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Critiques de Claude Louis-Combet (37)
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Bethsabée, en clair comme à l'obscur

Hendrickje la servante va naître au désir. Elle va prendre vie sous le pinceau de Rembrandt qui, lui, renaît à son contact alors qu’il traverse la période la plus sombre de sa vie.

p 61 Elle penche son visage vers son propre reflet d'absence et elle se trouve alors tellement présente à elle-même que le sourire de sa profondeur monte irrésistiblement jusqu'à sa face qu'il éclaire d'intelligence, de connaissance, de complicité avec l'être et le destin. Le Maître ne la regarde pas mais il entend son silence et il traduit ce qu'elle sent à mesure qu'elle le sent.



Les jeux d’ombre et de lumière habitent tout le livre comme ils jaillissent sous le pinceau du Maître quand il traduit la lumineuse opalescence de la chair de Hendrickje, quand le peintre va, face à la blancheur de la toile, dans son atelier où « l’heure est à l’ombre, à celle qui reflue du plus profond de l’être et qui va chercher sa confirmation jusque la lumière dorée dont la femme est pétrie », engendrer le « fascinant alliage de richesse charnelle et de ténèbre spirituelle » qui le relie à Hendrickje.



Un livre qui réunit tous les thèmes qui habitent l’oeuvre de Claude Louis-Combet, l’érotisme, les mythes et le féminin qui apparaissent dans les tableaux de Rembrandt avec Danaé, Pasiphaé et Bethsabée, la profondeur des luttes intérieures et le labyrinthe de leurs secrets.



Quelle beauté dans cette écriture qui se fait peinture pour atteindre tous les registres de l’âme humaine !!! En montant du plus intime, du plus caché, l’auteur parvient à dessiner et peindre à l’aide de mots, le chatoiement lumineux d’un corps et le sourire discret qui apparaît sur le visage aux yeux baissés de Hendrijcke quand elle pose et devient Bethsabée. C’est magique.

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Le Petit Oeuvre poétique

En alchimie, le Petit Oeuvre est la première étape de la transmutation du plomb en or. Dans le Petit oeuvre poétique, Claude Louis-Combet nous convie à une alchimie plus secrète, plus intime, celle de la mutation des souvenirs en mots. de cette modification, de cette mise en paroles naît une infime lumière, la plus inespérée, celle d'une poésie touchante comme une fenêtre ouverte sur le jour naissant.



Ce recueil réunit de nombreux textes écrits entre 1979 et 1995 et publiés dans des revues ou édités en ouvrage. Dans des poèmes en vers et en prose, Claude Louis-Combet décrit dans une écriture sensible et attachante le rapport intime de l'homme au monde. Un rapport porté par ses souvenirs, ses désirs, ses doutes, ses douleurs aussi.



Le temps traverse nos vies sans que l'on puisse rien en dire. Nous cherchons pourtant à tout expliquer, au risque de nous immobiliser sur notre chemin. Pourquoi cette tentation de retourner la parole contre nous-mêmes, de la mener dans une impasse ? La parole est affaire de patience, de solitude et de croyance en elle.

La poésie de Claude Louis-Combet est faite de tout cela. Sans attaches, sans prétention, un peu inquiète, elle est touchée par l'humilité et la justesse.



" Que rien, tandis que l'instant prend tout son temps, ne vienne soulever cette paupière close sous laquelle songe (en soi) ce visage de femme dont je puis seulement dire qu'en son absence de regard il m'est plus familier (l'étrange) que mon visage d'homme, comme si, précisément, d'être tout entier occupé à soi-même et sans le souci des choses (et si loin de moi), il m'offrait enfin le miroir inédit et essentiel au-delà duquel il n'est plus d'image à rechercher. Que rien ne vienne donc ternir la page et que la houle cesse enfin d'agiter son rêve dans celui des humains : je te contemple te contempler au-dedans de ton silence et de ton immobilité, j'assiste à toi qui n'assistes qu'à toi-même et je sais que l'heure est arrêtée. Rien ne saurait t'empêcher de t'absenter du jour, ma réservée, ma préservée, rien ne pourrait te disjoindre de cette ombre que tu portes en toi et qui me porte en elle et fait que tout ce qui demeure est féminin. de ta face à ton profil, inlassablement, insatiablement, erre, de moi à toi, cet impossible désir de m'oublier et de ta laisser m'absorber sans fin dans le recueillement de ta beauté. "

(extrait de "Sine Nomine").

