreux personnages, certains vraiment pas recommandables mais l'auteur a bien su mettre en avant les jalousies, les rivalités, les intrigues entre les Italiens présents en Érythrée : « Ne jamais prendre les Italiens au sérieux, Ils font toujours des choses inutiles. » D'ailleurs, chacun s'exprime avec un accent qui trahit sa ville ou sa région d'origine.

Chercher un assassin dans ce pays de la corne de l'Afrique, c'est comme chercher une aiguille dans une botte de foin mais Colaprico ne se décourage jamais. Il veut finir d'assembler sa mosaïque avec ces tesselles qui motivent beaucoup Ogbà.

Carlo Lucarelli mène son affaire avec un prologue, douze mouvements, deux intermèdes et un épilogue. Entre Asmara, la capitale, située à 2 300 m d'altitude, et Massaoua, le port sur la Mer Rouge, Carlo Lucarelli fait explorer le pays mais je voudrais, pour finir, mettre en exergue l'impressionnante scène, chez Ogbà, lorsque sa femme, Manna, réussit à préparer un repas non prévu pour le capitaine, en un temps record.



Ses cinq enfants : Adèba, Kabbedèsh, Mesfún, Lettebrahán et Tzeghè Ueiné l'aident à préparer l'ingera, l'agibò, le senàfec et la kichà, tout cela paraissant délicieux, comme l'ensemble de ce livre très exotique, même si : « le temps des rêves est fini. » et que c'est « maintenant le temps des hyènes. »




Lien : https://notre-jardin-des-liv..
Commenter  J’apprécie          280
Loup-Garou

Miles Davis , le générique d'Ascenseur pour l'échafaud, un serial killer -animal qui croque à belles dents dans la chair fraîche de ses victimes, un commissaire dépressif, insomniaque et secoué d'horribles contractures, une jeune inspectrice timide et gironde, mais qui se montre d'une grande détermination pour traquer les assassins: Carlo Lucarelli encore une fois nous sert un cocktail fort et bien noir!



Il faut rajouter néanmoins une pincée d'humour cynique: l'assassin est très vite connu, y compris de la police, qu'il nargue avec une politesse insolente.



Il l'est tellement, connu, qu'il est imprenable. Les "experts" -Lucarelli visiblement adore leur modestie!- disent que les serial killers ont deux points faibles : les corps à faire disparaître et le sens de la faute qui les fait prendre tôt ou tard ... Mais notre loup-garou lui s'en moque allègrement: sans la moindre culpabilité, il sème ouvertement ses cadavres ..Sauf un qui lui donne un peu plus de fil à retordre!



La police est aussi la cible de la noire ironie du récit. Celle de Modène accumule les bourdes: témoin renvoyé dans ses lointaines pénates, rapports déficients, filatures sans autorisation, diffusion des éléments de l'enquête à un malicieux journaliste déguisé en expert -encore un!- et qui se nomme...Carlo Lucarelli!!



La fin elle-même est une jolie gifle envoyée à notre goût des happy ends bien bouclées.



Un délice à déguster en V.O.!!
Commenter  J’apprécie          260
Laura de Rimini

Pendant cinq éprouvantes semaines, Laura de Rimini, jeune étudiante en littérature, "sorte de Mister Magoo qui marche sans voir ce qui se passe dans son dos, sans s'apercevoir de rien" va devoir échapper à un gang de tueurs, à des mafieux et à des flics corrompus, tout ça parce qu'elle s'est trompée de sac. On a beau ne pas aimer les polars, quand on transporte à son insu quatre kilos de cocaïne extra-pure appartenant à Grigorij, gros caïd ukrainien en pleine crise vestimentaire, il faut vite retrouver son instinct de survie, enfoui sous une épaisse couche de timidité et de bonne éducation.

Laura de Rimini est un bon pulp à l'ancienne, dans lequel Carlo Lucarelli démontre une nouvelle fois qu'un court récit bien rythmé est aussi efficace qu'un pavé de 400 pages, et que polar et second degré font souvent bon ménage. Lucarelli se livre à un bel exercice de style imposé par la brièveté du roman, construisant une intrigue solide et donnant vie et consistance à des personnages qui ne font que passer, la vie des mafiosis n'étant pas un long fleuve tranquille. La succession de rapides scènes d'action et l'inévitable collision des poursuivants qui convoitent tous le sac de Laura nous offrent un roman aussi visuel que sonore, avec force gesticulations, chutes, télescopages, et cris de terreur de l'héroïne (avec une scène d'orteil cogné contre un meuble en bonus). Par ces temps de disette, un brin d'humour décalé et quelques aphorismes ne peuvent nuire à la santé du lecteur de noir.
Commenter  J’apprécie          250
L'ispettore Grazia Negro : Lupo mannaro - A..

Dommage que cette compilation de trois nouvelles policières de Lucarelli n'existe qu'en VO: le regroupement est intéressant- et l'ambiance tendue!



Jugez plutôt: trois sérial killers qui ont pour caractéristiques d'emprunter le rituel ou la forme d'un animal - le loup, l'iguane ou le pit bull. Brr...



