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Critiques de Christophe Tison (135)
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Journal de L. (1947-1952)

Quelle folie s’empare de l’esprit, probablement sain, d’un écrivain lorsqu’il décide de filer, à toute allure, sur les sillons onduleux d’un auteur de légende, si épris de style et méprisant les flagorneurs, disciples, les épigones de carnaval ! Les mémoires de Lolita, tout le monde en a rêvé ; et ce rêve sentait l'automne, il ressemblait probablement à une ville américaine moyenne où s’entremêlent les ménagères et les papillons, les anthologies de poésie européenne, les pelouses où s’affolent les nymphettes provocatrices ; ce rêve était tâché de l’encre de Nabokov – un beau rêve, chaque soir recommencé, toujours différent ; un fantasme littéraire pour l’éternité. Christophe Tison a décidé d’imprimer le sien, et par malchance, il l’a écrit ; pire, je l’ai lu.



Le prologue permet à l’auteur de s’affranchir de toutes les critiques liées au style : c’est une jeune fille de 12 ans qui écrit, on ne sera donc pas regardant – pratique (et logique, il faut l’avouer). Dès lors commence la litanie insupportable des tourments physiques, psychiques, de la petite Dolorès, tour à tour esclave sexuelle de son beau-père, fugueuse désenchantée, manipulatrice odieuse, amoureuse incomprise … on pourrait trouver tout cela charmant, presque naïf, si l’auteur ne sombrait trop souvent dans la vulgarité la plus méprisable (« Je suis un trou sans fond » ; « son sexe pend continûment entre ses cuisses, énorme et vulgaire, le mien est rouge sang et ma bouche sent le sperme » ; « ses gros doigts pleins de savon glissent maintenant entre mes fesses et s’introduisent là où c’est sale … et il me vide comme un poisson » …). Que peut-on attendre d’une telle prose ? Si le livre ne m’avait été gracieusement offert par Babelio, je l’aurais probablement jeté dans la poubelle jaune d’un voisin de mon quartier.



Chez Nabokov, Lolita est plutôt un personnage sympathique. Dans « Le Journal de L. », Lolita est une figure détestable – son enfance volée, brisée, n’y change rien. Qui voudrait aimer cette écorchée de papier ! La faute à Christophe Tison et sa morne imagination ? Pour partie, seulement. Le véritable sentiment de dégoût (ou de mépris, tout dépend des soirs) que l’on éprouve à la lecture de cet opus a des origines plus profondes : Dolorès (et sa mère) sont des caractères béotiens sans intérêt ; des gravures de magazines féminins des années 1950 – personne n’a envie de pénétrer leur intimité cérébrale, à moins d'aimer le néant et l’insignifiance. Le seul intérêt littéraire de cette aventure scandaleuse ? Humbert Humbert, le chasseur de nymphettes ! Chanceux que nous sommes ! Le livre existe déjà, il est mondialement célèbre, et il a pour titre : « Lolita », tout simplement. Il est signé d’un des plus grands écrivains du XXe siècle.



Alors, que faire de ce journal vide, obscène, chaudement recommandé dans toutes les librairies de France, où poussent comme la mauvaise herbe de petites fiches manuscrites, arborées de cœurs rosis et d’avis standardisés, toujours intitulés « Le coup de cœur de votre libraire » ? Les options sont multiples : le laisser faner au bord d’une fenêtre jusqu’au dépôt de bilan, l’offrir à un ami à qui l’on veut du mal, l’introduire par effraction dans les rangées bien ordonnées des « grands classiques » au sein d’une bibliothèque municipale et observer les réactions consternées des habitués, etc. A la réflexion, on pourrait continuer ce petit jeu pendant des heures ; des heures de délires magnifiques, un luxe d’inventivité et de poésie. En réalité, tout ce qui manque à ce livre ! Ajoutez à cela les entretiens autobiographiques sur l’enfance volée de Christophe Tison (un argument commercial comme un autre - nous sommes en 2019) et vomissez pour de bon cette soupe rance, pleine de grumeaux amers.
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Journal de L. (1947-1952)

Lolita, un des personnages d'adolescentes le plus connu de la littérature nous confie son journal intime. On y découvre les hommes qui lui ont volé son enfance et celui qui lui rendra sa vie. J'ai adoré lire les secrets, les rêves et les espérances de Lolita.

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Journal de L. (1947-1952)

Et si nous donnions la parole à Lolita ?



L’oeuvre magistral « Lolita » de Vladimir Nabokov publié en 1955 nous avait fait découvrir un des personnages les plus envoûtants de la littérature à travers la voix de son ravisseur, Humbert Humbert.



Dans l’imaginaire public, Dolorès Haze dit « Lolita » est demeurée une jeune fille énigmatique. Christophe Tison a percé son secret en partant sur ses traces.



Il publie son journal rédigé de 1947 à 1952 sous le prisme de ses rencontres masculines et nous dévoile le tournant de son adolescence.



A la mort de sa mère, Lolita, est détenue par son beau-père, Humbert Humbert, qui l’emmène pour un long voyage à travers l’Amérique. Chaque nuit, cet homme l’a rejoint dans son lit.



Son innocence et son enfance lui sont brutalement enlevées. Lolita navigue entre sa volonté de fuir et cette sidération qui la retient sous la coupe de son beau-père.



Peu à peu, elle prend conscience de ses charmes et parviendra à en user. Elle percevra ses rencontres avec de nouveaux hommes comme le début de sa délivrance. Pourtant, la jeune fille sombrera encore davantage dans l’obscurité.



Christophe Tison a tenté un parallèle osé avec le célèbre roman de Vladimir Nabokov. En changeant de point de vue et en redonnant la parole à son héroïne, il réussit avec brio à mettre en lumière Lolita et dessine cette enfance brisée avec une extrême sincérité.



Le célèbre roman de Vladimir Nakobov méritait cette démystification. Vladimir Nabokov, avec sa plume magistrale, avait réussi à humaniser son ravisseur et faisait de « Lolita », une nymphette sexualisée. Pour sa part, Christophe Tison a donné enfin la parole à la victime silencieuse en nous livrant ses plus profondes confessions.



Si le roman de Vladimir Nabokov reste inégalable, le personnage de Lolita, sous le regard de Christophe Tison, m’a profondément émue.



Ce livre m’a emportée et m’a donné aussi l’envie de redécouvrir le classique « Lolita » dont ma lecture remonte à plusieurs années…



Merci à Babelio et aux éditions Goutte d’Or pour l’envoi de ce livre.
Lien : https://memoiresdelivres.wor..
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Journal de L. (1947-1952)

Lolita est LE roman avec lequel j'ai découvert Nabokov lors de mes années de fac. Je l'ai adoré. Plus que l'histoire, qui à l'époque ne choquait personne, c'est le style et l'ironie de Nabokov que j'ai appréciés dès les premiers mots. J'ai ensuite lu nombre de ses romans.