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Terpsichore et autres riveraines

Bref ouvrage composé de trois très courts essais : "Terpsichore", "Flora" et "Mala Lucina" et accompagné de quelques illustrations réalisées à l'encre de chine.

Ouvrage poétique, plein de réflexion sur la vie, la mort, notre ouverture au monde à travers les voyages et enfin le sens de notre vie.

Ces trois récits sont tous en rapport avec la femme, Femme en tant qu'être vivant, Femme en tant que Mère et enfin Femme en tant qu'être pensant.

Toutes trois parlent de naissance ou d'éclosion et de découverte du monde environnant.

Je ne vais pas vous en faire un résumé car cela reviendrait en réalité à faire une réécriture du livre. Ouvrage rempli de poésie, de pensées philosophique. Très bien écrit, ce dernier est très vite lu mais j'avoue avoir eu un peu de mal de temps à autres à percer toute la profondeur de la pensée de l'auteur, ce qui justifie ma note mitigée. A découvrir néanmoins !
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Magdeleine, à Corps et à Christ

Très beau texte de Claude Louis-Combet illustré par la photographe Elisabeth Prouvost et édité par la très soignée édition Fata Morgana.

Marie-Madeleine et le Christ se rencontrent pour unir féminin et masculin afin de donner naissance à l'Homme achevé, à travers la communion mystique de l'homme en la femme et de la femme en l'homme : dernière étape de l'humain, passerelle vers le Divin.

On se souvient bien sûr du thème de la sexualité mystique cher à Pascal Quignard quand on lit : " Le Maître au-dessus de tous les désirs éprouve en lui-même l'accroissement et l'accomplissement de son corps en corps de femme, par la seule pression de la main de Magdeleine. Il est plus Dieu que jamais. La lumière de tous les sens lui nimbe le visage" et aussi : "Parce que j'ai vu la douleur de l'amant je ne parlerai plus de la mienne".

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Ouvertures

Le mot "Ouvertures" se rapporte à ces deux essais méditatifs de Claude Louis-Combet et s'entend au sens musical du terme dans le sens d'ouvertures d'opéras.

Mais ces opéras, en tant qu'oeuvres inachevées, n'auront pas de suite, des circonstances inattendues en ayant empêché l'écriture. L'auteur s'en explique dans le dernier chapitre.



La première partie est un éloge aux rites et à la répétition du même, seule sorte d'éternité qu'il nous soit donnée de vivre : comme le retour de la vague creuse la falaise, comme la cloche de l'angélus ponctue le jour, comme reviennent les saisons, le temps est un espace dans lequel le mouvement reproduit continuellement le retour du même ;



La seconde partie est une rêverie sur l'oeuvre du peintre John Everett Millais, "Ophélie" : une jeune fille au visage serein est étendue dans le lit fleuri de la rivière comme dans une couche nuptiale ; la mort lui donne le visage apaisé d'une mariée sûre de l'amour qu'elle emporte éternisé au fil de l'onde.

Cette évocation est l'occasion d'un développement du mythe de la femme-rivière, sorte de vouivre enceinte qui sort de l'eau la nuit pour effrayer les enfants dans leur sommeil ; Combet fouille enfin à l'aide d'images de dévoration mutuelle le lien originel nourricier qui unit l'enfant à la mère.

Toujours de très beaux textes.

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L'Age de Rose

"L'âge de Rose" se présente comme l'hagiographie de Sainte Rose de Lima (1586-1617, canonisée en 1671), qui est la première sainte du Nouveau Monde.

