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Critiques de Christian Chavassieux (182)
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L'affaire des vivants

Lecteurs, lectrices, finissez vite ce que vous avez en cours et jetez-vous sans plus attendre sur ce roman ! Il est en tout point magnifique.



... Hmm ? Pardon ? Il faut que j'argumente ? Bon. C'est vous qui l'aurez voulu !



Tout d'abord... tout d'abord, il y a l'écriture. Un style puissant, qui sait aussi bien manier les longues phrases denses, pleines de sève, où tout un monde se compose et prend vie, que les petites phrases incisives, juste à point, où l'essentiel se concentre en quelques mots. Qui fait alterner dans le même temps passé et présent - l'ampleur de l'un et la vivacité de l'autre. Un récit qui se glisse au plus intime de ses personnages mais sait aussi s'en détacher pour mieux les remettre en perspective, avec l'auteur qui s'invite dans son texte, pour quelques lignes, non sans malice, nous prend à témoin puis disparaît pour mieux nous rendre à l'histoire, complices désormais autant que lecteurs. Un sens du suspense impeccable, tissé de petites allusions, d'ouvertures fugace sur la suite qui en disent beaucoup trop ou beaucoup trop peu, sans qu'on sache jamais, bon sang ! comment tout ça va bien pouvoir tourner.

Une narration qui accroche dès la première page et retient tout entier, jusqu'à la toute dernière. Bien après, même.



Ensuite, il y a les personnages. Des personnages ambigus, pétris d'autant de bon que de mauvais, jamais entièrement haïssables pour les pires, jamais exclusivement aimables pour les meilleurs. Victimes, souvent, d'une éducation sans amour, d'un milieu sans esprit, primaire, étriqué et mesquin. Mais capables, malgré tout, de dépasser ce conditionnement - par le travail de toute une vie ou le temps d'une pensée, d'un geste, d'un espoir, d'un remords.

Charlemagne s'arrache à l'abrutissement des siens par l'ambition féroce, le travail acharné, qui sont aussi débordement de vie, d'énergie, de volonté, créatrices autant que destructrices. S'il reste au fond une brute aux violences intolérables, un tyran détestable, il se révèle aussi capable d'amour et de générosité, et au fond bien moins mesquin que ceux qu'il écrase.

Face à ce fort, Alma, jeune oie blanche dressée depuis toujours à l'obéissance, le corps et l'esprit barricadés derrière les conventions de son milieu, spectatrice d'une vie qui se décide sans elle, peut-elle être autre chose que victime ? Petite-bourgeoise jusqu'au bout des ongles, dans tout ce que le terme a de moins flatteur, mais trop conditionnée pour ne pas être touchante plus encore que méprisable, et assez sensible pour sentir l'absurdité des barrières que la vie lui impose, pour envier, du sommet de sa fortune, la richesse de ceux qui ne possèdent rien que la liberté et l'amour.

Fruit de leur union, Ernest a la passivité insensible de ceux à qui la vie a tout donné, sauf l'attention et l'amour indispensables. Faible et froid, sans grande intelligence, avec plus de sensiblerie que de sensibilité, mais largement racheté par la conscience croissante de ses propres défauts et de la vacuité de sa vie. Par ses élans toujours avortés, ses folies, ses échecs, sa malchance et sa lucidité, qui en font finalement un des personnages les plus attachants de l'histoire. Lui... et un autre, franchement lumineux celui-là, un peu trop peut-être mais dont la présence en filigranne aère agréablement ce récit souvent très sombre.



Il y a cette finesse dans l'analyse psychologique des personnages et des ressorts sociaux qui les sous-tendent. La documentation, solide et intelligente. Ce talent pour donner vie, jusque dans le moindre détail, à un univers historique bien précis : celui de ces petites bourgades de province, longtemps modestes, endormies, puis gonflées soudain par l'essor industriel, la multiplication des usines et l'exode rural qui l'accompagne. Rien n'y manque : l'entrée en scène de nouvelles élites, leurs tactiques d'intrusion auprès des familles déjà affirmées, la confrontation inéluctable, difficilement conciliable, entre esprit paysan et esprit citadin, malgré tous les renouveaux, la cruauté de la vie dans les usines et les revendications qu'elle entraîne. Sans grande indulgence, mais sans manichéisme, jamais.



Christian Chavassieux s'inspire ici des plus grands - des Zola, Balzac, Hugo, Flaubert -, et sait face à eux s'affirmer par un style, une voix bien à lui. J'ai bien envie de dire qu'il n'a rien à envier à leur talent, avec même plus de finesse et d'esprit que certains.



Un grand merci à l'opération Masse Critique Babelio, pour me l'avoir fait découvrir, et aux éditions Phébus, pour publier de si bons textes.
Lien : http://ys-melmoth.livejourna..
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Mon très cher cueilleur de roses

C'est avec gêne, hésitation et appréhension que la narratrice pénètre à Malvoisie, un domaine reçu en héritage. Et elle entre dans une relation compliquée avec Antoine qui entretient les cultures, voire la demeure, avec dévouement. Et ce n'est pas tout : l'histoire de ce vieil homme incarne la face la plus sombre de la tragédie qui l'a cueillie dès l'adolescence. Cependant, écrivaine, elle surmonte son dégoût pour pénétrer le crime par une autre porte. Celle du coupable qui paye chaque jour. Lui aussi. Heureusement, en parallèle se profile une autre rencontre, toute en douceur celle-là.

Le style de l'auteur est précis et coloré. Il ose des mots et des tournures qui donnent une certaine érudition tout conservant sa fluidité. Un enchantement pour parcourir les affres de notre narratrice écrivaine, qui trouve ainsi en la personne d'Antoine un contact salvateur dans sa quête de vérité, ce qui lui permet d'enrichir son expérience d'écriture.

Un livre fort.
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Je suis le rêve des autres

Dans Je suis le rêve des autres, Christian Chavassieux nous attache aux pas de Malou et Foladj. Suite à un rêve fait par ce jeune garçon, âgé de 8 ans, les sages de son village pensent qu'il est un reliant. Mais pour en avoir la pleine confirmation, il va devoir prendre la route afin de se rendre auprès de ceux qui savent. Néanmoins, il ne partira pas seul car un vieux guerrier va l'accompagner dans ce voyage. Si pour l'un, celui-ci sonne comme la dernière étape de sa vie, il en va tout autrement pour l'autre car cela inaugure le commencement de quelque-chose de grand. C'est donc dans un parcours, qui s'annonce déjà semé d'embûches, que nos deux protagonistes s'engagent. Finalement, en ce début du périple, nul ne sait comment les événements vont tourner alors tout peut arriver.



