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Citations de David Grossman (250)


Sans lui, elle n'existait pas, tout simplement, elle n'avait pas de vie, et donc elle lui appartenait de droit en quelque sorte.
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OK, papa dit qu’il faut pas marcher sur les mains, alors je le fais plus. Mais aussitôt je pense : et maintenant qu’est-ce que je fais ? Comment je tiens, moi ? Vous m’avez compris ? Comment je sauve ma peau ? Comment je fais pour ne pas mourir si je me remets à l’endroit ? C’est comme ça que ça se passait dans ma tête agitée. Bon, très bien, il veut me voir marcher comme tout le monde ? Je ferai comme il veut, on ira sur les deux pieds, pas de problème. Mais alors je vais avancer comme une pièce d’un jeu d’échecs, vous voyez ce que je veux dire ?
L’assistance le regarde, interloquée, en cherchant à comprendre où il l’embarque.
Un exemple – il glousse et nous invite par une mimique compliquée à rire de conserve. Un jour, je marchais du matin au soir, toute une journée, en diagonale comme le fou. Un autre jour, j’avançais tout droit, comme la tour. Un autre jour, je sautais comme le cheval, tic-tac, de-ci de-là. Et les gens que je croisais, je les considérais comme des adversaires aux échecs. Ils en avaient pas conscience, comment l’auraient-ils su ? Mais chacun était un pion, et la rue, la cour de récréation, mon échiquier à moi…
Je nous revois marchant côte à côte en discutant, et lui me dépasse, virevolte autour de moi, surgit d’ici, vient de là. Qui sait dans quel jeu bien à lui j’ai été embringué.
J’arrive, disons, en jouant le cheval devant mon père, pendant qu’il découpait ses chiffons dans la pièce où ses jeans étaient entassés – croyez-moi, il y a quelque part un lieu dans l’univers où cette phrase revêt un sens logique -, et je me tenais debout sur le carrelage à l’emplacement stratégique où je pouvais protéger ma mère, la reine. Et je me retrouvais ainsi entre ma mère et mon père, et dans mon for intérieur je disais : échec. Je lui laisse quelques secondes pour exécuter sa manœuvre, et s’il ne s’est pas c’est pas placé à temps sur une autre dalle, c’est mat. Pas complètement fou, ce gamin là ? Vous ririez pas si vite si vous saviez ce qu’il avait dans les neurones ? Vous penseriez pas : « Regarde un peu comment ce taré a gâché son enfance » ?
P97
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L’homme qui marche :

Un pas,
Encore un pas, encore
Un pas,
Je marche
Et je marche
Vers toi,
Je suis
Une question lancée,
Un cri ouvert