Mais, comme nous en prévient l'auteur, qui a tiré ses informations d'un écrit anonyme sur la sainte de 1835, ce n'est pas une véritable hagiographie mais un chemin personnel intérieur à travers la vie largement fantasmée de Rosa ; de nombreux détails sont inventés (par exemple la petite Rose n'avait pas qu'un seul frère, mais une nombreuse famille dont on ne connaît pas grand chose).

De plus le roman de Louis-Combet est chargé d'éléments symboliques merveilleux, dont le dessèchement des roses à Lima pendant la grossesse de sa mère Marie Oliva Flores et leur brusque renaissance au moment de sa délivrance ; l'accouchement est une action héroïque où la mère joue un rôle de quasi démiurge en tirant elle-même de sa matrice le bébé - sa fille ! - dans quelque chose qui ressemble à un grand orgasme cosmique - et c'est à cet instant que la nature refleurit.

La petite fille devient de plus en plus austère au fur-et-à-mesure qu'elle grandit, se plonge dans l'histoire de Catherine de Sienne qu'elle prend pour modèle : la chair surtout l'horrifie et elle se mortifie au-delà du raisonnable, sans considération d'hygiène ou de santé. Elle entre dans le Tiers-Ordre dominicain et passe à l'instar de Catherine, le restant de sa vie en oraison dans une cabane de jardin et au service des malades, des vieillards et des miséreux. Elle meurt à 32 ans, d'épuisement sans doute, et de malnutrition.

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Louis-Combet s'empare de cette vie qu'il fait sienne par bien des aspects. Enfant très croyant destiné à la prêtrise, devenu un adulte agnostique mais toujours dans une recherche spirituelle, la totalité de son oeuvre explore le mythe du double masculin/féminin. On sent qu'il est fasciné par l'horreur de la chair de Rose, qui indique en creux l'immense importance de l'incarnation dans le destin humain. Dans un double mouvement un peu contradictoire, Rose, en s'anéantissant devant Dieu, en ne devenant plus rien, abolit en elle la malédiction qui pèse sur la féminité, qui est de représenter la face charnelle, instinctuelle de l'homme : l'être humain, quelque soit son sexe, en cédant à l'instinct, est dominé par le féminin et abolit en lui sa part virile.



Il s'agit d'un problème ontologique : l'être humain, qu'il soit homme ou femme, est tiraillé entre les besoins de son âme et ceux du corps (si la femme domine en lui, il devient luxurieux, si l'homme domine en lui il aspire à l'élévation ; je souris au passage à la misogynie des mythes, mais que faire contre ces représentations ancestrales attribuant à l'autre -la femme, le dominé- les instincts qu'on a du mal à maîtriser ; mais je ne veux pas alourdir le propos de commentaires anthropologiques déjà amplement développés ailleurs).



Rose s'efface en tant que femme en s'infligeant une ascèse confinant à la cruauté et l'auteur s'efface en tant qu'homme dans ce miroir qu'il se crée et qui n'est autre que lui-même transformé en Rose. La démarche n'est pas tenable : Rose, la vraie, la paie de sa vie et l'auteur la paie de l'absence de progression dans sa recherche spirituelle, frappé qu'il est par une forme de stérilité qui le condamne à remodeler sans cesse la forme dans ses écrits mais à emprunter toujours les mêmes chemins de l'âme. Car, nous avertit-il dès le début du roman : "L'aventure du texte n'avait pas eu le sens d'un progrès, d'un approfondissement du savoir sur moi-même. Au terme de la tâche, j'étais aussi démuni qu'en son commencement. Je pouvais repartir du même pas. (...) Tout avait été dit. Et tout restait à dire".



Un chemin immobile est aussi un chemin : qui ne creuse toujours le même sillon ?

Le travail littéraire et poétique est l'ascèse de Claude Louis-Combet.

J'ai aimé ce roman, très beau dans l'écriture. Je n'en recommanderais cependant la lecture qu'à ceux qui sont aguerris à l'évocation des mortifications que s'administèrent, sous prétexte de foi, un grand nombre de croyants fanatiques.