Entre roman initiatique et récit d'aventure, Christian Chavassieux nous immerge dans un texte intimiste dont l'intrigue se ressert exclusivement autour de ses deux personnages principaux. En effet, il met en scène ici deux protagonistes aux antipodes l'un de l'autre avec d'un côté, un enfant qui commence sa vie et s'émerveille de tout ce qu'il découvre et de l'autre côté, un vieillard qui la termine et en profite donc pour faire son bilan.



A travers Malou, l'auteur explore la figure du jeune apprenti qui entreprend une quête pour savoir s'il est ou non un élu. Sous l'égide de Foladj et des nombreuses rencontres qu'ils vont faire, il ne va pas cesser d'apprendre, ce qui va l'aider à murir. Bien que Malou soit très jeune, il fait preuve d'une certaine maturité et il a une vivacité d'esprit qui fait de lui un garçon attachant. Tout au long de l'aventure, il est tiraillé entre ses besoins de jeune garçon qui a soif de jeux avec d'autres enfants de son âge et ses doutes, ainsi que ses angoisses de ne pas être à la hauteur des attentes que les adultes ont à son égard. Malou incarne le petit garçon qui cherche à se conformer aux désirs des autres mais qui se retrouve bien vite dépassé par la situation.



Foladj, lui, est un ancien guerrier écrasé par le poids des années. Même s'il paraît aux yeux de Malou être un homme solide, Foladj est à la fois fatigué et rongé par la culpabilité de ses choix passés. Etre complexe que l'on découvre au fur et à mesure du livre, Foladj voit en Malou sa rédemption. En accompagnant cet enfant, en le protégeant coûte que coûte, il espère racheter les péchés qu'il a commis par le passé. Au travers des souvenirs, au gré des rencontres, on prend conscience de la violence qui a jalonné sa vie d'avant. Il fut sans doute un homme dur et implacable, il est aujourd'hui un homme brisé mais à la conviction sincère de terminer sur une belle et noble action.



Ils forment un duo extrêmement touchant et contribuent pleinement à nous faire apprécier ce roman.



Je suis le rêve des autres est un texte très court et pourtant incroyablement bien écrit. La plume de Christian Chavassieux est d'une grande fluidité. Si au premier abord, on plonge dans les pérégrinations de deux héros chargés d'une quête, très vite on prend conscience de la richesse de ce texte du point de vue de la multitude des thématiques abordées.



En effet, dans Je suis le rêve des autres, il est question d'approfondir cette notion de rapport à l'autre. L'auteur nous parle de relation intergénérationnelle puisque dans son livre il a associé un jeune et un vieillard et nous montre comment ils apprennent l'un de l'autre et développe finalement une relation filiale très forte. Mais, Christian Chavassieux devise aussi autour des rapprochements avec l'étranger. Il faut garder en tête que pour Malou, quitter son village natal, lui a aussi permis d'aller à la rencontre d'inconnus et de découvrir le monde sous toutes ses facettes.



Ce livre, c'est aussi une vraie bouffée d'oxygène dans le sens que l'auteur a renoué avec l'un des grands canons du genre en plongeant ses lecteurs dans une grande pérégrination qui amène les héros à traverser de grands espaces. La nature y est assez grandiose. Ainsi, ce roman est aussi une balade dépaysante qui offre aux lecteurs un plaisant moment de lecture... suite sur Fantasy à la Carte.
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Mon très cher cueilleur de roses

Christian CHAVASSIEUX. Mon très cher cueilleur de roses.



Saskia, une autrice parisienne reçoit en héritage, d’un ancien amant, Jacques Royan, une immense demeure, La Malvoisie, située en Bourgogne, sur la rivière la Roncine. Elle accepte ce legs et quitte Paris. Cette bâtisse constitue une refuge pour notre écrivaine. Elle va, dans ce cadre buccolique, se consacrer à l’écriture. Autour de cette propriété, un jardin, un verger, un rucher. Tous les ingrédients pour vivre en autarcie.Quelle joie de constater que ces lieux sont bien entretenus et donnent des fruits, des légumes, du miel et les poules alimentent notre héroïne et lui fournissent de nombreux œufs… Très rapidement, Saskia va partager des conversations avec son « jardinier », apprendre à le connaître et sympathiser avec ses voisins et voisines, Michèle, un couple d’anglais, Marcelle, la compagne d’Antoine, une femme au grand cœur, sans oublier Claire, la précédente occupante de la Malvoisie.



C’est un voisin, Antoine Cervin qui entretient avec amour ce site : c’est lui qui bêche, sème, plante, taille, récolte et porte des paniers garnis de fruits, de légumes et de roses à l’heureuse propriétaire. Il demeure secret et ne se confie que rarement à notre héroïne. Peu à peu il va lui livrer quelques confidences sur son enfance, son adolescence et sa vie heureuse près d’Apt. Il s’est exilé en bourgogne à la suite d’un terrible drame dont il a payé sa dette à la société. Il a tué son épouse et purgé sa peine avec une quinzaine d’années de prison… Il s’est réinsérer dans la vie sociale, s’est reconstruit tant bien que mal. Mais les êtres chers rôdent !



Les aveux de cet homme font ressurgir les ombres qui hantent Saskia. En effet, alors qu’à l’âge de douze ans, en rentrant de l’école, elle a découvert que son père venait d’assassiner sa mère. Elle n’a jamais pu lui pardonner. Toujours, elle a refusé de lui rendre visite en prison, n’a jamais lu les lettres qu’il lui a adressé, ouvert les cadeaux qu’il lui a offert. Comment pardonner un tel geste ? Elle ne l’a jamais revu. Antoine est un féminicide, comme son père… Dans son livre, en gestation, elle tente son introspection, mettant en parallèle les deux meurtres. Antoine lui donne son accord : son histoire peut servir de canevas pour un récit. Saskia nous révèle sa véritable identité, elle est Floriane. Pour l’écriture, elle a pris une nouvelle identité afin de fuir, d’ensevelir son passé derrière elle. Saskia, Antoine, chacun nous dévoile l’inventaire de leurs vies, leur passé douloureux, leurs espoirs.