“Lolita, light of my life, fire of my loins. My sin, my soul. Lo-lee-ta: the tip of the tongue taking a trip of three steps down the palate to tap, at three, on the teeth. Lo. Lee. Ta. She was Lo, plain Lo, in the morning, standing four feet ten in one sock. She was Lola in slacks. She was Dolly at school. She was Dolores on the dotted line. But in my arms she was always Lolita."



" Lolita, lumière de ma vie, feu de mes reins. Mon péché, mon âme. Lo-lii-ta : le bout de la langue fait trois petits pas le long du palais pour taper, à trois reprises, contre les dents. Lo. Lii. Ta.

Le matin, elle était Lo, simplement Lo, avec son mètre quarante-six et son unique chaussette. Elle était Lola en pantalon. Elle était Dolly à l'école. Elle était Dolorès sur les pointillés. Mais dans mes bras, elle était toujours Lolita. "



Dolores Haze a douze ans, vit seule avec sa mère qui loue une chambre dans leur maison à Humbert Humbert, un quadragénaire européen, écrivain et professeur, une sorte de double maléfique de l'auteur. Lorsque Mrs Haze décède accidentellement, Humbert Humbert kidnappe Lolita dont il est tombé amoureux et ils partent pour un road trip dans les Etats-unis d'après la seconde guerre mondiale.



Lorsque cette année Christophe Tison, journaliste et écrivain, a fait paraître Journal de L. (1947-1952), j'étais au départ très curieuse, mais un peu inquiète aussi, après avoir lu dans la préface que l'auteur avait été victime d'un pédophile pendant son enfance et qu'il se sentait "proche de Lolita".



Si le roman de Nabokov était rédigé par Humbert Humbert, le prédateur, Christophe Tison se place du point de vue de Lolita. Il propose des extraits du journal de Lolita après la mort de la mère. Comme dans le récit de Nabokov les sentiments de la fillette envers "Hum" sont ambigus. Le personnage est séduisant, la fait rire, lui offre ce qu'elle désire, mais les relations qu'il lui impose sont présentées de manière très crues.



Les deux personnages semblent avoir deux facettes. Lolita est tout à la fois aguicheuse et victime pendant que son "beau-père" est attentionné et exigeant. Christophe Tison ajoute certains épisodes qu'il a imaginé, des réactions parfois étonnantes, dans un langage parfois trop actuel. Même si l'auteur a mis beaucoup de lui-même dans ce récit, je n'ai pas eu l'impression d'une trahison de sa part. D'ailleurs les ayants droit de Nabokov ont validé la publication. On ne retrouve évidemment pas ce qui faisait la grande qualité du roman original, le style inimitable de Nabokov, ce qui est normal puis le Journal de L. est écrit par une enfant, mais j'ai plutôt apprécié l'ouvrage au final....
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Journal de L. (1947-1952)

Je remercie Babelio et les Éditions Goutte d'Or pour l'envoi du Journal de L., dans le cadre d'une opération Masse Critique privilégiée. Avant même de savoir si j'étais retenue, je me suis replongée dans Lolita de Nabokov, lu il y a plus de vingt ans. Le temps avait effacé certains détails du roman et, surtout, en passant, m'a permis de mieux comprendre cette oeuvre aussi sublime que retorse.



Alors que le livre originel était une confession/plaidoyer du vil Humbert Humbert en attente de son procès, Christophe Tison donne ici la parole à celle qu'on ne connaît finalement qu'à travers les yeux de son bourreau, la petite Dolores, sa soeur dans l'atrocité pédophile. Se colleter à une telle oeuvre dans un jeu de miroir était risqué, incontestablement, une vraie gageure. Je salue par conséquent le courage de l'auteur. Il reprend les éléments phares du texte de Nabokov, remplit les espaces vides en s'inspirant de l'esprit du texte initial et, sans doute, en y projetant ses propres blessures.



La narration sous forme de journal permet un accès direct à Lolita, un récit dénué des envolées linguistiques et périphrases "chastes" d'Humbert Humbert. Le style de l'enfant évolue au fil des mois et des expériences subies du fait d'hommes abjects chasseurs de chair à peine pubère. Son langage se fait de plus en plus cru et ses pensées sombres à mesure que ses violeurs l'entraînent dans leur spirale de dépravation.



Le tout forme un ensemble très cohérent. Sous le langage souvent vulgaire et trop adulte de Dolores, on entend malgré tout la petite fille en souffrance qui voudrait simplement qu'on l'aime, elle, pas une fantasmagorie nymphescente pour pervers en rut. Récit ô combien troublant et bouleversant qui renvoie à toutes les Lolitas - et leurs pendants masculins - de la Terre.



Je n'avais jusqu'à présent jamais rien lu de Christophe Tison. C'est chose faite et son texte vibre de sincérité douloureuse, de celle qui inscrit ses mots au fer rouge dans l'esprit des lecteurs. Reçu ce matin dans ma boîte à lettres, sitôt commencé, je n'ai pu le lâcher.
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Journal de L. (1947-1952)

Le chef d’œuvre du roman éponyme de Vladimir Nabokov publié en 1955, Lolita reste controversé par son héroïne, une jeune fille de 12 ans, subissant l’amour pédophile de son beau-père Humbert Humbert, récit d’une voix de cette relation par cet homme en prison , cristallisant cet amour unilatéral, de ce pervers, sous la plume anglaise formidable de ce russe naturalisé américain, une prose où l’amour masque les sentiments de cette jeune fille, Dolorès Haze, ne pouvant narrer sa version. Christophe Tison à cette confession, fait parler Lolita, de son journal intime retrouvé, et de cette voix, cette jeune fille.

Christophe Tison donne la parole à Lolita, ce personnage de fiction, sorti de la plume de Vladimir Nabokov pour explorer cette part d’ombre flottant dans les esprits, la petite Lolita, Lo, Lou, cette petite fille de douze ans prisonnière à jamais de la mémoire de cet homme, lui volant sa virginité, ses espérances, cette enfance, ces repères, toute cette vie. Cette enfance racontée semble être un larsen de sa propre vie, narré dans un de ses romans autobiographique Il m'aimait des éditions Grasset publié en 2004, subissant la férocité d’un pédophile, ami de ses parents, ne pouvant exorciser son mal par ce roman, il revient avec ce roman, Journal de L. (1947-1952), écrire ce qu’à put ressentir Dolorès Haze, ayant pour sa part subit ce calvaire d’un amour pédophile.