Je n'ai en effet jamais bien compris comment on pouvait concilier l'horreur du corps, qui serait oeuvre de Satan, et l'espérance de la résurrection des corps.

Sans doute le terme "corps" a-t-il plusieurs sens : c'est ce qui différencierait le corps glorieux de celui qui ne l'est pas.
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Blesse, ronce noire

magnifique ecriture classique, tragédie grecque, inceste entre un frère et une soeur. Exceptinnelle beauté du texte.
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Gorgô

Réécrire des figures féminines immémoriales pour dire, à travers elles, la part sauvage de l’être, ses angoisses, ses fantasmes. Faire de la mythopoétique une liturgie féminine, une célébration sensuelle, tellurique, inquiétante ; dire la femme dans sa sensibilité, sa sexualité, sa sainteté et ses maléfices : autant de thèmes qui imprègnent l’œuvre de Claude Louis-Combet et que l’on retrouve dans ces minces opuscules publiés chez Galilée et Fata Morgana.



A travers Gorgô, il chante la fascination-répulsion pour le sexe de la femme, béance insatiable de vie et de mort, tabou qui serpente ses mystères à travers les siècles. Interrogeant la figure hybride de Méduse, ce « ramassis de haine et d’amour », il dit la férocité du désir féminin et sa réception, scrute les limites entre animalité et humanité, et rappelle les diverses nuances du mythe (Gorgô, comme force de destruction paralysante, mais aussi comme force de vie donnant naissance à Pégase). En redessinant les contours de sa rencontre avec Persée, il offre aussi au monstre-femme une réinterprétation en forme d’expiation surprenante.
Lien : http://www.delitteris.com/au..
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L'Age de Rose

Ce texte inclassable, doté de pages profondes sur l'expérience intérieure, sur l'adoration, sur la part féminine de chaque homme, mais aussi de remarques impitoyables sur l'élaboration de la sainteté à l'époque du génocide sud-américain, apparaît en même temps comme une autocritique aiguë, ce qui lui donne une grande vitalité et une espèce de candeur touchante.
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Le livre du fils

Si ce livre de Claude Louis Combet ressemble à un retour sur sa vie et l’expérience intérieure qui l’accompagne, il ne se réduit pas à une autobiographie.

Il transcende, dans ses textes, l’autobiographie ou l’analyse pour atteindre au symbole, au mythe. Il nous fait pénétrer dans les régions obscures et chaudes, effrayantes, dévorantes mais aussi rassurantes du lien à la mère qu’il est dur de rompre.



Quand j’ai entamé la lecture de ce livre m’est venu presque immédiatement le symbole de l’ouroboros le serpent qui se mord la queue, retour à l’origine qui représente le cycle de la nature, mort et renaissance, symbole d’immortalité.



Le livre du fils est un livre bilan qui retrace la lente maturation qui a conduit l’enfant dont tous les sens sont tournés vers les senteurs, les odeurs, les caresses de la mère, de l’enfouissement jouissif et plein de culpabilité (désir d’inceste) dans cette terre-mère à la séparation progressive, la mise à distance douloureuse qui permet d’aller vers l’amante inspiratrice et l’intégration en lui du féminin ( première partie du recueil intitulée «Corps maternel»). Ce qui le conduira à la création et l’écriture (deuxième partie «corps d’écriture»). Le tout dans une langue pleine de sensualité brûlante, de poésie et aussi d’une lucidité douloureuse.



J’ai retrouvé dans ce livre, comme dans d’autres de Claude Louis-Combet, une tonalité de voix proche de celle de Louis Calaferte, tentative d’expression de leur long chemin initiatique.