Ce roman appréhende la rédemption, le pardon, la résilience. C’est un récit intimiste. Comment peut-on se reconstruire, vivre, revivre, survivre après une vie brisée, suite à un meurtre ? A-t-on le droit de juger ses semblables ? Il faut tout réapprendre pour s’intégrer à nouveau dans la société, que l’on soit meurtrier ou victime collatérale d’un tel geste. Et dans cette quiétude, notre romancière écoute son voisin, juge, en son âme et conscience. Une amitié naît entre eux. l’alternance des chapitres narrant les histoires parallèles des deux héros procure une fluidité dans leurs histoires De plus l’amour qu’éprouve Saskia pour Claire lui ouvre de nouveaux horizons, une sérénité, un bonheur, une renaissance. l’analyse psychologique des personnages est bien menée. De plus, n’oublions pas que c’est un homme qui écrit et s’approprie les caractères de son héroïne.

(19/01/2023).


Lien : https://lucette.dutour@orang..
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Je suis le rêve des autres

Parce qu'il a fait un rêve particulier, Malou, un jeune garçon de huit ans, est confié à Foladj, un ancien mercenaire. Ensemble ils doivent faire un long voyage qui les emmènera dans une ville où les sages doivent déterminer si Malou est un réliant. Au cours de ce voyage les deux personnages vont apprendre l'un de l'autre. Pour Malou cette expédition sera aussi l'occasion de découvrir le monde.

Un beau roman d'initiation où l'on retrouve l'univers des Nefs de Pangée. Deux personnages magnifiques, qu'on ne veut pas quitter quand arrive la fin du livre. Un beau texte plein de poésie et de douceur. Bref, une lecture qui fait du bien par ces temps troublés.

Merci à Christian Chavassieux pour ces belles pages.
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Mausolées

Un post apocalyptique atypique, tout en nuances servi par une belle plume. Magnifique.



La période des Conflits a totalement reconfiguré le visage géopolitique mondial, une méfiance, voir une haine tenace contre la science et le savoir est ancrée dans la population et ses dirigeants. Danc ce nouvel âge obscurantiste, le riche Khan, un ancien chef de guerre, embauche un poète et savant pour prendre soin de sa bibliothèque légendaire.



L'univers m'a fait penser à China Mieville, du fait que nous sommes entre science fiction et fantasy, et aussi de certains de ces personnages, tel Lilith, mi femme, mi robot.

Nous naviguons entre quête des origines, la démocratie, les luttes de pouvoir, les représentations, l'éthique scientifique et la nécessité (?) de la culture et du savoir.

Dans ce monde vieillissant, deux camps s'affrontent : ceux pour qui l'absence de natalité est une chance pour le monde, celle enfin de voir l'humanité disparaitre (Peter Watts ne renierait pas l'idée, nous en reparlerons avec le dernier Bifrost en date), et les quelques autres avec une lueur d'espoir.

Les personnages sont tout en nuances, comme ce chef de guerre, le méchant du livre qui se révèle beaucoup plus subtil qu'il n'y parait au premier abord. Et puis il y a Sargonne, la ville-monde dont nous déambulons dans certaines ruelles et commerce, ces quartiers cachés où la révolte grogne.

L'action est plutôt rare et lorsqu'elle est présente, elle est loin d'être spectaculaire. C'est un roman d'ambiance, assez sombre, crépusculaire, avec quelques touches d'optimisme.



Christian Chavassieux sait utiliser sa plume, ses mots font naitre les images. Sans trop en révêler sur sa ville et ses habitants, il fait naitre notre imagination pour combler les vides. Et au final, l'impression d'avoir lu beaucoup en si peu de mots.

Des belles phrases, voir plus bas, et bons mots comme ce "livres libres", ou mourir ? Ou cette citation que tout critique pourrait employer face à certains textes :

"Le scénario sur lequel j’avais déjà décidé de ne pas m’attarder m’épargnait l’effort de l’oublier"



Passé assez inaperçu lors de sa sortie, ce roman mérite amplement qu'on s'y attarde.
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Mausolées

Dans un futur proche, la population mondiale a baissé de moitié suite aux Conflits et à leurs dégâts collatéraux, les Etats ont laissé la place à des Cités toutes-puissantes, les hommes comme les livres sont atteints de maux mystérieux qui les font tomber en décrépitude... Léo Kargo, jeune écrivain quelque peu désabusé, débarque à Sargonne, recruté par le milliardaire Pavel Adenito Khan, ancien chef de guerre controversé reconverti dans la sauvegarde du patrimoine culturel et scientifique de l'humanité. Malgré l'attrait du défi qui est lancé au jeune homme, s'occuper d'un des dernières bibliothèques au monde, celui-ci est très vite conscient que des vérités lui sont cachées... Est-il vraiment là par hasard ?



Ce récit d'anticipation nous plonge dans un futur où prime la violence, le rejet d'une science qui a dégénéré et celle d'une culture qui n'a été d'aucun secours. Il nous met face à nos pires scénarios de fin du monde : un black-out informatique qui prive la Terre de ses yeux, ses oreilles, sa bouche ; un silence mortel qui est le point de départ à un déferlement de violence sans précédent - ni vu ni connu ; la perte de milliards de données qui plonge l'humanité dans une obscurantisme sans nom ; le recul considérable de la science ; l'explosion des maladies ; une humanité qui se retrouve stérile et affronte, désarmée, le spectre de sa fin imminente...



Dans ce contexte particulièrement noir, un homme tente de percer les mystères qui l'entourent : celui de la bibliothèque et de son savoir qui enivre ; celui de l'homme énigmatique qui l'a engagé et des relations complexes qu'il entretient avec son entourage ; celui de l'étrange Lilith, mi-femme mi-machine, et de sa haine qu'elle couve dans les entrailles de la vieille cité...



Ces questionnements le renvoie à ses propres fêlures. Qui est-il ? Qui sont ses parents ? Quel rôle peut-il jouer dans cet univers chaotique ?



A ce récit d'anticipation s'entremêle un véritable polar. Léo est fasciné par le Palais des Fous, le jeu de stratégie inventé par son employeur, où chaque pièce semble représenter un personnage de la réalité. Le jeune bibliothécaire s'interroge sur le rôle qu'il joue dans cette étrange partie. Tout bascule lorsqu'un meurtre crapuleux survient...



Certaines descriptions sont particulièrement dérangeantes et plus d'une image m'a maintenue éveillée tard dans la nuit. Pourtant, on est happé par l'histoire, intrigué par ce qui se trame réellement. Les deux premières parties entretiennent à merveille cette tension. Le héros est persuadé d'être à deux doigts de la vérité, frôle la folie, se croit coupable...