Trois traques rythmées par une bande-son tantôt jazzy , tantôt hard rock quand ce n'est pas une vraie bluette italienne bien sentimentale et dégoulinante de ti amo... comme on les aime, justement! Wap-do-wap...



Trois enquêtes de la "più tosta" des inspectrices: la douce, la tendre, la sexy, la vaillante Grazia Negro, qui face à ces trois BÊTES joue à merveille le rôle de la BELLE! Poopoopidoo!



Vous m'en direz des nouvelles - il y en a trois, ici, je vous rappelle!!



Gardez une petite lampe allumée à votre chevet: flip garanti!
Commenter  J’apprécie          230
Meurtre aux poissons rouges

Dans un appartement de Bologne, on trouve le cadavre d'un homme, mort étouffé dans un sac en plastique. A ses côtés, trois poissons exotiques tout aussi morts que lui.



Cette histoire de meurtre et de poissons rouges, on s'en fiche un peu, voire beaucoup. Bien plus que son intrigue banale et souvent invraisemblable, c'est la forme de ce court roman policier qui est intéressante : une compilation de documents - photos, articles de presse, rapports de police, et surtout échanges épistolaires ludiques et amusants entre deux enquêteurs.

Plus passionnante encore : la genèse, en postface, de cet ouvrage. Fruit d'un travail conjoint entre deux auteurs prolifiques de romans policiers, fusion de leurs deux univers. Rencontre et confrontation, à la faveur de cette intrigue, de leurs deux enquêteurs récurrents (l'inspectrice Grazia Negro de C. Lucarelli, le commissaire Montalbano de A. Camilleri). Une collaboration, un défi, presque un duel entre deux romanciers via leurs personnages qui se donnent la réplique, comme dans une partie d'échec, un spectacle de marionnettes en improvisation, un jam-session.



Bref, malgré une intrigue et un dénouement sans grand intérêt, ce livre se dévore, pour le plaisir de la construction, des échanges entre protagonistes, de l'exercice de style à quatre mains.
Commenter  J’apprécie          230
Guernica

Soyez rassuré, cet ouvrage ne constitue pas une description technique du bombardement du village basque, en 1937, par la Légion Condor de la Luftwaffe et leus assistants italiens. Mais Guernica, à moins de 100 km de Biarritz, et mondialement connu surtout par le célèbre tableau qu'en a fait Pablo Picasso, forme le décor de ce court roman de Carlo Lucarelli de 1996.



Guernica est devenu 'le' symbole de la guerre civile en Espagne (1936-1939), et même de la guerre tout court. Grâce aussi à de grands noms de la littérature, qui y étaient présents, tels George Orwell et Ernest Hemmingway. Le nombre d'ouvrages est, bien entendu, abondant. Plutôt que de produire une liste, je préfère me limiter à 2 ouvrages qui m'ont particulièrement impressionné : d'Orwell "Hommage à la Catalogne" et de Hemmingway "L'Adieu aux armes". L'ouvrage de Carlo Lucarelli est moins ambitieux que celui de ces illustres géants, mais indirectement il contribue, à sa façon, à montrer l'horreur qu'a été cette guerre fracticide en en recréant parfaitement le climat.



Comme héros Carlo Lucarelli a choisi un drôle de zèbre : Filippo Stella, un aventurier italien et chauffeur de poids lourds. Officiellement du moins, car il s'occupe de contrebande et d'autres petites affaires plutôt louches, jusqu'à son arrestation par l'armée italienne. Accusé d'espionnage et de dénonciation d'un colonel Mendoza aux communistes, il a le choix : ou être fusillé ou joindre la Légion italienne des Volontaires. Après cette formalité, il reçoit sa première mission : aider le capitaine Degl'Innocenti, venu spécialement de Florence, à trouver le corps de son ami, Vittorio, et à le ramener en Italie, pour être enterré dans le caveau familial. Mission importante car le mort était un ami du comte Ciano, beau-fils de Mussolini et son ministre des affaires étrangères. En plus, s'il réussit, peut-être pourra-t-il demander la main de la jeune veuve, dont il est amoureux depuis belle lurette.



La mission relativement simple se gâte lorsqu'il devient clair que le corps, qui lui est présenté, bien que méconnaissablement abîmé, ne peut être celui de son camarade. Suit alors une recherche à travers les zones de combat d'Espagne : de Terruel, en passant par Sigüenza, à Madrid, pour s'arrêter, bien entendu, à .....Guernica. En dire plus serait impardonnable.



Carlo Lucarelli, né à Parme en 1960, est un personnage multivalent : écrivain, régisseur, metteur en scène, animateur à la télévision et journaliste.

Il est surtout connu pour ses romans noirs, avec le commissaire De Luca, comme protagoniste principal. Le livre généralement reconnu comme son meilleur porte un titre en anglais, "Almost Blue", en hommage au trompettiste et chanteur de jazz, Chet Baker, trouvé mort peu avant à Amsterdam. Trois autres oeuvres valent la peine d'être mentionnées : "La huitième vibration", "Laura de Rimini" et "Enquête interdite".