«Quand il fermait le livre de toutes les terreurs et se campait de nouveau en l’attente de sa mère, le fils avait voyagé intérieurement en des contrées de songe. Il en revenait pour lui-même, chargé de vérités fortes à travers le prisme desquelles, il aspirait à l’unité de son être : idéal proprement spirituel dont la seule chance d’accomplissement passait par la rencontre amoureuse avec la femme.» p36



"L’amante avait pris le relais de la mère. Elle en était la fleur accomplie, en toute liberté de goût et d’appétit. Vienne le fils. Il boirait et mangerait, il prendrait et posséderait.

..... Et chemin faisant -- chemin de sexe et de souffle -- il comprendrait, pour la paix de son coeur dans la plénitude de sa passion, et pour sa plus grande part d’intelligence de la vie, que la femme rassemble en son essence maternelle d’obscurité, de fertilité, de désir et de plaisir, tout ce qu’il est nécessaire de connaître à la place de Dieu afin de donner sens au non-sens et de créer, de surcroît. "p60



"Alors, le mouvement d'écrit prolonge la caresse, enrichit la palpation, presse les mots jusqu'à la pulpe, entre dans les fastes violents de la morsure, de la griffure, de la déchirure." p87



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Le roman de Mélusine

Claude Louis-Combet, né en 1932 à Lyon, est un auteur très marqué par la spiritualité chrétienne (il a failli devenir prêtre) et passionné par la notion du double masculin/féminin, comme l'atteste le titre d'un autre de ses romans "Marinus Marina" (lu il y a longtemps, avant mon inscription sur Babelio)

"Le roman de Mélusine", à travers le mythe bien connu de la fée architecte, bâtisseuse et semeuse, explore une nouvelle fois l'androgynie fondamentale de l'être humain. Mélusine, femme six jours de la semaine et homme le septième (le samedi) concentre en elle vertus féminines ( Mélusine est la descendante de la Grand Déesse Mère, déesse primordiale de la terre, de la vie, des moissons, de la germination et de la construction des cités) , et masculines, orientées vers le pouvoir temporel (politique, guerre) dont elle délègue l'exercice à son mari Raymondin, seigneur vassal du Comte de Poitiers.



Ces deux pôles, attribués symboliquement à la femme et à l'homme, mais distribués indifféremment à chacun contribuent (devraient contribuer) à la prospérité du genre humain.



Hélas le mari de Mélusine rompt la promesse faite à son épouse en voulant percer son secret : il s'ensuit la fin de leur bonheur et une série de catastrophes.



Claude Louis-Combet possède l'écriture sompteuse qui régale l'esprit par la vertu subtile de l'assemblage des mots et possède le pouvoir de l'évocation à un degré quasiment inouï.



C'est un des grands auteurs contemporains, sur lequel il n'est pas fait beaucoup de bruit (quoiqu'il ait ses adeptes fidèles) mais qui frappe avec justesse les cordes de l'âme.

On pourrait lui trouver une parenté avec Pascal Quignard, malgré toutes leurs différences.



J'ai aussi lu de Louis-Combet "Christine l'admirable", une hagiographie inspirée et romancée sur la vie de Christina Mirabilis, née à Liège en 1150. Son propos dépasse largement le thème religieux et peut être lu par tous publics s'intéressant à la spiritualité.
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Terpsichore et autres riveraines

Avec Terpsichore, muse de la danse, c’est la femme comme puissance tellurique qui est célébrée : en nous donnant à lire la naissance de ce corps de femme (« muer en chair laiteuse et candeur d’âme »), en contant l’immanence de la beauté et de la féminité (« la femme antérieure à toute femme »), il chante l’éclosion d’une puissance d’adoration et de désir (« le rythme est né de la suprême émotion d’être femme et d’être au monde »).



Flora, la belle Romaine sortie des vers de Villon, prolonge ce mythe de la Femme-Corolle qui « compose et les sexes et les cœurs et les âmes » et fait de ses replis de chair-pétale le calice de tous les désirs (« on la devine sourdre à mesure que nous rêvons »).