Le récit est divisé en cinq parties, Christophe Tison met en scène comme Vladimir Nabokov, par un carnet intime, les révélations de la jeune Dolorès comme le roman Lolita, d’Humbert. C’est un calque performant, une route sinueuse avec cette partie manquante où Lolita s’enfuit avec Clare sera dévoilée par la main de Christophe Tison.

Dès les premiers actes sexuels, Dolorès sait le mal subit et se tait ; la peur s’installe, les mensonges aussi, mais aussi son regard acerbe vers la société qui l’environne, cette jeune fille perçoit la perversité de son beau-père, derrière son beau sourire, cette politesse étrangère, ce don de charmer son environnement et aussi la manipulation, le chantage, cette petite fille devient la poupée sexuelle de cet homme, il va la façonner à cette image qui l’excite, la forçant à devenir une autre fille qu’elle ne saura jamais. Tout le long de ce récit, la solitude berce avec mélancolie cette petite fille, orpheline de ses parents, de ses amies, de sa vie d’enfant et d’elle-même. Elle va s’inventer une amie virtuelle, une jumelle à son image floue, c’est son reflet devant la glace dans la salle de bain, un visage déformé par la bué, elle est seule, dans l’intimité de son être, se laver le corps de l’odeur de son bureau sexuel qui la souille, ce sperme en elle, sur elle, puis ce monologue avec son image qu’elle fixe, recherchant à briser cette solitude, s’évaporant dans une diffusion d’âme, cette conversation schizophrène sera pour Christophe Tison, cette liberté de donner vie à la pensée intime de cette jeune adolescente, à ses épanchements, ses désirs, sa solitude.

Dans cet écho au roman de Vladimir Nabokov, Dolorès n’est pas cette fille aguicheuse, provocante, Christophe Tison de son passé argumente avec beaucoup de justesse et d’élégance, la souffrance sourde de cette adolescence, privée de repaire, comme l’héroïne d’Irène Némirovsky de son roman L’ennemie, qui n’a pas appris le bien du mal. Comment une petite fille de douze ans, baiser par son beau-père peut espérer avoir une notion de bien et de mal, connaitre les codes des personnes de son âge, ayant comme seule référence cet homme qui dès la première nuit lui éjacule sur le visage pendant son sommeil, puis se fait tripoter les seins, recevant sur son sexe une langue, devant prendre le pénis entre sa main trop petite, puis s’introduisant dans son anus, cet endroit sale, elle devient un objet de désir, se comparant à sa poupée, juste là pour être caressée, habillée et déshabillée, attendant sur un lit, son sexe devient une tirelire, pour pouvoir s’échapper en gagnant de l‘argent , telle une prostituée, c’est de plus en plus frénétique, plus rude, elle écrira cette comparaison si cruel :

« J’avais l’échine d’un taureau sous les fesses ».

Même lorsqu’elle étudie, Hum la harcelle, lui lèche la chatte, assise sur une chaise, lui sous la table, elle jouit en silence sans lui montrer ses émotions, elle devient un morceau de viande, elle n’est plus personne, lui offre ses yeux de poissons morts, inerte, sans vie.

Ce beau-père lui vole son premier amour, ce jeune adolescent Stan, celui qui lui fera l’amour pour la première fois, la jeune collégienne est amoureuse, vit cet amour tous les jours en retrouvant ce garçon lui donnant l’amour recherché, mais le destin est cruel, tombant enceinte, se faisant avorter sauvagement avec son beau-père, surement le père de cet enfant, ou celui de Stan, son corps devient une pierre, cette absence et ce mensonge, Dolorès sera fui par ce garçon jaloux d’une absence, d’un amour sec, de cet avortement qu’il ne saura jamais, la honte de dire la vérité, Dolorès s’enferme un peu plus dans cette vie d’itinérance. Elle est maladroite avec les filles, avec les garçons de son âge, sera traité de Salope, ne voulant juste être aimé.

Sa rencontre avec Clare est un destin encore néfaste pour elle, l’ayant connu dans son enfance avec sa maman, le reconnaissant, Clare au premier contact, la perce au grand jour, Dolorès sent qu’il sait que Hum la baise, la jeune adolescence se trouve happée par cette force malsaine de cet homme qui la répugne, cette première rencontre scelle sa destinée, pour se faire baiser dès leur premier rendez-vous par cet affreux professeur de théâtre. Elle sa laisse faire, connaissant ces codes, elle ne joue pas avec cet homme, mais fustige le monde aveugle qui l’envoie à l’abattoir. Sa fuite avec Clare sera encore une chute, fuyant le diable de Hum, allant d’un pervers amoureux à un pervers diabolique paradant sa proie à ses amis en la présentant comme sa nouvelle petite nièce. Dès l’arrivée, elle rencontre dans la maison de Clare des serpents, symbole religieux de la perversité sexuelle, est-ce un signe, elle découvre un monde nouveau, aime faire sa crétine, mais reste dans la solitude.

Il y a dans ce récit, des passages forts sur les monologues de cette jeune fille, sur sa vision du monde qu’elle côtoie, et sa relation avec les hommes qu’elle rencontre. Hum l’emprisonne dans sa cage dorée, elle dit de lui au début

« Et c’est vrai qu’il est le seul être au monde à s’occuper de moi »

, ou bien à des moments de doute

« Mais à part lui, qui veut d’une petite princesse comme moi, une petite mendiante ? ».

Et ce constat fort et fataliste sur ces moments où Hum vient la pendre,

« C’est toujours un mauvais moment à passer, non ? Mais étrangement, je n’y pense jamais avant qu’il n’arrive, à ce moment-là…Jamais. Avant et après, il est gentil Hum qui prend soin de moi et qui me fait rire »

, et la force à se laver, la traitant de petite crasseuse,

« Alors, après m’avoir récuré l’âme avec des promesses et des menaces, ses gros doigts pleins de savons glissent maintenant entre mes fesses et s’introduisent là où c’est sale…et il me vide comme un poisson. »

Cette peur s’installe en elle, dès le début, elle a peur de réveiller les pensionnaires de l’hôtel, de trahir ce secret de son beau-père qui la baise, j’utilise ce mot car pour moi, c’est un acte de viol, même si dans l’esprit de Hum, c’est un acte d’amour, il lui posera cette question absurde à la fin si elle l’avait aimée, celle-ci ne répondra pas car elle ne s’était jamais posé la question. Cette peur la rend muette, devant la police lors d’un contrôle routier, elle a comme elle l’écrit le réflexe de sourire et de rien dire, se traitant de conne. Cette peur la rend actrice de sa vie, le mensonge devient son ami, elle a une réalité des choses assez brute, fort pessimiste, si vraie,

« Rien ne te retient plus à elle ni à ton enfance, c’est fini. Tu es jetée dans la vie. Les dés roulent … »

Au plus fort de sa peur, c’est cette hantise de l’effet cathédrale, ressentit la première fois lors de sa première ou deuxième nuit avec Hum, cette sensation se diffuse en elle pour revenir lors de sa fuite de chez Clare dans un parc, elle est seule dans la nuit dormant dehors ne pouvant faire la poupée, c’est une sensation de peur extrême où son corps se fige , son esprit s’échappe, une sorte de mort.