Mon fils

Si je pouvais
Rien que d’un
Pas
Te faire
Bouger.
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Qu'est-ce qui est trop quand on aime quelqu'un?
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Les premières lueurs du jour viennent les éveiller, encore perdus dans les brumes du rêve, à la lisière d'une prairie. L'herbe ondule à perte de vue dans un camaïeu de vert flamboyant. Ils sont seuls au monde, il n'y a pas âme qui vive, l'odeur originelle monte de la terre, l'air bruit de créatures minuscules, vaporeux et humide, le voile de l'aube se déploie au-dessus de leurs têtes, et ils ont les yeux rieurs d'avant la peur, d'avant eux-mêmes.
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Ce livre, encensé par la critique, m'est tout simplement tombé des mains. Dans le roman aussi, le diable, c'est l'ennui!!
Cette espèce de style, ampoulé, emphatique, pompeux, pseudo-elliptique est une caricature de style. A bon entendeur...comprenne qui pourra... C'est d'un ennui abyssal, tout juste capable de complaire au 6ème arrondissement de Paris...Tout cela ne vaut pas tripette. ni un bon polar de Jim Thompson, auteur autrement puissant!
Mais toute la critique adore, et la critique ne saurait se tromper...
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"Avec les enfants, il faut savoir arrondir les angles de temps en temps, leur offrir une vision édulcorée du monde, il n'y a pas d'autre solution [...]."
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[…] depuis un certain temps, elle éprouve l'étrange besoin de verbaliser la décrépitude, aspirant au soulagement qui accompagne l'aveu de la défaite. C'est ainsi. On prend congé de soi-même avant les autres, comme pour atténuer le coup fatal.
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Tu t'accoupleras avec un mâle alpha au physique de jeune premier, à la mine sévère, les tempes argentées, incapable de te demander si tu as des papillons dans l'estomac devant un magnifique coucher de soleil, ou en lisant "Les Robinets sciés" de David Avidan, mais ton avenir à ses côtés sera sûr et solide pour toujours et à jamais.
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Nous avons réussi à passer à travers les gouttes sans y laisser des plumes, entre les guerres, les attaques terroristes, les roquettes, les grenades, les balles, les obus, les bombes, les snipers, les attentats suicides, les billes d'acier, les pierres, les couteaux, les clous…
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Par où commencer ? Tant de sentiments mêlés se heurtent en moi... Quand j'étais petit, j'avais fait le voeu de lire tous les livres que personne n'empruntait à la bibliothèque de l'école. Et pendant toute une année je n'ai lu que des livres dont les fiches étaient vierges (c'est ainsi que j'ai découvert quelques trésors cachés). Ou bien je voulais m'exercer à rêver à la demande, et prendre des commandes des gens pour rencontrer à leur place leurs chers disparus. Je voulais aussi adopter un chien qui accompagnerait chaque soir dans la rue un promeneur solitaire différent.
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Soudain, elle eut la nostalgie de ses boucles épaisses pour se cacher un peu, ne pas se sentir aussi exposée, aussi nue. Qu'est-ce qui la poussait à dire ces bêtises, ce "qu'est-ce qu'on fait maintenant" si intime ? Qu'avaient-ils en commun ? Elle essaya de faire marche arrière, mais en vain. Des fissures, des crevasses s'ouvraient en elle à toute vitesse.
- Ce que tu voudras.
- Comment, qu'est-ce que tu as dit ?
Elle n'avait pas compris. La chaleur qui émanait de son corps lui parlait plus que ses mots bredouillés, un peu moqueurs. Il se taisait. Pourquoi est-ce qu'il se tait comme ça. Elle serra ses bras autour d'elle-même comme si elle avait soudain froid, inclina la tête et un sourire depuis longtems oublié éclaira son visage, pourtant la situation n'avait rien de comique. Puis elle regarda l'oreille gauche d'Assaf, sa chaussure droite, se lécha la lèvre inférieure qui était sèche, haussa les épaules sans raison, bougea les omoplates, se frotta les bras. C'était une envie irrépréssible, son corps bougeait tout seul, comme les gestes d'un rituel antique, ou une chorégraphie fixée depuis un million d'années, et sur laquelle elle n'avait aucune prise.
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Et le jour où tu m'as demandé de poser nue devant toi pour me croquer avec des mots. Je me suis installée sous la véranda face à l'oued - je n'arrive pas à croire que je l'ai fait -, dehors, tu avais insisté, tu te rappelles ? Tu affirmais que la lumière était meilleure. Et j'ai accepté, bien sûr, je faisais tes quatre volontés, à l'époque, à condition qu'Ilan n'en sache rien, à aucun prix ! Nous jouions à ce petit jeu, en ce temps là, ou plutôt c'était le jeu que tu jouais avec moi, et Ilan, dans tes dimensions parallèles. J'étais dans le plus simple appareil, au beau milieu de la terrasse face à l'oued, d'où les bergers de Hussan et de Wadi Fukin auraient pu surgir d'un moment à l'autre, tu t'en fichais, tu te moquais de tout quand le besoin d'écrire te démangeait, dans le feu de l'action.

Tais-toi, pense-t-elle. Pourquoi l'agresser ? Que lui arrive-t-il ? Il y a prescription là-dessus, non ?

- Moi, je t'assure, j'avais la chair de poule quand tu me disséquais en mots. J'en avais tellement envie - tu avais dû le deviner -, en même temps, je me sentais exploitée ! Comme si tu pillais mon sanctuaire intime, ma peau, ma chair, je n'ai jamais osé te l'avouer. Impossible de te parler dans cet état là. J'avais même un peu peur de toi, ajoute-t-elle, effarée. Tu ressemblais à un cannibale, mais j'aimais quand tu étais incapable de te contrôler, quand tu n'avais pas le choix. J'adorais ça chez toi !

- Je voulais te croquer de cette façon chaque année, croasse Avram.

Ora cesse de respirer.

- J'étais certain de continuer à le faire encore des années, poursuit-il d'une voix lasse, distante. Cinquante ans au moins, voilà ce que je voulais. Je pensais...j'envisageais, une fois par an, de décrire ton corps, ton visage, chaque centimètre, le plus petit changement, mot à mot, durant toute notre vie commune, même si nous n'étions pas ensemble, même si tu continuais à être à lui. Tu serais mon modèle, avec des mots.

Elle replie ses jambes sous elle, bouleversée, abasourdie par ce grand déballage.

- Mais je n'en ai eu l'occasion que deux fois : Ora à vingt ans et Ora à vingt et un ans.

Elle ne se rappelle pas un tel projet. Peut-être n'en a t-elle rien su. Il n'est pas toujours capable d'exprimer ses idées. Et il arrivait qu'il ne le veuille pas non plus...