S’éloignant de ces évocations sensibles, Mala Lucina, la maléfique accoucheuse, lui permet de renouer avec l’archétype de la Femme-Danger. Oscillant entre puissance de vie et de mort, Lucine façonne les humains, leurs folies et leurs difformités ; puissance créatrice et destructrice, elle dit toute l’ambivalence des mythes féminins à travers les siècles : « Je ne suis pas un fléau, songe Lucine. Je ne tue que ceux que j’aime – et pour les protéger. Je n’accouche des monstres que pour me distraire – comme d’autres écrivent des livres. Et je ne produis des fous qu’afin de connaître la vérité ».



Tramés d’une écriture musicalement juste, sensuelle et foisonnante, ces portraits féminins – ou plutôt ces blasons de féminité- chantent la transformation de nos regards sur le corps féminin, entre transgression et fascination ; la puissance de nos désirs ; notre besoin intemporel de cueillir la beauté ; la complexité de la réception du mythe féminin à travers les âges.



Dignifiant la Femme par la beauté du verbe poétique, seul apte à chanter la plénitude de ses énigmes, Claude Louis-Combet nous offre une mystique de la féminité qui décape, de manière salutaire, l’imaginaire sucré dont on enrobe la femme contemporaine.



Plus d'informations ici : http://www.delitteris.com/au-fil-des-pages/gorgo-terpsichore-et-autres-riveraines/
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Blesse, ronce noire

Rien ne permet, à la lecture de poème en prose, certes relativement court, mais dense et hautement littéraire, de mettre des noms sur les deux personnages principaux. C’est la quatrième de couverture qui donne succinctement quelques informations : Claude Louis-Combe relate le tragique destin d’un frère et d’une sœur marqués tous deux par le poids des amours interdites.



Georg Trakl est un poète bohème ; un étudiant en pharmacie plus porté sur le voyage intérieur, et l’usage des substances illicites que par les études. Trakl et sa sœurs vont sombre dans une relation incestueuse. C’est cette relation, et surtout les conséquences irrémédiables qui seront abordés dans ce texte superbement écrit, d’un abord plutôt âpre, et dans lequel on ne rentre pas avec aisance, c’est le moins que l’o puisse dire. Le sujet dérange, autant qu’il intrigue, parce que cet amour- là, bien que tabou et interdit n’en est pas moins sincère, assumé et pleinement vécu jusqu’au sacrifice. Il laisse au grand jour la solitude de ces enfants délaissés qui n’ont sans doute pas d’autre salut que de s’aimer, faute d’être aimés de façon plus « conventionnelle ».



On ressort lessivé de cette lecture ; belle, étrange, difficile, douloureuse, tragique, et lumineuse par moment. Tout cela à la fois…..


Lien : http://leblogdemimipinson.bl..
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Bethsabée, en clair comme à l'obscur

Claude-Louis Combet : Bethsabée, au clair comme à l’obscur (2015)

Le livre est présenté comme une « mythobiographie » d’Hendrickje Stoffels, servante, modèle et maitresse de Rembrandt après la mort de Saskia. L’auteur est inspiré par le regard intérieur, la concentration et la nudité de Bethsabée lisant la lettre du roi David dans le fameux tableau du Louvre dont il avait la reproduction dans sa chambre d’adolescent. La plongée du « rêveur », de « l’enfant gris » dans le tableau puis dans la pensée du peintre et du modèle est prodigieuse. Une énorme rêverie mystique, métaphysique, érotique et poétique s’attachait aux formes du corps féminin mais avec le souci jamais démenti de rejoindre l’être par delà les prestiges de la nudité. La prose est riche et facile. La fusion mystique, charnelle et ontologique est longtemps fascinante. Puis le texte devient redondant et laisse une impression d’enfermement et de chagrin, renforcée par les deuils des dernières pages.