Elle va au fil du récit jouer avec ses partenaires, elle va prendre des cours de tennis , ce qui va lui donner la force de réussir et de comprendre les envies perverses de Hum, elle sait qu’il est excité de la regarder jouer, il aime la voir transpirer, courir, sauter, pour voir sa jupe se soulever et découvrir sa culotte, elle sent cet homme excité et bander au bord des cours. Elle joue de lui, se masturbe à côté de lui pour le rendre fou, à le diable au corps, par vengeance, Hum en devient fou, elle a ce pouvoir sur lui, mais elle se déprave, devient sale, elle le domine sur son propre pouvoir celui du sexe. Lui raconte un rêve érotique, inventé, des histoires sur ses amies du collège. Elle fera e même avec Clare lui racontant la perversité de Hum et un mensonge sur son camp, pour finir emporté dans les méandres de la spirale du sexe et devenir actrice de porno sous la domination de ce Clare.

La déchéance de Dolorès est comme Justine ou les Malheurs de la vertu de Sade, elle va de malheur en malheur et au moment où tout est calme, le destin en décide autrement, sa mort en accouchant.

Christophe Tison entraine le lecteur dans une chute inévitable, Dolorès glisse lentement vers la mort et nous sommes témoin de ce cheminement, du camp à cette maison de Rick celui qui l’aime, cette jeune femme enceinte, n’est plus seule, moins perdue dans les bras de Rick, il y a un lien entre leurs ventres, une communion.

Un roman riche et intense, une douleur froide frisonne votre chair à cette lecture.

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Journal de L. (1947-1952)

⁣Pour apprécier cette lecture comme il se doit, il me semble nécessaire d'avoir le roman de Nabokov en tête. Malgré ce prénom qui lui a donné son titre, rares sont les moments où l'on entend Lolita. Ici, sa voix est rétablie... et cela remue. On prend pleinement conscience de son statut de victime, qui subit les assauts d'hommes malsains. L'auteur réussit à l'incarner brillamment. Il est intéressant de lire également des épisodes inventés, non évoqués dans le roman de Nabokov, mais qui trouvent parfaitement leur place dans ce journal. Une grande réussite, donc !⁣
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Journal de L. (1947-1952)

Lorsque l'on referme le Lolita de Nabokov, l'oeuvre qui a bouleversé la morale lors de sa première parution, on ne voit souvent les choses que par le biais de Humbert Humbert, cet homme monstrueux, charismatique, cultivé, tyrannique. La façon qu'il a de se dédouaner et de jouer avec les mots m'a presque fait oublier Lolita, sa victime, et ce qu'elle pouvait ressentir, parce qu'elle n'a jamais eu le droit à la parole.



Christophe Tison lève le voile pudique et aberrant qui a été jeté sur cette nymphette. Et la voilà qui monologue, emportée par les vagues destructrices de son destin. Elle rentre à la fois dans un rôle de victime et de vengeresse : elle le dit elle-même, elle est "deux", deux facettes de sa personnalités qui s'expriment plus ou moins fortement. Cette Lolita, j'ai eu envie de la serrer dans mes bras, parce qu'elle semble si vraie dans son adolescence bafouée. Ses paroles sont celles d'une victime qui trouve de la force dans sa résilience, alors que les traumatismes s'enchaînent. On les croise tous, les grands pervers, Humbert et Clare Quilty., et également d'autres hommes, qui n'ont pas su la protéger, des ombres qui ne savent pas comment comprendre ce jeune caractère tempétueux.



En lisant ce roman, j'ai beaucoup pensé à l'adaptation de Kubrick. Certaines images sont clairement inspirées du film et j'ai apprécié ce parallèle. Dolores est à la fois le personnage de Nabokov, de Kubrick et de Tison : elle y gagne une véritable puissance (alors que son discours repose souvent sur le fait qu'elle n'est plus qu'une ombre).



Étrangement, le Journal de L. m'a mise beaucoup plus à mal à l'aise que Lolita ; les cartes sont distribuées différemment et le point de vue change. L'empathie que j'ai ressentie devant la dureté des événements qu traverse Lolita, son désespoir, a été bouleversante. C'est qu'à force de voir Humbert Humbert clamer son innocence et son amour, j'avais presque oublié qu'il était, avant tout, un être vile. C'est donc une bonne lecture, à feuilleter en parallèle de l'oeuvre de Nabokov, même si elle existe également par elle-même, indépendamment de son illustre ancêtre littéraire.



(Merci aux éditions Goutte d'Or pour cette lecture)
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Journal de L. (1947-1952)

Il fallait oser. L’exercice était hautement périlleux : faire parler Lolita, l’insaisissable nymphette, l’incandescente aguicheuse, petit démon de midi & de minuit qui a pourtant des circonstances atténuantes. Tison, par le biais de la fiction, veut percer le mystère. J’ai d’abord eu un mouvement de recul. J’adule Nabokov. La profondeur du roman « Lolita » tient à l’insoutenable désinvolture de son personnage féminin. Tison commet un sacrilège, en quelque sorte. Il y a des coulisses qu’il ne faut pas dévoiler, des tours qu’on ne doit pas connaître, sous peine de voir la magie disparaître, le charme s’en aller. Un peu comme lorsqu’on découvre les secrets de fabrication d’un film dans les bonus du DVD. Une démystification. Autre difficulté, l’omniprésence de Vladimir Nabokov dont le génie plane sur ce journal. Je vous déconseille de lire « Lolita » avant d’attaquer le livre de Tison, il doit rester un souvenir lointain sous peine d’en éprouver chaque ligne, chaque référence. Car l’auteur mérite mieux, il s’en sort très bien. Sans vraiment l’expliquer (le mystère reste entier), il décrit les transformations vertigineuses de Dolorès Haze. Tout bascule page 106, l’ingénue devient manipulatrice, l’enfant abusée s’est muée en adolescente ingénue puis en femme fatale. Ni pute ni pudique, elle en sait trop, sur les hommes, et leur désir. Ce savoir la rend puissante, mais aussi, terriblement fragile. Elle est rejetée comme un monstre, une créature dotée de pouvoirs extraordinaires. Les errances de Lolita illustrent les souffrances des filles qui ont connu trop tôt les choses du sexe : l’impossibilité d’y associer l’amour quand il leur apparaît.
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Journal de L. (1947-1952)

Un grand merci à Masse Critique et aux éditions Goutte d'Or pour ce livre troublant et dérangeant.