- Y aurait-il des toilettes pour dames, dans le coin ?

Il désigne l'obscurité d'un signe de tête. Munie d'un rouleau de papier, elle s'éloigne. Elle urine, accroupie derrière un buisson. Des gouttes giclent sur son pantalon et ses chaussures. Demain matin, il me faut d'urgence prendre une douche et faire un peu de lessive, se dit-elle. Elle regarde les choses en face : elle ne pourra plus poser nue pour lui vingt-huit autre fois ni surprendre dans son regard comment il la considérait. Ni voir comment les mots qui la décrivaient changeaient d'une année à l'autre, telles des ombres se découpant sur un paysage familier. Vieillir dans ses mots aurait-il été moins douloureux ? Non, aucun doute, c'eût été pire.

Cela fait, adossée à un petit tronc, dans le noir, elle serre ses bras autour de sa poitrine, soudain très seule. Des images accumulées au fil des ans resurgissent du passé : Ora adolescente, Ora soldate, Ora enceinte, Ora et Ilan, Ora avec Ilan, Adam et Ofer, Ora avec Ofer, Ora seule. Ora seule avec toutes les années à venir. Comment la voit-il aujourd'hui ? Des mots cruels se profilent devant ses yeux : sèche, flétrie, les veines apparentes, les verrues, l'embonpoint, ses lèvres, ses seins, la peau flasque, les tâches, les rides, la chair, la chair...

Au sein de l'obscurité, elle le distingue à la lueur des braises. Il se lève, tire de son sac à dos deux gobelets qu'il essuie avec un pan de sa chemise. Il remplit d'eau le finjan noirci. Il lui prépare du café. Il écarte le carnet pour ne pas le mouiller. Sa main s'attarde sur la reliure bleue qu'il effleure du bout des doigts. Elle croit le voir en évaluer furtivement l'épaisseur avec le pouce...
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La vie est un petit espace critique entre deux nostalgies : celle de ce que vous n'avez pas encore vécu et celle de ce que vous n'allez plus pouvoir vivre. Et l'instant précis de l'action est si confus, si fuyant et si éphémère, que vous le gaspillez à regarder autour de vous avec hébétude.
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Ofer s'éloigne d'elle, elle le sent, elle savait que cela se produirait: il se barricade par la même torsion de l'âme dont sont coutumiers Ilan et Adam, ses hommes qui n'ont cessé de claquer la porte à ses débordements, laissant sa tendresse battre de l'aile au-dehors, veiller, virer aussitôt à la caricature
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La nuit. Ils étaient seuls au monde, enveloppés d'obscurité. Le lait tiède s'écoulait en secret de son corps vers le sien. Il la regardait, les yeux grand ouverts ; elle y plongeait, s'imprime sur sa rétine. Elle avait l'impression que ses traits se gravaient dans ce cerveau tendre et encore embrumé. Elle vivait un instant d'éternité, une expérience exaltante
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Elle saisissait son visage entre ses mains et l'obligeait à la regarder dans les yeux, à s'ouvrir le plus possible. Elle le scrutait et contemplait l'infini - il y avait un endroit où elle était totalement, inconditionnellement aimée, acceptée avec reconnaissance et bonheur pour ce qu'elle était.
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Moi je suis un fétu balloté par le vent. Plus exactement, je suis cet oiseau qui ne touche jamais le sol ? J’ai oublié son nom...
- L’albatros, mais ce n’est qu’une légende, il touche le sol parfois
- Moi si je le touche, c’est pour prendre mon élan afin de m’envoler à nouveau
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Souviens-toi! pense Avram, tandis que son cerveau en ébullition se heurte aux parois de son crâne. Cette tête que tu as vidée, effacée, souillée, que tu as remplie d'ordures, de saletés, va désormais engranger chacun des mots qu'elle prononce, tout ce qu'elle te raconte sur Ofer. C'est le moins que tu puisses faire! La seule chose que tu as à lui offrir, c'est ta maudite mémoire malade.
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- Continue, continue ! murmure-t-elle en dépassant héroïquement une inscription sur laquelle est gravé un poème de Moshe Tabenkin, qu'un guide déclame à voix haute devant un groupe de touristes. Ils doivent tous être sourds ! s'irrite Ora en accélérant la cadence. Il aboie carrément, celui-là !
Les montagnes lui renvoient l'écho :
Notre enfant était pareil à un pin dans la forêt.
Un figuier aux fruits abondants
Un buisson de myrte aux racines enchevêtrées
Un coquelicot flamboyant...
- Allez, continue ! répète-t-elle. Pourquoi t'arrêtes-tu ?
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