Petit detail intéressant : l'arrière-grand-père de notre Carlo fut Antonio Meucci, ami de Giuseppe Garibaldi et surtout célèbre pour avoir inventé le téléphone. Invention longtemps contestée, mais, en 2002, reconnu par le Congrès américain.



Que Lucarelli ait écrit un livre ensemble avec Andrea Camilleri, le père spirituel de l'inspecteur Montalbano, ne devrait surprendre personne. Tous les deux, ils ont cet esprit original et la maîtrise des finesses et trouvailles linguistiques. Leur oeuvre, "Meurtre aux poissons rouges" comme le titre le laisse imaginer, est assez spécial !



Je termine par une citation de Carlo Lucarelli, en fait la dernière phrase de son "La huitième vibration", parce qu'elle est tellement typique pour son style et langage : "Ceci est la terre de la huitième vibration de l’arc-en-ciel : le Noir. C’est le côté obscur de la lune, porté à la lumière. Dernier coup de pinceau du tableau de Dieu."
Commenter  J’apprécie          210
Meurtre aux poissons rouges

La rencontre d'Andrea Camilleri et de Carlo Lucarelli organisée par l'éditeur Daniele di Gennaro nous offre ce que nous pouvons appeler une espèce de jam-session littéraire comparable aux boeufs de certains jazzmen ou musiciens. Cette rencontre permet de créer un court roman policier à 4 mains fort original, basé sur un échange de messages et courriers utilisant l'humour et le côté un peu déjanté du commissaire bien connu Salvo Montalbano et de son équipe. Je découvre Carlo Lucarelli suite à une bonne critique de Pecosa mentionnant les fameux giallos. Etant déjà très familier avec les romans de Camilleri je vais avec plaisir aller découvrir les romans de Lucarelli.

Commenter  J’apprécie          202
Un giorno dopo l'altro

Connaissez-vous Luigi Tenco? Un beau ténébreux italien, amant de Dalida et chanteur-compositeur, qui se suicida d'une balle dans la tête en 1967 au festival de San Remo parce que sa chanson n'avait pas été choisie..



C'était pour moi un parfait inconnu, mais "Un giorno dopo l'altro" , titre du "gialo" de Lucarelli est aussi celui d'une de ses chansons - et toute la "bande-son" du livre est tirée de son répertoire. Bien loin de Volare-oh-oh voilà de la chanson italienne qui vous donnerait envie de sauter dans le Tibre à pieds joints ou de vous allonger vite fait sur les rails du Palatino. Pas gai-gai, si vous voyez ce que je veux dire!



Le récit, lui, n'a rien de nostalgique ou de suicidaire: tendu, nerveux, plein de fausses pistes et de faux semblants - un american stafford ça ressemble à un pitt bull mais ça n'en est pas un- "Un giorno dopo l'altro" se lit avec fébrilité...



Le sujet en deux mots: un serial killer - ou est-ce un tueur professionnel? - a l'étonnante manie de signer ses crimes, de l'image du Pitt bull, un chien assez peu sympathique. C'est aussi le pseudo qu'il utilise sur le net.



Entre la toile du net où il prend ses "commandes" et celle du réseau autoroutier où il les exécute, le tueur va croiser bien des routes et semer bien des cadavres. Il devient clair qu'il a aussi en tête un autre projet..Il devient urgent de l'arrêter.. Deux personnages semblent se mettre en travers de sa course meurtrière: un "ragazzo" romantique qui écoute les chansons de Tenco au casque tout en travaillant pour un provider d'internet et trouve les messages du Pitt bull bien étranges et la belle Grazia Negro, inspectrice de choc, toute préoccupée par un problème de G- test qu'elle n'a jamais le temps de faire, tant l'enquête lui prend du temps, de l'énergie...



Qu'elle prenne garde pourtant à ne pas y laisser plus encore...



Le pitt bull est un animal à sang-froid, dressé à tuer: il n'a que faire des amateurs de chansons tristes ou des futures mamans surbookées...



Il peut n'en faire qu'une boucherie..



Toujours aussi bien écrit - le style se module selon les points de vue- glaçant , neurasthénique ou rationnel selon le cas, - le découpage de l'action est nerveux, presque cinématographique: même si enjeux et personnages deviennent vite assez limpides, on est suspendu à cette traque,...



Qui ira le plus vite: le chien de combat ou la lice ?

Lu en V.O.
Commenter  J’apprécie          200




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Listes avec des livres de cet auteur
Lecteurs de Carlo Lucarelli (430)Voir plus

Quiz Voir plus

Quiz sur l´Etranger par Albert Camus

L´Etranger s´ouvre sur cet incipit célèbre : "Aujourd´hui maman est morte...

Et je n´ai pas versé de larmes
Un testament sans héritage
Tant pis
Ou peut-être hier je ne sais pas

9 questions
4781 lecteurs ont répondu
Thème : L'étranger de Albert CamusCréer un quiz sur cet auteur

{* *}