Le rythme s'accélère encore dans la 3e partie où les révélations pleuvent. Pourtant ce tiers m'a moins plu au final. Sans doute parce qu'y intervient un personnage extérieur à ce huis clos, un ennemi peu sympathique au demeurant. J'aurais préféré que tout reste "en famille"...



Quant à la fin, elle laisse pantois. Le héros trouve-t-il enfin sa place ? Y a-t-il encore un espoir pour le monde ?



Un dernier mot quant au style de l'écrivain et les idées qu'il véhicule. Tour à tour ciselée, poétique, violente, son écriture ne laisse pas indifférent ! Ses mots suscitent des images d'une force incroyable. On s'y croit, on s'y voit... J'ai particulièrement apprécié tous les passages qui magnifient le livre, la littérature, la culture, tout ce qui fait la mémoire de l'homme.



"Autour de lui, tout un peuple sans figures déployait ses rêves, des armées de signes mêlaient leurs énigmes, des foules de vérités et d'anathèmes vociféraient les unes contre les autres, des dialogues et des imprécations s'élevaient confusément. Un chahut de voix et de paroles repliées dans le secret des pages."



Dans cette histoire, il oppose deux idées, celle des interventionnistes qui veulent tout mettre en oeuvre pour relancer la démographie et sauver l'humanité et celle des démogénistes, comme il les appelle, qui considèrent qu'il faut laisser faire la nature, que l'interventionnisme humain n'est que source de malheurs et de chaos.



"Il s'agissait, pour les démogénistes, de se résigner à voir l'humanité s'éteindre au bout de quelques générations, ou bien de voir stagner sa démographie à un stade proche de celui des origines de l'espèce (c'était d'ailleurs le sens de ce néologisme : "la population de l'origine"). Les démogénistes modérés y voyaient la promesse d'une nouvelle humanité ; les plus extrémistes voulaient empêcher toute tentative de remédier à ce qu'ils voyaient comme un dessein de la nature."



Mais, malgré tout, même si notre destinée semble inéluctablement fatale, l'espoir fait vivre... Et c'est ainsi que j'interprète les incursions de l'auteur dans le récit. Après tout, comme il nous le rappelle, il ne s'agit que d'une fiction et nous pouvons, peut-être, encore, tout changer !



Qui vivra verra...



"- Tous les jours que la vie nous offre ne sont pas destinés à l'urgence. Et pourtant. Nous devrions pour chacun, avoir l'ambition d'un projet. Comme d'autres, j'ai laissé parfois le temps s'écouler sans utilité. Je ne le regrette pas forcément, mais il me semble à présent, à présent que je sais qu'il m'est compté, que j'aurais pu en faire quelque chose."



Dernière info pour les fans, l'auteur prévoit d'écrire une préquelle, histoire de mieux comprendre ce qui a amené le monde à sa perte et de découvrir comme s'est construit un personnage comme Pavel Khan surnommé "le Diable" !
Lien : http://lacoupeetleslevres.bl..
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L'affaire des vivants

Waouh !



Une saga familiale qui prend aux tripes et qui puise sa réalité dans la vie paysanne de la fin du XIXème, vie rude et violente qui ne pardonne pas à ceux qui réussissent.



Une écriture fluide au vocabulaire rustique de l’époque, des personnages authentiques tant dans leurs splendeurs, leurs rudesses, leurs bêtises ou leurs décadences, des situations familiales réalistes où la jalousie efface à grands coups de poing la bienveillance mal perçue, une époque foisonnante d’innovations qui vont changer le siècle, une saga qui aborde bien des sujets toujours d’actualité.



Une famille pauvre donc, quatre garçons qui ne sont là que pour faire tourner la ferme, unique gagne-pain ; il y a l’aîné, Charlemagne, le plus intelligent, le plus rude à la tâche, il y a Louis le plus jeune, le sauvage, le rêveur et puis il y a les deux autres, les incultes, les fainéants, les profiteurs, les trop sanguins. Et Charlemagne va porter la famille sur ses épaules et va construire un avenir radieux pour tous et va croire à un mariage d’amour et ne sera compris que par une poignée. C’est clairement mon personnage préféré qui se bat toujours pour avoir plus, pour ne plus souffrir d’un mal d’amour qui vient d’une enfance maltraitante où la tendresse est absente.



Un Zola moderne qui touche par la justesse de ses réflexions ; la bêtise des femmes de la petite bourgeoisie et la hargne des paysans face à ceux qui arrivent à sortir du lot, le racisme indécrottable de l’époque et l’incompréhension face à l’homosexualité, l’éducation délaissée des enfants et leur solitude…



J’ai adoré le style, l’histoire ainsi que les quelques interventions de l’auteur qui nous parle de ses personnages et de ses interrogations par rapport à leurs futurs possibles, probables ou déjà pliés…
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Les nefs de Pangée

Proposer une analyse des « Nefs de Pangée » de Christian Chavassieux, c'est forcément amputer l'oeuvre, tant elle déborde tous les cadres attendus. Le roman propose sans le moindre complexe des dizaines de thématiques entrecroisées (une philosophie du temps à l'échelle des planètes, une méditation sur les origines et les chutes des civilisations, une réflexion sur les pouvoirs politiques et religieux, la relativité des certitudes, la force et la fausseté partielles des mythes...), et des fils narratifs aussi variés que prenants : une chasse XXL, mais aussi un récit d'initiation, une révolution des mentalités, une guerre aux mutiples rebondissements, des récits d'exploration.... Avec, aux deux tiers, un renversement stimulant (même quand on est prévenu), où les cartes sont rebattues et les règles du jeu revues de bout en bout. Le tout dans un monde à la faune et à la flore exotiques, à la géographie vaste et variée (amateurs de cartes, il y a de quoi se régaler, en cours de lecture ET après la lecture complète), aux mœurs résolument inédites (faire un enfant devient toute une histoire à épisodes...), avec plusieurs dizaines de personnages – chacun jouant sa propre partition – et des dimensions systématiquement hallucinantes, qu'il s'agisse d'un arbre-fer, d'un navire de chasse ou d'un arsenal. A côté de Pangée, les épopées célèbres paraissent presque mesquines, les cycles de fantasy petits joueurs, les space opera raplapla.