Une ado qui s'appelle Douleur Brume on sent que ça va mal finir même si on n'a pas lu "Lolita".

Plus de 60 ans après le récit de Nabokov, Christophe Tison fait le pari de nous dévoiler le journal intime de Dolores Haze, 12 ans et demi, qui va tomber de Chrybde en Scylla, des mains de l'affreux et raffiné parâtre Hummy aux mains de l'immonde et vulgaire Clare.

Le résultat est criant de poésie et de vérité, jusqu'à la nausée.

Une remarque toutefois, on sent des tournures trop stylisées et des échappées lyriques qui semblent en ligne directe le fait d'un Christophe Tison plus que l'écriture d'une Lolita perdue, écartelée, qui cherche à vivre sa vie de jeune fille malgré tout et qui raconte le soir ses tristes déboires.





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Journal de L. (1947-1952)

Sordide à bien des niveaux, ce roman n'en est pas moins le pendant indispensable au Lolita de Nabokov. Dans un style tout autre mais tout aussi poétique, Christophe Tison donne la parole à la "nymphette". Les sonorités, le rythme de sa plume envoûtent, enivrent, mais l'enchantement ne dure pas et se transforme bien vite en cauchemar... (avis complet : https://pamolico.wordpress.com/2020/05/28/journal-de-l-christophe-tison/)
Lien : https://pamolico.wordpress.c..
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Journal de L. (1947-1952)

Il fallait une certaine audace pour s’attaquer au monument de la littérature mondiale qu’est Lolita, et le moins que l’on puisse dire est que Christophe Tison a réussi son pari.

Il donne à entendre la voix de Lolita, ou plutôt de Dolores, et à travers elle celle de l’enfance et de l’innocence volées.

Ce témoignage est fortement touchant et complète parfaitement l’oeuvre originale en comblant certains vides notamment.

Si Lolita était un road trip ancré dans l'Amérique des années cinquante, le journal de L. est beaucoup plus intemporel.

Il est également plus cru et beaucoup plus explicite, peut-être parce qu’il s’agit d’un livre écrit de nos jours, ou peut-être pour mieux faire comprendre au lecteur le ressenti de Lolita.

Une mention particulière enfin pour la magnifique couverture de l’ouvrage, en relief et lettres cuivrées.

Un grand merci à l'équipe de Babelio et aux éditions Goutte d’or pour m’avoir permis de découvrir cet excellent roman lors de la dernière opération Masse Critique.
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Journal de L. (1947-1952)

Avant tout, je remercie BABELIO et les Editions Goutte d'Or pour l'envoi de ce livre.

Mais ça ne va pas être facile de le chroniquer.

"Lolita" de Nabokov est l'un de mes romans préférés. Je ressens ce même mélange de mépris et de fascination, typique de la Vieille Europe, pour cette Amérique à l'ignorance crasse mais tellement sexy. Et puis, j'ai toujours trouvé ce livre magnifiquement bien écrit et follement drôle.

Oui, mais voilà, Christophe Tison bouscule toutes mes certitudes avec son ouvrage.

D'abord, il aurait dû s'appeler "Journal de D.", comme Douleur, comme Dolores Haze, dont il nous fait partager le point de vue. Là où Humbert Humbert noyait ses confessions sous des envolées lyriques, des mots savants et des traits d'humour raffiné, Lolita raconte son quotidien avec un vocabulaire simple et cru. Elle n'a rien à cacher, et elle décrit la pé-do-phi-lie dans toute sa dégueulasserie. Elle décrit également ses tentatives pour y échapper, ses stratégies de survie, ses rêves de normalité, ses moments de bonheur. C'est une lecture éprouvante et bouleversante, même si certaines réflexions me paraissent trop mûres pour une gamine de son âge, bien que le contact de vieux pervers ait dû la vieillir prématurément et la rendre plus lucide sur le monde qui l'entoure.

J'ai adoré la démarche de Christophe Tison, de donner une voix à Lolita. Quelle idée géniale ! Et il l'a très bien fait (je lisais son livre et "Lolita" en même temps pour vérifier la concordance des histoires). Mais... je fais quoi, moi, maintenant, de mon amour pour le roman de Nabokov ? J'ai l'impression d'avoir été la complice bienveillante d'Humbert Humbert pendant toutes ces années, et j'en veux un peu à Tison ; pourquoi n'a-t'il pas choisi un autre livre, une autre héroïne ? J'ai beau me dire que tout cela n'est que littérature, je me sens quand même mal. Et c'est pourquoi, par dépit, je ne mettrai que 4 étoiles à ce très bon livre qui en mérite largement 5.

A vous de rendre justice à ce roman, moi, j'ai un problème de conscience à régler...
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Journal de L. (1947-1952)

Lolita. Un classique.

Donner voix à un personnage emblématique de la littérature.

Un pari risqué. Un roman qui fait nécessairement miroir au premier.



Je suis intriguée. Je demande à lire.

Mais la déception pointe sa truffe dès les premières lignes.



Un journal. Un choix intéressant, celui de donner parole à la gamine de douze ans, d’entrer dans sa psyché, de saisir le personnage autrement qu’à travers le regard énamouré d’Humbert. Malheureusement, les mots ne sont pas ceux d’une enfant de douze ans. Les mots pourraient être ceux d’une jeune adulte mais pas d’une gamine dans les années 40. Dommage. Il aurait été peut-être plus simple de construire le roman sans l’aspect journal.



On oublie Lolita, on oublie l’oeuvre de Nabokov, et ce journal devient par moment un témoignage qui pourrait être celui d'un autre personnage. C’était peut-être là une volonté de l’auteur, de démystifier l’aura de la nymphette, de détruire l’image idéale façonnée par Humbert.



C’est bien écrit (si on oublie l'aspect journal), on arpente des détails crus sans barboter dans la crasse facile mais à aucun moment je ne lis les pensées d’une donzelle de douze ans.

