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Citations de Delphine Horvilleur (635)


Tout ce que nous construisons solidement finit par s’user ou par disparaître, tandis que ce qui est fragile, éphémère et faillible, laisse paradoxalement des traces indélébiles dans le monde. La buée des existences passées ne s’évapore pas : elle souffle dans nos vies et nous mène là où nous ne pensions jamais aller.
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La laïcité française n'oppose pas la foi à l'incroyance. Elle ne sépare pas ceux qui croient de Dieu veille, et ceux qui croient aussi ferme qu'il est mort ou inventé. Elle n'a rien à voir avec cela. Elle n'est fondée ni sur la conviction que le ciel est vide ni sur celle qu'il est habité, mais sur la défense d'une terre jamais pleine, la conscience qu'il y reste toujours une place pour une croyance qui n'est pas la nôtre. La laïcité dit que l'espace de nos vies n'est jamais saturé de convictions, et elle garantit toujours une place laissée vide de certitudes. Elle empêche une foi ou une appartenance de saturer tout l'espace. En cela, à sa manière, la laïcité est une transcendance. Elle affirme qu'il existe toujours en elle un territoire plus grand que ma croyance, qui peut accueillir celle d'un autre venu y respirer.
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Qu’est-ce qu’être un rabbin ? Bien sûr, c’est officier, accompagner et enseigner. C’est traduire des textes pour les donner à lire, et faire entendre à chaque génération les voix d’une tradition qui attend que des nouveaux lecteurs la transmettent à leur tour. Mais à mesure que les années passent, il me semble que le métier qui s’approche au plus près du mien porte un nom. C’est celui de conteur.
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Simone Veil savait que le combat pour les droits des femmes est infini et que rien n'est jamais acquis.
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En français, comme dans la plupart des langues, il n'existe aucun mot pour désigner celle ou celui qui perd un enfant. Perdre un parent fait de vous un orphelin, et perdre un conjoint fait de vous un veuf. Mais qu'est-on lorsqu'un enfant disparaît ? C'est comme si en évitant de la nommer, la langue croyait en écarter l'expérience, comme si par superstition, on s'assurait de ne pas en parler pour ne pas risquer de la provoquer.
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Tu savais qu'en hébreu, le verbe être, ça n'existe pas au présent ? Tu ne peux dire ni "je suis", ni "je ne suis pas". Tu peux conjuguer le verbe être au passé ou au futur. Mais au présent, ça disparaît comme le lapin dans le chapeau du magicien. Bref, en hébreu, tu peux "avoir été" et tu peux être "en train de devenir", mais tu ne peux absolument pas "être"... ni binaire, ni non-binaire, ni homme ni femme.
Tu as été et tu deviendras, mais tu es forcément en plein dans ta mutation.
En clair, l'hébreu c'est la langue des trans.
Je crois que c'est pour ça que Dieu l'a utilisé pour écrire son best-seller. C'était censé dire que ça n'a jamais fini de dire ce que ça pourrait encore vouloir dire. Mais j'avoue : c'est beaucoup trop subtil pour le commun des lecteurs. Un peu comme La Marseillaise.
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Je dis toujours aux endeuillés, quel que soit l'être cher qu'ils perdent, qu'ils vont devoir, en plus de leur douleur, se préparer à vivre un étrange phénomène : la vacuité des mots et la maladresse de ceux qui les prononcent.
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La vérité n'est en effet la propriété de personne, et nos traditions proposent des chemins différents pour s'en approcher. Celui qui dit la posséder est prêt à détruire le monde à coups de certitudes.
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Un héritage qui cesse d'être interrogé meurt.
Le questionnement des sources et des rites, loin de tout dogmatisme, constitue peut-être la religion véritable. Le sens renouvelé d'un texte constamment revisité constitue sa seule lecture fidèle. En cela, je peux croire.
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En Hébreu "génération" se dit dor. Ce mot est omniprésent dans les prières et la liturgie. Midor ledor, "de génération en génération"...beH'ol dor vador, "à chaque génération"...Le mot dor, qu'on traduit par "générations", signifie en réalité quelque chose d'un peu plus complexe : c'est littéralement l'action de tisser des paniers. L'image est simple et saisissante. Pour tisser un panier, il faut passer un fil ou de la paille entre les lanières bien rangées de la lignée précédente. Un panier se construit toujours de bas en haut. Chaque nouvelle rangée s'accroche à celle qui lui a donné naissance, s'ancre en elle, pour constituer à son tour le support solide de la rangée suivante.