Le revers de la médaille logique d'une telle profusion concentrée en moins de six cents pages, ce serait une densité excessive ou une tendance à l'hermétisme. Il n'en est rien. Habilement, l'auteur structure l'oeuvre en courts chapitres et anime ses créatures d'une écriture précise, évocatrice, d'une haute tenue, mais jamais pesante ou poseuse. La fluidité et le naturel reviennent chaque fois que le lecteur risquerait de se perdre dans des considérations techniques ou mystiques un peu poussées. Les personnages, très nombreux, demandent un minimum d'attention pour être suivis, et il est certain que ceux qui aiment s'attacher aux pas d'un héros principal qui porte à peu près toute l'histoire sur ses seules épaules ne seront guère convaincus. Mais si, comme moi, on est sensible aux seconds rôles aussi discrets que cocasses, exaltants ou touchants, on sera comblé par les apparitions d'un Erv, un Mâad, une Taum ou un Yma (de loin mon préféré, drôle et émouvant).

Ajoutons à cela que la tonalité d'ensemble, qui pourrait sembler solennelle et premier degré, est en réalité régulièrement infléchie par des notations humoristiques (par exemple sur les animaux de transport avec lesquels il faut sans cesse négocier, sans parler du « calouca rouge », dans le glossaire en fin d'ouvrage! Ou les réactions un peu décalées ou très modernes de certains personnages). C'est surtout la tristesse, la lassitude qui reviennent au cœur de scènes énergiques ; en cela, « Les Nefs de Pangée » renouent avec le véritable esprit épique, cet accablement qui s'empare de l'âme des guerriers, dans « L'Iliade » ou plus encore « Salammbô ». Et au milieu du fracas des vagues et des armes, des mini-tragédies marqueront la mémoire, comme la disparition prématurée de Tyla, qui avait tout d'une héroïne majeure et est engloutie à peine son aventure lancée, avec l'amertume des destins inaccomplis. Une manière de prévenir le lecteur que le récit sera grandiose, mais qu'il faudra accepter d'être parfois dérouté, détourné de nos repères en matière d'imaginaire. Pour notre plus grand plaisir.
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Les nefs de Pangée

Quelle que soit "l'animal" qui a réussi à se dresser sur ses deux pattes et à se servir d'appendices opposables, l'évolution, du moment que l'échange et le volontarisme altruiste fait place au commerce, donc au profit ....c'est le début de la dégringolade...Heureusement les êtres ouverts , de bonne volonté et créatifs savent tisser des ponts.

L'écriture, qu'elle serve à rapporter les faits, se faire souvenir du passé, pour ne rien en oublier ou à faire rêver, le travail de journaliste ou de conteuse, le travail d'écriture pour témoigner. Le respect à tout prix de sa sauvegarde et de sa liberté, de la part de toutes les parties en faction est la garantie d'un avenir commun et de la paix.



Outre le cheminement d'Hammassi désignée dés son enfance pour être la conteuse de la dixième chasse, celle qui réunira derrière elles toutes les nations, aube d'une ère nouvelle....Le récit de cette chasse sur l'océan, l'Unique, d'un méga monstre marin et au passage de ses protecteurs, sous race de flottants.....réjouira les amateurs de combats maritimes, et fera sourire d'une idée féministe, plus qu"eugéniste, de la manière de sélectionner les meilleures gamètes pour engendrer les meilleurs Gehm ou Gélich ....Tout un monde créé ici que l'ont découvre, comme une survivance d'un monde connu, peut être en mieux, que l'on suit les yeux grands ouverts pour pas en perdre une miette.
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Les nefs de Pangée

J'ai acheté ce roman parce que cela faisait un moment que je n'avais pas lu de fantasy, et parce que la couverture m'a tout simplement éblouie. ça m'arrive de plus en plus souvent, d'acheter des livres d'abord pour leur couverture, ça va finir par me jouer des tours...

Pas cette fois, cependant, parce que j'ai adoré les Nefs de Pangée. Je partais avec un peu de crainte à cause de quelques mauvaises critiques que j'avais lues, et j'ai été un peu effrayée au début parce qu'on est vraiment propulsé dans cet univers sans préambule, mais au final j'ai été happée complètement, au point que c'est avec regret que j'ai tourné la dernière page du livre et quitté les personnages.



L'histoire pourrait se découper en deux parties. Dans la première, on suit parallèlement les aventures de plusieurs personnages : d'abord, il y a les navigateurs lancés sur les mers pour chasser l'Odalim, un monstre marin gigantesque et terrifiant. Ils sont emmenés par le jeune commandant de la flotte, Bahca, accompagné de la conteuse du voyage, Hammassi.

Pendant ce temps, sur la terre ferme, de drôles d’évènements ont lieu : Plairil, le fils de l'une des familles les plus influentes de la capitale, s'est érigé en idole d'une secte étrange, qui se propage de plus en plus vite à travers tout Pangée.

Forcé de fuir son tyran de frère, Logal s'est lancé sur les routes à travers le continent unique, accompagné du sympathique oracle Yma.

Mais un bouleversement plus grand encore se profile, propre à changer toutes les perspectives et à rendre bien futiles les ambitions de chacun, en comparaison. Et c'est au milieu du roman qu'intervient ce revirement inattendu, lorsqu'un adversaire dont personne n'avait prédit la venue se joint à la bataille. Des vérités anciennes sont alors révélées sur ce monde et ceux qui le peuplent.



Toutes ces intrigues entremêlées sont assez passionnantes à suivre. Il y a un grand nombre de personnages, et beaucoup suscitent notre intérêt, pas seulement les principaux. J'ai beaucoup aimé Mâad, par exemple, ce poète qui se révèle aussi un grand stratège lorsqu'il s'agit de protéger ses terres et son peuple.

Au début, j'ai trouvé qu'ils arrivaient un peu tous en même temps, ces personnages, et trop abruptement, rendant difficile de savoir qui était qui. Mais une fois qu'on a repéré les personnages principaux, qu'on s'est fait une bonne idée du caractère de chacun et qu'on a mis un visage sur toutes ces têtes, si je puis dire, c'est un vrai délice de les suivre.



Les Nefs de Pangée, c'est un vrai récit épique, à l'ampleur mythologique. On pourrait le qualifier de bien des manières, tant le roman est dense et complexe : récit d'aventure, histoire de quêtes et de conquêtes, récit de peuples qui se déchirent et se disputent la suprématie sur ce monde qui recèle bien des secrets.