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Journal de L. (1947-1952)

Un profond et courageux travail d’investigation ou Christophe Tison donne suite à une histoire vraie « Lolita » de Nabokov. Suite ,oui , car je ne vois pas un éditeur publier pareil ouvrage aujourd’hui . Livre controversé ,interdit à sa sortie ,prenant , troublant, qui fait mal . Une relation perverse, malsaine condamnable à l’infini montre une immense souffrance Des tristes faits dans une société américaine puritaine, faits noyés dans les tabous qui ressortent au grand jour 70 ans plus tard.
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Journal de L. (1947-1952)

Christophe Tison auteur du journal de L, qui est le point de vue direct de Lolita de son prénom Dolores, est en premier lieu, une très bonne idée. J'ai dévoré le livre, espérant qu'enfin Dolores s'échappe de ces porcs, et encore le mot est bien trop doux, car eux ne finiront pas en jambons, en brochettes, éparpillé dans des estomacs au quatre coins du monde... J'ai eu l'impression de lire le fonctionnement d'un être vivant, dont son cerveau, son âme harcelée par ces porcs essaye de faire au mieux pour essayer de vivre en paix. Tantôt il y a l'oubli d'enregistrer les événements comme un film dont on coupe la pellicule pour ne pas se souvenirs de ses traumatismes sinon impossible d'avancer... et tantôt des idées naissantes en elle pour essayer de fuir vers l'inconnu qui pourrait cacher un bonheur potentiel.



L'existence de Dolores est une vie qui ressemble tant à celles qu'on peut vivre : Passer sa vie à subir les autres alors qu'on est une personne de bien, qui ne voudrait que la paix et l'amour. Vouloir vivre en paix, se sentir bien dans un petit cocon familial, au chaud, avec à manger, et entouré de gens qui nous aiment, est pourtant ce que tout le monde aimerait vivre, aimerait que ça soit la normalité... mais c'est si compliqué quand ce monde d'humains fait tout l'inverse.

Mais ces deux choses nous sont refusés car on subit une existence de merde. Comment croire en un Dieu bienfaiteur, quand on vit tous ces malheurs ? Comment s'en sortir quand on est seule, malgré que tout autour de nous les gens nous voient ? Alors qu'ils et elles ne voient et ne veulent pas voir ni entendre la souffrance intérieure des gens... Certains le voient, sont au courant comme ceux et celles qui voient que telle ou telle personne est une proie que l'on peut chasser, violer, abuser, maltraiter et que personne d'extérieur interviendra, comme si sur cette personne il y avait l'étiquette permettant cela.





Dolores va de mal en pire et de pire en épouvantable, est-ce inné ? Est-ce dû par les chemins qu'on nous a fait prendre pour ne rencontrer que des monstres ? Ou à la naissance nous recevons telle ou telle carte par notre gêne ou Destin ? Cette carte qui nous conditionnera toute notre vie en bonheurs ou malheurs et qu'importe ce qu'on fera pour se sortir du merdier quand on a la mauvaise carte, on sera toujours dedans jusqu'au cou ?



Tant de fois Dolores, qui n'est qu'une enfant, se remet en question quand les adultes ne le font pas et elle essaye d'échapper mentalement et physiquement à des hommes plus âgés qu'elle. Comment le peut-elle du haut de ses 12 ans quand sa mère meurt et qu'elle se retrouve avec Humbert qui la maltraite sexuellement ? Et qui ne sera pas le dernier !

Dépendante des adultes dans leur monde compliqué d'argent, de papiers, de pouvoirs, mais surtout de manipulation et de menaces. Mais quand bien même Dolores se retrouve dans des écoles, entourée de gens de son âge. Là aussi elle se retrouve harcelée par des enfants de son âge qui deviendront de mauvais adultes... tout ceci n'est pas sain. Mais hélas c'est toujours comme cela, et rien n'est fait pour arrêter cela. Même pas les forces de l'ordre : la police, la justice, qui souvent se retournent contre les victimes en les arrêtant pour les mettre selon leur âge à l'orphelinat ou la prison et au pire à l'hôpital psychiatrique, etc. Des lieux destinés aux « vrais » monstres humains qui au final dirigent ces lieux et exercent une énorme pression mentale sur les innocents qui en ont peur et se renferment dans leurs détresse.





Beaucoup de gens ne s'imaginent pas, ne comprennent pas pourquoi des personnes maltraitées n'arrivent pas à s'en sortir... peut-être qu'après cette lecture ils comprendront.





Merci à Babelio et aux Éditions Goutte d'Or pour ce livre. :)
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Journal de L. (1947-1952)

Elle était Lolila le péché de Humbert Humbert. Le feu de tous ses enfers.

Un des personnages les plus connus de la littérature.

Un personnage uniquement vu par les yeux d'un homme fou d'amour.



Dans ce journal de L., Christophe Tison a fait le pari de lui redonner vie et nous livrer sa version de l'histoire.



Le prologue comme un écho à celui de Lolilta. Un narrateur extérieur qui présente les confessions. Fragments de chair. Morceaux de coeur d'une personne dont nous allons entendre les mots.



Résonne ensuite la voix de L. Ce départ précipité d'un camp de vacances avec Hum. Cette fin de l'innocence. Cette enfance volée et qu'elle ne peut et ne sait plus retrouver. Malgré tous ses efforts.



Sentir toujours le désir sur elle. Et les yeux réprobateurs de ceux de son âge qui n'ont pas eu à grandir aussi vite.



Lolita ballottée d'homme en homme. Hum, Clare, le pianiste...

Lolita pantin de leurs envies.

Lolita qui développe des sentiments complexes pour Hum. Entre colère et pitié.

Lolita qui rêve sans cesse. D'amour pur et sincère.

Lolita qui n'a plus de repères.

Lolita qui s'égare dans un Hollywood- Babylone où on l'exploite sans cesse.

Lolita...



Au fil des pages, se dessine ainsi le portrait d'une jeune fille complexe. Jouet d'hommes voraces. Amoureuse d'autres. Lucide. Rêveuse. Menteuse. Perdue. Courageuse. Vengeresse.



Cinq années de son existence se déroulent sous nos yeux. Ses phrases épousent son évolution. Son langage perd son caractère enfantin. Ses yeux se dessillent irrémédiablement.



J'ai aimé le choix de parler de l'horreur avec sobriété et pudeur. Ce qui rend le récit encore plus frappant et émouvant.



J'ai aimé cette reprise des codes ainsi que des scènes clés du classique de Nabokov. Leur détournement. Leur perspective enrichie par ce regard forcément différent.



J'ai aimé ce périple sur les routes américaines.



J'ai aimé ce choix de rendre la parole à Lolita. Désormais, elle n'est plus la projection de la passion de Hum. Elle est Dolores, Dolly, Lolita. Celle qui existe indépendamment.



Bref, vous l'aurez compris: je me suis laissée embarquer par ce Journal de L.





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Journal de L. (1947-1952)

Avis compliqué à rédiger car j'ai de la peine pour la jeune Lolita, qui pourrait rester insensible à sa vie ? D'autant plus que j'ai une fille de douze ans... impensable vraiment ! Et pourtant, pourtant, malgré moi, après une bonne moitié du livre, je me suis détachée du personnage et lassée de la répétition des scènes et du défilé de pédophiles.