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Blesse, ronce noire

Comme le disait Richard Blin à la sortie de ce livre, c'est un "hymne aux puissances nocturnes de l'amour". C'est aussi un livre où la phrase est travaillée avec soin, précision, style, le langage y est puissant et d'un érotisme souvent saisissant. J'aime aussi beaucoup les pages où Trakl part en guerre, on ressent celle-ci dans toute son horreur et son inhumanité ; le poète perdra la vie dès 1914, à la bataille de Grodek, la drogue aidant, alors que son souhait le plus cher était de mourir avec sa soeur, à qui il faisait prononcer en guise de derniers mots dans son poème Révélation et anéantissement : Blesse, ronce noire. C'est peut-être l'un des plus beaux livres de Claude Louis-Combet (avec Gorgô que j'adore aussi!!!).
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Blesse, ronce noire

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Bethsabée, en clair comme à l'obscur

Louis-Combet Claude – "Bethsabée, au clair comme à l'obscur (mythobiographie d'Hendrickje Stoffels)" – Corti, 2015 (ISBN 978-2-7143-1136-8)



Ce qui frappe en tout premier lieu lors de la lecture de cet ouvrage, c'est bien la qualité esthétique extra-ordinaire de l'écriture, qui atteste immédiatement de l'aptitude de l'auteur à se mesurer à cette œuvre essentielle, fondamentale qu'est la "Bethsabée" de Rembrandt.

Dans une toute autre approche, certes, Claude Louis-Combet me fait ainsi penser au Proust rendant littérairement l’œuvre d'un imaginaire Elstir ou encore à Patrick Grainville fouillant le rapport entre le maître peintre et la chair humaine du modèle dans son "Atelier du peintre". J'éprouve une profonde admiration pour ces écrivains qui parviennent ainsi à rendre compte par l'écriture (discursive par nature) d'un art aussi différent par l'immédiateté (apparente) de son moyen d'expression.

Ces écrivains ne se lancent dans un tel défis qu'après avoir travaillé longuement leur écriture à travers d'autres ouvrages, et Claude Louis-Combet ne fait pas exception à cette règle, puisqu'il a déjà beaucoup publié.



Ce qui m'amène à la deuxième caractéristique garantissant la solidité de cette entreprise hors du commun : l'auteur sait parfaitement ce qu'il vise, il poursuit un objectif qu'il appelle une "mythobiographie" et qu'il expose clairement dans son ouvrage, plus spécialement à deux reprises (pp. 84-90 puis 150-153 - voir citations)



En effet, Hendrickje Stoffel appartient à cette population de très humble extraction qui ne laisse habituellement aucune trace dans les Grands Travaux des Eminents z'Historiens (surtout dans la tradition universitaire franchouillarde) : il semble d'ailleurs qu'Hendrickje ne savait ni lire ni écrire.

Inversement, la vie de Rembrandt est très connue, un ouvrage aussi épais que laborieux comme celui de Gary Schwartz (intitulé sobrement "Rembrandt" et publié chez Flammarion en 2006, voir recension) en fait le tour quasiment minute par minute, sans fournir pour autant la moindre explication spirituelle essentielle.

Fort justement, fort simplement, pour étayer sa mythobiographie, l'auteur s'appuie sur la mine que constituent toutes les représentations (dessins, eaux fortes, peintures etc) de sa compagne produites par Rembrandt : la mythobiographie n'est pas si "mytho" que son appellation ne le laisserait supposer...



Enfin, pour fonder son projet, l'auteur s'appuie sur sa propre perception de ce tableau fondateur que fut pour lui (et pour tant d'autres) la représentation magistrale de la Bethsabée. Il y a là une part d'interprétation subjective que je ne partage pas, faisant d'Hendrickje la "servante" du "Maître" – deux termes employés à de multiples reprises, qui – même s'ils ne s'appliquent ici qu'au domaine artistique du modèle posant pour le peintre – me semblent inappropriés. Pour ma part, plus je regarde ce tableau, plus je suis persuadé qu'il repose sur un profond respect de l'Homme-Rembrandt envers sa Compagne-Hendrickje.