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Les cerises de Westhoffen, tout comme ses enfants, ne meurent jamais vraiment. Elles se conservent même lorsqu’elles sont arrachées à leur terre. Il suffit de les plonger dans l’eau-de-vie, une eau qui de génération en génération leur fait répéter « LeH’ayim ! », « À la vie ! ». 
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Marceline était une grande théologienne, capable de disserter, la clope au bec, sur l'absence de Dieu à Auschwitz, l'orgasme féminin et les vertus de la vodka, une seule et même conversation sur le sacré de la vie.
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Les juifs affirment qu’ils ne savent pas ce qu’il y a après notre mort. Mais ils pourraient le formuler autrement: après notre mort, il y a ce que nous ne savons pas. Il y a ce qui ne nous a pas encore été révélé, ce que d’autres en feront, en diront et raconteront mieux que nous, parce que nous avons été. (p. 180)
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p. 17 Ces histoires ancestrales (…) créent des ponts entre les temps et entre les générations, entre ceux qui ont été ceux qui seront. Nos récits sacrés ouvrent un passage entre les vivants et les morts. Le rôle du conteur est de ses tenir à la porte pour s’assurer qu’elle reste ouverte.
Et ainsi se repose à nous la question des espaces et des séparations. Nous aimons croire que les parois sont hermétiques, que la vie et la mort sont bien séparées et que les vivants et les morts n’ont pas à se croiser. Et s’ils ne faisaient que cela, en réalité ?
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Parce qu'il manque un point de retouche, le fantôme ne peut quitter ce monde. Il y est retenu et le hante en attendant le raccomodage, celui qui permettra enfin son départ. En hébreu les fantômes s'appellent d'ailleurs rouaH'refaïm, ce qui signifie littéralement "esprit relâché". Ils sont des esprits dont les fils sont défaits.
Les fantômes portent la trace de leurs histoires effilochées et c'est pour cela qu'ils reviennent. Ils attendent d'en découdre, c'est-à-dire de voir leur histoire reprisée par ceux qui leur survivent.
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Delphine Horvilleur
Je suis incroyablement attachée à l'amour qu'a le judaïsme pour le questionnement. L'obsession de la question, toujours plus importante que la réponse qu'on y apporte. J'aime ce proverbe hassidique qui dit : "Ne demande jamais ton chemin à quelqu'un qui le connaît, car tu risquerais de ne pas te perdre." Il y a, dans le judaïsme, cette obsession de l'égarement. Dès qu'on croit avoir trouvé une réponse, une autre question surgit. Je ne sais lire le texte que de cette façon. Pourvu que jamais je n'achève sa possibilité de dire.
(Dans la revue "Panorama" no 530, juin 2016)
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L'émergence du féminin dans les religions ne se fera pas qu'à travers les femmes car le féminin ne leur appartient pas. Mais elle ne se fera pas non plus sans elles. Elle n'aura pas lieu tant que des voix jusqu'ici tues n prendront pas part à la lecture, au commentaire et au débat, tant que le genre humain ne pourra pas percevoir la bénédiction d'avoir été créé homme ou femme, masculin et féminin.
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Chaque génération vient, en principe, poursuivre le travail de couture dont elle hérite, en ajoutant des points, qui étoffent la lecture du texte originel et en assurent la « reprise » et la transmission. Ainsi, sur la page de Talmud, un verset de la Bible commenté par un rabbin et ensuite commenté par un autre sage, puis par un autre. Il convient à chaque génération de surpiquer le commentaire précédent, et de poursuivre une conversation cousue de siècle en siècle. La littérature juive traditionnelle est une « shmattologie ».

Marcel Proust ne procédait pas autrement quand, dans « Le temps retrouvé », il définissait ainsi son entreprise littéraire : « épinglant ici un feuillet supplémentaire, je bâtirai mon livre, je n’ose pas dire ambitieusement comme une cathédrale, mais tout simplement comme une robe ».
(p.40)
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C'est quand la vie et la mort se tiennent la main, que l'histoire peut continuer.
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Delphine Horvilleur
Il est passionnant de voir que nos trois religions choisissent pour fondateur un homme qui a brisé les idoles de son propre père. Cette figure d'Abraham s'est inscrite dans un questionnement sur ses origines. Elle est troublante à une époque où les djihadistes de Daech détruisent toutes ces statues. Aussitôt, dans mon imaginaire religieux, cela me renvoie au geste d'Abraham. Pourtant ces actes sont commis dans une idée inverse. Il y a une telle fixité dans la lecture des textes faite par ces fondamentalistes, une telle incapacité à percevoir la complexité des héritages, qu'ils brisent ces statues dans un geste idolâtre et non iconoclaste.

(Le monde des religions n°100)
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