Avant cela, le début du roman m'avait happée, je me suis revue adolescente (fin d'adolescence quand même, pas 12 ans !), découvrant la Lolita de Nabokov et je me suis questionnée : avais-je manqué toute cette souffrance ? Où avais-je pu imaginer de la séduction et de l'amour ? Est-ce que toutes les jeunes filles ont cette naïveté ? Est-ce que les marques d'attention d'un homme plus âgé sont de nature à les faire basculer, encore de nos jours ? Oui, beaucoup de questionnements plus ou moins existentiels, de craintes car la jeune fille est devenue mère et que cela modifie évidemment l'intégralité de mes perceptions.

J'aurais besoin de relire Lolita pour vérifier tout ça... mais est-ce que j'en ai envie...

Merci
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Journal de L. (1947-1952)

Titre : JOURNAL DE L. (1947-1952)



Auteur : Christophe TISON



Editions : Goutte d''Or



Genre : roman



Nombre de pages : 280



Date : 2019 (mai)



Prix : 19,50 €







Présentation physique du livre :



Un livre de format moyen comprenant près de 300 pages.



La couverture est simple mais magnifique : un extrait du livre est inscrit en relief et le titre  est écrit en orange brillant.







4ème de couverture :  



Ce roman est le journal intime d'un personnage de fiction. Plus d'un demi-siècle après la publication des carnets de son ravisseur par Vladimir Nabokov, Lolita se livre enfin. L'adolescente la plus célèbre de la littérature raconte son road trip dans l'Amérique des années 50, ses ruses pour échapper à son beau-père, ses envies de vengeance, ses amours cachées, ses rêves de jeune fille.









AVIS







Un livre qui ressemble à nul autre et qui vous plonge dans les pensées d'une petite fille devenue adolescente.







Début du livre



J'ai tellement transpiré que ça me dégouline encore dans le dos, la voiture était brûlante. On a roulé toute la journée vers l'ouest jusqu'à ce que le soleil devienne une grosse boule de feu à l'horizon.







Dolores ou Lolita est une petite fille qui vit avec sa mère. A l'occasion d'une colonie de vacances, son beau-père vient la récupérer pour aller, dit-il voir sa mère qui est hospitalisée.



Cette petite fille, à qui la vie ne sourit pas beaucoup part donc avec Humbert, cet homme qu'elle ne connaît pas très bien et pourtant de qui elle va être très intime involontairement.



Cet homme aurait pu être son deuxième papa; mais Lolita n'en demandait pas tant , juste qu'il soit là pour elle et qu'il la protège.



Alors oui, de la vision de cet homme c'est ce qu'il fait, mais vu de l'extérieur il fait un peu voire beaucoup trop.



Alors qu'ils sont en voiture, il va lui apprendre que sa mère est morte. Il va décider de traverser le pays et, de rouler jusqu'à plus soif : pour quelles raisons ? Impossible à deviner . Toujours est-il qu'il va trimbaler cette petite fille avec lui comme on traîne un jouet, une peluche ou un doudou.



Il va l'aimer à sa manière pense t'il, mais cette manière est tout sauf normale; elle est malsaine, elle est vulgaire, elle est condamnable, elle est surtout inimaginable pour la plus grande majorité des personnes...et pourtant.



Lui ne voit que ses désirs et pulsions animales, sans aucun respect pour ce petit être qui ne demande qu'à découvrir la vie et être accompagné comme tout enfant devrait l'être.



Cette dernière décide de quitter cette vie et surtout cet homme mais malheureusement, elle va tomber sur un autre homme peut être pire encore et qui va pousser le vice encore plus loin.



Il va la souiller, la salir pour assouvir ses fantasmes les plus fous.



Cette jeune adolescente n'a encore rien découvert à la vie si ce n'est la débauche.



Elle se perd dans cette vie qui l'entraîne dans des bas-fond (pas sur la forme, car tout se passe sur fond de luxe et d'hommes fortunés) ; ses sentiments vont être totalement faussés .



Elle va perdre son innocence en peu de temps et découvrir le pouvoir de ses charmes.







Le style de l'auteur



Il fallait oser, prendre le risque... L'auteur l'a fait avec brio.



Prendre la voix d'une jeune fille quand on est un homme n'est déjà à mon sens pas facile, mais en plus réussir à écrire une histoire qui ressemble à la sienne, sans verser dans le mélodrame, là on est vraiment sur une victoire. 



Le passé de l'auteur lui a permis je pense d'appréhender certaines situations et de s'approprier la vie de Dolores, tout en transposant ses propres souffrances, sa propre douleur de son passé difficile.



Comment passer à côté de ce récit quand on connaît les séquelles et les conséquences des pédophiles sur leurs victimes et surtout quand ces derniers se trouvent dans l'entourage.



On ne peut qu'écouter les peurs qui ressortent de ces phrases de ces mots crus lancés par une petite fille qui a à peine découvert la vie, et qui tient des mots durs avec un langage qui n'a rien à faire dans  la bouche d'un enfant. Une petite fille de 12 ans confrontée à une vie d'adulte et surtout entourée de pervers qui pensent ne lui vouloir que du bien. Puis au final, pensent-ils, ce n'est qu'une enfant, elle va oublier, elle ne s'en souviendra plus : que cette phrase fait mal, elle semble irréelle mais tellement proche de la réalité de leurs pensées.



On a envie de HURLER, de les punir d'une manière qui n'est pas appropriée, de les humilier mais certainement pas de les comprendre ni de leur pardonner.



D'ailleurs tout cela est-il pardonnable ??? Je vous laisse seul juge, ne préférant pas dévoiler ce qui me passe par la tête.







La construction du livre : on retrouve des chapitres qui sont consacrés à chacune des rencontres masculines de Lolita. Puis le miracle viendra peut être vers la fin....ou pas....



Malheureusement pour elle, la plupart de ces rencontres si ce n'est toutes, ne vont lui apporter que souffrances. 



Le récit est construit sous la forme d'un journal de bord où cette jeune fille va raconter cinq années de sa vie de 12 à 17 ans à la première personne du singulier.



Alors oui, certains passages sont bruts, mais ils reflètent la pensée de cette enfant. Je ne pense pas qu'une personne écrivant son journal intime prenne de gant quant à la tournure de ses phrases, aux mots employés. Il écrit ce qu'il pense au moment M.



Ce livre va faire écho à la confession de Nabokov. 



On se retrouve d'un côté avec la confession du pédophile et de l'autre avec le ressenti de la victime.