Cette divergence avec l'auteur ne m'interdit pas d'identifier un point d'accord autrement plus fondamental : tout comme Claude Louis-Combet, je suis persuadé que cette œuvre ne pouvait apparaître sous le pinceau de Rembrandt qu'à travers le vécu de la fusion entre les liens spirituels et charnels qui – les nombreuses autres représentations en attestent – furent consubstantiels à la relation entre cette femme-là et cette homme-là et firent éclore ce nu d'une grande pudeur, d'une intériorité spirituelle probablement sans égal dans toute l'histoire de la peinture occidentale.



Je termine par un point que l'auteur n'aborde pas du tout : cette représentation d'Hendrickje en la Bethsabée biblique repose sur une relation femme-homme qui n'existe plus de nos jours.

- D'abord parce qu'elle présuppose une culture spirituelle (fondée ici sur la Bible, mais peu importe, le Livre Saint ne sert ici que de support à une réflexion spirituelle profonde, traversant toute l’œuvre de Rembrandt) qui est bafouée et même combattue dans notre société centrée sur un matérialisme consumériste immédiat.

- Ensuite parce qu'elle suppose du Respect et de la Pudeur au sens le plus fort de ces termes – deux notions "ringardisées" aujourd'hui, la plus grande partie de gent féminine s'ingéniant le plus souvent à exhiber son anatomie dans une démarche marchande plutôt vile visant à une "réussite" sociale et professionnelle tout à fait intéressée.

- Enfin parce que l'ensemble de notre société se vautre dans une pornographie plus ou moins déguisée contribuant à une marchandisation du corps humain (féminin ou masculin) et rendant impossible le regard que Rembrandt avait pour Hendrickje.



Un livre incontournable pour toutes celles et ceux qui savent encore combien l’œuvre de Rembrandt-Hendrickje nourrit la vie de tous les jours.

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Bethsabée, en clair comme à l'obscur

Que dire de plus après la très belle critique de Nadedja. Magnifique livre dans lequel , "À travers la figure de Bethsabée et le destin de Rembrandt, Claude Louis-Combet offre un cantique à la gloire de l’art et du corps féminin".

Considéré comme l'un des plus grands peintres hollandais, Rembrandt n'en connut pas moins la douleur avec la perte de son épouse et la mort de ses enfants. Il mourut lui-même dans le plus grand dénuement. Sans argent, il fut néanmoins inhumé dans l'église de Westerkerk. Une plaque commémorative y fut apposée en 1906. Toutefois,il ne reste plus aucune trace de cette tombe de nos jours.

Quant à Hendrickje, l'Eglise considérant scandaleuse son union avec Rembrandt et ayant réprouvé le "tableau maudit" que fut Parsifaé, dans lequel elle figura, elle fut appelée à comparaître devant le Tribunal ecclésiastique.
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Blesse, ronce noire

C'est le troisième opus que je lis de cet auteur qui m'était inconnu voilà moins d'une année.

Il imagine ici les relations amoureuses et intimes entre le poète allemand, Georg Trakl (1887-1914) et sa sœur, Gretl.

Comme dans mes lectures précédentes de Louis-Combet, je suis frappé par sa recherche de l'impalpable, de ce qui ne se livre pas aisément ; il y parvient, non seulement par une prose somptueuse dont la lecture demande grande attention, mais également par un effort de concentration qui lui permet d'exprimer, d'atteindre une profondeur à laquelle nous sommes très rarement habitués et qui nous permet aussi de nous y lire.

Fabuleux !
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D'île et de mémoire

5 étoiles évidemment !

D'abord pour la majesté de l'écriture : le déroulement de la phrase, son rythme, ses respirations ; le vrai plaisir de la lecture est là !

Surtout : dans le chapitre "De l'enfance, en son retrait" j'ai retrouvé mes rêveries personnelles de cet âge, incommuniquées et incommunicables. Je trouve ici un auteur qui, par sa phrase, longue, souple, réussit à traduire, à concrétiser ce qui est si évanescent, si volatile et que tant d'autres œuvres, si elles pointent le sujet, n'arrivent pas à atteindre.

Une œuvre très forte et douce...
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