L'auteur retourne habilement la situation de manière à ce qu'on ne sache plus de quel côté se positionner. Ce peuple que l'on nous présentait en maitre incontesté du continent se révèle arrogant, et pourrait bien tomber par pêché d'orgueil. Car qui est-il pour s'accorder le droit de massacrer, chaque année et sans véritable raison, une créature aussi majestueuse que l'Odalim, maitre des océans ancestral ? Et pourquoi s'acharne-t-il à perpétuer le génocide de ce peuple mystérieux appelé les Flottants ? On finit par s’apercevoir que rien n'est ce qu'il parait, l'auteur nous mène en bateau (sans mauvais jeu de mots) avec une habileté sans pareille et, au fil des pages, on ne peut que se passionner de plus en plus pour cette épopée.



Le style de l'auteur est très élaboré et je l'ai trouvé vraiment plaisant à lire. Alors bien sûr, il est loin d'être simple, on pourrait le trouver lourd, mais j'aime bien ces longues phrases, rythmées, qui donnent envie de lire à voix haute tellement c'est mélodique. Et puis, leur grandiloquence est à l'image de la magnificence de la ville de Basal et du gigantisme des fameuses nefs.

Je suis impressionnée par l'imagination qu'il a fallu solliciter pour développer un tel univers, de bout en bout : le glossaire à la fin du livre montre que l'auteur a vraiment créé un monde à part entière, qui s'étend au delà de l'histoire qu'il nous raconte.

J'ai pensé plusieurs fois aux Travailleurs de la mer, de Victor Hugo, à raison apparemment, puisque l'auteur le cite dans ses références à la fin du livre. Il évoque aussi Homère, et c'est vrai qu'il y a un peu de l'Odyssée dans ce roman.



En bref, si vous aimez la fantasy et les récits épiques, que vous n'avez pas peur des longues descriptions et des grandes phrases (ni des gros monstres marins), alors je vous recommande fortement de tenter le coup !
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Je suis le rêve des autres

Dans un village appelé Paleval, Malou, un enfant de sept ans, se réveille après avoir fait un rêve rappelant en tout point une prophétie connue des sages de son village. Il serait d'après eux, un réliant, un frère humain que les esprits désignent pour parler en leur nom.

Pour en être certain, ils décident d'envoyer Malou à Beniata pour passer le Grand Examen devant le Conseil des Conseils.

Le voyage est long et durera plusieurs mois. Il sera accompagné de Foladj le vieux.

Au fur et à mesure de leur voyage, Malou découvrira non seulement la beauté de la nature, ses odeurs, ses couleurs, son immensité et sa puissance mais également le tumulte et le bruit des villes traversées. Forquin, Pryga, autant de cités marchandes qui l'étourdiront par son tapage et sa foule, lui, jeune enfant naïf malgré sa sagesse, quittant pour la première fois son village et son environnement familier.

Foladj, quant à lui, reste méfiant, envers tout et tout le monde, et redouble de prudence lorsqu'ils arrivent dans des cités. Il a acquis au cours de sa vie et de ses multiples voyages une grande expérience, qui cache une grande part d'ombre et de secrets.



"Qu'as tu appris aujourd'hui?"



Voici la question que lui pose tous les soirs Foladj, car ce voyage doit être bénéfique à Malou. Lors du Grand Examen, il devra montrer ses connaissances de l'homme et du monde, illustrer sa grande Sagesse, s'il veut être reconnu comme réliant.

Et Malou apprend, observe, s'interroge, analyse, ressent... se rend compte que ce qui est en surface compte mais qu'il faut souvent chercher plus en profondeur la signification des choses et des êtres.



"J'ai appris aujourd'hui que les gens sont des fleuves profonds"



La complicité entre ces deux personnages que tout oppose (la jeunesse/la vieillesse, la découverte/l'expérience, débuter sa vie/la terminer) est très touchante. Ils vont apprendre l'un de l'autre et une relation très forte va s'installer entre eux deux.



Comment se terminera ce voyage? Que découvriront-ils de soi et de l'autre et de ce qui les entoure au terme de ce périple?

Je vous laisse le découvrir en courant chez votre libraire vous offrir ce très beau conte initiatique où tout est douceur et humanité, observation et sensitivité, malgré la rudesse de certains moments et l'inconfort de ce voyage interminable.

Je ne connaissais pas cet auteur mais je vais m'empresser de lire d'autres titres de lui!




Lien : https://www.instagram.com/p/..
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Demain les origines, tome 1

Ce roman a une histoire un peu particulière, l'auteur l'ayant vu retoqué par son éditeur. Lors du confinement, il a décidé de partager ce premier volume, composé de 6 "livres" retraçant une période de 2042 à 2094.



"Pour ceux qui connaissent un peu mes livres, les deux volumes de "Demain les Origines", à terme, font un lien entre "Le Baiser de la Nourrice", "Mausolées" et "Les Nefs de Pangée", voire "L'Affaire des Vivants" (et oui). "



J'aime beaucoup ce titre, Demain, les origines, qui synthétise parfaitement le propos de l'auteur : Qu'est ce qui nous a amené à cette catastrophe décrit dans ce futur proche et dont nous apercevons les conséquences dans Mausolées.



C'est une sorte de gros fix-up, dont les deux premiers livres peuvent se lire de manière indépendante, ainsi que Le livre de Syrrha. Ces deux livres posent l'ambiance de suite, demain ne sera pas rose, mais brun ! Le livre de Malik qui ouvre le bal pourrait être sous titré Chronique du fascisme ordinaire. Dans une campagne tranquille, un jeune transporte un vieux philosophe, ils s'apprécient sans le dire, le jeune indifférent et le vieux militant. Puis au détour d'une route, un barrage policier...

On suit les aventures de ce Malik aux prises avec l'absurdité, la bêtise et la violence d'un état fasciste au pouvoir. L'auteur nous montre qu'un simple grain de sable peut enrayer la machine de la tranquillité. Le droit n'est décidément pas au service des victimes, quand à la justice... Un monde qui pourrait très bien être le nôtre dans quelques années lorsque l'on voit la montée des Marines un peu partout en Europe et ailleurs.

Malik, le jeune insouciant, en colère mais impuissant, qui préfère oublier par la sexualité, se rend compte que c'est son indifférence au politique qui a rendu cette situation possible. Il est responsable.

Un texte qui prend aux tripes, l'auteur réussissant à rendre cette atmosphère ambiante étouffante. Glaçant de réalisme.