La plume est fluide et le texte aéré, ce qui en fait une lecture agréable sur la forme.



L'écriture de Christophe Tison est pleine de sincérité, d'émotion mais également de souffrances.



J'ai vraiment apprécié sa manière de se positionner dans les yeux et la tête de cette petite fille et de poser des mots sur l'indicible, sur l'improbable, sur l'inimaginable vérité des enfants abusés.



Loin du voyeurisme, de la délation on est vraiment dans un récit qui veut donner la parole à une victime, qui n'a pas l'impression d'en être une, et qui cherche à tirer son épingle du jeu du mieux qu'elle peut et avec les moyens mis à sa disposition.



Du début à la fin du livre, on attend une lueur d'espoir, une personne qui aura l'envie de secourir cette jeune fille qui dévale sans s'en rendre compte une pente raide dont l'issue ne pourra être que fatale.







Une lecture qui m'a fait du bien et surtout qui m'a ouvert les yeux sur ce drame qu'est la pédophilie et qui est malheureusement devenu un sujet de société très présent dans l'actualité.



Comment ne pas être révoltée par cette situation, par ce fléau qui semble progresser, ou peut être les médias permettent-ils d'en mesurer l'étendue absolument effroyable ?















Sur l'auteur et son univers cf Babélio



Nationalité : France

Né(e) à : Amiens , 1961

Biographie :



Christophe Tison est un écrivain et journaliste français.



Après des études au Lycée Condorcet de Paris, et un DEA de philosophie à La Sorbonne Paris IV, il devient journaliste pour des magazines de presse écrite : Actuel, Globe, Glamour, Lui, Cosmopolitan, ou encore Biba. Il travaille ensuite pour la télévision à France 2, M6, Arte, pour l'agence CAPA, puis pour I-Télé et Canal Plus.



Il est connu pour avoir notamment lancé en tant que rédacteur en chef l'émission musicale et de société Tracks sur Arte en 1997.



Il est ensuite rédacteur en chef à I-Télé et pour le Journal de Canal Plus présenté par Philippe Gildas et Jérôme Bonaldi. Rédacteur en chef, il tient depuis 2008 une rubrique quotidienne dans le JT de Canal Plus, présenté par Florence Dauchez, intitulée Le tour du monde en 80 secondes. Il fait également partie du jury du Prix de Flore.



Après deux livres publiés aux éditions Balland, le récit de son enfance saccagée par un ami de ses parents pédophile, Il m'aimait (éditions Grasset 2004), devient un best-seller. Le succès public et médiatique est tel que l'auteur expliquera plus tard que loin d'être un exorcisme, la médiatisation de ce livre n'a fait qu'aggraver son traumatisme et sa dépendance à l'alcool et aux drogues. Une dépendance qui est le sujet de Résurrection (Grasset 2008), récit d'une cure de désintoxication effectuée en janvier 2005.



Entre temps, il publie Temps de Cerveau Humain Disponible (Grasset, 2005) un récit de ses « expériences absurdes » de journaliste et de rédacteur en chef dans diverses chaînes de télévision.



En 2013 puis 2017, il a publié deux romans dans la collection L'Arpenteur chez Gallimard : “Te rendre heureuse”, puis “Les Amants ne se rencontrent nulle part”.







Sur les éditions



 Les Éditions Goutte d’Or sont nées dans un immeuble de la rue de Tombouctou, dans le XVIIIe arrondissement de Paris.







À l’origine du projet : l’envie de publier des livres d’immersion qui emmènent le lecteur pour une virée dans des univers de marge, mal connus et fantasmés. 











Collection journalistique



dans la lignée de la narrative non fiction anglo-saxonne. Un emprunt des codes de la littérature pour aborder des sujets de société à travers des histoires, des portraits, du vivant et de la chair.  







Collection fiction



dans laquelle, sur la base d’univers existants, le réel explose ; tout y est permis.  



L’auteur(e) connaît en profondeur le monde qu’il raconte pour le faire découvrir de l’intérieur. 











La distribution et la diffusion de nos ouvrages sont assurés par HARMONIA MUNDI Livres.







Les Éditions Goutte d’Or déploieront leur créativité pour porter les livres dans la rue, en ligne et dans la vie publique, à travers des sessions d’affichage sauvage, des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux et des happenings. 
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Journal de L. (1947-1952)

Aplats dorés, rabats aux grosses lettres du surnom Lolita, gaufrage du premier paragraphe sur la première de couverture, papier de qualité, les éditions de La Goutte d’Or soignent leurs livres et cela fait vraiment plaisir de tenir un bel objet entre ses mains. Je les remercie ainsi que les responsables de Babelio pour cet envoi.




Ayant lu Lolita, il y a quelques temps, il me tardait de découvrir ce que Christophe Tison avait bien pu imaginer et écrire de la misérable aventure de la nymphette la plus célèbre du monde aux côtés de Humbert Humbert.




Ma réaction à la lecture des premières pages a été une gêne : non une gamine de 12 ans ne pouvait pas écrire ainsi, c’était trop littéraire, trop bien construit. La Lolita de Nabokov était provocatrice avec un rien de vulgarité, plus authentique. Ce livre était-il une fausse bonne idée ?




On suit donc Lolita en repensant au roman de Nabokov qui lui était la transcription imaginaire du journal du pédophile. Seulement Hum était cultivé et forcément son écriture devait tenir une certaine qualité. Pour coller à Lolita, Tison ne pouvait plus avoir la même prétention. Double difficulté donc que de faire penser et écrire une fillette tout en n’étant pas mièvre, le réalisme en est la victime.

Mais comme Lolita prend cinq ans dans le roman, ce handicape finit par s’estomper et puis après tout, ce que nous savons d'elle ne provient que des écrits d'Humbert !

Nous y voilà, étrange force des bons romanciers que de finir par nous donner l'impression de l'existence réelle de leurs personnages.



Alors qui est la vrai Lolita ? Celle de Nabokov décrite par le professeur Humbert Humbert, éternel amoureux d'une jeune fille morte trop vite. Ou celle de Tison, victime du vice et de la cruauté des adultes ? Dans les deux cas, nous en revenons à une enfance brisée, manipulée par un adulte qui n'a pas su ou voulu se maîtriser à temps.

Là où Nabokov joue subtilement avec ses lecteurs, édulcorant, excusant, faisant presque passer Hum pour faible et manipulé, Tison relate le calvaire de ces enfances brisées.

Son roman est intense, captivant mais mon entendement se perd, écartelé d'un livre à l'autre et finalement, je reste dubitatif.

N'aurait-il pas mieux valu nous compter l'histoire de cette enfance saccagée sans faire référence au Lolita de Nabokov ?

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