Le livre de Grace nous fait suivre les pas d'une des personnages du livre précédent où culpabilité et responsabilité vont aller jusqu'à leur fin inexorable. Si vous pensez que l'humanité avait touché le fond, vous vous trompez lourdement. Très violent, âme sensible s'abstenir. On apprend un peu plus de notre futur proche : Dérèglement climatique, avec ses tempêtes de plastiques, les bidonvilles...



Le livre de Syrrha nous emmène dans les pas d'une journaliste, une watcheuse, rencontrée dans le précédent livre. Alors qu'elle doit faire un reportage sur un gigantesque incendie d'un nuage de plastiques, avec sa cohorte de réfugiés, elle s'enferme dans un manoir qui devait lui servir de point d'attache. On retrouve un peu de l'ambiance de Mausolées avec ce manoir croulant sous les livres, son propriétaire étrange et hors du temps qui m'a aussi rappelé le film orgiaque La grande bouffe.

Un livre plus introspectif, psychanalytique s'attardant sur les apparences trompeuses de ce château à l'architecture impossible...



Les autres livres poursuivent dans les conséquences de ce fichu bordel. Le monde d'après ? Un monde pur. Non, pas l'air, mais la race. Blanche de préférence et chrétienne. On retrouve quelques personnages rencontrés dans les premiers livres. Et aussi un petit dictateur, digne héritier du petit Adolf. Le climat poursuit son dérèglement de bien belle manière, vivre est désormais synonyme de survie, mis à part pour la classe des dirigeants et de ses courtisans.

Religion , pouvoir, science. Lorsque ces trois là se tiennent la main, le pire n'est jamais loin. Et c'est ce qui arrive. Une icône nait, le besoin d'un bouc émissaire et un scientifique à l'éthique inexistante : l'Histoire se répète.



Qu'est ce qui fait de nous des monstres, des bourreaux, des dictateurs des prophètes ? Sommes nous noir ou blanc ou existe t'il des nuances ? Leur reste t-il une part d'humanité ? Sommes nous responsable de cette situation ?

Une fresque impressionnante, souvent âpre et douloureuse, mais l'auteur nous fait quelques clins d'oeil et plante ici ou là quelques touches d'espérances, à l'univers fort riche de thématique : état, pouvoir, religion, environnement, génétique...

Sur un pavé comme celui ci, il y a bien quelques longueurs, ou manque de crédibilité avec cette sorte de tumeur organique gigantesque rappelant les monstres gigantesques du cinéma, mais rien de rédhibitoire.



Les différents livres sont libres de droit, disponible en format pdf (il existe des convertisseurs en ligne pdf vers epub). Alors on télécharge, on lit, et on dit merci à l'auteur sur son blog. En attendant la suite de l'Histoire avec le second volume à venir dans quelques années, même si le fait de ne pas trouver d'éditeur lui aura peut-être scier un peu les jambes. Quoiqu'il en soit, je poursuivrai ma découverte des écrits de l'auteur.



A télécharger sur son site : http://kronix.hautetfort.com/demain-les-origines/



Seul impératif, "Je rappelle que le téléchargement est gratuit, libre de droits, etc. je vous demande juste de laisser un message ici, ou de m'adresser un mail, si vous avez téléchargé et, si vous évoquez ou citez ce texte, d'en signaler la source."
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L'affaire des vivants

Une vraie découverte, en ce qui me concerne. Cette saga familiale se lit goulûment, sans ennui, tellement la construction du récit est ciselée et savamment orchestrée. Et il y a (peut-être surtout), en ce qui me concerne, la découverte d'un vrai écrivain, au style alerte, chatoyant, coloré. Barrès disait du jeune Montherlant: "Il a du jus, ce petit !". J'en dirais autant de Chavassieux, auteur à suivre, assurément !
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Noir canicule

Cher M. Chavassieux Christian,

Il y a quelque temps, les équipes de Babelio et des éditions Phébus m’ont proposé de découvrir l’un de vos romans, « Noir Canicule » (je leur en remercie vivement, d’ailleurs). J’ai lu attentivement le résumé que votre éditeur en a fait et je me suis immédiatement attendu à aller de surprises en surprises, à nager dans un océan de pourriture. J’ai tout de suite voulu ressentir cette panique et cette oppression que génère les romans noirs. J’ai voulu être horriblement captivée … presque, à en rêver (ou à en cauchemarder) les nuits. C’est avec ces attentes que j’ai commencé à découvrir votre plume. 
On peut le dire, vous avez une plume agréable et douce. Même en relatant l’horreur, elle ne fourche pas. Elle reste respectueuse de notre belle langue française. C’est un choix que je salue vivement. Toutefois, cette écriture si douce et ce ton si constant ne m’ont pas semblé adaptés au genre que vous auriez voulu donné à votre roman. S’il était un roman de littérature contemporaine, cette écriture serait parfaite. Mais pour un roman noir, il lui manquait, à mon sens, un peu de piquant, de force, de rage, de vivacité. Cette douceur a masqué les émotions qu’un roman noir devrait nous faire ressentir. Il n’y avait pas de place au suspens, pas de place à la peur panique, pas de place à l’étonnement. En refermant votre roman, je garde un souvenir de douceur … Pourtant, vous avez travaillé à maculer ce roman de maladies, de morts et de souffrances dans le but de le rendre sombre. 
Cette plume, qui vous a subtilement trahi, apporte d’étonnantes déconvenues. Quand à la centième page, nous découvrons ce qui doit être l’horreur, nous n’y croyons pas. Nous n’y croyons pas parce qu’on a l’impression que cette péripétie à été jetée ici comme on jette un sac poubelle. Rien ne le laisse envisager. Rien ne le laisse imaginer. Oui, nous avons l’impression que ce fait est là, comme-ça, parce qu’il fallait bien qu’il se passe quelque chose à un moment. Et puis, il y a les incohérences qui vont de paires. Je ne souhaite pas spoiler mes amis lecteurs, donc je vous dirais simplement qu’être vieux ne veut pas dire perdre l’odorat … surtout en pleine canicule. 
Parlons de ces « vieux », justement. Je les ai adoré et j’aurais voulu en savoir davantage sur eux. J’aurais voulu avoir leurs ressentis, j’aurais voulu capter leurs émotions. Je trouve, malheureusement, que vous vous êtes satisfait d’une surface plutôt que de les creuser en profondeur. Ces deux personnages auraient pu être une mine d’or si vous les aviez davantage développés. Bernard, quant à lui, m’a beaucoup intéressé. Un enfant qui a grandi en étant continuellement comparé à son auguste aîné. Un enfant qui est devenu un adulte en manque de confiance en soi. Un adulte déprimé, fatigué. Un personnage qui avait tout pour devenir le personnage sombre par excellence. Mais là encore, nous n’avons découvert qu’une surface plane. Je ne vous mentirais pas, j’ai eu beaucoup de difficultés à apprécier Lily, Nicolas et Jessica. Ils me semblaient manquer « d’humanité ». Un peu comme des ébauches de dessins qu’on ne finira jamais et qui ne prendront jamais réellement vie … juste un amoncellements de traits. 
La fin ? Il n’y a véritablement eu de fin que pour deux personnages. Une fin fatale. Mais pour les autres, que leur est-il arrivé ? Nous refermons le livre sans le savoir. Nous ne pourrons qu’imaginer avec le peu d’indices que vous nous avez laissés.

Vous l’aurez compris, M. Chavassieux, je m’attendais à être emportée dans les limbes et ce ne fût pas le cas. On ne peut susciter l’horreur dans l’imaginaire en se contentant de caresser des pages avec une douce plume. Vos pages auraient dû souffrir et saigner à force de se faire griffer par votre plume. Malgré tout, j’espère vous découvrir dans un nouveau roman. Un roman où votre si belle plume sera sublimée par une histoire qui lui ressemble.

P.S. : Je trouve ça dommage que votre éditeur se soit accommodé d’une image provenant d’une banque d’image pour illustrer votre roman … Vous y avez passé de longues heures de travail, il aurait été de justice que le graphiste de votre éditeur y passe également quelques heures de réflexion. Il a préféré acheter une image et la coller sur le gabarit de votre roman avant de l’envoyer en édition. Ce serait être malhonnête que de dire que les illustrations n’invitent pas à la découverte, n’est-ce pas ?
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Les nefs de Pangée

De la fantasy opera. Un monde gigantesque, pensé, travaillé, cohérent, original. Une plume lyrique qui sait se faire rude par moments. On reconnaîtra quelques hommages aux auteurs classiques, dont G. Flaubert avec cette phrase glissée page 126 (éditions Mnémos, 2015) "C'était à Mehassa, faubourg de Basal, dans le jardin des nautiles." Un hommage que C. Chavassieux peut largement se permettre de faire, et sans rougir.



Les Nefs de Pangée, c'est un voyage qu'on entreprend en croyant connaître sa fin. On se trompe. Et on se trompe avec délice. C. Chavassieux nous surprend, place ses éléments au compte-goutte, révèle ses secrets avec une habileté et une finesse désarmantes, parfois même au détour d'une phrase anodine. L'univers qu'il nous propose est foisonnant et pourtant si accessible, déroulé comme une poésie en prose, sonnant aux rimes de la fatalité.



Un véritable coup de cœur. Ma meilleure découverte depuis Gagner la guerre de Jean-Philippe Jaworski.
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La vie volée de Martin Sourire

L'évolution d'un garçon au sourire "figé" et à la parole rare, sorti de son univers d'enfance par la grâce et le caprice de Marie-Antoinette (personnage inventé mais crédible : la reine adoptait des enfants pauvres) et dont le destin de rencontres en rencontres (notamment un Architecte philosophe) traverse la fin de la royauté (la construction d'une ferme au château de Versailles pour le plaisir de la reine), l'avènement d'une nation de citoyens, et la guerre terrible de l'armée révolutionnaire... Un roman d'apprentissage où le lecteur-la lectrice apprend aussi, au fil d'une écriture que j'ai beaucoup aimée : le choix des mots est "gourmand", on sent que ça compte autant que l'histoire (sans pour autant être "regardez comme j'ai plein de vocabulaire !"), et la manière dont celle-ci est composée (la fin demande un peu de souffle mais c'est très cohérent avec ce qui est raconté) donne une fluidité que je n'imaginais pas trouver, et une fin inquiétante jusqu'aux dernières lignes.

Enfin, les pages d'annexes sont pleine d'humour et très intéressantes quant aux choix de l'auteur et son travail pour lier fiction et historique.
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Je suis le rêve des autres

Une lecture qui me laisse un peu dubitative.

C'est très bien écrit, poétique, positif, bienveillant. Cela change dans l'univers très sombre que peut être souvent la SFFF. Et en cela c'est une bonne expérience.

Par contre, je me suis ennuyée (désolée). Il ne se passe pas grand chose. Je n'ai rien contre le contemplatif, mais quand je sais que cela va en être. Dans les littératures de l'imaginaire, j'ai envie qu'il se passe des choses, que ça saigne, que ça voyage, que ça rencontre des obstacles, que ça vive, que ça souffre... Et en l'écrivant, je me rend compte qu'il se passe ces choses ici : l'enfant et Foladj voyagent, rêvent, se font attaquer, vivent et progressent. Mais je ne sais pas, je n'ai pas été touché, tout m'a semblé lent, statique.

Je reconnaît les qualités d'écriture, mais ça ne devait pas être le bon moment pour moi.
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Mon très cher cueilleur de roses

Par un de ces hasards que l'on croit heureux, la narratrice, auteure parisienne, hérite d'une propriété rurale et y voit l'occasion d'une nouvelle vie. Sur place, elle rencontre Antoine Cervin, qui s'occupe des roses et du potager. Alors qu'elle voulait d'abord congédier cet homme taciturne, elle voit bientôt dans son histoire un écho à la sienne, et la matière de son prochain roman. Les chapitres alternent entre récit d'Antoine et vie de Floriane, qui tombe amoureuse de l'ancienne locataire des lieux, artiste peintre. Le roman devient aussi le lieu d'une réflexion sur la création, ses sources, ses limites et son lien éventuel avec la vie réelle, elle aussi romanesque. La lecture est agréable, mais peut-être pas inoubliable.
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Je suis le rêve des autres

C’est un coup de coeur pour Je suis le rêve des autres de Christian Chavassieux. Le texte est sublime, d’une poésie dingue qui envoûte, transporte et émeut. Et le voyage proposé invite à l’apaisement, à la réflexion et à la rencontre de l’Autre et de soi-même avec beaucoup de justesse. C’est un texte à la frontière des genres qui est d’une humanité folle. Un petit bijou.



Critique complète sur yuyine.be!
Lien : https://yuyine.be/review/boo..
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